AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Ionesco : Théâtre tome 3 sur 8
EAN : 9782070233069
312 pages
Gallimard (24/04/1963)
4.12/5   4 notes
Résumé :
TOME III : Rhinocéros - Le Piéton de l'air - Délire à deux - Le Tableau - Scène à quatre - Les Salutations - La Colère


La plupart des pièces publiées dans ce recueil ont été jouées en France et un peu partout dans le monde. Les succès ont succédé aux fours et les fours ont succédé aux succès. Mais la gloire d'un auteur dramatique est surtout le résultat d'une série d'échecs. Le théâtre de Ionesco ne fait pas exception à cette règle.Rhinocé... >Voir plus
Que lire après Théâtre 03 : Rhinocéros - Le Piéton de l'air - Délire à deux - Le Tableau - Scène à quatre - Les Salutations - La ColèreVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Je me suis intéressé à deux des sept textes que contient ce recueil : le tableau et Scène à quatre. Ces deux textes représentent la part intimiste de l'oeuvre de Ionesco ; dans les deux cas l'action se déroule dans un lieu unique avec un nombre limité de personnages, la durée elle-même est limitée, il s'agit de textes courts. Voici donc, deux saynètes sans excès, presque sobres, on pourrait même dire sages qui explorent les pulsions élémentaires de l'homo sapiens moyen. Ces deux textes sont en quelque sorte une contribution aux recherches en psychana ou en psycolo. Il y avait l'école freudienne, jungienne, lacannienne, eh bien voici maintenant, l'école ionescienne.

LE TABLEAU :

Trois personnages : Un gros monsieur, un peintre déguenillé et une vieille femme laide et aveugle. le gros monsieur semble physiquement puissant, en tout cas il est très autoritaire et parle fort. Il est content de lui et exprime son autosatisfaction sur tous les tons. Ce qu'il apprécie tout particulièrement en lui, c'est sa réussite personnelle dans les affaires, c'est un self made man qui adore se donner en exemple. On pourrait dire qu'il manque un peu de modestie et de discrétion.

Le peintre lui, timide plutôt fluet, est inconsistant. Il ne parvient pas à réellement formuler une phrase. Faut dire, pour sa décharge, qu'il n'est pas chez lui, mais chez le Gros monsieur, auquel il cherche à vendre une de ses toiles. La position de solliciteur engendre toujours un sentiment de gêne ou de faiblesse.

Alice ,on l'a dit, est vieille, laide et aveugle, la vie ne l'a pas gâtée, en plus, comble du raffinement dans l'horreur, son frère n'est autre que le gros monsieur. Car celui-ci, outre les qualités sus dites, est totalement dénué de compassion, et semble même prend positivement plaisir à la maltraiter.

Cette pièce est en deux mouvements. Dans le premier, les trois personnages sont réunis, le Gros monsieur est le maître de la situation, il exige, les deux autres obéissent. Cette séquence est un marchandage, à quel prix sera cédée la toile du peintre? Or ce peintre est un si piteux commerçant qui non seulement ne parvient pas à vendre sa toile, mais qui en plus accepte de payer une location pour l'espace que le tableau occupera sur le mur de la maison du gros monsieur.

La seconde séquence s'ouvre par la sortie du peintre. Dès que le peintre a disparu une rupture complète s'opère. le tête-à-tête entre le gros monsieur et le tableau modifie le comportement de ce dernier, sans doute est-ce dû au sujet de la toile : il s'agit d'un portrait très majestueux d'une reine. La présence de cette femme peinte semble le mettre dans une joie tout à fait puérile. Alice, de son côté, subit également une modification brutale de son caractère, de soumise qu'elle était elle devient tyrannique et de sa canne d'aveugle elle frappe le gros monsieur, pour qu'il cesse de regarder la souveraine peinte. Tristement il se remet au travail à son bureau et compte, compte, compte tout l'argent qu'il a gagné par millions. Grâce à la litanie des chiffres et des nombres il parvient a endormir sa terrible soeur. Il va pouvoir, ainsi, se livrer au vice, et au stupre avec la belle, la grande majesté accrochée au mur. Malheureusement le plaisir qu'il prend avec cette image de femme réveille sa soeur. Elle se jette sur lui et le frappe à tour de bras, mais il parvient à se dégager, à saisir un pistolet et à en vider le chargeur dans le corps de sa soeur. Merveille des merveilles Alice au lieu de s'effondrer dans une flaque de sang, se métamorphose en sosie du portrait. Tout joyeux le gros monsieur tire des coups de pistolets partout dans sa maison qui au fur et à mesure des détonations se transforme en palais forain.

Maintenant une petite devinette psychanalytique, parmi les personnages de la pièce, qui est le Moi, le Sur-moi, le Ça et où se trouve le Fantasme ?



SCÈNE À QUATRE:

« Mesdames, messieurs, je suis parfaitement d'accord avec vous. Ceci est tout à fait idiot. » telle est la conclusion de cette saynète d'une dizaine de minutes. Cette déclaration est d'ailleurs le seul propos sensé de ce texte, le reste n'est que vide et agitation. Toutefois vide et agitation sont deux caractéristiques fondamentales de l'équilibre cosmique, de la plus grande à la plus petite échelle. Dans le cas qui nous occupe il s'agit d'un atome, constitué d'un noyau autour duquel tournent d'abord deux puis trois électrons. Nommons ce noyau bouquet de fleurs et respectivement Dupont, Durand et Martin les électrons ; étant de charge négative les trois électrons se repoussent avec énergie et mauvais humeur. Leur seule convergence c'est le désaccord, quel est la nature de ce désaccord, cela demeure encore un mystère, qui peut donner, par exemple, la nature de la Force gravitationnelle? Enfin quoi qu'il en soit les trois électrons dialoguent ainsi :

« MARTIN, à Dupont : Vous non plus, mon cher Dupont.
DUPONT, à Martin : Vous non plus, mon cher Martin.
DURAND, à Dupont : vous non plus, mon cher Dupont. ….. »

Ils contredisent, démentent, refusent, rejettent, réfutent les deux autres de plus en plus violemment et de plus en plus rapidement ils tournent autour du pot de fleurs. C'est affolant, on ne les voit déjà presque plus tant leur vitesse est importante, bientôt ils vont disparaître. Mais voilà que pénètre dans l'atome un joli petit proton, doté d'une charmante charge positive, nous appellerons ce nouveau corps, la Dame. Toute cette positivité provoque une réaction immédiate chez les électrons : ils s'arrêtent, se jettent sur le pot de fleur, en arrachent les fleurs qu'ils offrent à la Dame. Mais, mais, mais un proton pour trois électrons c'est trop peu, il y a risque de dislocation du proton ; car les électrons tout en étant solidement ancrés au proton continuent à se repousser violemment entre eux. C'est ainsi, que le mignon petit électron est d'abord déshabillé puis démembré.
Ionesco a été l'un des tous premiers à comprendre les dangers de l'énergie nucléaire !
Commenter  J’apprécie          40
J'ai choisi d'emprunter ce tome III, recueil du théâtre d'Eugène Ionesco pour les saynètes, textes courts qui n'ont souvent pas été publiés seuls.
Elles accompagnent la pièce maîtresse « Rhinocéros » que j'avais déjà lu mais qui rappelle, au même titre La Peste de Camus, l'actualité de la pandémie du Coronavirus.
Nous nous trouvons dans une ville où les gens se transforment en Rhinocéros les uns après les autres. C'est une sorte d'épidémie. Ionesco fait la description du processus de massification avec certaines idées très contagieuses qui s'emparent de l'homme. C'est la traduction d'une idolâtrie qui va les guider et non plus une idéologie. La métaphore et donc particulièrement réussie.
A côté, les petites saynètes sont un peu pâlottes mais j'ai bien aimé "Les salutations" notamment. Dans ce texte, une fois la première question posée "Comment allez-vous?", un personnage réponds par un adverbe (qui n'existe pas toujours) après quoi il ajoute "Et vous?", relançant ainsi le dialogue. On voit tout de suite l'effet comique mais ce qui fait la force du texte c'est son rythme car il y a une progression comme dans une chanson, avec une phase de ralentissement entre deux accélérations. Et puis cela permet à Ionesco de terminer par une pirouette qui le met en scène.
Tout cela ressemble à des exercices de style et montre le goût de l'exagération qui a fait le succès d'Eugène Ionesco.


Commenter  J’apprécie          80

Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
LE TABLEAU


LE GROS MONSIEUR : [...] Je ne suis pas un égoïste, contrairement à la plupart des gens qui sont arrivés, comme moi, à force de volonté, d'entêtement, d'énergie, de travail. Je viens de vous dire, Monsieur, qu'il n'y a pas de miracles. Eh bien si, Monsieur, il y a le miracle.

LE PEINTRE : Ah, le miracle?

LE GROS MONSIEUR: Si, comprenez-moi bien. un seul miracle, le vrai miracle, le miracle par excellence : le travail.

LE PEINTRE (naïf) : Ah oui, vous avez raison ; le miracle du travail.

[...]

LE GROS MONSIEUR : Je suis le fils de mes œuvres. La vie a été pour moi un long combat. La vie, c'est une lutte sans merci. On marche sur les cadavres ! Je ne sais pas si vous êtes de mon avis. [...] Une lutte sans merci, mais... honnête : la libre concurrence. [...] Finalement on y trouve une sorte de satisfaction, un plaisir amer et profond, la joie du devoir accompli... La nuit, on peut dormir, car on a la conscience tranquille. (Il ferme les yeux et ronfle....)
Commenter  J’apprécie          40
SCÈNE À QUATRE

(La dame, dépeignée, dégrafée, essoufflée, à moitié dévêtue, s'avance vers le public, sans bras, sautillant sur une seule jambe.)

LA DAME : Mesdames, messieurs, je suis parfaitement d'accord avec vous. Ceci est tout à fait idiot.

(Rideau)
Commenter  J’apprécie          71
Béranger : Je suis obligé de vous faire des aveux. Je me suis toujours rendu compte que je n'avais aucune raison d'écrire.
Journaliste : C'est tout à fait compréhensible. Mais ne pas avoir de raison, ce n'est pas une raison. Il n'y a aucune raison à rien, cela nous le savons tous.

[Le piéton de l'air]
Commenter  J’apprécie          50
L'étendue boueuse se fait prairie, le ciel est un océan aux îles fleuries...dans les déserts voici les oasis... les rivières coulent dans les sables arides... Tu es un chemin d'aubépines... Tu me rappelles les capitales englouties dans les flots... tu me rappelles... tu me rappelles... Qu'est-ce que c'était, qu'est-ce que c'était? Je suis jeune, je bourgeonne, je verdoie... Ah, la, la, la, la, la ! et même je fleuris... (il se rapproche du tableau, caresse les bras peints.) Je fleuris. Je fleuris... Ah, je deviens poète! [...] Ooh, oooh, aaah... Je t'adore!

Le Tableau (pièce en un acte)
Commenter  J’apprécie          10
Premier Monsieur, entrant et apercevant le deuxième Monsieur et le troisième Monsieur: Bonjour, messieurs!
Deuxième Monsieur, entrant et apercevant le premier et le troisième Monsieur: Bonjour, messieurs!
Troisième Monsieur, entrant et apercevant le premier et le deuxième Monsieur: Bonjour, messieurs!
Premier (au deuxième) : Heureux de vous voir. Comment allez-vous ?

[Les salutations]
Commenter  J’apprécie          10

Videos de Eugène Ionesco (103) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Eugène Ionesco
FACE-À-FACE CRITIQUE Pour son cinquième long métrage, Valeria Bruni Tedeschi opte à nouveau pour l'autofiction, en romançant ses années d'apprentissage à l'école des Amandiers de Nanterre, dans les années 1980.
L'école des Amandiers, dirigée par Patrice Chéreau, est dans les années 80 un rêve pour beaucoup de jeunes comédiens. Décrite comme un « anti-Conservatoire », elle voit défiler dans ses rangs Agnès Jaoui, Vincent Perez, Marianne Denicourt, Éva Ionesco, et donc Valeria Bruni Tedeschi.
La réalisatrice conte les souvenirs de sa promotion en les romançant. Louis Garrel, en Patrice Chéreau, et Nadia Tereszkiewicz, en Valeria Bruni Tedeschi, sont bluffants. Les Amandiers est un film de troupe dans lequel la réalisatrice parvient à dépeindre les années sida mais aussi les amours et amitiés d'une bande de vingtenaires qui découvrent le théâtre et y mettent toute leur énergie.
#amandiers #valeriabrunitedeschi #theatre
Vous avez aimé cette vidéo ? Abonnez-vous à notre chaîne YouTube : https://www.youtube.com/channel/¤££¤24Vincent Perez18¤££¤4fHZHvJdM38HA?sub_confirmation=1
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux ! Facebook : https://www.facebook.com/Telerama Instagram : https://www.instagram.com/telerama Twitter : https://twitter.com/Telerama
+ Lire la suite
autres livres classés : absurdeVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (26) Voir plus



Quiz Voir plus

Eugène Ionesco

Eugen Ionescu, alias Eugène Ionesco, est né à Slatina (Roumanie) en ...

1899
1909
1919

12 questions
56 lecteurs ont répondu
Thème : Eugène IonescoCréer un quiz sur ce livre

{* *}