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sur 3519 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Dans le Parc royal du Kenya, une petite fille évolue librement parmi les animaux les plus féroces de la réserve.
Écartelée entre la fierté que lui voue son père et les angoisses de sa mère, elle tente de sauvegarder sa liberté, sa volonté de de ne faire qu'un avec la nature, au prix d'une grande solitude.
Elle est comme une petite sorcière au regard des membres des tribus africaines. Celle qui parle le langage du lion et fait de lui son ami est à la fois respectée et redoutée.

On se retrouve transporté au milieu de paysages paradisiaques, avec pour décor le Kilimandjaro. Cet écrin de beauté n'empêche pas la cruauté de la loi du plus fort dans le monde animal. La réalité est la même chez les hommes. Ils s'obstinent à se voir différents, à mettre des barrières entre eux.

Pourtant, Patricia réussit à faire écrouler cette hiérarchie, à faire entrer le lecteur dans le mystère qui régit ces tribus africaines, à nous faire comprendre leur façon de penser la vie.

Roman d'aventures et roman d'initiation, qui nous emmène droit vers une fin tragique. On en devine les grandes lignes, en espérant qu'on se trompe.
Une aventure qui ressemble à une fable, où le mystère finit par se briser sur le miroir de la réalité. La petite fille s'éveille et doit abandonner ses rêves et ses pouvoirs.

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Afrique sauvage, éclatante de couleurs.
Kilimandjaro majestueux, parc royal du Kenya.
Savane. Point d'eau. Gazelles, antilopes, girafes, gnous, zèbres, rhinocéros, buffles, éléphants.
Soleil irradiant.
Chaleur étouffante.
Paix. Silence. Bruissements.
Une petite fille de dix ans.
Un lion.
L'histoire se prépare à vibrer...

Inutile de vous dire que moi aussi j'ai vibré !
Ce chef-d'oeuvre de Kessel raconte l'extraordinaire fusion entre une gamine et un lion recueilli lorsqu'il était bébé et livré à la vie sauvage quelques mois après.
Cette fusion, le narrateur y assiste avec effroi et fascination. Ecrivain-voyageur fasciné par les bêtes, désirant de toutes ses forces « être admis dans l'innocence et la fraîcheur des premiers temps du monde », il ne peut qu'aspirer à entrer dans la danse de force et de douceur, approcher du mufle doux et des yeux d'or de King, le bien-nommé.
Patricia l'y fait entrer, avec toute l'espièglerie et la cruauté de l'enfance mais aussi toute la maturité du monde, avec toute la certitude de connaitre une « vérité hors de la routine humaine ».
Petite fille entière vivant exclusivement pour son lion, elle est totalement comprise par son papa, le fameux John Bullit, le volcanique, le tempétueux. Ancien chasseur repenti, il consacre son temps à la protection des animaux du Parc dont il est le propriétaire.
Mais il y a Sybil, la maman de Patricia, névrosée, ne supportant plus cette nature brute et cruelle dans laquelle son mari et sa fille s'aventurent avec passion.

Et puis arrivent les Masaï, tribu la plus libre de toutes les tribus d'Afrique, la plus fière, la plus instinctive, qui glorifie ses « moranes », ses jeunes hommes, seuls habilités à porter les cheveux longs et la crinière du lion...
Le destin est en marche.

Jeu, douceur, amour fou, jalousie.
Terrible confrontation, danse ultime.

Je ne peux me détacher des paysages décrits avec poésie et passion, de la liberté, du silence, de la chaleur, des couleurs.
Je ne peux me défaire de la relation particulière, puissante, absolue entre le lion et la petite fille.
Je ne peux quitter les animaux libres et élégants, quels qu'ils soient.
Je ne peux dire adieu à ce monde fier et noble, sans faux-semblants.
Je suis obligée, pourtant, de retourner à ma civilisation, mais dans un coin de mon coeur, continuera à vivre ce lion.
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Je termine à l'instant la lecture de mon deuxième Kessel. Autant Une balle perdue ne m'a pas emballée des masses que le lion m'a complètement envoûtée.
Joseph Kessel, lors d'un périple en Afrique, fait une escale au Parc Royal à quelques kilomètres de Nairobi. Lors de son séjour, il fera la connaissance de Patricia, la fille de John Bullit le directeur de la réserve.
Au contact de cette étrange petite fille, il découvrira qu'elle possède un don : celui de comprendre les bêtes. de toute la faune qui peuple le parc, l'enfant entretient une forte amitié avec King, un lion, leurs liens sont si étroits que les autochtones la considèrent comme une sorcière.
Témoin privilégié de ces rapport entre la petite fille et le fauve, Kessel nous entraîne dans la mystérieuse Afrique qui nous enseignera ses lois...

Absolument fabuleux, comme vous l'aurez compris j'ai adoré ce livre. L'Afrique étant un rêve de voyage que je souhaite réaliser un jour, pour le moment, je tente de m'y rendre par la lecture. le lion, a accompli complètement sa mission, le dépaysement à été total.
J'ai été beaucoup touchée par cette histoire. En parallèle de cette merveilleuse amitié, ce roman est une véritable mine d'or sur le plan des descriptions et des sentiments. L'écriture est brute et raffinée et dans la moiteur de l'atmosphère l'on ne reste pas tranquille, la magie de l'Afrique nous prends au tripes et l'on sent que quelque chose de grave va se produire...
J'ai pleuré à la fin du livre, et j'ai été déçue que ça se termine si vite au bout de 243 pages. Toutes les bonnes choses ont une fin certes, mais dans quelques temps je prendrai un grand plaisir à la relecture de ce roman qui a été un coup de coeur. Je le conseille à tous. A lire !
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Joseph Kessel, je l'ai rencontré la première fois en lisant "L'équipage"... puis un peu plus tard "Les amants du Tage"... mais j'ai toujours retardé la lecture du Lion... parce que j'appréhendais un épilogue tragique qui ne pourrait pas me satisfaire. Parfois on désire que tout reste rose, idyllique. Je manquais de courage... J'ai surmonté ma lâcheté. le Lion ne pouvait que me séduire, j'ai longtemps rêvé d'Afrique et j'aime les animaux... Un livre qui ne raconte pas uniquement une amitié entre une petite fille et un lion... Un texte beaucoup plus profond, qui dit le mal être au sein d'une famille, les incompréhensions, les non-dits, les idéaux, les espoirs déçus... Superbe promenade au Kenya, avec en fond "d'écran" le Kilimandjaro couronné de neige... Belle amitié aussi qui se développe entre une petite fille et le narrateur... Ames sensibles s'abstenir! Mais si l'histoire est sombre, la plume de Joseph Kessel reste magnifique.
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Patricia, jeune fille de 10 ans vit au Kenya, avec ses parents Sybil et John directeur du parc royal dans la région du Kilimandjaro. Depuis son plus jeune âge Patricia se glisse parmi les animaux sauvages sans éveiller la crainte ni l'inquiétude de son entourage. Bercée par les sons des animaux du parc, éduquée par les leçons de son père - un homme expérimenté par 20 ans de brousse - Patricia développe avec le temps un pouvoir fascinant sur toute cette faune sauvage.
Dans cette réserve, Patricia a un ami hors du commun King, un lion recueilli à l'âge 2 jours. Alors qui gémissait de faim, de soif et de peur, la jeune fille soigne, fortifie et sauve le lionceau. Depuis King et Patricia ne peuvent vivre l'un sans l'autre, ils sont inséparables.
Tout paraît idéal dans cette belle famille, mais derrière ce beau tableau familial se cache une vérité bien moins réjouissante. John le père ancien chasseur reconverti, est une brute insensible sauf avec ses bêtes, Sybil femme snob et nostalgique de sa vie européenne, est très terrifiée par la relation qu'entretient sa fille avec King, elle veut les séparer, et, enfin Patricia fillette dominante, ne mesure pas le danger de cette faune sauvage, recroquevillée dans son monde elle s'éloigne de la vie des hommes.
Tous les trois s'aiment pourtant et ne peuvent vivre l'un sans l'autre mais sont-il faits pour mener la même vie ?
Le narrateur émerveillé par l'Afrique et Patricia, nous conte l'histoire de cet amour exclusif que porte la fillette pour le lion. Au fil des pages le lecteur attend le dénouement car « c'était une inexplicable certitude – il y aurait un dénouement ».
Roman mené par la délicieuse plume de Joseph Kessel, j'ai été transportée parmi les Masaï, dans la savane, au pied du Kilimandjaro ; paysage magnifique décrit par des passages tout poétiques.
Mais "Le lion" est avant tout un récit tragique qui nous plonge au coeur de l'Afrique où règnent les lois coloniales…
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Quand on commence, on ne peut plus s'arrêter...
On est tout de suite absorbé par le monde mystérieux du Kenya, les animaux sauvages de la réserve d'Amboseli et par Patricia, la petite fille héroïne du roman et sa relation avec King le lion.
C'est une très belle mais cruelle histoire d'amour. C'est aussi un compte rendu intéressant sur la vie des occidentaux en Afrique à l'époque des colonies, souvent isolés, et confrontés à des ethnies nombreuses et aux coutumes parfois mystérieuses.
Un magnifique roman qui nous offre des scènes de toute beauté, d'un humanisme profond et qui font prendre conscience de ce qu'est la nature, l'humanité, et les rapports possibles entre humains et animaux… On n'est pas encore à l'époque du développement durable, mais certaines interrogations de Joseph Kessel trouvent encore des échos aujourd'hui en dépassant le romantisme de l'amour de l'homme pour la nature…
Mais plus qu'un roman, c'est une partie de l'injustice de la vie qui est illustrée
Egalement Un livre avec une très belle écriture, indéniablement.
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Le narrateur arrive dans une réserve au pied du Kilimandjaro. Il est très vite fasciné par la fille des gérants. Au point qu'il va prolonger son séjour. On dit, que parfois, cette petite gamine dort entre les pattes d'un lion.
Même en relecture, la magie opère. C'est tellement bien écrit que le lecteur s'immerge dans l'histoire en y croyant. Un joli conte inoubliable pour les petits et les grands.
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On se fait parfois de fausses idées sur les classiques : J'ai toujours cru qu'il était trop question de nature pour moi dans ce roman. Alors qu'en fait, le propos est vraiment centré sur les personnages dont l'auteur brosse d'efficaces portraits, puis sur la relation homme animal, puis enfin sur la nature qui entoure et contient tout cela. Ce n'est l'histoire du roi de la savane qu'au travers de l'histoire des hommes qui vont malheureusement (pour qui ?) croiser son chemin et avoir une action sur sa nature. C'est surtout l'histoire de Patricia, enfant blanche née en Afrique d'une pure citadine (la bien nommée Sybil) et d'un chasseur de bêtes sauvages, Bullit, reconverti en Directeur du parc royal. En tant que tel, il est désormais chargé de protéger les animaux des hommes au sein de la réserve, mais aussi les hommes des animaux - et d'eux-mêmes, qui veulent parfois s'approcher d'une nature qu'ils ne maîtrisent pas.


Bullit a bâti sa réputation et son charisme sur sa connaissance et sa maîtrise des fauves. Et les chiens ne faisant pas des chats, ni les lions des gazelles, il a transmis cette dangereuse fascination à sa fille depuis toute petite. C'est donc naturellement qu'ils recueillent King le lionceau lorsqu'il devient orphelin, l'élevant au biberon et aux jeux comme un membre de la famille - qu'il n'est pas, comme se tue à le rappeler la mère, qui devra imposer de le réhabiliter à la vie sauvage avant qu'il ne dévore sa fille en grandissant. Car Sybil, plus que Bullit qui pense avoir la maîtrise, et contrairement à Patricia qui, comme une enfant, croit tout savoir mieux que les adultes, est consciente du danger de jouer avec une nature plus forte que soi, elle qui l'a expérimenté au côté de son mari chasseur.


Cependant, comme le révèlera Patricia au narrateur (parce qu'elle voit en lui un spectateur assez conscient du danger pour l'admirer) elle continue de fréquenter King. On pourrait croire qu'elle aime le fait de « posséder » un lion comme d'autres enfants des jouets, ou comme elle croit « posséder » un domestique (« il est à moi » dira-t-elle). Mais très vite elle avoue que posséder des peluches vivantes ne lui suffit pas : sa gazelle et son singe apprivoisés ne l'intéressent pas, qui se laissent aimer par tout le monde. Ce qu'aime Patricia, c'est non seulement dominer et contrôler ces animaux dangereux, mais encore gagner ce mérite pour susciter l'admiration… de son père qui, en tant que chasseur, encense le pouvoir de sa fille, l'encourageant par-là à continuer malgré les reproches et inquiétudes de la mère.


Mais Patricia est une enfant. Et cette soif de pouvoir qu'elle a, frêle créature, sur des carnivores immenses, c'est certes un moyen d'attirer l'attention de son père, et de s'assurer de sa presque dévotion, d'exercer un pouvoir sur cet homme (« elle agrippait de la même façon la crinière de King ») ; Mais c'est aussi une provocation, un test de limites, un jeu auquel elle aime jouer parce qu'elle y excelle, et qu'elle pense avoir compris comment tout cela fonctionne. Comme son père qui, à un degré moindre, provoquait habilement les animaux féroces avec sa jeep en pleine brousse et « sortait rafraîchi de ces dangers que son audace avait voulus et son adresse dominés ».
Un jeu permanent de pouvoir, comme en usent et en abusent tous les enfants de manière plus conventionnelle en des lieux plus conventionnels. Sauf que sans limites, le jeu va de plus en plus loin. le narrateur s'en aperçoit lorsqu'elle lui présente King sur son territoire - moment magnifique du livre - et qu'elle feint de le faire dévorer juste pour lui montrer qu'elle seule est parfaitement maîtresse de sa puissance.
Ou encore lorsqu'il demande si King a une famille à lui désormais, et que Patricia se renferme… Est-ce que leur relation enfant-animal empêche le lion de posséder sa propre famille ? Est-ce que Patricia lui interdit d'une manière ou d'une autre ? Ou plus probablement en a-t-il une, mais qui attiserait une sorte d'étrange jalousie de la part de cette fille unique, qui semble avoir l'impression de posséder l'univers à ses pieds et d'en contrôler (presque) tous les pions…? Comme une sorte de défi suprême : soumettre à sa volonté le plus impressionnant.


En cela, elle ressemble à ces moranes, jeunes chasseurs de la tribu Masaï que tout le monde craint et qui, en d'autres temps, devaient chasser un lion pour prouver leur valeur et leur courage. Elle est d'ailleurs fascinée par l'un d'entre eux, et ce n'est pas un hasard si elle le fascinera à son tour. Mais elle ne s'intéresse qu'au plus puissant… Ainsi, tout au fil du roman, la tension monte. On craint comme la mère que tout cela ne finisse mal. « C'est tout ensemble. C'est la tension, la passion de l'enfant. C'est le climat, la nature, l'entourage. Cela ne peut pas durer. Cela doit mal finir. »
Alors, on pense avec le narrateur : « Il faut que j'assiste au dénouement (…) Pourquoi un dénouement ? Et lequel ? M'attendais-je à voir Kihoro tirer sur Oriounga ? Ou le morane percer de son javelot le vieux pisteur borgne ? Ou un rhinocéros éventrer Bullit ? Ou King, oubliant tout à coup les règles du jeu, déchirer Patricia ? Ou Sybil devenir folle ? Toutes ces pensées étaient odieuses et absurdes à la fois. J'étais en train de perdre tout sens commun. (…) Mais je sentis que je resterais dans le Parc royal jusqu'au dénouement car - et c'était une inexplicable certitude - il y aurait un dénouement »…


… Et l'on quitte à regret ce roman puissant et sublime, où règne en maître mot l'équilibre : parfois évident, parfois difficile. Entre une famille où l'une se sacrifie par amour (« il n'y a rien à faire quand les gens s'aiment trop pour pouvoir vivre l'un sans l'autre, mais qu'ils ne sont pas faits de manière à pouvoir vivre la même vie, et que ce n'est la faute de personne ») ; équilibre entre les peuples, la faune, la flore. A l'image de ce combat-jeu entre le père et le lion : chacun debout, torse gonflé, pattes avant contre bras en un semblant de rapport de force respectueux. Bien sûr, King peut tout faire s'effondrer. Mais il ne le veut pas. Il veut pouvoir continuer à jouer avec cet homme comme nous voulons continuer à profiter de la nature qui nous entoure.
A nous de ne pas trop jouer avec, en pensant tout contrôler.


Un roman rondement mené, au rythme des tambours de la brousse, dans un décor de jungle et de savane, sanguine tapisserie où les ombres chinoises sauvages se meuvent sur le soleil couchant. Une parfaite leçon d'équilibre et d'humanité… Donnée par un lion. Dommage que l'homme et son besoin de tout soumettre vienne, une fois encore, tout gâcher.
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C'est les yeux pleins de la poussière de la savane, la peau brûlée par le soleil et les oreilles saturées des bruissements de la vie grouillant sous la perpétuelle chape de plomb d'un parc national d'Afrique de l'est que je referme ce livre, oeuvre maîtresse du grand conteur Kessel, écrivain voyageur et grand reporter.

Je suis tombé sous le charme magnétique de cette relation d'amour tendre et brute, sans artifice aucun, entre Patricia et King, relation dont la plupart d'entre nous ne pourra jamais se payer le luxe et, heureusement, nos chats apportent une belle consolation à ces élans primitifs d'amour et d'admiration remplie de crainte respectueuse, de déférence mystique, pour les grands fauves.

Ce roman, chant de la nature, exaltation de la vie simple, dure et, en définitive, pure que l'on y mène, montre aussi les contradictions, les limites au-delà desquelles l'humain ne peut s'aventurer sans éprouver tôt ou tard un déchirement. Cette célébration de la vie sauvage est un retour transitoire vers un état que l'on sent nous appeler comme les percussions appellent les jambes à entrer dans la danse.

Quelque chose se réveille qui grandit et prend possession de la volonté. On ne saurait répondre à ce genre d'affinité que comme Montaigne à propos de la Boétie : « Parce que c'était lui, parce que c'était moi. »

Le poète Kessel y décrit la crudité de la condition et des moeurs des hommes vivant selon les coutumes millénaires de leurs aïeux, les Masaï notamment, comme s'il l'avait lui-même vécue. La jeune Patricia est un être fascinant ; elle est entièrement dévouée à son lion recueilli tout petit par son père Bull Bullit, fort comme un taureau et pourvu lui aussi d'une crinière léonine.

Elle ne vit que pour cette savane dont elle connaît les moindres recoins, où elle entretient une familiarité avec toutes les bêtes et dans laquelle elle évolue sans peine, entièrement rompue à l'art de la discrétion. Transporté avec le narrateur à travers la brousse dans ces grosses voitures carapacées, on y évolue comme sur un tapis volant et on embrasse d'un coup d'oeil des panoramas dont la seule description imprime durablement des images de poésie où le style à la fois lyrique et journalistique sonne vrai et juste.

La plume vigoureuse de Kessel transporte et fait palpiter ses récits de vibrations exquises. J'ai pris le temps de savourer ce roman comme un vin plein de corps, rond et dont le goût se déploie graduellement en notes chaudes et épicées. Je pense que j'aurai grand plaisir à le relire.
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Dans la première moitié du 20ème siècle, la petite Patricia vit avec ses parents dans une réserve animalière au Kenya. Elle s'est vu confier l'élevage d'un lionceau devenu orphelin dès les premiers jours de sa vie. Elle s'est inévitablement éprise de l'animal. Devenu adulte, il n'a bien sûr plus rien de la charmante peluche qu'elle avait choyée mais conserve pour celle qui lui a donné le biberon un attachement dont on ne sait trop ce qu'il peut augurer s'agissant du comportement d'un grand fauve. Sa mère est horrifiée de la voir partir dans la brousse retrouver l'animal qui ne ferait qu'une bouchée de Patricia. On le serait à moins.

Cet ouvrage est pour Joseph Kessel prétexte à engager le débat sur la complexité de la relation que peut tisser un être humain avec un animal en général, un fauve en particulier. Celui-ci ne reste jamais qu'une proie potentielle pour un prédateur parmi les plus puissants. Ce roman est une approche de la psychologie animale quant aux sentiments que d'aucuns sont tentés de lui prêter, quand d'autres ne voient en l'animal qu'une bête capable d'émotions commandées par l'instinct, servi par les sens en éveil, dont l'odorat est souvent le plus fin chez l'animal, et armé de crocs et griffes redoutables.

S'agissant d'un ouvrage publié en 1958, à une époque où l'écrivain a atteint sa maturité littéraire, on y trouve une étonnante sensibilité du baroudeur qu'a été Joseph Kessel dans l'approche de la psychologie enfantine. Approche aussi de l'étude des moeurs, traditions et coutumes des peuplades autochtones, les Massaïs en particulier. L'accession à l'âge adulte pour un garçon de cette ethnie comportait la mise à l'épreuve de son courage dans l'affrontement avec le lion.

Une lecture en 2021 ne manque pas de mettre au jour des archaïsmes de langage comportant des expressions désormais bannies, faisant référence à des postures de colonisateurs qui prêtent aujourd'hui à la culpabilisation. La promotion de la négritude au rang de culture par Léopold Sédar Senghor et Aimé Césaire ne lui a pas encore ôté sa connotation péjorative dans l'esprit des ex colons.

J'ai beaucoup apprécié cet ouvrage pour l'authenticité qui caractérise son environnement tant humain que du point de vue historique. La description des moeurs, des ambiances et paysages est servie par une écriture concrète, efficace, certes peu métaphorique et qui ne verse pas dans la sensiblerie, laquelle s'avérerait décalée du contexte. le narrateur en séjour au sein de la famille de Patricia a un oeil neuf et impartial sur la situation provoquée par cette relation insolite et inquiétante d'une petite fille avec un grand fauve. L'épilogue rehausse la narration, lui conférant une intensité dramatique quelque peu attendue mais répondant à une certaine logique de ce que l'on connaît des comportements commandés par les culture et tradition, mais aussi par l'instinct.
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