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3,67

sur 1453 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
La publication d'un roman de Michel Houellebecq est toujours un événement littéraire ; l'écrivain est une star, il a ses idolâtres et ses détracteurs. J'aime bien sa manière d'écrire, j'ai apprécié la plupart de ses romans et c'est assez naturellement que je me suis imposé de lire anéantir dès sa parution.

Les premiers chapitres sont accrocheurs, prometteurs. Les touches d'ironie décalées caractéristiques de Houellebecq transparaissent derrière le style simple, direct, à la fois classique et libre. Je me suis laissé docilement embarquer par la fiction, début 2027 – oui, dans cinq ans ! – à Paris, dans les cercles du pouvoir.

Là, on s'inquiète d'une mystérieuse organisation terroriste qui s'attaque au commerce mondial, tout en diffusant des messages composés de signes cabalistiques, auxquels les hackers les plus affûtés n'entravent que pouic. L'on prépare aussi les élections présidentielles, qui approchent. La Constitution ne permet pas au président en exercice – qui n'est pas nommé, mais ressemble à qui vous savez – de se représenter pour un troisième mandat, une option que ne rejetterait pourtant pas l'opinion publique. On subodore que le président pourrait faire élire un homme de paille, avec l'intention de revenir cinq ans plus tard pour deux mandats supplémentaires ; un scénario à la Poutine / Medvedev.

J'en ai eu l'eau à la bouche et je me suis préparé à suivre tout cela en compagnie de l'antihéros houellebecquien de service, l'homme apathique sans qualités, central dans chaque roman de l'auteur. Il est un peu monté en grade par rapport à ses prédécesseurs. Pensez : un énarque, haut fonctionnaire ! Paul Raison est le chef de cabinet (le chef, pas le directeur !) du ministre de l'Economie et des Finances, un certain Bruno Juge, que certains lecteurs identifient à Bruno Lemaire… une assimilation qui fonctionne assez bien. Pour corser le tout, j'apprends que le père de Paul était un agent très important des services secrets français. Voilà qui laissait augurer une histoire passionnante !

Un feuilleton en-dessous de mes espérances ! Je n'ai eu à me mettre sous la dent que le quotidien tristounet du presque quinquagénaire Paul Raison et de sa grise famille. Sortir de l'ENA n'empêche pas d'être un homme comme les autres, avec ses petites misères secrètes. A l'exception des deux dernières parties (sur sept), où la glissade progressive vers le néant, inattendue et glaçante, m'a littéralement tétanisé, j'ai lu les sept cents pages d'anéantir sans enthousiasme ni déplaisir. L'écriture est tellement habile, fluide, avec ici ou là un commentaire désabusé aussi pertinent qu'hilarant, que malgré la longueur du livre, je n'ai pas eu le sentiment de m'ennuyer.

Ai-je perdu mon temps ?… Pas autant que Paul et sa femme, qui ne se sont pas touchés pendant dix ans ! Ils s'y remettent, y prennent goût, baisent comme des fous… Malheureusement, c'est un peu tard ! Mais ils ont raison, ce serait bête de mourir idiot…

Il me reste des questions sans réponses. Quel est l'intérêt des nombreux et indéchiffrables rêves de Paul ? A quoi rime l'intervention clandestine d'un commando de gentils mercenaires d'extrême droite, juste pour sortir un père âgé et handicapé d'un établissement de soins et l'installer dans sa famille ?

Je lis dans la presse qu'anéantir est l'occasion pour Houellebecq d'exprimer sa foi catholique et ses convictions politiques très conservatrices. On évoque aussi le pessimisme de l'auteur et sa vision prémonitoire de l'effondrement de notre civilisation. Rien que cela ! Il y a pourtant eu pire dans l'histoire et il y a toujours pire de nos jours sur la planète. le talent d'un romancier est de faire vivre des personnages de fiction ; ils ont leurs idées, leurs convictions, leur sensibilité ; ce sont les leurs. En tant que lecteur de romans, ça ne m'intéresse pas de savoir si ce sont aussi celles de l'auteur.

En conclusion, je me demande quand même si une forme de magie n'est pas en train de se dissiper. En d'autres termes, serai-je aussi prompt à lire le prochain Houellebecq ?

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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- Bon alors tu as fini par le lire ?
- Oui, ça a été un peu long, c'est un pavé.

- Certes, mais c'est un bel objet, agréable à tenir, visuellement réussi.
- Franchement, j'ai une pensée pour tous les arbres abattus pour le réaliser. Mérite-t-il ce sacrifice ?

- ... (silence devant l'horreur suscitée par la remarque précédente pour un bibliophile)
- Je te rassure, pour éviter ça, je l'ai « lu en audio » en roulant dans mon véhicule Diesel.

- ... (resilence devant l'horreur suscitée par la remarque précédente pour un électrophile)
- C'est un roman « cinéma français ». D'un petit bourgeois désabusé qui n'a pas grand-chose d'utile à faire dans la vie à part dépenser les dividendes de ses livres qui se vendent comme les objets inutiles qui abreuvent notre société et qui, selon les collapsologues, conduisent notre monde à sa perte.

- ... (reresilence devant l'horreur suscitée par la remarque précédente pour un exceptionfrançaisophile)
- Ceci dit, l'écriture de M. Houellebecq est agréable, cela glisse, cela amuse parfois. Certains traits sont bien ajustés, font mouche. L'auteur observe à loisir, avec un cynisme amusé cette société qu'il décrit.

- Ah voilà ! C'est exactement cela ! L'art de Houellebecq est descriptif, contemplatif presque !
- Ce n'est pas très difficile lorsque, à l'instar de ses héros, le travail consiste à se regarder agir et recenser tout ce que l'on ne sait pas, tout ce qu'on ne sait pas faire : c'est-à-dire tout en fait.

- Oui mais il le fait avec talent, avec une plume acérée parfois, nostalgique souvent. Et ses saillies sexuelles sont toujours assez ... étonnantes ! Ils rompent avec brio avec le tempo plus ... « Lento ».
- Traduction : C'est donc un roman petit bourgeois pour petit bourgeois neurasthénique se percevant immergé inéluctablement dans une décadence de sa civilisation, au ralenti.

- C'est une marche funèbre ! Individuelle et collective.
- Si celle menait quelque part encore, cela pourrait se justifier mais non. C'est un roman « cinéma français » comme je le disais, à toi d'imaginer la fin. Ou pas. le seul fil un peu intéressant, les attentats spectaculaires, ne seront pas élucidés.

- C'est la beauté du geste. Ce côté « thriller » est un piège pour nous amener à poursuivre la lecture et écouter l'auteur discourir sur nos problèmes de société. C'est plus agréable que lire Michel Onfray sur une ligne similaire.
- Alors l'ensemble ne mérite pas le détour. Sauf pour encourager l'auteur à continuer de décrire notre déclin, notre soumission, notre disparition physique. Ses fantasmes récurrents.
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Un peu mitigée à l'issue de la lecture du dernier roman de Michel Houellebecq, dont on parle tant dans les media.

Vaste fresque politique, familiale, conjugale, sociale.. peut-être cela embrasse trop à la fois.

J'ai apprécié les personnages bien campés et "typés" socialement. Paul, le héros, (ou antihéros?) travaille au ministère de l'économie pour un certain Bruno Juge (qui ne partage pas que le prénom avec le ministre dans la réalité..), ministre présenté comme un nouveau Colbert à la capacité de travail inouïe.
Paul habite le quartier de Bercy , dont l'église, de moins en moins fréquentée, devient à ses yeux le symbole des "tribulations du christianisme en Occident".

La famille de Paul n'est pas à franchement parler très "classique". Sa mère, restauratrice d'oeuvres d'art, meurt six mois avant son départ prévu à la retraite. le père de Paul, victime d'un AVC, doit être admis dans un établissement de rééducation dépendant d'un EHPAD.. ce qui permettra à Houellebecq de développer la problématique de la gestion de ces établissements de santé.

Paul a une soeur mariée à un notaire au chômage, et un jeune frère qui se débat dans des problèmes de couple iinsolubles. Quant à la propre épouse de Paul, Prudence, elle semble s'éloigner peu à peu de son époux, tout en se consacrant à la nouvelle "sorcellerie" tendance: le wicca... Les liens familiaux sont analysés avec une précision quasiment scientifique et l'auteur n'a pas son pareil pour décrire des relations familiales qui s'effilochent, avec des personnages qui ont du mal à se situer dans leur propre famille.

Face à cela, de nombreuses interrogations assaillent Paul: l'euthanasie, la valeur de la vieillesse, le divorce, l'enjeu des migrations, se situer par rapport aux prochaines élections, son ministre se posant comme un rempart contre le cynisme politique ambiant.

On retrouve les thèmes chers à Michel Houellebecq qui nous dresse encore une fois un tableau sans complaisance de notre société et des difficultés à la réformer.. beau roman qui pose de vraies questions mais un peu trop "foisonnant" à mon goût.
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Je suis hermétique aux querelles suscitées par Houellebecq, je n'halète pas comme un caniche attendant sa pâtée à chacune de ses parutions mais je finis toujours par les lire avec un certain plaisir.

Refermant "anéantir", j'ai compris l'origine de ce plaisir, qui en est paradoxalement absent.
Jusqu'ici Houellebecq me faisait rire... jaune, mais il me faisait rire et cet humour cynique et désabusé me maintenait dans son sillage. Cet humour fait, pour moi, terriblement défaut à ce livre, le privant de cette once d'originalité qui démarquait ses prédécesseurs du tout-venant de la production littéraire.
Houellebecq a décidé de changer de ton, c'est son droit mais je ne suis pas sûr de l'accompagner dans cette direction.
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Il faudrait sans doute savoir arrêter d'écrire lorsque la vie finit par perdre de son mystère, soit qu'elle finisse par être devenue agréable, soit que ses déceptions ne surprennent plus. L'écriture est l'exutoire de ceux qui ne sont pas entendus, soit qu'ils ne savent pas parler, soit qu'ils n'aient pas trouvé de bons interlocuteurs. Il est plus difficile de conserver le feu sacré que de ne pas finir par s'acclimater à la vie, mais lorsque la vie commence à devenir un lieu où se reposer, il faudrait arrêter d'écrire des romans et commencer peut-être à écrire autre chose, si vraiment l'occupation de l'écriture est indispensable. Il est en effet parfois nécessaire de continuer d'écrire, même si on n'a plus rien à dire, par seul souci de continuité identitaire, mais aussi parce qu'il peut être inquiétant pour certains, qui confondent écriture et sagesse, de découvrir que l'approfondissement de l'inscription d'un être dans la vie va vers le retrait d'un nombre croissant de pensées.


Michel Houellebecq est certainement devenu plus heureux et, comme la plupart d'entre nous, il découvre que l'inspiration et la paix de l'âme sont incompatibles (ce ne sont que des suppositions). Mais que peut faire un écrivain de renommée sinon écrire ? Alors Michel se force. Les intrigues ne m'intéressent généralement pas et il est difficile de ne pas remarquer que Michel Houellebecq semble partager le même agacement pour cette formalité littéraire. Au cours de ce roman, il essaiera de lancer diverses aventurettes pour nous divertir : tantôt des piratages informatiques, tantôt un enlèvement de vieux en maison de retraite, tantôt une élection présidentielle ; puis, ne parvenant à conduire ces intrigues nulle part, ne s'y attachant même pas, puisqu'elles ne seront ensuite plus inclues dans une quelconque forme de conclusion, Michel Houellebecq invoque la maladie d'un personnage pour refermer son roman sur lui-même.


Parlons cul puisque c'est à travers ce thème que Houellebecq s'est distingué de ses concurrents en matière de romans et parce qu'il en souligne généralement les enjeux les plus contradictoires dans un manque de complaisance qui ne peut qu'offenser nos pires ennemis : les idéalistes. Cette fois, Michel Houellebecq aborde le sujet d'une manière originale à travers l'histoire d'un couple qui, faisant chambre à part depuis des années, parvient à se retrouver du jour au lendemain pour repartir dans d'incroyables baises quotidiennes, la transition d'un extrême à l'autre n'amenant que très peu d'interrogations et encore moins de sensations si ce ne sont celles, relativement managériales, concernant la meilleure position pour prendre une (sa) femme. Pourquoi pas. Houellebecq ne nous avait pas habitué à du cul progressif mais il reste cohérent dans le ton. Il n'est pas un romantique et l'art mécanique de la baise dont font preuve ses personnages, robots bien huilés à partir du moment où l'interrupteur a été enclenché, confirme que Michel Houellebecq est le grand sage que nous aimerions tous être : celui qui s'est débarrassé de ses émotions inutiles. Il est très difficile de parler de ce qui ne pose pas de difficultés, et Michel Houellebecq lui-même, tout bon écrivain qu'il puisse être, peine à nous intéresser aux histoires copulatoires de ce roman, au-delà d'un vague intérêt voyeuriste.


Le bonheur fait également rarement bon ménage avec l'humour. Michel Houellebecq a peut-être connu une petite période de dépression en commençant son roman. Ce phénomène survient en effet souvent lorsqu'on se plonge à nouveau dans la galère d'écrire ; l'écrivain, ou supposé tel, se demande alors pourquoi il s'inflige une telle torture alors qu'il pourrait simplement lire tous ces autres livres que d'autres ont écrit, et qui racontent certainement peu ou prou la même chose. Ainsi, le début d'anéantir est plutôt bon. Michel a la pêche, ses descriptions sont vives, les situations sont encore parfois cocasses. Les 100 premières pages sont convaincantes puis, elles le sont de moins en moins.


Toutes ces petites déceptions ne sont pas très importantes. Je constate que Michel Houellebecq n'est pas un écrivain businessman. Il a essayé de produire un roman qui serait semblable à ses précédents mais il n'a pas réussi à le faire. On dirait que toutes ces histoires commencent à l'ennuyer. Moi, en tout cas, je me suis ennuyée. C'est comme ça quand on avance dans la vie. L'ennui est le paroxysme du bonheur, mais comment enthousiasmer les foules avec ça ?

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La dernière livraison de notre Michel national est une longue tentative assez ennuyeuse de dépeindre la société française, au travers de personnages assez peu romancés qui répètent avec une certaine intelligence, les obsessions de leur créateur. L'impression est curieuse de lire un long monologue pour plusieurs voix qui dialoguent en canons afin de maintenir tout du long du livre ce petit rythme de moteur diesel qui marque ici l'écriture en charentaises plutôt confortables de l'auteur.
Si n'étaient les saillies humoristiques et la capacité de Michel à accélérer bougon dans quelques passages, et sa faculté de créer une sorte d'hypnose dont il est pourtant capable de sortir, on s'ennuierait ferme au sein des infinies discussion désabusées de personnages portant des prénoms ridicules : Indy, Bruno, Paul, Brian, Prudence, Cécile et Maryse. Spécialistes en conversations salons et en repas de table maniant l'à-propos et le sens des banalités avec une persévérance documentaire qui se confond souvent avec une maniaquerie dans le plaisir de la description.
Non, Michel ne s'intéresse pas à rien puisqu'il note et dépeint l'ordinaire avec un sens du détail qui rappelle les grandes heures de wikipédia, si l'encyclopédie était un roman.
Je ne sais à quel point l'autofiction irrigue ce texte, et si l'entre-soi houellebecquien ressemble à ses personnages, toujours est-il que notre auteur semble se complaire à traîner son spleen en leur compagnie, et qu'il a définitivement quitté les Felix Pottin et Shoppi qui ont fait sa gloire pour consommer des produits de bouche en grands nombres, entourés d'individus charmants ayant des problèmes aussi graves que de reconnaître leur finalité mortelle, leur échec de divorcés précaires et leur sort condamné à l'impuissance fondamentale de la condition humaine en ces temps de déclin de la civilisation.
D'où la légère sensation d'empâtement à la lecture de ce long fleuve tranquille poétique qu'est malgré tout, Anéantir. Où heureusement surnage un certain talent de styliste, quelques notes d'humours bienvenus qui réveillent ce texte assez endormi qui a des airs d'interminable repas de famille.
Bonne chance à ceux qui termineront les 734 pages, cela tient du marathon ou du concours de marche sportive. C'est un genre nouveau que le page-turner au ralentis. J'imagine qu'il faut presque de la foi pour terminer un aussi long surplace où rarement la vie de bureau et ses aléas auront été aussi finement auscultés par un écrivain pour qui, elle ne représente pourtant rien d'important ni de révélateur.
Et c'est là, l'enjeu majeur et la limite du roman que de s'intéresser à quelque chose qui ne l'intéresse pas tel un greffier de mauvaise humeur sur le trottoir roulant de son one - man show. Mais deci delà, quelques phrases claires démontrent une certaine oreille littéraire, un sens de la période courte et de la rythmique française avec sa géométrie faites de consonnes. La langue se meut enfin, elle se pimente et s'active, elle se fait douce également, ce qui est nouveau chez Michel et le texte atteint à une forme de classicisme.
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J'ai lu tous les livres de Houellebecq, c'est un maître pour moi. Je suis un ingrat tellement il a été un de seuls auteurs que j'avais envie de lire pendant des années. Cette fois-ci, je suis déçu. Une déception toute relative, j'ai fini ce pavé en quelques jours.

Je trouve que ce qui faisait sa force n'est plus aussi présent ou bien moins.

- Je n'ai pas ri, rarement souri. J'adore quand il réveille le lecteur par une vanne qu'il nous envoie pourtant au visage.

- le style m'a paru paresseux, sans la poésie et les registres de langage différents. Quelques pages ou passages m'ont impressionné mais le reste, non.

- L'histoire m'a semblé embrasser trop de thèmes, trop de personnages pour finalement par grand-chose.

- Les rêves, je n'ai pas su les comprendre.

Pour conclure, j'ai eu l'impression qu'il a voulu écrire un livre pour le grand public, mais qu'il peut perdre ses grands admirateurs comme moi. Je suis content de ne pas avoir acheté ce livre et qu'un voisin me l'ait prêté.

En revanche, un Houellebecq moyen vaut mieux que 10 livres mièvres des fan-clubs "J'ai adoré et lis-le à tout-prix". Vivement le prochain.
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L'être et le néant
C'est du lourd. Au sens propre mais le dernier ouvrage de Michel Houellebecq paru ce vendredi entouré de trésors de mystère et de confidentialité qu'on réserve à un Saint Graal, 700 pages d'une édition reliée, à la couverture cartonnée, avec une tranchefile et un signet de couleur, aurait gagné à s'amputer de 300 pages pour épargner au lecteur le verbiage de phrases sans intérêt (voir ci-dessous) ; cependant quel éditeur pour oser suggérer et encore moins imposer des coupes à son écrivain vedette chevronné ?
Coupes utiles aussi pour resserrer une intrigue à peu près construite, mêlant politique, nous sommes en 2027 dans la coulisse d'une élection présidentielle, une habitude depuis Soumission, avec en figure de proue Bruno (Juge / le Maire, tout fier dans le Monde du 31 décembre 2021 d'avoir inspiré l'écrivain), rapports conjugaux et familiaux, bonheur et haine, réflexions sur la transcendance et marche vers la finitude humaine, Pascal pas loin, énigmes et attentats (pour pasticher le Dan Brown du Da Vinci code ?)
Le livre vaut surtout par la figure de Paul, haut fonctionnaire à Bercy (quel intérêt d'en rapporter les rêves toutes les quarante pages. Pour faire masse ? N'est pas Freud qui veut) par ses rapports avec Prudence sa femme, ses retrouvailles et sexe avec elle et son apprivoisement avec la mort.
Enfin l'auteur s'impose de développer à longueur de texte des phrases d'une affreuse banalité, un crispant degré zéro de l'écriture comme pour marquer une certaine indifférence au monde dans le style, moins réussi, de l'Etranger de Camus « Pendant ce temps, Paul était engagé dans un combat sans gloire avec le distributeur de confiseries de la gare TGV Mâcon-Loché, à part lui déserte. Quelques minutes plus tard il renonça, abandonnant ses deux euros à la machine récalcitrante ; le train de Paris venait d'être annoncé. En atteignant le quai, il fut envahi d'un doute soudain : allait il reconnaître son frère et sa belle-soeur ? […] La veille il avait fait un rêve inquiétant.» p 203. Comme s'il voulait ainsi brider en lui, et c'est regrettable, sa pulsion naturelle à un lyrisme romantique « la lumière sur les vignes était enveloppante, atroce de beauté. » (698)
En bref un roman à demi raté, boursouflé, à la limite de l'amateurisme désinvolte envers ses lecteurs. Une déception. Anéantir n'a ni la puissance du pamphlet prophétique de Soumission paru en janvier 2015, par pure coïncidence comme une réponse donnée à l'immense mobilisation citoyenne consécutive aux attentats de Paris ni la force désespérante des grands mâles vaincus du Sérotonine de 2019. Dommage.
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Paul, bientôt quinquagénaire, travaille auprès du ministre de l'économie, Bruno, dont il est presque le seul ami. Quelques mois avant la présidentielle de 2027, alors que le président actuel ne peut pas se présenter pour un troisième mandat, Bruno est pressenti pour devenir le premier ministre d'un candidat plus ou moins désigné. Parallèlement à sa vie professionnelle, Paul partage un bel appartement avec son épouse Prudence qu' il ne croise même plus et avec laquelle il n'a plus aucune relation. Mais son père fait un grave malaise et il retrouve en Bourgogne sa soeur, son beau-frère et son petit frère. Cet événement va modifier ses relations avec eux, et à son retour Prudence et lui se rapprochent… Je n'ai pas reconnu le style de Houellebecq : peu ou pas d'humour noir, très peu de sarcasme, une certaine tendresse de l'auteur pour ses personnages pour lesquels l'amour est pour une fois une force, et une grande tristesse générale.
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Je suis très amateur de MH, que j'ai lu avec grand plaisir de l'extension du domaine de la lutte jusqu'à la soumission. J'ai provisoirement zappé la sérotonine (lassitude inconsciente?) et repris le fil avec cet Anéantir qui m'a récemment été offert. Pour la première fois, je me suis un peu ennuyé, et ce n'est pas de chance car le bouquin fait plus de 700 pages. On les lit sans effort et sans réel déplaisir, tant l'auteur a un style fluide, dosant habilement humour et réflexion souvent pertinente sur l'époque, et quelques belles pages sur la fin de vie récompenseront ceux qui seront allés au bout, mais il aura fallu en passer par une intrigue peu inspirée : qui a envie de se taper la chronique de la victoire, à la présidentielle de 2027, d'un improbable ticket Hanouna-Lemaire ? Au final, une déception à la mesure de l'engouement précédemment suscité par le bonhomme.
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