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Sublime et lyrique écriture de Kessel qui nous décrit avec finesse, avec humanité, une atmosphère, la complexité des relations humaines, l'imbroglio qui peut se nouer dans les sentiments humains, l'impact d'un instant sur nos vies, pour mieux nous entraîner, attirer notre attention, nous rendre plus réceptifs à ce qui peut se cacher sous le masque d'un visage humain. Il perçoit les mouvements de l'âme humaine. Il nous entraine dans une histoire d'amour tragique, bouleversante.

Témoin de son époque, ce « Lion » magnifique et généreux a tellement roulé sa bosse en sa qualité de journaliste-reporter qu'il a développé un sens aigu de l'observation. Ses aventures qu'il cherche aux quatre coins du monde, lui servent d'inspiration pour ses romans. Dans cette fiction (voire autofiction), il scrute ce qu'il se passe sous le ciel de Paris en 1935. Il voit les modifications sociopolitiques de l'époque et avec elles, pressent l'avenir de l'Europe malgré le bonheur des premiers congés payés.

Montmartre au petit jour, le narrateur, journaliste-reporter, fini sa nuit, attablé derrière la vitre du bistrot « le Sans-Souci ». Il remarque une jeune femme qui toujours aux mêmes heures, invariablement, passe devant le café. Son allure retient son attention. Elle est mystérieuse, elle le fascine par sa façon de se comporter dans son manteau de zibeline jusqu'à devenir une obsession.

« Je crois que sa régularité même, l'inclinaison pareille de la tête, le trajet identique, la démarche qui reproduisait strictement celle de la veille, m'inspiraient l'effroi que j'éprouve toujours devant l'automatisme des fous"

Jusqu'au jour où n'y tenant plus, le narrateur, ivre et fiévreux ce jour là, se met en travers de la route de son apparition. Pris d'un malaise, il s'écroule près d'elle, la jeune femme lui porte secours et va l'aider à rejoindre son domicile.

Elsa Wiener est allemande, elle a fuit l'Allemagne et son cortège de bourreaux. Son mari, Michel, éditeur et opposant à la nouvelle politique d'Hitler, a été arrêté pour être transféré dans un camp. C'est l'époque où l'apparition des premiers camps est évoquée. Elsa a fuit en compagnie de Max, un enfant juif, que les coups des nazis ont rendu infirme. Pour subvenir à leur besoin, Elsa chante dans les cabarets, la nuit.

A partir de cet instant, on assiste impuissant à la lente descente aux enfers d'Elsa dans ce milieu interlope des nuits parisiennes. Elle doit survivre pour elle et pour Max, tenir envers et contre tout jusqu'au retour de Michel ! La lecture nous propulse à la suite d'Elsa, d'étape en étape, de bonheur en déchéance, d'espoir en crise de détresse, d'angoisse pour Michel mais détestation d'elle-même, l'avilissement dans les bas fonds, l'alcool aidant, Elsa va vivre un véritable calvaire devant le regard d'un enfant de douze ans impuissant à soulager la détresse de celle qui l'a sauvé d'une mort certaine.

Ce roman est peut-être le plus beau de Kessel bien que je n'ai pas lu « Belle de jour ». Assister à la déchéance de cette femme a été pour moi une torture et c'est là que l'écriture de Kessel est admirable, il défie notre empathie.

Bouleversant, fascinant, la présence de Romy Schneider ne m'a pas quittée un seul instant bien que le livre et le film fussent totalement différents. Son aura a illuminé le livre.

La passante du « Sans-Souci » se situe à la fin des années folles. Kessel ressemble au narrateur, journaliste-reporter. La narration emploie le « Je » ce qui donne plus d'épaisseur à son message. Paru en 1936 chez Gallimard, ce petit livre de 285 pages est un manifeste antifasciste d'un écrivain Juif qui pressent un sombre avenir.
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Je n'aime pas les histoires d'amour, sauf si elles sont absolument tragiques, impossibles, matures.
Nous y sommes en plein avec cette passante du sans souci qui donnera et perdra tout, sa joie de vivre, son honneur, sa beauté, pour un homme qu'elle n'aura même commencé à réellement aimer que dans la souffrance.
Le visage de Romy Schneider, qui a incarné Elsa Wiener dans le film pourtant assez éloigné du livre, a totalement habité ma lecture sur lequel il s'est serti à la perfection tant l'actrice colle au personnage de ce roman sépulcral, terrible et bouleversant, qui a su voir et dire avant la nuée des autres la barbarie du nazisme.
Immense coup de coeur.
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Il flotte dans ce roman de 1936 comme un doux parfum suranné, et ce ne sont pas forcément les pages bien jaunies de mon exemplaire les responsables, même si elles y ont contribué sans doute à leur manière innocente. Ça serait peut-être le subjonctif ou le passé simple, ou plus sûrement les tournures descriptives et les réflexions psychologisantes sur les personnages, bien éloignées de la tendance au factuel moderne, ici empreintes de la subjectivité d'un narrateur aiguillonné par le mystère de la passante du Sans-Souci. Car le roman suit essentiellement la relation entre deux êtres, pour ceux qui n'auraient pas vu le film, ou l'auraient oublié. le narrateur, écrivain journaliste en proie à la détresse de son âme noie ses nuits dans l'alcool et la débandade de Montmartre. Tous les matins, il voit passer une dame spectrale, drapée d'une aura envoûtante. Leur première rencontre s'inscrit sous le sceau de l'entraide, mais c'est la mystérieuse dame qui endosse le rôle pour commencer, en ramenant à son domicile notre confident bien mal en point. Pour le reste, ça sera plutôt l'inverse. Surtout quand notre témoin connaîtra les conditions de vie de la belle, chanteuse exilée d'Allemagne, surtout quand il rencontrera son protégé Max, gamin estropié de la vie parce qu'il est juif, surtout quand il saura le lien viscéral d'Elsa avec Michel désormais en camp de concentration Outre-Rhin, et l'histoire de cet amour quelque peu embrasé par la distance et le désarroi.
Voilà pour le pitch. Une histoire qui nous plongera dans la vie pas si marrante d'un Montmartre des cabarets, finies les années folles. Mais un roman qui nous rappellera aussi la finesse que pouvaient prendre les romans d'époque, dans leur perception affûtée des sentiments (j'ai parfois pensé parfois à Zweig), dans leur lyrisme et dans la beauté des tournures stylistiques (même si un peu désuètes), dans leur capacité naturelle à retenir le lecteur sur des choses simples, comme ici la trajectoire tragique d'un sublime personnage, dans un monde déjà hanté par le nazisme.
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1935. Quartier Montmartre où, quand Paris s'éveille, un client malade et dépressif, qui est le narrateur, se morfond dans le bar du Sans-Souci. Sa fièvre monte encore d'un cran quand apparaît une passante dont on ne va pas tarder à faire la connaissance.

L'ambiance chaude des nuits parisiennes connaît à l'époque un coup d'arrêt avec la crise qui s'installe.

Kessel, à travers ce personnage féminin traqué, aborde le nazisme , très toxique à l'époque puisqu'il est déjà question de terreur dans les quartiers juifs en Allemagne.
Kessel se sert du désarroi et de la descente aux enfers de cette femme pour tirer la sonnette d'alarme face au fascisme montant de l'époque.

L'intention est louable et surtout visionnaire mais je n'ai pas souscrit au procédé de l'écrivain qui consiste à entourer, surligner et re-souligner jusqu'à l'écoeurement l'explicite de la situation dramatique qui accompagne les deux secrets de cette femme.
Kessel est pour moi dans l'excès. Bien que sensible au sujet, j'ai trouvé que le pathos de nombreuses scènes desservait le message.
Cependant, on peut dire qu'il a vu juste. L'histoire lui a donné raison. le nazisme est bien une histoire de chasseurs et d'hommes traqués qui vont être battus à mort.
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Véritable coup de coeur!
Il y a des romans qui vous révèlent la nature humaine dans toute sa crudité, avec justesse, un charme s'en dégage insufflant à la lecture une certaine atmosphère de sérénité! Quelle plume! Sublime, majestueuse et d'une puissance qui nous relate la genèse de la folie des pratiques inhumaines du pouvoir nazi au moment où le monde n'en soupçonne pas encore l'existence alors que les victimes de cette folie trimbalent déjà leur déchéance humaine, même à l'extérieur d'Allemagne.
Oh La passante du Sans-Souci ou encore Mme Elsa Wiener dont les circonstances et les situations ne peuvent se définir que par un seul mot confusion car elle va mener un combat très confus, et elle va y aller avec beaucoup de courage toujours confus, mais à quel prix...
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Après l'avoir observée, assis à sa table au café le "Sans-souci", le narrateur, journaliste et écrivain, fait la connaissance d'Elsa Mayer, allemande, qui a fui son pays et pris sous son aile Max, un jeune garçon juif de 12 ans, resté handicapé après avoir été battu par des sympathisants nazis. Des deux, c'est Max le plus raisonnable et protecteur quand Elsa se perd dans des soirées cabaret pour gagner de quoi vivre, des gains qu'elle perd quelquefois trop rapidement en boissons ou au jeu. le narrateur, éconduit, s'attache à ce duo et à son tour, excuse et reste indulgent face aux frasques de la femme, à ses sautes d'humeur ou ses mauvais choix et voit le lent délitement de la vie dissolue d' Elsa, au désespoir de revoir Michel, son mari interné dans un camp en Allemagne.

Publié en 1936, ce roman de Joseph Kessel évoque le Montmartre festif et encore léger dans lequel essaye de subsister et s'étourdir Elsa Mayer, dans l'attente de retrouver son mari...Mais la jeune femme, mal préparée à l'indépendance, connaît mal les codes de la survie et va lentement amorcée une descente aux enfers, ne sachant pas vraiment lutter dans ce Paris plus enclin à s'encanailler qu'à s'entraider.
J'ai eu un peu de mal à m'attacher au personnage central d'Elsa, cette femme seule qui cherche à s'en sortir dans le Paris des années trente. Malgré sa générosité envers Max, ses frasques et ses choix obtus m'ont laissés dubitative, une psychologie passant de l'exaltation à la dépression la plongeant dans la boisson...
La passante du Sans-Souci est une première rencontre avec Joseph Kessel, que j'apprécie pour la peinture de l'époque, sans plus.
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Montmartre n'est pas qu'une jolie carte postale au charmé rétro blottie contre le flanc protecteur du Sacré-Coeur. Montmartre, c'est aussi des nuits d'ivresse et d'épaisses fumées; des nuits de fêtes que l'on regrette au petit matin quand on titube jusqu'à son logis, des cernes sous les yeux et le coeur au bord des lèvres. C'est dans ce Montmartre-là que Joseph Kessel situe l'intrigue de "La Passante du Sans-Souci". Les années folles s'achèvent et s'étirent en une longue agonie qui les fait ressembler à une vieille courtisane sur le retour. Nous sommes en 1936 et bientôt l'Europe ne dansera plus.
Le narrateur du roman est journaliste et écrivain, familier du Paris nocturne, interlope. Il a ses habitudes dans Montmartre, ses soirées, ses nuits et dans un café un peu miteux, sûrement enfumé: le Sans-Souci. Chaque matin, depuis la vitre de ce dernier, il voit passer cette femme enveloppée dans sa fourrure. Elle semble fuir, en proie à la peur et elle est belle, d'une beauté d'autant plus émouvante que c'est la beauté pleine, mature de ces fleurs sont on sait qu'elles se flétriront bientôt.
Fasciné, le narrateur -dont on ne saura pas grand chose- finit par gagner l'amitié de sa belle inconnue. Elle s'appelle Elsa et elle a fui l'Allemagne son pays natal après que le régime nazi ait arrêté et déporté son époux, opposant au régime. Elle a aussi recueilli Max, un enfant juif, orphelin et martyr de ce nouveau gouvernement.
Elsa n'a qu'un but: sauver son mari mais ce n'est pas si simple et elle n'est pas vraiment armée pour ce combat là qui la désoriente autant qu'il la blesse.
"La Passante du Sans-Souci" c'est autant le récit d'une descente aux Enfers désespérante et désespérée qu'une histoire d'amours. C'est aussi un roman d'un humanisme poignant malgré son pessimisme, un manifeste antifasciste qui aborde la question du nazisme et de sa barbarie. Kessel tire la sonnette d'alarme mais peu l'entendent, c'est le lot des visionnaires...
On pourrait lui reprocher d'être avec La Passante excessif, de donner dans le mélo, d'en faire trop, de tirer sur la corde... On pourrait être agacé par Elsa et trouver Max trop mature pour être honnête. Je conçois tout cela, je l'entends. Mais moi, j'ai adoré. J'ai adoré la langue, le texte de Kessel, la passion de son appel, l'intensité de son désespoir et du destin de sa passante. J'ai été émue, touchée, saisie. Poignardée. Transpercée.



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J'ai eu du mal à m'attacher à cette passante à la fois pleine de bon coeur et puérile. J'ai aussi été un peu mal à l'aise devant le mélange de cette femme superbe et de cet enfant rendu infirme. Toujours appelé d'ailleurs par l'auteur l'infirme alors qu'il pourrait dire l'enfant, l'adolescent, le gamin…

Kessel l'a écrit en 1936 quand peu de gens s'intéressaient au sort des Juifs en Allemagne. Or ce sont les Allemands qui ont brisé le bassin et les jambes de Max, tandis que le mari d'Elsa “la passante" est envoyé en camp de concentration, ce qui la fait fuir vers Paris.
Chanteuse à succès dans son pays, elle a trouvé un engagement mais la crise le fait fermer et lorsqu'après des vacances elle cherche une nouvelle place, tous les bons engagements sont signés et c'est le début de la descente aux enfers, d'autant que par loyauté puis par amour elle envoie de l'argent à son mari qui lui en réclame.
La fin, que je ne connaissais pas n'ayant jamais vu le film, est particulièrement cruelle.
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La passante, c'est Elsa Wiener. Tous les matins, le narrateur, qui n'est autre que Kessel, l'observe, traversant fugitivement son champ de vision alors qu'il est attablé dans son bistrot favori, le Sans-Souci.

Piqué dans sa curiosité et par l'allure attirante de cette femme, le narrateur décide de l'aborder. Elsa est allemande. Elle a fui le régime Nazi, nous sommes en 1933. Elle vit avec Max, un jeune enfant rendu infirme par les chemises brunes, parce qu'il était juif. Son père, ami d'Elsa, est mort sous les coups. le mari d'Elsa, Michel, est interné dans un camp de concentration en Silésie. Aussi, Elsa, de formation artistique, travaille dans les bouges de Montmartre pour subvenir aux besoins d'elle et de Max, et soutenir son mari en lui envoyant de l'argent.

Elsa est une femme fière. Elle refusera toute aide. La passion qu'elle voue à son mari l'amènera à tout sacrifier pour lui. On assiste, impuissant comme l'est le narrateur, à la longue descente aux enfers d'Elsa qui donnera tout, dans l'espoir que Michel survive.

Joseph Kessel décrit dans ce livre le Paris de la fin d'une époque, celle des fêtes folles de l'entre-deux-guerres. Il règne une ambiance de désoeuvrement, comme si l'impensable allait arriver. le roman a été écrit en 1936. Encore une fois, Kessel fait preuve de prescience historique.

L'atmosphère de ce livre est donc d'une grande tristesse. L'écriture de Kessel est celle que nous lui connaissons : des phrases courtes, des mots précis et incisifs.

Au-delà du décor et de l'ambiance, Kessel pose la question de l'abnégation de soi pour atteindre l'impossible. « Un acte, quel qu'il soit, peut-il se nommer dégradant, s'il est uniquement voué au salut d'autrui ? » Tel Faust ou Anna Karénine, peut-on se perdre corps et âme pour l'être aimé, au risque de pas en être récompensé ?
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J'adore le style de Joseph Kessel dans ce roman. L'histoire est bouleversante et magnifique. J'ai ressenti beaucoup d'empathie pour les personnages, surtout Max. J'en ai plus appris sur la vie du romancier et j'ai découvert grâce à lui un auteur intéressant: Panaït Istrati. Excellente lecture que je vous recommande.
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