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EAN : 9782070371495
160 pages
Gallimard (22/11/1979)
3.6/5   79 notes
Résumé :
Un bordel de luxe pendant que la révolution gronde à l'extérieur.
Les clients jouent à l'évêque, au juge, au général. Plus vrais que leurs modèles. Dans la comédie somptueuse ou sordide que se donnent les clients de Madame Irma, " le mal sur scène explose, nous montre nus, nous laisse hagards s'il se peut et n'ayant de recours qu'en nous. "
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Fantasmes à tous les étages!

Dans ce claque très classe, on vient chercher l'orgasme du pouvoir, un grand vertige existentiel pour le prix d'une passe, c'est plus efficace qu'une psychanalyse et à la portée du premier minable venu. Surtout quand, hors du microcosme maternant du boxon, gronde la révolution..

Le Balcon a donné du fil à retordre à Genet le mythomane provocateur, le poète baroque, le dramaturge incendiaire. Comme Cyrano attaqué par Christian, il le critiquait lui-même " avec assez de verve" ..

C' est une oeuvre que j'ai trouvée difficile à lire, mais passionnante à jouer ou à voir jouer!

Dans une mise en abyme que Genet affectionne -il faut lire et voir Les Bonnes, encore plus étonnant et nettement plus abouti que le Balcon- le bordel de Madame Irma devient le théâtre où les clients, pour leur plus obscur plaisir, se travestissent, en Evêque, en Général, en Juge...les trois pouvoirs avec lesquels Genet avait maille à partir, dans sa vie réelle ou rêvée, donnant à voir aux spectateurs non le pouvoir lui-même, mais , comme dans une galerie des glaces sur le champ de foire, son image déformée par le prisme de l'obsession et de la frustration, ce qui est beaucoup plus intéressant!

Le pouvoir, son reflet, et derrière, l'homme lui-même, tout nu, sous les dentelles de son déguisement...

Shakespeare l'a bien dit: All the world's a stage! Ici, les jeux de miroir réfléchissent cette maxime puissante jusqu'au malaise..

Une langue toujours précieuse, jamais vulgaire, peut-être un peu trop embijoutée, trop fardée, comme ces dames elles-mêmes, mais c'est la marque du poète baroque qui ne sommeille jamais quand le dramaturge prend la plume..

A voir ou à monter, plus qu'à lire!
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La dramaturgie subversive de Jean Genet, l'un des auteurs les plus atypiques du "théâtre nouveau", trouve une résonance particulière dans le Balcon . Cette pièce marque un tournant dans l'oeuvre de Genet, qui en publie d'ailleurs cinq versions successives : sur le plan dramaturgique, l'auteur brise l'unité de la scène et multiplie le nombre des personnages. Ces derniers jouent leurs scénarios pervers dans la maison de prostitution " le Grand Balcon" tenue par Madame Irma, alors que la révolution fait rage dans la ville. Les clients du Grand Balcon viennent sous des habits d'emprunt, chercher une image idéale dont ils seront « la figure » pendant le scénario pervers qu'ils joueront avec l'une des prostituées de Madame Irma. C'est ainsi que l'on peut assister aux séances d'habillage et de déshabillage du client.
Le personnage se distingue dans le Balcon par son caractère protéiforme . C'est le cas de l'Evêque qui se réjouit d'entendre confesser les pêchés, du Juge sadique qui veut fouetter la Voleuse, du Général heureux de succomber aux blessures des batailles. Ne disposant d'aucune identité, il prend de ce fait des allures multiples. Ainsi, le Général ne nous sera connu que sous l'étiquette d'un client assidu de la maison de Madame Irma, qui vient satisfaire ses fantasmes en revêtant l'uniforme et en mimant sa propre mort sur le champ de bataille avec l'aide de la fille dont il s'assure les services. du reste, le personnage de Madame Irma est central: elle observe tous les salons de la perversion à travers un viseur qu'elle a installé dans sa chambre et c'est donc par ses yeux que le spectateur voit quelques scènes "obscènes". Quand l'Envoyé de la cour propulse Irma sur le devant de la scène politique afin de se servir d'elle, cette dernière devient une figure qui remplace la reine morte lors de la révolution. Cette machination met fin à la révolution.
Le Balcon reste d'une actualité surprenante même si sa version finale remonte à 1961. Genet y associe, non sans ironie, la société occidentale à un bordel de luxe : un lieu où s'échangent les corps contre de l'argent, où règnent la supercherie et l'illusion.


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Nouvelle mise en abyme avec cette autre pièce de Genet, mais dans un genre beaucoup plus grand-guignolesque et absurde : finie la sobriété des décors, des personnages, et de la situation des soeurs des Bonnes, puisque nous atterrissons, sans coup férir également, dans un bordel bien particulier. En effet, les clients paient pour jouer des rôles de personnages puissants, dans des mises en scènes rodées au millimètre, face à des femmes qui vont être sous leur domination : ainsi de l'Evêque, du Juge, ou encore du Général. Au fil de neuf tableaux, nous découvrons le fonctionnement du bordel, sa tenancière, Irma, et tous ceux qui gravitent autour, avec en toile de fond une révolte populaire qui gronde alentour, sans que l'on ne connaisse vraiment, du début à la fin, les raisons de cette révolte, mais dont nous découvrirons, malgré tout, l'issue.

Que de thématiques abordées dans cette pièce foisonnante, parfois complexe à appréhender de ce fait, notamment en raison de la profusion des personnages, des relations, ou encore des intrigues qui se nouent, sans que l'on ne comprenne immédiatement leur finalité. L'on peut facilement s'y perdre, à l'aune des jeux de pouvoir, des jeux de miroir et de trompe-l'oeil – au sein des décors comme des personnages -, qui symbolisent tout le caractère illusoire et factice de notre société. Caractère aussi parfaitement mis en exergue par le langage utilisé, tour à tour percutant, fusant avec beaucoup de violence, et ample, permettant aux personnages de mettre en lumière toute leur duplicité – ils jouent presque tous, un rôle, après tout-, ou encore par la variété des registres, nous faisant évoluer en quelques répliques d'un grotesque carnavalesque à un tragique noir, désabusé et cynique, le tout éminemment représentatif de la pensée, et de l'esthétique, du dramaturge.

Une grande pièce en somme, qui bouscule, avec délectation, et les codes théâtraux, et les codes moraux des années 1950, sur laquelle je vais avoir plaisir à travailler cette année.
Lien : https://lartetletreblog.com/..
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Un bordel de luxe, alors qu'au-dehors gronde la révolution... Tandis qu'en son sein se livrent les secrètes perversions de successivement un évêque, un juge et un général, sous l'oeil inquisiteur de Madame Irma, surveillant toutes les chambres de son austère bureau. Une pièce de théâtre dont Jean Genet a mis du temps avant d'en boucler l'écriture : insatisfait de son travail pendant la gestation de son oeuvre ("C'est très mauvais, et très mal écrit. Prétentieux" dixit l'auteur à son propos durant son écriture). Jean Genet veut susciter des fables pour adopter un ton caricatural, tout dans le ton de la pièce. L'auteur réussit donc son entreprise stylistique, mais pousse le nihilisme jusqu'à (dans mon édition) donner des indications de mise en scène, insatisfait d'un bon nombre de ses représentations auxquelles il assista dans le monde.
Mon point de vue se résume simplement : je me suis emmerdé. Comme Jean Genet durant l'écriture du Balcon (dixit lui-même, encore). Un peu trop statique, plutôt répétitif, peu d'action concrète rendent la lecture de cette pièce éprouvante. le côté pervers et malsain n'y est pour rien, il ne fait au contraire qu'ajouter au ton satirique de l'oeuvre. Jean Genet manifeste, par la construction d'"acteurs" au sein de cet univers interlope qu'est la maison close, son mépris pour les professions évoquées en exaltant captieusement leur perversion, et c'est ce qui fait la puissance de l'oeuvre.
En résumé de cette critique fort mal écrite : lecture harassante, malgré un bon fond, mais pièce sans doute intéressante du côté du spectateur. La lecture bien que désagréable laisse à entrevoir de bonnes possibilités de mise en scène, sans doute capables de rendre son interprétation très captivante et plus agréable.
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Le peuple est mécontent, il se révolte. de quel lieu observer ce soulèvement? Quel endroit montrera le mieux les rouages de la révolte en action? Un bordel pardi! Et à la tête de celui-ci, madame Irma aux commandes des vices humains.
Le peuple obtiendra-t-il gain de cause? La société peut elle changer?
Jean Genet nous propose une intrigue théâtrale au coeur des considérations les plus basses et où se met en place la mécanique implacable des soulèvements populaires.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
"Le balcon" (1958) peut-être considéré comme la pièce la plus scandaleuse de cet après-guerre. Même à Paris où, malgré le Gaullisme, il n'y a pas de censure, elle suscita de graves perplexités et l'on jugea bon, pour les surmonter, de limiter à cinquante le nombre des représentations.
A Londres et en Allemagne occidentale, les représentations ont été données en privé.
Le premier acte se déroule à l'intérieur d'un bordel, tandis que la ville est secouée par une insurrection.
Sans se soucier des événements, les clients de la maison s'adonnent à leurs ébats. Pour ceux que l'âge et le tempérament ont rendu vicieux, cela consiste à se travestir selon leur idéal : l'un en évêque, l'autre en juge, un autre en général.
Les filles et un aide complètent les travestissements par par des actions adéquates : elles se font confesser par l'évêque, fouetter par le juge, conduire à la victoire par le général.
[...]
La patronne est en relation étroite avec le préfet de police, pour des raisons d'intérêt et de sentiment, bien qu'elle prenne son plaisir avec une favorite.
La révolte réussit pleinement. La famille royale et les autorités sont tués ou mis en fuite.
Pour calmer la population, le préfet de police apparaît au balcon de la maison close avec la patronne, déguisée en reine et prise pour telle, et l'évêque, le juge, le général avec leurs travestissements qui sont devenus la réalité.
Une jeune prostituée, Chantal, se rebelle et les démasque. Enlevée de la maison par un ouvrier, elle devient l'héroïne de la révolte. Elle sera touchée à mort pendant que se déroule la grotesque parade...
(extrait de "Histoire du Théâtre" - tome 4 - parue aux éditions "Marabout" en 1964)
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La fille: Les soldats mouraient en baisant l'étendard. Tu n'étais que victoires et bontés. Un soir, rappelle-toi..

Le Général: J'étais si doux, que je me suis mis à neiger. A neiger sur mes hommes, à les enliser sous le plus tendre des linceuls. A neiger? Bérézina!

La fille: Les éclats d'obus avaient coupé les citrons. Enfin, la mort était active. Agile, elle allait de l'un à l'autre, creusant une plaie, éteignant un œil, arrachant un bras, ouvrant une artère, plombant un visage, coupant net un cri, un chant, la mort n'en pouvait plus. Enfin épuisée, elle-même morte de fatigue, elle s'assoupit , légère, sur tes épaules. Elle s'est endormie...

Le Général (ivre de joie): Arrête, arrête, ce n'est pas encore le moment, mais je sens que ce sera magnifique. Le baudrier? Parfait! (Il se regarde dans la glace).
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L'ÉVÊQUE - En vérité, ce n'est pas tant la douceur ni l'onction qui devraient définir un prélat, mais la plus rigoureuse intelligence. Le coeur nous perd. Nous croyons être maître de notre bonté: nous sommes l'esclave d'une sereine mollesse. C'est même d'autre chose encore que d'intelligence qu'il s'agit... Ce serait de cruauté. Et par-delà cette cruauté - et par elle - une démarche habile, vigoureuse, vers l'Absence. Vers la Mort. Dieu? Je vous vois venir! Toi, mitre en forme de bonnet d'évêque, sache que si mes yeux se ferment pour la derière fois, ce que je verrai, derrière mes paupières, c'est toi, mon beau chapeau doré... C'est vous, beaux ornements, chapes, dentelles.
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Carmen ( toujours pensive): Dans une vraie maison, il doit faire bon...
Irma: Va savoir. Mais , Carmen, mais si mes filles se mêlent d'avoir de pareilles idées, mais c'est la ruine du bordel. Je crois, en effet, que ton apparition te manque. Écoute, je peux faire quelque chose pour toi. Je l'avais promis à Régine, mais je te l'offre. Si tu veux, naturellement. Hier, on m'a réclamé, par téléphone, une Sainte Thérèse...(Silence) Ah! évidemment, de l'Immaculée Conception à Sainte Thérèse, c'est une dégringolade, mais ce n'est pas mal non plus...(Silence) Tu ne dis rien? C'est pour un banquier. Très propre, tu sais. Pas exigeant. Je te l'offre. Si les révoltés sont écrasés, naturellement.
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Ornements ! Mitre ! Dentelles ! Chape dorée surtout, toi, tu me gardes du monde. Où sont mes jambes, où sont mes bras ? Sous tes pans moirés, glacés, que font mes mains ? Inaptes à autre chose qu'esquisser un geste qui voltige, elles sont devenues moignons d'ailes - non d'anges, mais de pintades ! - chape rigide, tu permets que s'élabore, au chaud et dans l'obscurité, la plus tendre, la plus lumineuse douceur. Ma charité, qui va inonder le monde, c'est sous cette carapace que je l'ai distillée...
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Vidéo de Jean Genet
Jean Genet, l'auteur des "Bonnes", du "Balcon" ou des "Nègres", s'est inspiré de la vie des autres pour écrire sur la vie des minorités et des opprimés et a fait de personnages réels des personnages de ses fictions. Retour sur l'oeuvre de l'écrivain et dramaturge à travers deux romans : "Mourir avant que d'apparaître" de Rémi David, et "Par-delà l'attente" de l'avocate Julia Minkowski.
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