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EAN : 9782080711410
492 pages
Flammarion (12/06/2003)
3.7/5   5 notes
Résumé :
Un beau jour, dans la petite ville de Medina, un chevalier du bourg voisin, Olmedo, vient disputer le prix d'une Fête. Il a vingt ans, il est riche, noble et beau comme un dieu. En vingt-quatre heures, il séduit la plus jolie demoiselle du pays, et tue tous les taureaux de l'arène. Ce succès, on s'en doute, n'ira pas sans attiser les jalousies...
Cet argument inspiré d'une complainte populaire du début du XVIe siècle donnera jour au Chevalier d'Olmedo, l'une... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
C'est toujours agréable, pour les oeuvres traduites, d'avoir entre les mains une petite édition bilingue, même si l'on n'est qu'un fort piètre hispanophone, histoire de se faire une idée de l'ampleur de la trahison, des distorsions et déformations diverses auxquelles sont contraints les traducteurs pour transvaser une pensée émise dans une langue d'origine au creux de notre moule francophone avec ses contraintes internes.

C'est étonnant aussi de voir à quel point les langues vieillissent, cheminent sur leurs propres rails, s'éloignent toujours plus du noeud ferroviaire dont elles émanent. Sur le trajet du vieillissement des langues, chaque auteur est une gare, toujours plus loin du point de départ.

Félix Lope de Vega est une station suffisamment éloignée de l'Espagne d'aujourd'hui pour nous fournir une vague idée du chemin parcouru. Il en va de même pour l'évolution des sociétés. Si le castillan de l'auteur est assez proche de l'actuel pour nous permettre de le bien comprendre, autant il nous permet d'en déceler les altérations plus récentes.

De même, la société royale et catholique de l'Espagne de la Reconquista est par beaucoup d'aspects encore très proche de la nôtre (on s'en rend compte en lisant des tragiques grecs par exemple, où le fossé culturel et générationnel est bien plus marqué) mais déjà passablement différente de la société où nous évoluons pour que nous en mesurions bien l'étendue.

C'est donc plus qu'une aventure littéraire de se frotter à Lope de Vega, c'est déjà de la paléo-ethnographie. On trouvera dans cette édition deux pièces aux accents tragiques plus prononcés qu'à l'accoutumée chez l'auteur.

Tout d'abord, le Chevalier D'Olmedo, une tragi-comédie (quant à la structure mais que l'on peut sans peur ranger dans la catégorie des tragédies) en trois actes où l'auteur, en s'appuyant sur des faits réels plus ou moins récents et plus ou moins remaniés tout en lorgnant fort du côté des mythes grecs, donne sa conception de la morale et de l'honneur, et où il nous rappelle qui en est le socle, le garant et en même temps le plus beau fleuron en cette société espagnole du XVIIème siècle, à savoir, le roi catholique.

Quelle est la part de ce que pense l'auteur ? quelle est la part de ce que son public, sensibilisé aux événements, attend ? et quelle est la part de ce que la cour royale lui autorise à écrire ? Là est un autre débat, pas inintéressant, mais vraisemblablement affaire de spécialistes, aux rangs desquels je ne me compte pas ; donc je n'ai nulle raison de poursuivre sur cet axe.

En revanche, le texte, lui, reste une bonne base de discussion. Lope de Vega nous y raconte une histoire d'amour avec des relents d'eau de rose au départ. En effet, lui est beau, riche, vaillant, fort apprécié du roi ; elle est belle comme pas permis, bien dotée, issue d'une très respectable famille, d'une vertu incomparable.

Bref, tout devrait bien se goupiller. Lui, c'est le Chevalier d'Olmedo, Don Alonso, elle, c'est la fleur de Medina del Campo : j'ai nommé Doña Inés. le hic, c'est qu'évidemment, une fleur comme cette Inés, devant le parvis de l'église de Medina del Campo, ça se remarque. Et bien sûr, tous les garçons à marier de bonne famille sont sur les starting-blocks pour tâcher de conquérir le coeur de la belle Inés.

Le plus ardent prétendant se nomme Don Rodrigo. Il n'a certes rien d'exceptionnel mais il n'est pas non plus scandaleusement hideux, incapable ou idiot. À telle enseigne que le père d'Inés, Don Pedro, pense qu'il pourrait constituer un parti honorable pour sa fille et lui a déjà plus ou moins promis sa main.

Inutile de vous préciser que lorsque surgit de la ville voisine d'Olmedo une espèce d'Apollon doublé d'un Hercule, qui le ridiculise lors des festivités de la corrida, l'ami Don Rodrigo commence à fulminer sous son crâne. Pire, toutes ses sincères marques de dévouement pour Inés ne recueillent qu'indifférence et sourires forcés tandis que les tours d'adresse de Don Alonso font resplendir l'allégresse dans les yeux de sa Dulcinée.

Je ne vous en dis pas plus mais vous avez probablement bien senti que les ferments d'une tragédie sont en train de prendre racine. Néanmoins Lope de Vega, par l'intermédiaire de deux personnages atypiques et intéressants imprime une structure de comédie à la pièce.

Tout d'abord Fabia, l'entremetteuse un peu sorcière, ex-fille de joie et sans doute maquerelle à ses heures, dont le personnage a tout pour plaire au réalisateur Pedro Almodovar. Et ensuite l'écuyer de Don Alonso, Tello, sur lequel repose une bonne part du burlesque, une manière d'Arlequin qu'on croirait tout droit sorti de la Comedia dell'Arte.

Ensuite, l'on enchaîne avec le Duc de Viseu, une pièce elle aussi franchement plus " tragi " que " comédie ". C'est heureux que ces deux oeuvres aient été réunies car elles ont des points communs nombreux qui nous permettent de s'en figurer un peu plus sur les aspirations et le mode de pensée de l'auteur.

Ici, le noble chevalier d'Olmedo est remplacé par le Duc de Viseu, mais ses attributs sont quasiment les mêmes. Ce qui va changer, c'est que l'envie et la jalousie amoureuses à son égard émanent cette fois-ci du roi lui-même. C'est la raison intime pour laquelle Lope de Vega déplace son histoire en royaume de Portugal, car il est bien connu qu'un roi espagnol ne saurait témoigner d'autant de bassesse… (C'est toujours commode d'avoir un Portugal sous la main pour lui coller tous les trucs malpropres qu'on n'ose pas trop dire à voix haute.)

Structurellement, et aussi par son intrigue, cette pièce est un peu plus complexe que la précédente car c'est une jalousie puis une vengeance d'un tiers, que le roi utilise à son compte pour atteindre et assouvir sa propre vengeance et ainsi tarir la source de son irrépressible envie ou défiance vis-à-vis du duc.

Je dis plus complexe, car l'entremise de Don Egas est capitale. Celui-ci est un noble, plein de vaillance et d'attraits, mais qui a le malheur d'avoir une branche pourrie dans son arbre généalogique. Cette " souillure " dans le pedigree, pour un noble portugais, c'est d'être issu d'une femme maure. Il est parvenu à le cacher, mais l'information s'ébruite juste avant son mariage.

La promise, encore une Doña Inès, mais quelque peu retorse celle-là, rejette tout en bloc en apprenant cela et compromet sérieusement le connétable qui lui a fourni l'information, contre son gré et à la demande insistante de la fiancée, en allant tout bonnement rapporter cela à Don Egas.

Vous imaginez le sac de noeuds pour le connétable, qui n'avait pourtant l'intention de nuire à personne. Merci Inès ! le problème c'est que Don Egas est le favori du roi et, de ce fait, jouit d'un pouvoir de nuisance considérable. Comment le Duc de Viseu sera éclaboussé dans cette affaire ? c'est ce que je m'autorise à ne pas vous dévoiler, car ce serait bien dommage…

Encore un tout petit mot à propos de cette édition, que j'ai déjà dit être plaisante, même si à la comparaison, j'ai préféré le traduction du Chevalier d'Olmedo fournie dans le volume « Théâtre Espagnol du XVIIème siècle » de la Pléiade, mais voici encore une considération très hautement subjective et je rappelle que ce n'est là que mon avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Le chevalier d'Olmedo

Cette pièce a paru pour la première fois en 1641 mais la date de sa création demeure incertaine, autour de 1620 sans doute. Lope de Vega s'est inspiré de faits réels devenus légendaires : le meurtre d'un jeune seigneur entre Medina del Campo et Olmeda à l'époque du règne de Charles Quint. Cet épisode a donné lieu a toute une floraison de complaintes populaires. Une première pièce ayant pour sujet cet épisode et datée de 1606 a précédée l'oeuvre de Lope de Vega.

Lope réarrange le matériel de départ à sa manière, il place l'action sous le règne de Jean II, au début du XVe siècle. Don Alonso, le chevalier d'Olmedo du titre, est amoureux d'Inès. Il réussit à communiquer avec sa bien-aimée par une entremetteuse et Inès se montre sensible à son amour. Mais son père envisage pour elle un autre mariage, avec don Rodrigo, qu'Inès n'aime pas. Pour se soustraire au mariage, et malgré son amour pour don Alonso, elle annonce à son père qu'elle veut se faire religieuse. Son père est étonné et peu enthousiaste devant cette perspective, mais ne veut pas forcer sa fille. Don Rodrigo remarque que quelqu'un traîne devant la maison d'Inès, et tente d'appréhender le soupirant. Mais don Alonso se montrer plus vaillant et peut s'esquiver. Toutefois le manteau que Rodrigo perd dans l'affaire et que le domestique d'Alonso va arborer, va permettre au soupirant éconduit de reconnaître son rival. Qui triomphe aux combats de taureaux, à l'inverse de Rodrigo. Les combats et la gloire d'Alonso poussent les deux amoureux à avouer leurs sentiments au père, qui ne demande qu'accéder aux souhaits de sa fille. Tout semble donc aller pour le mieux, mais Rodrigo jaloux, profite du voyage que son rival fait pour donner de ses nouvelles à ses parents, pour l'assassiner lâchement sur la route. Son serviteur le dénonce au roi qui le fait exécuter.

C'est une véritable tragédie, avec une mort que tout le monde attend, puisque l'histoire est connue. Même le personnage du serviteur est à peine comique. le drame est très simple dans son déroulé, il n'y a pas d'intrigues secondaires, pas de doutes sur les sentiments des uns et des autres. Les personnages sont très tranchés, entre les bons et les méchants. C'est très touchant dans une forme de simplicité qui donne une réelle sincérité au récit. Maîtrisée de bout en bout, c'est vraiment une belle pièce.
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
LE CONNÉTABLE : J'ai là deux résolutions proposées par votre conseil, les deux de la plus haute importance.
LE ROI : De quoi s'agit-il ?
LE CONNÉTABLE : Elles exposent les raisons des marques distinctives que vous imposez aux Maures et aux juifs qui séjournent en Castille.
LE ROI : Mon intention est de faire droit aux souhaits si vivement exprimés par frère Vincent Ferrier.
LE CONNÉTABLE : C'est un saint homme plein de sagesse.
LE ROI : J'ai résolu hier avec lui que dans chacun des mes États où ils se mêlent à la population, les juifs devront porter en guise de manteau un tabard marqué d'un signe et les Maures un caban vert. Tout chrétien doit montrer la retenue qui s'impose en s'écartant d'eux. De cette façon la crainte servira de frein à ceux qui souillent leur noblesse.

(PS : Cela ne vous rappelle pas le discours de quelqu'un ?)
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Votre arrestation est une mesure de justice ; si c'est une mesure de justice, elle ne vous déshonore pas ; si elle ne vous déshonore pas, vous ne pouvez vous en plaindre. Et si vous avez envie de vous plaindre, que ce soit de votre malchance car à la Cour la chance compte plus que les lettres et les armes.
(Prenderte ha sido justicia;
si es justicia, no te agravia;
si no te agravia, no puedes
quejarte ; si quejas hallas,
sea sólo de tus dichas;
que las dichas en las casas
de los reyes sirven más
que las letras y las larmas.)
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Eh bien, si vous êtes devin, devinez, malheureux, un meilleur vêtement et un autre village où manger, parce qu'ici vous n'allez trouver que des puces et de la chaleur.

(Pues si vos sois adivino,
adivinad, pecador,
algún vestido mejor
y otro pueblo en que comer ;
que aquí no habéis de tener
sino pulgas y calor.)
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LE ROI : Elle est morte ?
LUIS : Et si glacée qu'elle ne donne plus signe de vie.
LE ROI : Elle s'est donné la mort ?
LEONARDO : Non, elle ne s'est pas tuée.
LE ROI : De quoi est-elle morte, alors ?
LEONARDO : D'un immense amour.
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Une vérité dénuée d'artifice donne aussitôt la preuve de sa force face à celui qui s'efforce de l'abattre. Le mensonge peut parfois l'affaiblir en la torturant mais il ne saurait la détruire.
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Video de Felix Lope de Vega (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Felix Lope de Vega
La Roseraie des Cultures et des Arts - 8ème édition Table ronde : "Tous des conquérants" Invité(e)s : - Bernard Lavallé, Professeur de civilisation hispano-américaine à la Sorbonne. Mondialement connu pour l'étude des effets de la colonisation sur les sociétés d'Amérique latine. Biographe de F. Pizarro et de B. de Las Casas chez Payot. Ouvrages qu'il signera avec « Au nom des Indiens ». Titre de son intervention : « Francisco Pizarro, conquistador de l'extrême ». Livre « Francisco Pizzaro, conquistador de l'extrême », aux Éditions Payot, 2004.
- Eric Freysselinard, Haut fonctionnaire, agrégé, énarque, inspecteur de l'administration, conseiller et directeur de cabinets ministériels, préfet, directeur des stages de l'ENA. Signera sa biographie d'Albert Lebrun. Titre de son intervention : « Albert Lebrun : la conquête de l'héritage du dernier président de la III° République ». Livre « Albert Lebrun, le dernier président de la III° République », aux Éditions Belin, 2013.
- Suzanne Varga, Agrégée, docteur d'État, Professeur des Universités, spécialiste de la littérature auriséculaire, auteur de biographies dont Lope de Vega (Fayard), grand prix de la biographie littéraire de l'Académie française et Philippe V, petit-fils de Louis XIV, prix Hugues Capet. Elle signera ces biographies ainsi que celle de « Sophie d'Espagne » et « Les 12 Banquets qui ont changé L Histoire ». Titre de son intervention : « Sophie d'Espagne, une reine à la reconquête du trône des Bourbons ». Livre « Sophie d'Espagne », aux Éditions Flammarion, 2015.
- Philippe le Guillou, Agrégé, doyen de l'Inspection Générale de Lettres Modernes, écrivain, auteur de nombreux essais et d'une trentaine de romans, essentiellement chez Gallimard, prix Médicis pour « Les Sept Noms du peintre », préside le Centre de l'imaginaire arthurien. Il signera entre autres ouvrages « Géographies de la mémoire », Gallimard, 2016. Titre de son intervention : « Julien Gracq et Jean Guillou, rendez-vous à la conquête des abîmes et des cimes ». Livre « Géographies de la mémoire », aux Éditions Gallimard, 2016.
- Jean Guillou, Titulaire des grandes orgues de Saint-Eustache, compositeur, pianiste, organiste, concepteur d'orgues, pédagogue, Professeur honoraire de l'Université de Sarrebruck, écrivain, poète. Signera « L'Orgue, souvenir et avenir » (Symétrie), La Musique et Le Geste (Beauchesne), le Visiteur (Ch. Chomant). Titre de son intervention : « La Musique et Le Geste » ou une dramaturgie musicale conquérante. Transcription syncrétique de la Fantaisie et Fugue sur le nom de B.A.C.H. (F. Liszt) exécutée aux grandes orgues de Saint-Eustache, le 18 avril 2015. Projection du film et de l'enregistrement réalisés par le L'Haÿssien Philippe Barbier. Livre « La Musique et Le Geste », aux Éditions Beauchesne, 2012. Icone livre « L'Orgue, souvenir et avenir », 4ème édition, Lyon, aux Éditions Symétrie, 2012.
-- Projection (extrait) du concert de Jean Guillou, aux grandes orgues de Saint-Eustache, le 18 avril 2015. Film réalisé par le L'Haÿssien Philippe Barbier.
Modératrice : Suzanne Varga.
http://www.laroseraiedescultures.fr/edition2016/mb-table-ronde-1-Tous_des_conquerants.html
Association "La Roseraie des Cultures et des Arts" le 3 septembre 2016 - Moulin de la Bièvre Salon du Livre et des Arts de L'Haÿ-Les-Roses http://www.laroseraiedescultures.fr
Réalisation : M.D'E
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