Les romans nordiques. Que n'a-t-on pas écrit sur eux! On a crié au géni en découvrant Stieg LARSON et Hanning MANKEL, on s'est rué sur le filon pour en extraire des auteurs comme Camille LACKBERG,
Jo NESBO,
Lars KEPLER,
Leif DAVIDSEN,
Gunnar STAALESEN et j'en oublie forcément dans le Who's Who littéraire !
Aujourd'hui la tendance, bien française, est à brûler ce que l'on a encensé la veille, à dénigrer une mode que nous avons tous, d'une manière ou d'une autre, contribuée à répandre autour de nous pour en faire le succès que nous lui connaissons. En la matière, dans des articles récents, le « Monde des livres » et « le canard enchaîné » n'ont pas
été les moins incisifs.
Porter sur un piédestal tout ce qui est estampillé « nordique », pour mieux le dénigrer aujourd'hui. Comme si on venait enfin de prendre conscience que tout ne relève pas du « chef d'oeuvre » dans la production littéraire nord-européenne, et qu'il faille du coup y mettre le feu, comme pour exorciser la naïveté qui nous a conduit à tant d'excès, à gober à grandes cuillerées le made in scandinave, sans se poser la question de la saveur de la tambouille ingurgitée.
Soit ! Ces articles ont le mérite de nous interpeller sur nos pratiques de « consommation littéraire », d'accord, ils pointent les limites du polar nordique, mais il serait dommage cependant de jeter à leur suite tous ces romans venus du froids, de les clouer aux piloris du bon goût français au prétexte qu'il n'y aurait finalement rien de bon dans tout ca !
Car du bon il y en a ! Si MANKEL et LARSON ne seront jamais remis en cause, tant leurs oeuvres ont marqués les lecteurs, à côté ils se trouvent encore des romanciers qui méritent d'être lus, n'en déplaise aux cassandres.
C'est sans doute le cas de
Mons Kallentoft. Journaliste suédois, il est déjà l'auteur de cinq romans. «
Hiver » est le premier d'une série qui se décline au rythme des saisons. On y retrouve ce qui fait le charme des romans nordiques. Une certaine langueur, une histoire qui imprègne peu à peu le lecteur sans qu'il s'en rende vraiment compte. Un paysage qui tient lieu de personnage, et une saison pour scène de crime. A cela s'ajoute un art consommé pour dresser par petites touches le portrait psychologique de ses personnages, et un talent à maintenir la vérité derrière le voile d'un scénario habilement mis en oeuvre.
hiver0Quand on retrouve le cadavre congelé d'un homme pendu à la branche d'un arbre, l'inspectrice Malin Fors se voit conforter dans son impression que « cette journée n'est pas faite pour les vivants ». Nu, lacéré, le corps de la victime, figée dans son dernier souffle, reste en suspension au dessus des vivants, témoin de sa propre déchéance.
Très vite ce cadavre est identifié. Il s'agit d'un marginal qui rôdait toujours près d'un terrain de football où il aimait à récupérer et renvoyer les ballons perdus. Pas méchant pour un sous , mais suffisamment « différent » pour devenir le souffre douleur de certains jeunes. Pourtant, ce meurtre a aussi toutes les caractéristiques d'un sacrifice rituel.
Les pistes ne manquent donc pas, d'autant que l'inspectrice va également s'intéresser à une famille, connue pour sa violence, ses combines et larcins ; un clan constitué de frères, des brutes épaisses, soudés autour de la matriarche qui dirige celui-ci d'une main de fer.
Car la neige
hivernale recouvre bien des secrets.
Divorcée, un peu trop fidèle à la téquila et mère d'une ado qui progressivement s'émancipe l'autorité parentale dans les bras d'un garçon mais qui ne manque pas de réflexion pour aider sa mère dans son enquête, Malin Fors aura besoin de toute sa finesse d'esprit et de son opiniâtreté pour faire remonter la vérité à la lumière des hommes. Car dans cette enquête, toutes les pistes sont à explorer, tant elles éclairent sur les revers sombres d'une soci
été aux apparences un peu trop lices.
Il m'a fallu un peu d
e temps pour rentrer dans ce roman. Quelque chose d'inhabituel qui m'empêchait au début de m'installer dans l'histoire. Sans doute parce qu'inconsciemment, dans ce décors d'
hiver et cette trame qui se mettait en place, je refusais de laisser une place à un des acteurs du roman.
C'est quand enfin j'acceptais finalement que la victime, le mort prennent la parole et s'exprime au long du livre que j'ai pu enfin me laisser aller ans retenue à sa lecture. Original que de faire parler un mort qui reste là, flottant, parlant aux vivants sans que ceux-ci ne l'entendent. Une victime qui accepte son sort mais qui attends. Une délivrance ? une vengeance ?
Ce n'est pas là la seule particularité de ce roman. Une femme flic pour héroïne, des personnages qui intériorisent leurs réflexions, autant d'aspects qui donnent au roman son originalité et son épaisseur.
Une entrée en matière plutôt réussie pour cet auteur qui vient à la suite de ses nombreux prédécesseurs.
A noter que ce roman fait l'objet d'une adaptation cinématographique .
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