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EAN : 9782070438372
288 pages
Gallimard (01/07/2010)
3.54/5   35 notes
Résumé :
Qu'y a-t-il dans le fond de la jarre ? C'est le mystère des vieux pots, ou plutôt du flacon magique : on ne sait ce qu'il contient mais on l'ouvre avec un frisson délicieux. Et qu'en sort-il ? Une vraie cour des miracles, avec ses personnages extravagants, doux marginaux ou folles de Dieu au verbe acéré. Une curieuse nuit de noces, où l'on ne brandit pas le seroual taché de sang. Un oncle fugueur amateur de kif, se transformant la nuit en un auguste Homère. Un pique... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Fès, début des années 50. le narrateur raconte la jeunesse d'un garçon de sept ou huit ans, cadet d'une famille de onze enfants. le père, membre de la confrérie des selliers, parvient à faire vivre chichement mais dignement les siens. Surnommé Namouss (le moustique), le petit dernier découvre le monde qui l'entoure avec l'insouciance de l'enfance.

Du mariage de son frère à l'activisme indépendantiste qui va précéder la fin du protectorat français, Namouss traverse une époque charnière de l'histoire de son pays. Sa vie quotidienne est rythmée par l'école, les jeux dans le quartier avec les copains, les matchs de foot, la découverte du cinéma et l'importance primordiale de la famille.

Abdellatif Laâbi porte un regard plein de tendresse sur sa jeunesse sans jamais tomber dans l'idéalisation. Bien sûr, il y a les charmes sans fin de la médina. Bien sûr, il y a l'image de la mère, Ghita, femme au caractère bien trempé qui l'a profondément marqué. Bien sûr, le trait est peut-être parfois forcé lorsqu'est présentée une galerie de personnages plus extravagants les uns que les autres. Mais l'auteur ne cherche pas à écrire une carte postale pour lecteurs en mal de romantisme « made in Maroc ». Son ton sait se faire critique, notamment lorsque sont abordés le ramadan (un mois d'ennui où la vie s'arrête) ou l'école coranique, qu'il a d'ailleurs très peu fréquenté. le petit garçon se languit souvent, il s'interroge aussi sur ses premiers émois sexuels et se passionne pour les leçons de choses de son maître venu de France, Monsieur Cousin.

Le fond de la jarre porte un regard lucide sur une enfance pas forcément plus difficile qu'une autre, mais que l'auteur se refuse de sacraliser.

La prose est fluide, elle coule sans accroc, embarquant le lecteur avec réalisme dans le Maroc de l'après-guerre. Point de lyrisme pour enjoliver la vie au Maghreb à cette époque. le ton est juste, oscillant entre humour et gravité.

Au final, un très beau texte, pétrit d'intelligence et de sensibilité.


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Tout débute lorsqu'un homme, réuni avec sa famille, devant la télévision et les images de la chute du mur de Berlin, se demande pourquoi son frère est absent, et de fil en aiguille, revisite son enfance.
C'est donc par le biais du jeune « Namouss » (moustique) que l'on découvre Fès, dans un contexte de combat pour l'indépendance, le Maroc, et ses coutumes, à travers le mariage du frère, l'oncle fantasque amateur de kif, les fastes du Ramadan.

La première chose qui frappe dans ce roman étonnant, à tiroirs, si je peux dire, c'est le style particulièrement plaisant, on sent toujours en toile de fond l'humour de l'auteur, et ses nombreuses références culturelles émaillant le récit sont toujours un plaisir pour le lecteur averti, qui sourit de voir un radis comparé à une certaine madeleine, par exemple, ou des nombreux traits d'esprit de l'auteur.

Ceci étant dit, l'on peut désormais s'intéresser à l'histoire même, celle du petit Namouss, le récit d'une enfance à Fès, parmi de nombreux frères et soeurs (dont la plupart son anonymes) et surtout entre deux figures parentales assez étonnantes, Guita et Driss. En effet, entre Guita, la mère fantasque, lunatique, à la personnalité très marquée, prompte aux lamentations, et le père, Driss, un homme calme, bon, les moments à dominante comique sont nombreux. Namouss grandit et découvre l'école, l'éducation, les luttes pour l'indépendance, le monde. Il rêve de voyage, d'aventure, comme n'importe quel enfant. C'est un personnage vivant, entier, attachant. le lecteur est donc ravi de pouvoir lire son histoire.

Ce roman reprend donc la période houleuse de la lutte pour l'indépendance, vue par un enfant, et du côté marocain, ce qui est doublement instructif, étant donné que tout ce que nous savons de ces évènements a été appris au lycée, du côté français. Cependant, l'auteur ne semble pas porter de jugement à l'égard de la France : si plusieurs personnages s'avèrent véritablement en faveur de l'indépendance, Namouss, lui, n'a aucune animosité vis-à-vis des français, et est même fier d'apprendre le français, espérant que son maître ne sera pas inquiété par les troubles.

Lire ce livre, c'est également l'occasion de voyager : le Maroc nous apparait comme si on y était, on croirait presque voir les tajines servis par Guita, les souks et leur atmosphère, les maisons dont les terrasses se jouxtent. Ce livre est une véritable plongée dans la culture marocaine, Namouss nous fait découvrir le Ramadan, le Hammam, le mariage à la marocaine. En somme, un livre que j'ai pris énormément de plaisir à lire, et je remercie très vivement les éditions Gallimard et le forum Livraddict pour cette découverte des plus agréables.

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Novembre 1989 la chute du mur de Berlin défile en images sur un téléviseur dans un foyer à Fès.
Ce foyer c'est celui de l'auteur, qui est en visite dans sa famille alors qu'il a quitté le Maroc suite à plusieurs années d'emprisonnement pour opposition au régime.
Les images qui défilent n'intéressent personne, le sujet est l'aîné de la fratrie Si Mohammed qui oublie de venir voir sa famille « Ni lettre ni tiliphoune ». Ainsi Abdellatif, du point de vue de Namouss « le moustique », se revoit à l'âge de huit ans dans les années cinquante.
Le lecteur va y retrouver une famille vivant à Fès, les parents Driss « un sage » : « Personne n'en veut à un écervelé. Que Dieu lui rende le bon sens et le guide vers le droit chemin. Je vous bénis tous, mes enfants, et lui aussi. » et la mère Ghita, qui pratique le féminisme, comme Monsieur Jourdain la prose, sans le savoir : « On nous tue avec ce voile. Nous autres femmes, on ne nous laisse respirer ni dehors ni dedans. Que Dieu nous vienne en aide. »
Le récit du choix de l'épouse de Si Mohammed, de la nuit de noces et de ses déboires font du poids de la tradition des moments de vie cocasses et hauts en couleur.
C'est un récit qui nous fait revivre l'auteur enfant, sa famille et tout le petit peuple des souks, une ville fourmillante en pleine mutation.
Mais l'auteur évite l'écueil du récit façon « carte postale ».
Du ramadan aux matchs de football en passant par l'école et la vie culturelle, c'est la vie tout simplement qui se déroule devant nos yeux.
Le lecteur conçoit parfaitement comment Abdellatif Laâbi a modelé sa sensibilité de poète et est devenu militant.
Une lecture aux milles saveurs et parfums.
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 05 avril 2017.
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Le Maroc est l'invité d'honneur du Salon du livre de Paris 2017. Pour être honnête, trouver des bouquins écrits par des marocains ou sur le Maroc qui n'abordent ni la condition féminine, ni le racisme, ni le printemps arabe - et qui m'intéressent ! - relève du parcours du combattant. Finalement, j'ai opté pour le fond de la jarre d'Abdellatif Laâbi. La promesse d'une course d'enfant dans le dédale des souks de Fèz sous l'ère coloniale m'inspirait pas mal. Finalement, si j'ai trouvé amusantes les mésaventures du jeune Namouss, je n'ai pas franchement accroché au roman que l'on peut qualifier d'autofiction. En bien des points, l'ambiance et les personnages plutôt joyeux m'ont semblé caricaturaux, j'ai eu souvent du mal à positionner le narrateur (fils de Ghita mais lequel - frère de Namouss - Namouss lui-même ? ). le style de l'auteur est agréable à lire sans être particulièrement original. Globalement, je me suis ennuyée et j'aurais abandonné ma lecture si la contrainte d'un cercle de lecteurs ne m'avait pas incitée à la terminer. Après avoir tourné la dernière page, je me dis que je n'aurais probablement rien perdu à m'arrêter plus tôt.
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Abdellatif Laâbi est un auteur marocain qui a publié son premier recueil de poésie, le soleil se meurt, en 1992. le fond de la jarre est paru en 2002. L'auteur sera distingué par le prix Goncourt de la poésie en 2009. Il vit en région parisienne depuis 1985, après huit ans d'emprisonnement dans son pays (de 1972 à 1980), pour ses activités d'opposant.

Hasard ? Je viens de lire coup sur coup, deux livres qui traitent du même thème.
Après un agréable séjour en Haïti, avec Dany Laferrière dans le charme des après-midi sans fin, me voici au Maroc.

Les deux oeuvres sont des autobiographies. L'une et l'autre donnent la parole à l'enfant qu'a été l'auteur dans le pays de son enfance.

Ici, c'est Namouss, sept/huit ans, qui vit à Fès, dans le quartier pittoresque de la "Source des chevaux", au moment de la chute du mur de Berlin, en 1989, que la télévision marocaine annonce au milieu de l'indifférence familiale parce que "les Marocains ont inventé, eux, l'image de fond, sans lésiner pour autant sur les décibels d'accompagnement".
La famille de Namouss, c'est Ghita, sa mère, Driss, son père ; c'est aussi Si Mohammed, son frère, Zhor, sa soeur.

Les jours s'écoulent, tranquilles, pour le petit garçon, qui, comme tous les habitants de ce quartier, est informé des derniers évènements par "radio Médina", "station non hertzienne mais hautement efficace du bouche-à-oreille". Mais dès le début du roman, le lecteur est mis en condition... Si Mohammed a eu maille à partir avec un lieutenant de l'armée française : les gendarmes sont venus l'arrêter, l'ont roué de coups et mis au cachot. le contexte sociopolitique est posé. le Maroc est soumis au protectorat français (tiens ! en effectuant une recherche sur cette partie de l'histoire marocaine, je m'aperçois que le protectorat français a pris fin en 1956... y aurait-il une anachronie dans ce récit ?).

J'évoquais la tranquillité des jours... C'est vrai qu'il règne dans cette communauté, une "vraie cour des Miracles, avec ses personnages extravagants, doux marginaux ou folles de Dieu" une sorte de languidité qui s'étire, un peu interminablement sur plus de deux cents pages. "Le temps passe et Namouss ne s'en aperçoit pas forcément'", mais la lectrice s'en est rendu compte...

Ce roman est très bien écrit, mais j'en ai trouvé le style un peu trop nonchalant, trop lent.

Mais même si mon avis est mitigé, c'est un livre que je ne regrette pas d'avoir lu !
Lien : http://livresouverts.canalbl..
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
La nuit de noces arriva. [...]
Cela fait deux ou trois heures que les mariés sont dans leur chambre. Pourtant aucun bruit, et surtout aucun cri rassurant ne parvient à nos oreilles dressées. Dans le salon où nous sommes tous réunis, l'attente devient insupportable.
Ghita ne tient plus enplace.
" Ces gosses, dit-elle, qu'est-ce qu'ils font? Ils jouent à saute-mouton ou quoi?"
[..] La petite a oublié de mettre un coussin sous son bassin come je lui avais recommandé. Quant au marié, il lorgne la chose mais n'ose pas l'entreprendre.
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Mais son père semble n'avoir rien vu, ou, est-ce possible, ne s'en formaliserait-il pas ? Alors, mû par la morale qu'on lui a inculqué et qui ordonne qu'un homme veille en toute circonstance sur l'honneur de ses femmes, Namouss croit bien faire en rappelant les règles de la bienséance. Il se dresse sur ses ergots et lance à Ghita :
"Nous sommes dehors, Lalla, couvre toi le visage."
Cette sortie amuse plutôt Ghita, qui lui rétorque :
"Tu es devenu mon mari ou quoi ? Occupe-toi de ta morve ! Il ne manquait plus que ça. Un bambin de la taille d'un pois chiche et qui veut me gouverner !"
Et, dans un geste de défi, , elle ôte le capuchon de sa jellaba et montre sa tête nue, sauf du foulard qui retient ses cheveux.
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On nous tue avec ce voile. Nous autres femmes, on ne nous laisse pas respirer ni dehors ni dedans.
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Si les Européens ont la manie de la musique de fond, les Marocains ont inventé, eux, l'image de fond, sans lésiner pour autant sur les décibels d'accompagnement. La cacophonie semble être chez nous un des éléments constitutifs de la joie des retrouvailles.
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On nous tue avec ce voile. Nous autres femmes, on ne nous laisse pas respirer ni dehors ni dedans.
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Videos de Abdellatif Laâbi (18) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Abdellatif Laâbi
Avec douze écrivains de l'Anthologie Avec Anne le Pape (violon) & Johanne Mathaly (violoncelle) Avec Anna Ayanoglou, Jean d'Amérique, Camille Bloomfield & Maïss Alrim Karfou, Cyril Dion, Pierre Guénard, Lisette Lombé, Antoine Mouton, Arthur Navellou, Suzanne Rault-Balet, Jacques Rebotier, Stéphanie Vovor, Laurence Vielle.
Cette anthologie du Printemps des Poètes 2023 proposent 111 poètes contemporains et des textes pour la plupart inédits. La plus jeune a 20 ans à peine, le plus âgé était centenaire. Tous partagent notre quotidien autour de la thématique corrosive des frontières. Leurs écrits sont d'une diversité et d'une richesse stimulantes. Ils offrent un large panorama de la poésie de notre époque. Avec notamment des textes de Dominique Ané, Olivier Barbarant, Rim Battal, Tahar Ben Jelloun, Zéno Bianu, William Cliff, Cécile Coulon, Charlélie Couture, Jean D'amérique, Michel Deguy, Pauline Delabroy-Allard, Guy Goffette, Michelle Grangaud, Simon Johannin, Charles Juliet, Abdellatif Laâbi, Hervé le Tellier, Jean Portante, Jacques Roubaud, Eugène Savitzkaya, Laura Vazquez, Jean-Pierre Verheggen, Antoine Wauters…
Mesure du temps La fenêtre qui donne sur les quais n'arrête pas le cours de l'eau pas plus que la lumière n'arrête la main qui ferme les rideaux Tout juste si parfois du mur un peu de plâtre se détache un pétale touche le guéridon Il arrive aussi qu'un homme laisse tomber son corps sans réveiller personne Guy Goffette – Ces mots traversent les frontières, 111 poètes d'aujourd'hui
Lumière par Iris Feix, son par Lenny Szpira
+ Lire la suite
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