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EAN : 9782330048457
231 pages
Actes Sud (11/03/2015)
4.67/5   3 notes
Résumé :
Le temps d'une visite au musée, rêvant devant les toiles de Rembrandt, Botticelli ou Delacroix, Henri Lewi se demande s'il est nécessaire d'être docte pour aller à la rencontre d'un tableau, ou s'il n'existe pas au contraire un charme et un bienfait du non-savoir... Le visiteur est bien conscient que le commentaire même savant des oeuvres change au fil du temps, que le regard le plus juste, à toute époque, est le plus personnel. A travers ce voyage parcourant le tem... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Commandé le 6 décembre 2017- Librairie Caractères à Issy-les-Moulineaux- Relecture partielle en juillet 2021

Une relecture que je me félicite d'avoir faite… car à cette seconde lecture, je découvre d'autres pistes de réflexion…et une infinie pluralité de points de vue…

Essai des plus passionnants de « notre « regard sur les oeuvres d'art….

L'auteur nous prend par la main pour visiter certaines oeuvres du Louvre qui lui parlent plus profondément : Poussin, Léonard de Vinci, Rembrandt, Chardin….Hubert Robert, etc.

Un ouvrage lu il y déjà près de quatre ans… que je relis en ce mois de juillet 2021, en piochant au hasard… pour savourer les multiples questionnements, réflexions sur « comment regarder un tableau », « Comment apprécier une oeuvre d'art ? » « Faut-il une formation, une éducation particulière, lire des choses savantes, ou se laisser porter par l'étonnement spontané, le mystère de la création « ? Autant de questions sans aucune réponse vraiment satisfaisante et définitive.. !

« Je ne suis pas sûr que l'enfance qu'émerveille la peinture soit vocation muette au langage. Ainsi mon regard à moi, quand j'avais neuf ans et que ma mère m'achetait des livres de reproductions. le tableau se donnait d'un seul coup, comme un mot d'esprit qui fait rire avant même qu'on ait réfléchi. Je ne savais pas qui étaient Dürer et Vinci, je ne lisais pas le texte du livre. Je ne cherchais jamais à savoir qui était tel personnage, ce qu'était exactement le mythe représenté. Je me contentais de l'étonnement que j'éprouvais devant chaque tableau. Sans lire la biographie des peintres, je découvrais des voix. Ce regard, rétrospectivement, me paraît juste, aussi juste que celui des savants. (p. 185)”

Texte à la fois assez savant et vraiment jubilatoire…Rapprochements intéressants entre Littérature et beaux-Arts, et plus spécialement la peinture… sans omettre les analyses et observations d'écrivains sur l'Art, dont une part, bien évidemment, non négligeable sur Proust

Henri Lewi parle de ses goûts, attirances, coups de coeur envers tel ou tel artiste, de son enfance à l'âge adulte…dont un engouement non démenti pour les sanguines et grands tableaux d'Hubert Robert…parmi tant
d'autres !...

Un essai ouvert qui n'apporte aucune réponse définitive… L'auteur propose de nombreuses alternatives parfois contradictoires, réunissant lectures savantes ou non sur les oeuvres et spontanéïté, sans préparation…pour vraiment « regarder un tableau ».
La grande qualité, à mon sens, de cet essai est de sensibiliser chacun, pour exercer au mieux sa perception avec un regard à la fois plus spontané, plus attentif, en s'informant, lisant aussi à l'occasion comme les artistes eux-mêmes l'ont toujours fait, tout en restant dans l'attitude merveilleuse de l'enfant ou dans un bel état méditatif, n'ayant besoin d'aucun discours ; une sorte de balancement continu entre « intellectualisation » et « élan sensible », spontané d'avant les mots !! :

« Quel est l'effet d'une cathédrale de Monet, d'un compotier de Cézanne ? Comment on peut le penser dans la salle des Nymphéas, le tableau naît d'une attitude méditative et veut susciter la même chez son spectateur ; cette attitude méditative se voulait étrangère à tout discours. La peinture de grand genre faisait appel continuellement au langage ; l'effet produit était peut-être d'abord un effet des mots (en particulier du titre), elle appelait les mots ; mais que dire des Coquelicots de Monet, a fortiori des taches noires de Soulages ? (p. 213)

Essai passionnant, que je reprendrai certainement pour relire tel ou tel passage… Un ouvrage à lire avec attention, mais pas forcément d'un bloc….Ce qui manque ce sont quelques reproductions des tableaux évoqués, commentés… j'ai, pour apprécier le texte, été chercher les toiles pour revisualiser les « oeuvres ». Essai enrichi d'une bibliographie très variée et attractive….

« L'effet produit par un tableau, sans doute, condense la complexité de tous ses aspects. Il découle toujours à la fois du sensible et de l'idée (…)»

"Cette histoire peut faire sentir à quel point il est difficile de parler mais aussi de ne pas parler de peinture : pourquoi donc, ayant atteint la jouissance picturale, ou un étonnement qui pourrait durer indéfiniment, pourquoi donc faut-il absolument dire des choses sur un tableau ? S'agissant de Daniel Arasse, la raison essentielle, sans doute, est dans l'amitié qu'ont les professeurs pour l'humanité ordinaire: la parole est celle de l'initié qui fera entrer l'amateur dans le temple de l'oeuvre. (p. 136)"
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Un essai très intéressant, au titre emprunté à une nouvelle de Vladimir Nabokov, en forme de promenade/réflexion, au musée du Louvre. Voir et savoir regarder les oeuvres, oui mais lesquelles, et surtout comment ? Quelle relation établir avec le tableau ? Quelle distance garder avec le commentaire savant ? Qu'est-ce qu'un chef d'oeuvre ? Autant de questions que nous nous posons tous, évidemment, et qui sont abordées dans ces pages.

Pas d'exercice obligé d'admiration – rassurez-vous – pour Henri Lewi, dont on apprend quand même un peu à discerner les préférences. Faire apparaître le poids de l'appareil à penser les oeuvres, telle est l'une des intentions. Certaines parmi les grandes oeuvres emblématiques du Louvre s'y prêtent : Delacroix (« La Mort de Sardanapale », 1827), Léonard de Vinci (« La Vierge à l'enfant avec Sainte Anne », commencée vers 1500 et terminée dix neuf ans plus tard !), Poussin (« La Peste d'Asdod », 1630-1631) et Rembrandt (« Bethsabée au bain tenant la lettre de David », 1654), accompagnent parfaitement les réflexions de l'auteur sur la question – mais beaucoup d'autres encore sont examinées. La visite, sur ce plan là, enrichit l'esprit et ne peut décevoir.

Réflexion très personnelle, plutôt lucide, axée sur le rôle tenu par le verbe et la place dévorante prise par les commentaires pléthoriques et savants dans l'élaboration et la construction du discours sur l'art, l'esthétique et la création artistique, façonnant notre connaissance et parfois nos vues dans le domaine de la peinture en particulier. Face à cet appareil intellectuel envahissant, au détriment des oeuvres selon l'auteur, quelle place reste-t-il pour la subjectivité résiduelle d'un non initié ? C'est le véritable sujet, au fond, de cet essai qui semble vouloir ranimer discrètement les feux d'une plus subtile et mystérieuse rencontre entre l'amateur sans bagage et l'oeuvre d'art. Est-ce possible ?

« On peut se demander, s'il n'y a pas dans l'étude universitaire d'une oeuvre, littéraire ou plastique, de quoi entraver son effet naturel ? »

Difficile d'ignorer ce savoir, mis en place par l'institution muséale elle-même [autour des cartels (pas toujours à jour), descriptifs et autres brochures, mais aussi expositions, études et manuels, catalogues fournis au public] et qu'appuie la recherche scientifique, avec des moyens de plus en plus étendus et sophistiqués (cf. l'expo sur la restauration de la Sainte Anne de Léonard, en 2012, largement évoquée), produisant un discours venu principalement de spécialistes en sciences humaines (histoire, histoire de l'art et sociologie etc.). Quelle est sa légitimité, sa nécessité même, et jusqu'où l'admettre dans l'interprétation des oeuvres, compte tenu des incertitudes irréductibles pesant sur l'acte créateur ? C'est en somme cet édifice que tente d'ébranler Henri Lewi, au fil de ses haltes picturales pas désagréables du tout, même si un tantinet raisonneuses, parfois ; ajoutant lui-même inévitablement au passage, il faut bien le dire, du commentaire aux commentaires : ainsi du rapprochement fort réussi entre Madame de la Fayette et Nicolas Poussin au Grand Siècle. L'agrégé de lettres classiques maniant la formule latine n'est jamais loin. Sic transit gloria mundi!

La visite s'effectue au pas de charge et sans trop de poses. Ailes Denon, Sully et Richelieu… enfilades de galeries, escaliers roulants, ascenseurs, parcours au gré des « appels » lancés par les tableaux ou par les peintres :

Les nombreuses oeuvres devant lesquelles il s'arrête sont l'occasion pour les besoins de sa démonstration d'un inventaire critique des diverses sources écrites produites à leur sujet (on peut d'ailleurs discuter du choix retenu par l'auteur) – quelques références citées datées des années 60/70 permettent de mesurer l'ampleur de la variabilité et de la fragilité d'hypothétiques interprétations, ainsi que d'en relativiser de plus contemporaines (Arasse se trouve épinglé). Force est de constater que cette luxuriance verbale ressemble souvent à un excès verbeux (fumeux verbiage) qui se délecte de lui-même. c'est convaincant.

« Faut-il absolument parler de peinture ? » (p. 185)
… Quand tout porte à se taire, (c'est moi qui ajoute).

Saturation d'écrits et commentaires faisant en effet écran à l'oeuvre d'art. Si l'on suit volontiers Henri Lewi dans sa quête de "l'effet naturel" d'une oeuvre, il reste quelques doutes sur l'aléa de sa survenue. La néophyte que je suis et entends rester préfèrera toujours en matière d'ecrits la surabondance à l'indigence. Sur le chemin des arts la rencontre (rare) avec l'oeuvre « au naturel » peut bien s'accorder avec une connaissance périphérique (encombrante) dont le contact naïf éperonne aussi certaines curiosités. Une belle lecture.
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Agrégé de lettres classiques, traducteur de l'italien et du yiddish, connu également pour ses essais, en particulier celui sur le grand auteur Isaac B. Singer, Henri Lewi explore ici les chemins de la transmission du savoir et de la culture. Faut-il nécessairement être docte et cultivé pour apprécier une oeuvre d'art, alors qu'au fil du temps, change la manière de recevoir ladite oeuvre ? Paradoxalement, le non-savoir n'est-il pas préférable à la connaissance intellectuelle pour découvrir un tableau, une sculpture, un poème, s'abandonner à la beauté d'un texte, à la grâce d'une statue, à l'éblouissement des couleurs ? Tout au long d'un voyage original, parcourant le temps et les formes, l'auteur essaie de répondre à cette interrogation récurrente et controversée, d'une actualité brûlante à une époque où se pose plus que jamais la question de la démocratisation de la culture, où les musées se multiplient et n'ont jamais été aussi fréquentés. D'une érudition immense mais sans pédanterie aucune, l'auteur évoque ses visites dans ces lieux mythiques, ses rêveries devant des toiles aussi diverses que celles de Poussin, Rembrandt ou Botticelli, démontrant que le plaisir de la découverte est indépendant de l'ordre social, que le conférencier ne peut remplacer l'élan personnel, que l'ineffable et la grâce émanant d'un tableau nous touchent sans qu'il soit nécessaire de connaître son histoire, ni l'intention du créateur. Prenant ses distances avec l'académisme et la conception rigide de la culture, ce petit ouvrage confirme que la vérité dans l'art est une utopie : en réalité, l'amateur a simplement besoin, non de cohérence, mais d'émotion, d'impertinence et de spontanéité : les musées eux-mêmes ne sont-ils pas multiples, changeants et vivants, à l'image du Louvre, sans cesse renouvelé ?

Par Joëlle Elmyre Doussot, critique parue dans L'Objet d'Art 516, octobre 2015
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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
C'est vrai qu'il y a dans tous les tableaux de Poussin, l'un après l'autre, une ambition absolue ; c'est celle du sacrement, au moins de la cérémonie. "Les Bergers d'Arcadie", "La Peste d'Asdod", "Apollon amoureux de Daphné" : chaque tableau est un acte capital qui veut introduire dans le monde une nouveauté, un renouvellement. Il faut voir comment le peintre se donne tout le loisir qu'il lui faut ; met au point l'ensemble et le détail. Choisit son sujet, fait des esquisses, prend des notes, construit même des maquettes. Contrairement en son temps aux peintres de son importance il n'a pas d'assistants ; sa solitude est celle de l'exil, mais aussi du grand oeuvre ; du mystère dans lequel naissent les visions profondes. C'est l'ancêtre de Duchamp, du "Grand Verre" ; non pas de Faraday ni de Marie Curie. (p. 155)
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Je ne suis pas sûr que l'enfance qu'émerveille la peinture soit vocation muette au langage. Ainsi mon regard à moi, quand j'avais neuf ans et que ma mère m'achetait des livres de reproductions. Le tableau se donnait d'un seul coup, comme un mot d'esprit qui fait rire avant même qu'on ait réfléchi. Je ne savais pas qui étaient Dürer et Vinci, je ne lisais pas le texte du livre. Je ne cherchais jamais à savoir qui était tel personnage, ce qu'était exactement le mythe représenté. Je me contentais de l'étonnement que j'éprouvais devant chaque tableau. Sans lire la biographie des peintres, je découvrais des voix. Ce regard, rétrospectivement, me paraît juste, aussi juste que celui des savants. (p. 185)
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Qu'est-ce donc qui est si important dans un tableau, qu'on veuille le posséder, par la jouissance ou la connaissance ? Il est remarquable que Pline l'Ancien, dans son -Histoire naturelle- , blâme les riches Romains d'avoir chez eux des fresques qu'ils seront seuls à voir; le tableau, dit-il, tabula, est plus juste, il circule et réjouit tout le monde, au moins virtuellement; il y a dans l'essence de la peinture de n'appartenir à personne, une liberté; c'est pourquoi il y a des femmes peintres, mais non des esclaves; un mystère aussi, une capacité infinie de métamorphose, d'un regardeur à l'autre, d'une époque à l'autre.
(p. 43)
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Enfant, je me perdais déjà dans les salles aux parquets bien cirés du musée de Valence; les sanguines d'Hubert Robert en étaient le fleuron. (...)
Mais les grands tableaux d'Hubert Robert ont la clarté du technicolor; ils ouvrent pourtant au rêve autant que les Prisons de Piranèse, que Venise ou Varsovie dans les oeuvres des Canaletto. Hubert Robert n'était pas, sans doute, un aussi grand génie que Léonard; mais quelle importance ? (p. 52)
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On peut pourtant aimer l'art contemporain; ainsi l'enfant que j'étais que charmaient les reproductions de l'Oeil, tableaux d'Ubacs, statues de Chadwick ou de Laurens; dans les machines inutiles de Tinguely, je retrouvais le plaisir du Meccano; sans doute n'aurais-je pas passé des années devant; mais que signifie le temps passé devant un tableau ? (p. 105)
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