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Aurélie Loiseleur (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070399550
352 pages
Gallimard (02/04/2011)
3.77/5   20 notes
Résumé :
Raphaël, second roman d’amour de Lamartine après Graziella (dont le succès ne se dément pas) garde des zones d’intensité et de mystère qui refont vibrer une grande voix du Romantisme. Raphaël est le nom que Lamartine donne, un peu plus de trente ans après, à l’amant qu’il a été. Pour accroître la confusion entre vérité et fiction, Julie Charles, héroïne du « Lac » qui fut le plus célèbre poème du XIXe siècle français, garde son prénom. Tissu de mensonges, son récit ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Roman poétique évoquant l'amour divin comparé tout au long des pages à l'amour terrestre, au plus grand avantage du premier.

Julie et Raphaël ont choisi de s'unir dans l'amour spirituel, chacun étant pour l'autre le reflet du divin.

On peut lire un peu partout que le style lamartinien est démodé, désuet...

Le style d'Alphonse de Lamartine est tout simplement délicieux, atteignant par instants, la beauté et à d'autres, le sublime.

Que dire en effet du balancement lancinant, de la construction hypnotique de la phrase suivante :

"ELLE ne me parlait pas, JE ne lui disais rien ; MAIS JE SENTAIS tout le poids de son corps suspendu avec confiance à mon bras, MAIS JE SENTAIS ses deux mains froides entourer la mienne, ET de temps en temps UNE involontaire étreinte, UNE haleine plus chaude sur mes doigts, ME faisaient comprendre QU'ELLE avait approché ses lèvres de mes mains pour les réchauffer."

On peut lire un peu partout que les deux héros geignent, s'évanouissent, pleurent, tombent à genoux. Qu'ils sont gnangnans, ridicules, outrés et je ne sais quoi encore.

Pour dire cela, il faut méconnaître le contenu chrétien de l'oeuvre. Et l'on pense aux saints, aux saintes, aux mystiques, qui, le visage baigné de larmes, les mains levées au ciel, manifestent leurs transports d'union extatique avec la divinité : sainte Thérèse d'Avila, Marguerite Porete, béguine née en 1250 et brûlée en 1310 en Place de Grève, qui écrivit "Le miroir des simples âmes anéanties et qui seulement demeurent en vouloir et désir d'amour".

Je ne crois pas que l'oeuvre de la béguine ait été accessible à la fin du 18 ème siècle et au début du 19 ème et que Lamartine en ait eu connaissance. Mais il était familier de la mystique rhénane, lui qui écrivit dans "Raphaël" :

"Enfin, je voyais, je sentais, j'adorais tout, et Dieu lui-même, à travers cette divinité de ma contemplation. Si la vie durait dans un pareil état de l'âme, la nature s'arrêterait, le sang cesserait de circuler, le coeur oublierait de battre, ou plutôt il n'y aurait plus ni mouvement, ni ralentissement, ni lassitude, ni précipitation, ni mort, ni vie dans nos sens ; il n'y aurait plus qu'un éternelle et vivante absorption de tout notre être dans un autre être. Cet état doit ressembler à l'état de l'âme à la fois ANÉANTIE et VIVANTE en Dieu".

L'expression de l'amour sacré est un genre littéraire prisé des romantiques, ils y excellent.

Que Flaubert, son cadet de trente ans n'ait pas trouvé à son goût les pamoisons lamartiniennes, rien d'étonnant à cela. Mais laissons là Flaubert qui n'y vit, ou feignit de n'y voir qu'une bluette. Les deux auteurs, proches dans le temps, se trouvent de part et d'autre d'une ligne de faille infranchissable.
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Le destin, très ironique et cruel, offre à Lamartine les plus propices évènements à un drame romantique.

Raphaël (qui est en fait Lamartine) vagabonde près de Chambéry dans un hôtel au bord d'un lac où il aperçoit une femme sublime et discrète.
Il n'ose l'approcher, mais l'admire déjà.
Ce n'est pas seulement son physique qu'il admire, son aura seule l'attire, un mystère plane autour de cette femme.
Bien qu'il ne soit pas timide, un respect presque sacré pour l'intimité féminine l'empêche de communiquer ouvertement avec elle.

Leur rencontre, orchestrée par le destin, se produit lors d'une tempête où Raphaël sauve héroïquement la dame.
Cette proximité forcée rompt les barrières initiales, ouvrant la voie à une intimité progressive, bien qu'elle reste entourée de mystère et de retenue, sans jamais relever de la niaiserie pour autant.

Les échanges entre Raphaël et Julie, tout d'abord réservés, deviennent plus profonds lors d'une seconde rencontre fortuite.
Ils se confient enfin. chacun se demande pourquoi l'autre passe autant de temps à errer sur ce Lac en pleine autonome à cet âge (ils ont chacun près de 30 ans). En réalité, les deux personnes errent sans but, Raphaël, sans être dépressif, se complait dans la solitude, la nature, il pourrait passer pour misanthrope mais ne l'est pas. Julie a un peu le même caractère, mais sa vie personnelle aggrave sa situation. Orpheline, recueillie par un vieil homme très cultivé qui a pourvu seul à son éducation, elle a baigné dans une éducation très philosophique, profondément athée. Ses pensées philosophiques la poussent à se reconnecter à la nature mais contribuent aussi à sa solitude morbide, elle semble ne pas vivre dans le présent, se posant sans doute trop de questions existentielles. C'est surtout la mort qui l'obsède. Elle se sait atteinte d'une tuberculose qui devrait bientôt la condamner définitivement et ne recherche plus rien. Elle semble attendre avec enthousiasme et impatience la mort dans le berceau de la nature.

L'acte héroïque de Raphaël illumine brièvement l'existence sombre de Julie. Elle développe un engouement progressif pour Raphaël qui est autant son sauveur au sens physique que moral, son état de santé s'améliore même progressivement par sa présence.
Elle est partagée entre une résistance ferme à tout attachement envers lui et cette sensation incontrôlable du romantisme, qui prendra brièvement le dessus pour former un amour réciproque et soudainement fusionnel.
Raphaël aime son esprit fin, ses paroles rares et profondes, jusqu'a même préférer le silence entre eux aux paroles.
Julie fait pourtant tout pour le dissuader d'un amour nocif, en ce qu'elle serait trop malade pour établir une relation. Sûr de lui, Raphaël persiste et sait qu'il a trouvé un être rare et sensible.
Julie, qui est autant étonnée que charmée de la persévérance de Raphaël, s'abandonne totalement à lui, elle qui n'a plus rien à perdre.
Leur extase commune est ponctuée de mélancolies éphémères provoquées par Julie, craignant une souffrance inutile pour Raphaël.
Le voyage à Chambéry est longuement prolongée par les deux personnages, où Lamartine excelle dans l'art de romancer le moindre détail de la nature, de leurs promenades variées.

Leur séparation temporaire à Paris intensifie la mélancolie de Julie. Elle dissimule son déclin de santé à Raphaël, augmentant l'intensité dramatique du récit. La proximité de la mort, constante et insidieuse, imprègne chaque page du roman, accentuant la profondeur et la sincérité de ce roman presque entièrement autobiographique De Lamartine.
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Commençons par ce qui confère à cet ouvrage une lourdeur inclinant - à tort - à le laisser choir rapidement : l'expression très répétitive d'un amour pur, éthéré, absolu, d'une femme dont la perfection renvoie ipso facto à l'existence de Dieu. le souci d'en exclure le plaisir charnel est tel que le héros "baise convulsivement" non pas son aimée mais la porte de son immeuble (p. 148), et "colle sa bouche" sur... le tapis que foulent ses charmants petits pieds (p. 166). Comment s'émouvoir de scènes aussi grotesques ? Il faut croire que des sociétés d'autrefois ou d'ailleurs, approuvées de Dieu, préfèrent que l'on embrasse des murs, des portes ou des tapis plutôt que des êtres humains, pourvu que la réalité demeurât cachée derrière. Heureusement pour le vrai Lamartine, il semble avéré qu'il n'était pas niais au point de manquer si pitoyablement sa cible.
Heureusement aussi, l'auteur du fameux "Un seul être vous manque et tout est dépeuplé", libéré de l'obsession de la bienséance, savait à merveille traduire les formidables paradoxes de l'obsession amoureuse, magnifiant en nos existences modestes et fugaces le sentiment de l'immensité et de l'infini. Pour seul exemple tiré de son transparent "Raphaël", cette évocation du moment où il guettait chaque soir la fenêtre de l'appartement parisien de Julie Charles, attendant impatiemment le signal lumineux de la délivrance : "Il n'y avait plus d'autres clartés sur la terre, plus d'autre étoile dans le firmament, que cette petite fenêtre ronde semblable à un oeil ouvert sur moi pour me chercher dans l'ombre, et vers laquelle mes yeux, ma pensée, mon âme, étaient sans cesse et uniquement tendus. Ô puissance incompréhensible de cette nature infinie de l'homme qui peut remplir les espaces de mille univers et les trouver encore trop étroits pour son universalité ! et qui peut se concentrer dans un seul petit point lumineux brillant à travers la brume d'un fleuve, parmi l'océan de feux d'une ville immense, et trouver son infini de désirs, de sentiments, d'intelligence et d'amour dans cette seule étincelle qui ne rivaliserait qu'à peine avec le ver luisant d'une nuit d'été !" (p. 184).
Et puis, quand bien même l'objet n'en serait ni pur ni parfait, reste la puissance évocatrice, intimidante, éternelle, du désarroi que provoque la perte d'un être que l'on a aimé au point d'en aimer toutes choses.
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Livre nullissime au possible, je mets deux étoiles parce que je suis sympa et parce que je ne veux pas choquer la sensibilité de personnages qui pleurent pour un coup de vent. Les scènes les plus ridicules se succèdent, ça braille pour rien, ça fait des évanouissements pour deux vagues de trop sur un petit lac de Savoie. Les Méditations étaient déjà une littérature d'infirme, mais au moins il y avait du rythme et un semblant de sincérité. Là, on sent Lamartine sur la fin, on sent l'humiliation de 48 aux élections, on sent qu'il avait besoin de ressasser une fois de trop ce qu'il aurait dû arrêter de ressasser en mettant un point final au "Lac". Même l'éditrice semble le reconnaitre implicitement dans sa préface, et même Flaubert le dit: "c'est un esprit eunuque, la couille lui manque, il n'a jamais pissé que de l'eau claire."
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Qui lit Lamartine aujourd'hui.Je l 'ai découvert grâce à Youtube et à Henri Guillemin en particulier, un homme intéressant et au delà un personnage politique important pour la France(J' ai lu quelque part mais je peux me tromper qu 'il est un des homme à l 'origine du suffrage universel).Il est bien oublié maintenant et c est dommage. Raphael est son autobiographie romancé, un amour platonique contrarié dans sa jeunesse ça peut prêter à sourire mais la prose écrite est belle et ça se lit très bien, je pense lire sa poésie et Graziella pour me faire un autre avis.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Enfin, je voyais, je sentais, j'adorais tout, et Dieu lui-même, à travers cette divinité de ma contemplation. Si la vie durait dans un pareil état de l'âme, la nature s'arrêterait, le sang cesserait de circuler, le coeur oublierait de battre, ou plutôt il n'y aurait plus ni mouvement, ni ralentissement, ni lassitude, ni précipitation, ni mort, ni vie dans nos sens ; il n'y aurait plus qu'un éternelle et vivante absorption de tout notre être dans un autre être. Cet état doit ressembler à l'état de l'âme à la fois ANÉANTIE et VIVANTE en Dieu.
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Combien de fois je la priais, comme on prie un être d'une autre nature, de me laver dans une de ses larmes, de me brûler dans une de ses flammes, de m'aspirer dans une de ses respirations, pour qu'il ne restât plus rien de moi dans moi-même que l'eau purifiante dont elle m'aurait lavé, que le feu celeste dont elle m'aurait consumé, que le souffle nouveau dont elle aurait animé mon nouvel être !
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- Relevez-vous, me dit-elle d'une voix grave, mais sans colère ; n'adorez pas une poussière mille fois plus poussière que celle où vous souillez vos cheveux, et qui s'envolera au premier souffle d'automne. Ne vous trompez pas sur la pauvre créature qui est devant vos yeux. Elle n'est que l'ombre de la jeunesse, l'ombre de la beauté, l'ombre de l'amour.
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Nous laissions à chacun de ces sites un de nos soupirs, un de nos enthousiasmes, une de nos bénédictions. (...) Nous leur demandions de nous rendre tout cela un jour, avec la parcelle d'existence que nous y laissions (...) toutes ces émanations de nous-mêmes dans ce dépôt fidèle de l'éternité où tout se retrouve, même le souffle qu'on vient de respirer et la minute qu'on croit avoir perdue.
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Mon corps n'éprouvait plus sa matérialité. Je ne croyais plus au temps, ni à l'espace, ni à la mort : tant la vie de l'amour qui venait de jaillir en moi me donnait le sentiment de l'éternité.
(...)
"... moi, madame, lui dis-je en balbutiant, je voudrais ne savoir jamais rien de tout ce qui fait de vous un être vivant de notre vie, attaché par les mêmes liens que nous à ce triste monde (...)
- Oh ! ne vous trompez pas ainsi (...). Ne voyez en moi que ce que je suis : une pauvre femme (...)"
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