Comme tant d'autres,
Daniil Harms fut une victime du régime soviétique. Il a été arrêté plusieurs fois, et au final décédé suite à un internement forcé dans un hôpital psychiatrique en 1942. Il survivait tant bien que mal grâce à la publication de quelques oeuvres, en particulier poèmes, destinées aux enfants. Des oeuvres ont toutefois été sauvés par sa femme, et elles seront publiées grâce à la perestroïka dans les années 80 du siècle dernier.
Les textes présentés dans ce recueil sont des textes courts, relevant de l'absurde.
Harms a été l'un des fondateur du courant Oberiou (Association pour l'Art réel), un mouvement d'avant garde artistique et philosophique qui s'est fait connaître par des manifestations artistiques provocantes. Les textes de
Harms remettent en cause l'existence même des choses, matérielles (objets et êtres sont enclins à des disparitions rapides et inexpliquées) mais aussi de concepts, de valeurs, comme dans Un épisode historique, dans lequel apparaît Ivan Soussanine, personnification de courage et de patriotisme, transformé en personnage lamentable et pleutre. Parodies, distorsions narratives, négation de la raison, tous les procédés sont bons pour remettre en cause la solidité des perceptions et des croyances.
C'est assez étrange, parfois très drôle, parfois déstabilisant. J'avoue toutefois avoir été davantage convaincue par une pièce de théâtre de l'auteur, Elisabeth Bam que j'ai eu l'occasion de voir jouer. Peut-être parce que je ne suis pas arrivée à dégager de cet ensemble de textes brefs une sorte d'unité d'ensemble, ils m'ont donné la sensation d'être des morceaux de quelque chose qui n'était pas forcément fini. Ils n'ont pas été publiés, et personne n'est en mesure de dire si au final l'auteur ne les aurait pas présentés autrement. Mais tels quels c'est sans aucun doute une trace intéressante d'un auteur original.