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sur 1223 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je voudrais ce soir vous entretenir de L'affaire Charles Dexter Ward, un roman écrit par le fameux Howard Phillips Lovecraft.
Pénétrer dans les pages de ce livre fut pour moi un voyage halluciné. Ce fut comme descendre dans un labyrinthe enfoui dans des profondeurs abyssales et m'y perdre. Entrer dans un cauchemar les yeux ouverts. L'auteur nous y entraîne pas à pas, la tension est grandissante à chaque page.
C'est un récit dans le récit. Y entrer, c'est ouvrir des portes que l'on n'aurait sans doute jamais dû franchir. Tiens ! À propos de porte, à l'instant où je vous écris, j'entends celle qui donne sur le côté du jardin et qui bat dans le vent. J'étais persuadé de l'avoir verrouillée... Comme quoi, on n'est jamais sûr de rien... J'irai la refermer tout à l'heure, plus tard lorsque j'aurai fini de vous écrire cette chronique, je ne veux surtout pas perdre le fil de mes idées...
Nous sommes à Providence, dans le Rhode-Island, au début du XXème siècle.
Le jeune Charles Ward est passionné d'histoire et de généalogie. Cette passion a priori sans danger va l'amener au fil de ses investigations à la rencontre d'une sordide histoire dont son aïeul Joseph Curwen, échappé de Salem lors de la grande chasse aux sorciers du XVIIIème siècle, fut le principal instigateur. Accusé de sorcellerie, Joseph Curwen se réfugie à Providence où il deviendra armateur.
Cette découverte marque la plongée du jeune homme dans les méandres de la folie et dans l'atermoiement des autres, ses proches et nous autres lecteurs par la même occasion, lorsque des voix surgissent des livres anciens que Charles a imprudemment ouvert un jour...
C'est donc sur les traces de son ancêtre sorcier que l'intrigue du roman va se construire, au travers tout d'abord des vieilles correspondances et chroniques explorées, puis des voyages de Charles, de Providence à Salem, puis jusqu'en Transylvanie. La Transylvanie... Si vous voyez ce que je veux dire...
Le vertige de l'histoire tient sans doute dans la métamorphose progressive de Charles Dexter Ward au retour de son voyage...
Parfois, on voudrait rêver que les morts ne sont pas vraiment morts, ici je vous assure qu'on voudrait croire à l'inverse.
La réalité est porteuse d'horreur, c'est là tout le talent de Lovecraft de la saisir et nous en livrer ses dédales.
J'espère seulement ne pas perdre la tête, comme cette petite figurine de cire posée sur mon bureau dont le visage penche vers moi et semble fondre légèrement au moment où je vous écris.
Je me rappelle avoir découvert Lovecraft lorsque j'étais adolescent. À l'époque les textes de cet auteur me faisaient davantage peur qu'aujourd'hui, il y avait aussi quelque chose de psychédélique et de gothique qui stimulait mon imaginaire, l'idée d'aborder les confins d'autres mondes secrets, de transgresser leurs frontières étaient grisants, mais ces récits m'empêchaient aussi de dormir...
Aujourd'hui je ne me fais plus avoir. Je sais bien que ces chuchotements qui parviennent de la cave, derrière ses murs sombres enterrés sous la terre, ne sont que les bruits normaux d'une maison qui respire... Pourtant ce soir, ces bruits n'ont jamais été aussi plaintifs... Sans doute ce maudit vent...
Il y a dans ce récit une esthétique de l'inconnu, de l'imaginaire, de l'effroyable... J'ai été saisi par cette beauté dans l'écriture. Elle dessine les profondeurs, les espaces souterrains, les labyrinthes, les rues étranges et oniriques de Providence, ville à la fois sublimement horizontale et déjà furieusement verticale.
Derrière le rideau des ténèbres apparaissent une bibliothèque, une forêt, un cimetière, une cave, un tableau, qui deviennent brusquement l'entrée secrète et improbable vers l'envers du décor. L'enfer, dites-vous ? Vous avez dit l'enfer ? Oui sans doute ai-je dit l'enfer, je ne sais plus, les mots brusquement m'échappent...
Car lire et écrire, c'est peut-être revenir sans cesse vivant du pays des morts...
Ici ce qui suscite l'angoisse et la terreur c'est sans doute ce qui est occulte, ce qui se révèle par le non-dit, le non-vu...
Il y a des portes qu'on ne devrait jamais ouvrir... Certains livres sont parfois des tombes, des entrées secrètes vers des mondes mystérieux ou oniriques presque à portée de main, dont nous ne parvenions pas jusqu'à présent à trouver l'accès.
Je comprends maintenant les raisons pour lesquelles Stephen King était fasciné par l'oeuvre laissée par Lovecraft.
Je me suis parfois demandé si à mon tour entrer dans l'univers de Lovecraft ne risquait pas de mettre ma santé mentale en danger, mais ce soir je tiens à vous rassurer : tout va très bien.
Je regarde le visage de cette figurine de cire dont les yeux se figent sur mon regard. C'est peut-être à cause de cette bougie que j'ai dû allumer dans ma précipitation lorsque l'électricité s'est subitement coupée, c'était peu après que la porte du jardin a commencé à battre dans le vent. Il me faudrait descendre à la cave, chercher le compteur, rétablir le courant, j'ai un peu la flemme car je dois terminer cette chronique...
Les livres sont parfois des lieux où le lecteur perd pied, perd la raison, n'est plus maître du temps ni de l'espace, où les personnages à travers leurs attentes, leurs blessures et leurs aspérités, nous tirent désespérément par les bras vers leurs destins implacables et éperdus.
Entre poésie et fantastique, les territoires inconnus des livres sont vastes qui peuvent autant nous embrasser que nous embraser...
Mais voilà qu'à présent j'entends craquer les marches de l'escalier qui mène à la cave ! Je dois vite vous abandonner provisoirement. Je reviendrai conclure cette chronique un peu plus tard.
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J'avais 15-16 ans quand j'ai découvert Lovecraft. C'était quelque chose de tellement nouveau pour moi, plus adulte, plus sombre que mes lectures habituelles de l'époque. J'ai vite été entraînée vers les héritiers de l'auteur et je l'ai délaissé pendant pas mal d'années tout en gardant de bons souvenirs, flous mais bons tout de même, de mes lectures. Et puis récemment l'envie de me tourner de nouveau vers le génie de Providence s'est faite ressentir. Depuis environ 3 ans je suis prise de temps en temps de pulsions lovecraftiennes. Et c'est chaque fois un grand plaisir de découvrir ou redécouvrir les textes de cet auteur.

Ma première lecture de « L'affaire Charles Dexter Ward » remonte à environ 25 ans. C'est dire si je ne me souvenais pas de grand-chose, si ce n'est, qu'à l'époque, je l'avais trouvé génial. Mon avis après cette relecture est moins dithyrambique, mais tout de même très enthousiaste. Aujourd'hui, je ne parlerai pas de génie pour ce roman, je trouve Lovecraft meilleur sur les nouvelles, il maîtrise à la perfection la forme courte. Ici, le récit n'est pas toujours parfaitement construit, ou du moins parait moins maîtrisé que lorsque Lovecraft raconte une histoire courte. J'ai eu le sentiment qu'il y avait parfois quelques toutes petites longueurs, quelques petites redites.
Mais je pinaille, ce sont des broutilles par rapport au plaisir de lecture indéniable que procure « l'affaire Charles Dexter Ward ». On retrouve tout le talent de Lovecraft pour instaurer une ambiance particulière, pour faire ressentir au lecteur une impression de lente dégradation. Il y a ici un très beau crescendo. A l'image de la démence qui semble peu à peu prendre possession de l'esprit du héros, le surnaturel contamine petit à petit le récit, d'abord subtilement par petites touches, puis de façon de plus en plus marquée.

« L'affaire Charles Dexter Ward » vieillit très bien, il se lit facilement et parvient à faire de l'effet, même à un lecteur d'aujourd'hui. Plus je lis et relis cet auteur, plus j'apprécie son talent de conteur de l'angoisse.
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H.P. Lovecraft est un des rares auteurs que j'arrivais à lire lors de mes plus jeunes années (triste époque où la lecture ne provoquait pas encore l'engouement qu'elle suscite aujourd'hui chez moi...).
Plus tard et pendant longtemps, j'étais "angoissée" à l'idée d'en relire un - ou même d'en découvrir un jamais compulsé -, non tant pour le contenu de ses textes que par crainte de la déception ; les goûts changeant avec l'âge et le temps... Serait-ce possible que l'écrivain ayant bercé mes soirées d'adolescente me déçoive ? Je n'osais y penser...
Puis quand Isabelle m'a proposé L'affaire Charles Dexter Ward en lecture commune avec Denis (expérience renouvelée par ailleurs avec beaucoup de plaisir!), j'ai sauté sur l'occasion d'autant plus qu'il s'agissait là d'un ouvrage encore non lu pour ma part.

Alors qu'en est-il ?

Entre longue nouvelle et court roman, le récit se lit assez rapidement malgré un certain temps d'adaptation et l'effet de répétitions, à mon sens peu utiles.
D'aucun le trouveront trop lent et complexe alors que d'autres en apprécieront le dynamisme, mais beaucoup s'accordent à dire que c'est l'oeuvre phare de Lovecraft et que c'est là le titre idéal pour découvrir le génialissime écrivain. J'avoue être assez d'accord avec cette assertion.

Le mode de narration est indéniablement bien choisi pour suivre ce qui n'est au départ qu'une simple enquête généalogique et qui vire au fil des pages en véritable quête satanique.
Notes, lettres et témoignages savamment distillés tout au long du livre rythment agréablement la lecture.
Horreur et suspense montant crescendo jusqu'au paroxysme de l'épouvante. Chaque nouvelle révélation intriguant d'avantage, l'étau se resserrant chaque fois un peu plus sur ce pauvre Charlie, au point d'étouffer le lecteur déjà fortement magnétisé.

On notera aussi les nombreuses références à d'autres oeuvres non moins mythiques...

Le point fort de cette sordide affaire réside sans doute dans le pouvoir de suggestion qu'elle fait naître rapidement, pouvoir nettement plus féroce que n'importe quelle description détaillée serait bien en peine d'égaler.

En revanche, et c'est bien dommage, des personnages par trop insipides nuisent à un ensemble pourtant réellement attrayant.

Beaucoup ont ou auront aussi tendance à reprocher le côté raciste de l'auteur, certes assez présent dans ses écrits, mais je pense, sans pour autant nier la justesse de ces reproches, qu'il faut aussi se remettre dans l'époque - s'imaginer ce qu'était la vie en ce début de XXe siècle - pour sinon comprendre, au moins accepter qu'en ce temps-là (pas si éloigné que cela d'ailleurs) de telles pensées ou réactions étaient monnaie courante malheureusement.
Et pourtant, cette même époque veut qu'une telle imagination, que de tels écrits (et je parle ici de l'oeuvre lovecraftienne dans son entièreté) soient ceux d'un indéniable génie littéraire.

Au final et malgré quelques points sombres, je n'ai nullement été déçue et ce livre aura au moins eu le mérite de me faire renouer avec une littérature trop longtemps mise de côté.


Je vous renvoie également aux critiques de mes co-lecteurs, Siabelle et Walktapus ;)
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Ce fut ma première lecture de Lovecraft, voici près de cinquante années maintenant.
Bien sûr,cette horreur grouillante était nouvelle et délectable pour un adolescent curieux! Je découvrais un écrivain morose et casanier, hanté par la folie et habité d'une imagination aussi fertile que glauque.
Cette main crochue d'une hérédité malsaine et d'un destin abominable avait marquée le jeune lecteur qu'était Horusfonck des seventies.
J'ai lu d'autres oeuvres de Lovecraft par la suite, et j'en lirai encore... Mais c'est L'affaire Charles Dexter Ward qui me reviendra toujours.
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«Il observait souvent d'étranges choses dans la pièce : petites figurines de cire sur les tables ou les rayonnages; traces de cercles, de triangles et de pentagrammes, dessinés à la craie ou au fusain au centre du plancher.»

C'est mon deuxième livre de cet auteur et je suis un peu mitigée. C'est une bonne histoire certes mais j'ai eu du mal à m'orienter. Je me remets donc à découvrir cet auteur, plus vite que prévu dans une lecture commune avec Walktapus et Angie. En faisant une recherche, j'apprends que c'est publié en 1941 et on en convient à l'époque, que ce récit pourrait être situé entre un roman et une nouvelle. Ce qui est pertinent, on mentionne également, que c'est un des plus longs textes écrits par l'auteur.

«C'était une simple exhortation à la prudence, murmurée par Charles, et pourtant il lui inspira une mystérieuse terreur quand il entendit ces deux paroles très banales : Chut !... Écrivez… »

Maléfique, Puissance, Magnétisme

Je mentionne que le livre contient cinq parties. Dès les premiers chapitres, j'ai dû mal à embarquer dans l'histoire. J'avoue que je suis un peu désorientée, je dois identifier les personnages. Ensuite, on énumère des dates et des lieux sur des événements. Je suis également mêlée, ça m'a pris un certain temps pour me situer dans le roman.
Après le chapitre 4, je commence à me familiariser avec le récit et je me laisse happer par le climat angoissant et mystérieux. Je suis alors avec intérêt, Charles Dexer Ward. On l'accompagne dans sa quête car il veut savoir qui est le sorcier Joseph Curwen, son ancêtre.
Le sujet est plus qu'une passion, ça devient une obsession, il en vient même à faire des expériences secrètes. On le soupçonne de faire de l'incantation, on entend des bruits inhabituels et on murmure tout bas des formules indéchiffrables. Qu'est-ce qu'il fabrique donc ?

Ensuite, à cause de son comportement étrange, son père est inquiet et avec l'aide du Dr. Willet, il fait une enquête. On pense qu'il serait pris d'une folie soudaine mais le Dr. Willet est loin d'en être convaincu. Alors il s'aventure dans son antre pour tenter y découvrir des preuves. Et c'est là qu'il capte vraiment mon attention. Quelle découverte, je n'en dis pas plus !

«Mr. Ward ne pouvait saisir les paroles, et qui pourtant le bouleversait jusqu'au fond de l'âme.»

Intéressant, Troublant, Fascinant

Je ne suis pas encore une habituée à ses écrits mais je trouve que le livre est bien construit, ses chapitres sont bien devisés, ils ne sont pas trop longs. Il suit très bien sa ligne directrice. Je ne peux pas dire que j'ai tout retenu, lors de sa recherche sur ses ancêtres. On peut suivre très bien l'histoire et tu te lasses transporter davantage par le personnage inquiétant, par les lieux obscurs et surtout par les odeurs inusitées.
Je constate qu'il possède un talent de conteur, sa plume est vive et son imagination est débordante. Je trouve que son sujet est bien recherché malgré qu'il dispose beaucoup de détails. Je le mentionne car pour moi, j'ai perdu un peu mes repères. Je constate que ses descriptions sont bien détaillées, et son intrigue est bien amenée. Je remarque aussi qu'il y a souvent des longueurs et des répétitions au cours du roman. Je me suis un peu lassé mais quand le Dr. Willet poursuit son enquête, c'est une partie du livre qui m'interpelle vraiment.

Pour terminer, c'est une autre belle incursion dans le monde de Lovecraft. Je trouve que son livre «L'affaire Charles Dexer Ward» contient tous les éléments qui font un bon livre : on suit une enquête, avec des éléments fantastiques et un repaire à explorer. Intriguant, n'est-ce pas ?

« J'ai des raisons de penser qu'il ignorait le goût du sang, et son anémie croissante constitue la meilleure preuve à l'appui de ma théorie. Ward a touché à des choses terribles, mais il n'a jamais été un monstre.»

Comme c'est un roman de l'époque, j'ai beaucoup apprécié lorsqu'il mentionne des faits dans les journaux anciens, lorsqu'il nous démontre aussi les lettres de correspondance. Dans ce roman, les bibliothèques, les livres ont une place essentielle. Je crois que l'instruction, le savoir sont importants et c'est une des forces du roman. Il met aussi l'importance sur une date clé au cours de l'histoire. Il faut être attentif.
Je crois que la fin, elle complète bien l'histoire. Il y a une phrase, reformulée dans mes mots, qui suscite mon intérêt : «Il nous met en garde lorsqu'on s'aventure dans un terrain inconnu.» Qu'est-ce qu'il veut dire par là ? C'est à vous de le lire, si vous voulez le découvrir…

C'est une bonne lecture, malgré quelques lacunes, j'en garde une belle impression. Je remercie mes deux amis, Walktapus et Angie, pour leurs partages et leurs échanges. C'est toujours plaisant et agréable, je vous conseille d'aller voir leurs critiques sur notre lecture commune. Je dis aussi un ''merci'' spécial à mon ami AlbertHenri, qui m'a permis de découvrir cet auteur talentueux et grâce à lui, moi et mes amis on découvre ce livre. On le communique avec enthousiasme sur Babelio. Vous pouvez aussi aller voir sa critique sur ce livre.

C'est un autre auteur à découvrir et ce n'est pas les livres qui manquent.

Isabelle
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On ne revisite pas innocemment – ni impunément – les Terres d'éblouissements de notre adolescence. Tout avait (si bien) commencé dès l'âge de quinze ans par la projection du film "La Malédiction d'Arkham" ("The Haunted Palace", 1963) de Roger CORMAN au Ciné-Club un rien poussiéreux de notre lycée... On y découvrait – en v.f. alors – la diction très appuyée de l'acteur Vincent Price excessivement inquiétant (Charles Dexter Ward/Joseph Curwen "le sorcier de Salem"), la porcelaine du visage angélique de la belle Debra Paget (Mrs Ward dans le film), les charmes jaune d'or, bleu outremer et émeraude du Technicolor, la partition ténébreuse et fascinante de Ronald STEIN (responsable de la b.o.), le fabuleux générique à l'araignée tissant si patiemment cette toile où un beau papillon coloré se laissera prendre, les stigmates de la "Malédiction d'Arkham" (étrange petit port de pêche en carton-pâte situé à l'intérieur des Terres de la Nouvelle-Angleterre, aux ruelles emplies de la brume des machines à brouillard - à l'instar de son cimetière au arbres morts "Caspar David Friedrichiens" aux formes torturées), Arkham hanté par cette petite fille titubante aux yeux occultés par une membrane de crapaud, la vision finale d'une créature verdâtre et floue tapie dans l'une des fosses aux sacrifices du Manoir... Puis la mention au générique : " FROM THE POEM BY Edgar Allan POE AND A STORY BY H.-P. LOVECRAFT " : sauf que POE n'y était pour rien et le mystérieux "LOVECRAFT" à la base d'à peu près tout ! Et nous voici à la recherche du livre de poche des Editions "J'AI LU" (en collection "fantastique"), riche de ses 182 pages. C'était la digne traduction (réalisée par Jacques PAPY en 1956 pour le compte des Editions Denoël) d'une histoire rédigée en langue anglaise en 1928, publiée une première fois dans la revue "Arkham House" en 1941 (4 ans après la disparition physique de son auteur) et intitulée " The Case of Charles Dexter Ward", longue nouvelle ou roman court en cinq actes aux titres de chapitre un rien grandiloquents mais si prometteurs : 1. RESULTAT ET PROLOGUE, 2. ANTECEDENT ET ABOMINATION, 3. RECHERCHE ET EVOCATION, 4. METAMORPHOSE ET DEMENCE, 5. CAUCHEMAR ET CATACLYSME.

Ce petit opus était devenu pour nous "le film" en version étirée, moins la présence de Mrs Ward/Debra Paget (Dommage...). Certes, le film de Corman était fauché mais particulièrement inspiré, le livre besogneux et un peu guindé - mais qu'importe : la magie opérait. Il y avait la fameuse "mine couche de fine poussière d'un gris bleuâtre", sorte de mantra à l'ubiquité fascinante, un peu le "petit pan de mûr jaune" (ou jaunâtre) proustien de Sa Majesté Lovecraft... Les créatures "cthulhuiennes" des fosses, le poids de l'hérédité... Un monde s'ouvrait devant nous, terriblement prometteur... Un enfer était pavé de pièces maîtresses telles "La couleur tombée du ciel", "Dans l'abîme du temps", "Je suis d'ailleurs", Par-delà le mur du sommeil", "Démons et merveilles", "Dagon", "Le Rôdeur devant le seuil" (poésie profonde et prometteuse des titres). L'homme avait habité la Nouvelle-Angleterre, vécu en reclus et presque dans la misère, vivant exclusivement de travaux de réécriture, au centre d'un réseau phénoménal de relations épistolaires, s'étant bien peu éloigné de sa ville natale (Providence) durant ses seulement 46 années d'existence. C'était Howard-Phillips LOVECRAFT (1890-1937) qui mettait en scène et en mots ses chers fantasmes, peurs, névroses et autres obsessions morbides - et c'était proprement fascinant. Après le bon & prolifique Roger CORMAN (né en 1926), un autre ex-adolescent et excellent metteur-en-scène, ci-devant fils de garagiste né dans l'Etat de New-York en 1948, nommé John CARPENTER, s'y immergea corps et biens en nous offrant successivement : "The Thing" ("La Chose", 1982 - "classique" qui verra en 2011 une suite ou "prequel norvégienne" cauchemardesque due à Matthijs van Heijningen Jr), "Prince of Darkness" ("Prince des Ténèbres", 1987) puis "In the Mouth of Madness" ("L'Antre de la Folie", 1995, avec l'excellent Sam Neill). Certes, ce que nous a laissé Lovecraft n'était pas forcément - toujours - "de la grande Littérature" (et la simple relecture objective et patiente de "The Case of Charles Dexter Ward" nous en montre toutes les limites, par ses touchantes invraisemblances psychologiques et ses pesanteurs de style) mais c'était - si l'on ose dire - neuf, "frais", et plein de promesses. L'auteur aimait souvent rendre hommage à ses modestes "frères" – prédécesseurs ou contemporains – oeuvrant ou ayant oeuvré dans le genre alors trop souvent méprisé du pur "Fantastique" (Jacques CAZOTTE, Edgar Allan POE, Nathaniel HAWTHORNE, Lord DUNSANY, Arthur MACHEN, Algernon BLACKWOOD, etc - il nous faut relire, pour s'en convaincre, son fameux essai "Epouvante et surnaturel en Littérature", 1927-35/1945). Lovecraft est d'abord un incroyable gisement, une carrière à ciel ouvert : Nyarlathotep et le "Necronomicon" de l'Arabe fou Adbul Al-Hazred n'y sont que "simples" pépites vénéneuses...
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Je remercie Neneve pour cette pioche de Février, pour une fois que j'arrive à lire mes pioches dans le mois imparti, il faut dire que celui-ci est assez court et je voulais l'inclure depuis quelque temps dans mes lectures. Je l'ai acheté récemment grâce à Easycash, pendant un temps ils ont fait des offres du genre « 10 livres = 3€ », difficile d'y résister surtout quand on y trouve des livres intrigants. Ce roman sera ma première lecture de cet auteur renommé en fantastique. J'ai ainsi choisi un roman peu épais dont le résumé m'intriguait.

Le récit est très compact, il n'y a pas du tout de dialogue dès les premières pages, on ne trouve que des descriptions avec, parfois, des phrases assez longues. Quand je reprend ma lecture, je ne sais plus où j'en suis et je relis souvent les mêmes parties. Pour ma part, ce genre de récit est un somnifère et au vu du résumé, je m'attendais à tout autre chose. J'ai donc essayé d'avancer un peu plus loin pour voir où me mener l'histoire. le démarrage est curieux car on apprend qu'un homme fou s'est échappé d'un asile d'aliénés. C'est ensuite son médecin traitant qui raconte comment il est devenu fou en remontant l'histoire jusqu'à un de ses trisaïeuls dont on a tenté de l'effacer des mémoires. C'est très alambiqué mais cela m'intrigue suffisamment pour que j'en continue la lecture. Où veut nous amener l'auteur ? Malgré les innombrables longueurs de ce texte, certains passages ont suscité ma curiosité et m'ont permis d'en continuer la lecture car je voulais avoir le fin mot de cette histoire. Par contre, certains passages ont été allégrement sautés tant ils ne présentaient que peu d'intérêt pour le reste (des suites de noms, de grades ou d'achats divers…). Malgré les seulement 125p de ce récit, la lecture a été quasi aussi longue que pour un livre de 300p, c'est surtout dû au fait qu'il soit très dense, je pense. J'avais fini par deviner certaines choses mais l'histoire est encore plus tordue que je ne le pensais et ça frise l'horreur et l'épouvante. Je ne suis pas sûre de vouloir en découvrir d'autres de sa bibliographie, ça dépendra si j'en trouve d'autres d'occasion. L'histoire est tellement dense et fourmille de tant de détails que j'en ai perdu certains en cours de route. À la fin de certains passages, je m'arrêtais pour essayer de reconstituer l'histoire dans son entier d'après certains détails ainsi révélés et qui laissaient planer une atmosphère sombre, morbide et d'une peur ancestrale pour un certain type de magie noire. Tout n'est pas réellement expliqué à la fin mais c'est suffisamment explicite pour donner une vue d'ensemble sur les « activités » de certains sorciers de Salem. Seule coquille du livre concerne une erreur de date entre celle d'une lettre et de sa réception par le destinataire, comme si elle était antidatée, mais vu la logique du récit, je ne pense pas.

Comme vous l'aurez compris, j'ai donc un avis mitigé pour ce court roman. Malgré un début difficile, je me suis laissée happer par l'histoire de ce jeune Ward et je voulais savoir dans quoi il s'était embarqué. Au final, ça se lit, bien que dans une atmosphère teintée d'horreur latente et ce n'est certainement pas un livre à lire la nuit pour ceux qui sont sujets aux cauchemars. Et c'est sans doute cette atmosphère qui m'empêche de dire que ce fut une excellente découverte du style de Lovecraft. Cela m'a permis de découvrir son style assez particulier où les dialogues sont rares et les descriptions importantes, oui. Mais est-ce que je lirais d'autres oeuvres de lui ? Je ne sais pas, tout dépendra des résumés… Si vous êtes amateurs de fantastique teinté d'horreur et d'atmosphère sombre, je vous conseille de découvrir cet auteur et son univers très particulier.

Sur ce, bonnes lectures à vous :-)
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Ecrit en 1927 et publié en 1941, ce roman pourrait sans contestation se revendiquer du genre Fantasy: magie noire, incantation, créatures cauchemardesques, rien ne manque.

Le jeune étudiant en archéologie Charles Dexter Ward, effectue des recherches généalogiques qui l'amènent à découvrir les liens de parenté qui le relient à un personnage sulfureux qui défraya la chronique locale de la petite ville américaine Providence, 150 ans plus tôt. La curiosité l'emporte sur la prudence et le jeune homme est précipité dans une spirale infernale que les autorités médicales de l'époque attribueront à une folie soudaine. Mais le docteur Willet n'est pas tout à fait convaincu par cette explication...

Le style est très descriptif et imagé, et je découvre qu'une adaptation cinématographique a été diffusée dans les années 60. Je n'ose imaginer un Spielberg et des techniciens 3D s'emparant de l'affaire : au risque pour la spectatrice émotive que je suis de passer la séance sous le fauteuil et avec les mains sur les oreilles. Car déjà dans cette version écrite, l'angoisse est très présente et savamment distillée. C'est assez court et très dense. Pas de bavardages et d'états d'âme, la situation est très critique et ne supporte pas le délayage.

Il est étonnant de constater à quel point bien des auteurs de science-fiction ont souvent été de grands visionnaires : ici encore le récit date de plusieurs dizaines d'années avant la découverte de l'ADN et de son rôle dans la transmission des caractères héréditaires, et pourtant....

Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Est-ce qu'on peut apprécier Lovecraft sur le tard, quand on n'a pas goûté à l'adolescence cette extase un peu baroque et violente de son univers démoniaque et glauque? Pour ma part j'en doute, le bonhomme est quand même méchamment frappé et une incursion dans son crâne peuplé de monstres, de démons et de terreurs sourdes ne m'attirent pas plus que ça.
J'avoue néanmoins un réel frémissement à l'évocation des inframondes qu'il anime, notamment celui-ci où des puissances démoniaques resurgissent à la faveur de l'enquête généalogique que mène le jeune Charles Dexter, enquête dont il ressortira en aussi mauvais état que le lecteur.
Terrifiante, délétère, satanique, cette lecture le ramène contre son gré à ses peurs les plus ancestrales. Je m'en vais de ce pas concocter un breuvage antidotal dans mon antre de sorcière pour me remettre la tête à l'endroit.
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Un challenge avec des auteurs imposés, c'est comme les pochettes surprises de notre enfance : dévoiler son contenu avec enthousiasme, recevoir un nouveau cadeau, apprécier tellement ce qu'on y trouve qu'on le conserve précieusement, ou bien si on aime moins, se dire qu'on peut retenter sa chance !

J'ai ainsi découvert Howard Phillips Lovecraft : honte à moi, contrairement à beaucoup d'entre vous, je ne l'ai pas lu à l'adolescence. Je n'avais pas eu cet engouement pour le surnaturel, la pierre philosophale, le vampirisme, le retour du monde des morts… Une lacune que je comble donc tardivement.

Le malaise ambiant est ressenti à travers tous nos sens : grognements, grincements, odeurs nauséabondes, pâleur maladive, poussière bleutée… Et l'expérience du livre audio m'a englobée et coupée du monde extérieur encore plus qu'avec un livre papier.

Le récit est présenté comme la retranscription, par le Docteur Willett, médecin de la famille et ami du père, de l'affaire Charles Dexter Ward, jeune homme dont on apprend qu'il a eu des réactions bizarres après des recherches sur un aïeul, Joseph Curven, avant d'être enfermé dans une clinique psychiatrique et d'en prendre la fuite…

Une lecture macabre, glaçante, qu'il vaut mieux aborder en été qu'en hiver si vous êtes sujet aux insomnies et que vous vivez dans une grande maison ancienne avec des planchers qui craquent….

Pour résumer, j'ai tiré une pochette surprise avec des bonbons acides, un déguisement d'Halloween, des incantations et un portrait proche de celui de Dorian Gray… Je crois que je vais rejouer pour en choisir une autre… Croisons les doigts pour quelque chose de moins pesant !
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