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EAN : 9782213636412
202 pages
Fayard (01/10/2008)
3.33/5   3 notes
Résumé :
Quand je lève les yeux au-dessus de ma feuille de papier, par la fenêtre au-dessus de ma table de travail, je vois tout. Il ne se passe d'ailleurs pas grand-chose sur la place de mon village. Mais enfin, les gens qui passent, le voisin sur son tracteur, les amoureux sur le banc de l'abribus, cela me distrait. Où en étais-je ? Il arrive que ce que j'écrivais et ce que j'aperçois se mêlent et vous allez voir que cela peut me mener loin. Autant vous l'avouer tout de su... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
N°339– Mai 2009
OÙ EN ÉTAIS-JE ? – Philippe BEAUSSANT - FAYARD.

Quand on fait la présentation d'un roman, il est d'usage d'en dévoiler [un peu] l'intrigue. Ici ce n'est pas facile puisqu'il l'y en a pas, enfin presque.

L'auteur raconte certes une histoire, regarde par sa fenêtre, dit ce qu'il voit, écoute son imagination et laisse aller sa main sur la feuille blanche. C'est pour lui l'occasion de prendre son lecteur à témoin pour lui expliquer sa démarche d'écriture, le départ de l'inspiration qu'il faut écouter et qui intervient quand on s'y attend le moins, comment tout cela naît, si cela se fait tout seul ou non [« Voilà, cher lecteur, comment peut naître un roman, une phrase suffit »], le plaisir qu'il éprouve à cet exercice, avec le choix gourmand qu'il fait des mots, justes et sonnant bien, de l'architecture des phrases, pour que le témoin des scènes rapportées les voit et devienne au moins un spectateur et peut-être son complice, parce que notre langue française est belle et qu'il faut l'utiliser correctement... Il indique que tout cela n'est pas quelque chose de facile, qu'écrire c'est un peu se soumettre à cette dictature des mots [qu'on ne s'y trompe pas, il est bien ce « tâcheron de la plume »], parce qu'il faut être disponible, attentif à tout, capable de se laisser entraîner dans d'improbables contrées à l'invite de son imagination.

Il rend compte de ce qu'il voit, les lieux et les personnages, les sensations, mais aussitôt, sa culture, son érudition prennent en quelque sorte, le relais malgré lui, lui soufflent d'autres situations, d'autres figures venues d'autres romans ou de tableaux. Alors, puisqu'il a décidé de se laisser embarqué dans une folle équipée, il mélange tout, les paysages, les époques, et convie le lecteur dans sa démarche intime, et un geste banal devient aussitôt un invitation au voyage dans le temps, dans l'espace!

Les hommes et les femmes du quotidien, ceux qu'il voit de cette fenêtre, qui ont les deux pieds sur cette terre d'aujourd'hui, et même parfois dedans, qui s'agitent et qui parlent à leur manière, il les transposent sous Louis XIV, invente des dialogues précieux, une transaction un peu surréaliste, une histoire de fontaine et de roi qui veut, seul, en boire l'eau, y glisse les fantasmes que peut susciter une jolie voisine ou se fait le témoin privilégié de la tournée journalière de la boulangère ou de l'arrivée, plus impromptue et fugace, de l'héritier d'un immeuble vacant depuis longtemps... Bref, il met tout ce petit monde en scène, en perspective, comme on dit, il lui insuffle la vie, lui prête des sentiments, des défauts, des qualités ou plus exactement le laisse vivre, former des projets, parce que, maintenant, tous sont autonomes et échappent complètement à leur créateur qui se contente de les regarder... M. Mitard, M. Boussard, Mlle Leroux, habitants de ce petit village, deviennent des acteurs de cette fiction intime qui est partie d'un écrivain qui voudrait bien qu'on le laisse tranquille quand il se met au travail, qui est assis face à sa fenêtre, devant sa feuille blanche, dans ce petit village de nulle part, avec devant lui quatre maisons et , plus loin, la route de Provins, de Château-Thierry...

Alors oui, parfois il y revient dans ce décor, fait un peu le point, comme lorsqu'on sort d'un rêve et qu'on tente de faire la part de la réalité et du songe et qu'il se demande si tout cela est vrai. Mais c'est qu'il n'est plus seul comme devant sa feuille, il a avec lui son lecteur, parce que, bien sûr ce dernier, même s'il a été un peu décontenancé au départ, est devenu au fil des pages le témoin attentif de tout cela et s'est engagé dans ce voyage. Parfois, cette pause entraîne l'auteur plus loin qu'il n'aurait voulu et un visage de femme croisé au hasard de la vie est à nouveau l'invite d'une création, parce que les yeux des femmes ont ce pouvoir de faire rêver. Les choses sont bien plus complexe, et cette Justine qu'il avait seulement imaginée, cette femme immatérielle, peut soudain prendre corps et exister réellement, devenir Claire!

Mais l'histoire déraille, [fiction ou réalité?] et il n'est plus question de ratiocinations sur l'écriture, sur l'architecture des phrases, le choix des mots, quand l'ordre immuable des choses qu'on avait imaginé est bouleversé et qu'on a le sentiment confus d'avoir tout deviné avant les autres.

L'écriture, ce n'est pas une sinécure mais on peut même dire que c'est une alchimie, et la question vaut bien d'être posée, au moins par l'auteur « Un romancier, est-ce qu'il invente ou est-ce qu'il raconte ? ».

Alors le lecteur attentif et complice peut, lui aussi, dire avec l'auteur« Où en étais-je? ».

Hervé GAUTIER – Mai 2009.http://hervegautier.e-monsite.com

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Voilà un roman (récit ?) qui commence tout innocemment... Un écrivain est assis à sa table de travail, devant sa fenêtre. Devant lui, au delà des carreaux vitrés, se tient la place du village. Soudain, une voiture rouge, incongrue, s'y arrête. L'écrivain, tout à sa concentration artistique, cherche un adjectif à attribuer au véhicule : "galbée" puis "belle Américaine galbée" sont des définitions qui lui viennent finalement à l'esprit... Heureux de sa trouvaille, il reste malgré tout circonspect devant cet engin rutilant, perturbateur de concentration qui gêne son regard. Il n'a qu'une envie, qu'on le laisse tranquillement écrire son livre, peuplé de personnages du XVII ème siècle , tout en continuant de s'inspirer des villageois qu'il observe, et c'est ce qu'il fait...
Mais lorsque la création finit par se mélanger au réel, l'écrivain prend peur !

Ce petit roman est un drôle d'objet, une sorte d'OVNI, un écrit produit entre deux temps, qui parle du temps justement, celui de l'écriture, du temps passé et du temps présent, et de la frontière étroite qui lie le réel à l'imaginaire.
J'en ai aimé la lenteur, le fouillis apparent, la chute. J'ai aimé suivre l'écrivain dans son quotidien d'écrivain, entre inspiration, réflexions et pauses romanesques. J'ai aimé aussi sa manière d'appréhender les figures de son village, les diverses perturbations qui viennent rompre le fil de ses pensées, son imaginaire burlesque. Malgré cela, il m'a manqué peut-être un peu de profondeur pour véritablement en apprécier la teneur sur toute sa longueur, car attention certains virages d'écriture peuvent sembler difficiles à négocier. Allez, soyons honnête, cet écrit m'a tout de même suffisamment intriguée pour désirer lire davantage Philippe Beaussant...

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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Les gens qui ne savent pas ce que c'est qu'écrire un livre disent "il rêve". Ils ont tort.
En musique, on appelle cela une "pause". C'est un moment extraordinaire, dont on ne mesure pas toujours la richesse. Rien ne se passe. Les instruments se sont tus. La chanteuse aussi. Et dans ce silence, dans ce vide, dans cette absence de son, résonnent les notes du dernier accord, qui sont encore présentes - non pas dans l'air, mais dans notre mémoire, durant cette seconde où les sons qui n'existent plus règnent sur ceux qui n'existent pas encore. Aucun instrument, aucune voix ne les a fait entendre, et déjà ils sont présents, aussi réels et aussi vrais que si nos oreilles avaient pu les percevoir. Leur existence est rendue indispensable, nécessaire. Comme si le souvenir du passé engendrait le futur. Comme si ce qui n'existe plus engendrait ce qui n'existe pas. Le silence, c'est l'un des plus étonnants miracles de la musique.
Je rêve, disiez-vous ?
Pardon. Où en étais-je ?
Mais justement... Si un livre, avec ses caractères, ses majuscules, ses italiques, ses paragraphes, pouvait dessiner ce qu'on pense et lui donner tout simplement une forme comme voulut faire jadis Apollinaire, il faudrait que je laisse ici tout simplement une demi-page blanche : la marque d'un vide.
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