Les recueils des éditions YBY, c'est dix plumes au service d'un thème, dix façons différentes de l'interpréter et tant d'imaginaires qui se déploient. Autant vous prévenir tout de suite que ces nouvelles peuvent se révéler des plus surprenantes.
À chaque fois que je lis un ouvrage édité par YBY, j'ai du mal à préférer une nouvelle aux autres, car chacune d'entre elles apporte une touche de couleur particulière à l'ensemble. Les récits autour des fleurs mettent en valeur leur délicatesse, leurs secrets, leur vanité et leurs chagrins aussi. le bouquet qui se déploie au fil des pages est particulièrement fascinant ; difficile de deviner dans quelle contrée un parfum floral peut nous entraîner.
- La douceur des Ronces (de
Lou Linson, illustration de Lilblueorchid)
Une jolie nouvelle qui porte très bien son nom : la plume de Lou illustre de façon touchante les sentiments du protagoniste, Basil. Aux yeux de ce dernier, les émotions s'incarnent sous la forme de couronnes de fleurs plus ou moins épanouies.
Mais les plus belles, forcément, c'étaient celles de son ami d'enfance, Aoi.
- D'entre les écailles éclot l'espoir (de
Zeph Dangles, illustration de Novellojello)
J'ai beaucoup aimé cette nouvelle à la tonalité douce-amère. La nostalgie se mêle à la tristesse empreinte de colère de lae protagoniste, Théo. Zeph dépeint avec efficacité son quotidien marqué par l'absence de ce qui lui est le plus cher.
Mais comment retrouver de l'espoir quand tout est terni à ce point ?
- le trèfle noir (d'
Hamilcar B., illustration de Mihio)
Je reconnais avoir été moins emporté par cette fleur-là, car si elle constitue un bon prologue, elle laisse malheureusement un peu sur sa faim. Elle aurait gagné à se développer sur un autre format que la nouvelle. Dommage pour Mars et Raz, qui sont des protagonistes intéressants.
- L'éternité pour soi (de Pao, illustration de Su & the Boys)
Le quotidien du duo formé par l'elfe, Johann, et la fée, Ailenna, qui vivent en marge de l'humanité, est bousculé par l'apparition d'une adorable sorcière, Pénélope.
Cette lecture très agréable donne à découvrir une nouvelle facette de la figure de l'elfe, nous dévoilant son émoi avec beaucoup de douceur. Ce genre de personnages fait souffler un vent de renouveau sur le monde parfois un peu guindé de la fantasy.
- le jardin du gladiateur (de
Lati B., illustration de Helsenn)
Ici, nous cheminons aux côtés de Hel, intendant de l'Enfer, qui part à la recherche d'esprits turbulents et hauts en couleur.
Au fil de son enquête dans une ville dépourvue de couleurs, Hel découvre les histoires particulières de ces fantômes un peu trop charmants, issus d'une époque qui n'est en rien semblable à la sienne. Nous remontons avec lui la piste des esprits, interloqué·es par les indices qu'iels sèment dans leur sillage joyeux, teinté d'une légère touche de mélancolie.
Et il est difficile de ne se pas se prendre d'affection pour Hel, sous-fifre malmené par l'administration infernale.
Sans surprises, j'ai beaucoup aimé l'univers de
Lati B, tout en délicatesse, et je suis sorti émerveillé de cette lecture.
- Seize femmes en colère (d'Alces, illustration d'
Anaïs Munier)
Ruth est une femme totalement autonome. Mieux encore, elle est artiste peintre. le seul problème est qu'elle vit à une époque où l'on n'attend guère des femmes qu'elles se montrent indépendantes.
Si la nouvelle précédente nous a ramené·es dans l'Antiquité, nous voici à présent dans l'ère victorienne (XIXe siècle), une époque aussi misogyne et austère que vous vous l'imaginez.
Ici, on ne nous conte pas une jolie histoire et les fleurs peuvent être de dangereuses alliées, tout autant que la sororité.
La plume d'Alces est parfaite pour cette histoire au sous-texte glaçant.
- Echos d'un monde meilleur (de
Naël Legrand, illustration de Neith)
L'auteur nous entraîne vers une bien étrange contrée dont je ne pense, malheureusement, pas avoir saisi toutes les subtilités, parce qu'il est regrettable que notre passage à Adna soit si bref.
À la dernière page, j'avais encore trop de questions, même si j'ai aimé certains fragments aux nuances plaisamment poétiques.
Alas, je ne suis pas le genre de lecteur à apprécier les détails qui restent flous, les intrigues qui m'échappent (raison pour laquelle j'ai également du mal avec les oeuvres de Mélanie Fawzi — nouvelliste fantastique reconnue — par exemple. Il est possible que je n'aie pas autant d'imagination que l'auteur·ice pour compléter les portes ouvertes).
- Magiciel et Technoboy (de C. M. Deiana, illustration par Mistéxpi)
La formule des contraires qui s'attirent malgré les contraintes est bien gérée dans cette nouvelle basée sur de la science-fantasy : l'histoire d'OX et de Gustave est d'une grande douceur, rythmée par leurs pensées bien différentes l'une de l'autre, mais tournant autour d'un même sujet.
Dès le début on sent que les retrouvailles sont inéluctables et c'est ça qui est plaisant.
- L'herbier de Muguette (de
Théodore Koshka, illustration de Feilyn)
L'herbier de Violette, une vieille dame manifestement sans histoires, n'est pas banal...
Le parfum de ses souvenirs partagés avec un amour de jeunesse revient la hanter lorsqu'elle oublie dans une boîte à dons ce trésor complété par leurs soins, les siens et ceux de Muguette.
J'aime vraiment beaucoup la façon qu'a l'auteur d'amener la nostalgie dans la vie d'une grand-mère, de jouer avec le décalage entre ce qu'a été sa vie et l'avènement de la modernité. L'herbier de Muguette fait à présent partie de ces nouvelles que je n'hésiterais pas à relire lorsque j'aurai un petit coup de mou, pour m'attendrir de nouveau devant ses protagonistes adorables et authentiques.
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