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EAN : 9782882505484
160 pages
Noir sur blanc (03/01/2019)
3.83/5   12 notes
Résumé :
Dans ses nouvelles, Vladimir Maramzine fait preuve d'une grande inventivité stylistique, marquée par l'ironie et l'absurde, dans la tradition de la littérature russe du XXe siècle (Zochtchenko, Platonov). C'est un petit garçon qui s'offusque d'être jeté sans ménagement dans une rivière pour apprendre à nager ; c'est une journée dans la vie d'un frotteur de parquet ; ce sont des métiers disparus et des portraits mémorables, dressés à partir de détails surprenants (un... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique


Ingénieur de formation, Maramzine (né à Leningrad) s'est surtout illustré pour avoir fait connaître Brodsky sous forme de samizdat. Cela le conduit à son arrestation puis exil en France en 1974. Il se considérait comme un émigrant politique appartenant à la littérature de l'exil, et c'est bien cet aspect que nous retrouvons dans ce recueil de nouvelles. Certaines ne font que quelques pages, la plus longue, Un tramway long comme la vie, donne le titre de cette publication. Il y est question de souvenirs liés à sa vie à Leningrad mais également de celle de ses congénères venus s'installer en France. Tout est teinté d'une certaine 'désinvolture russe', si une telle expression existe, décrite avec beaucoup d'ironie. le travail du traducteur est extraordinaire, permettant d'entrevoir les jeux de mots et de comprendre parfois les références grâce à des notes qui auraient probablement mérité d'être plus nombreuses.

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Il s'agit d'un recueil de nouvelles d'un écrivain russe méconnu en France bien qu'il y ait passé plus de la moitié de sa vie suite à son expulsion d'URSS en 1975. Il ne fut pas expulsé pour ses écrits, il n'avait alors pratiquement rien écrit, mais pour avoir contribué activement à la diffusion des poésies de Joseph Brodsky, futur prix Nobel. Une fois en France, il écrit des nouvelles (en russe) jusqu'au début des années 80, puis, après vingt ans de silence reprend la plume, toujours en russe, au début des années 2000. Dans le même temps il refuse toute publication de ses oeuvres en Russie, ne voulant avoir aucun lien avec la Russie actuelle. Etrange (il est le seul dans ce cas, en tout cas, avant février 2022), mais ce recueil de nouvelles en donne quelques explications. Au fil de nouvelles pleines d'humour, écrites d'un ton léger, il égratigne toutes les générations d'émigrés russes, des russes blancs de 1917 à Soljénitsyne, revenu avec les honneurs en Russie. Il considère que l'église orthodoxe russe actuelle est l'équivalent contemporain du Part Communiste. Son écriture est fine, légère, il dépeint des scènes du quotidien, tant en URSS ou Russie qu'en France, avec un regard décalé, à la limite de la satyre ou du fantastique selon les moments. Quand il égratigne, c'est toujours en quelques mots, comme en passant, parfois entre deux jeux de mots. A part la nouvelle qui donne son titre au récit, ce sont des nouvelles très courtes, un peu inégales.
Un tramway long comme la vie : cette nouvelle occupe près des deux tiers du livre et elle est de toute beauté. Avec les voyages en tramway comme fil rouge, nous voyons défiler la vie du narrateur et l'évolution tant de la ville de Leningrad/Saint-Pétersbourg que de la société russe, de l'après-guerre à nos jours. C'est habile, nous découvrons la ville avec les yeux de l'enfant (on imagine la nostalgie de l'auteur, au-delà de la nostalgie de l'enfance), puis l'évolution des us et coutumes, des rencontres, des moeurs (avec encore quelques jolis coups de griffe au passage). L'écriture est fluide, aérienne et presque poétique. Une découverte surprenante et très agréable.
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Un tramway long comme la vie
Vladimir Maramzine
nouvelles
traduites du russe par Anne-Marie Tatsis-Botton
janvier 2019, les Editions Noir sur Blanc, 160p


Je me disais : pourquoi ne pas lire de nouvelles ? Pour voir comment écrire des textes plutôt courts, s'intéresser à l'agencement de l'histoire, au traitement des dialogues, à la survenue de la chute, à l'écriture.
Voilà que je tombe sur la couverture, et le tramway, dans une lumière légèrement voilée, receleuse de mystères, m'invite à me prendre. Un tramway nommé désir, dans lequel j'ai toujours eu un vif plaisir à monter dans la ville de Lisbonne.
Rien à voir avec la quiétude de la capitale Portugaise, ni avec la touffeur de la Nouvelle-Orléans. Je suis perdue dans une atmosphère slave, et j'ai du mal à m'accrocher aux personnages. Je décide d'écrire quelques mots sur l'ouvrage parce que très vite je vais oublier le nom et ce que racontent les nouvelles, qui déjà m'échappe. La nouvelle la plus longue donne son titre au livre. le tramway sert de métaphore à la vie. Les nouvelles se lisent bien, la lecture est agréable même, vivante, mais rien ne me retient, je peux laisser le livre, il ne me manque pas.
On est à Leningrad, après-guerre. le narrateur est contre le régime, attaque la bourgeoisie et les membres du clergé, dénonce la misère du pays, les groupes mafieux qui font régner la peur chez leurs victimes. Un pope refuse à une jeune fille qu'elle fasse des études de médecine et lui propose d'être call-girl. C'est dit ainsi sans commentaire, au fil de l'histoire. L'écriture est incisive, ironique, caustique. le narrateur, gamin, s'est amusé à vider les poches des gens qui empruntaient le tramway. Il n'a pas fait fortune, les gens n'ayant rien. Dans le tramway, comme encore aujourd'hui, des malappris profitent de la presse pour peloter les femmes, jeunes ou non, jolies ou pas, détrousser les voyageurs, et même pis, les tuer s'ils trouvent porteur de reproches le regard d'un passager. le tramway, de toutes manières, est un transport dangereux. Si l'on veut faire saucisson, c'est à dire se tenir sur la plateforme sans avoir à payer, ou en descendre sans que le tramway s'arrête, on risque des accidents, comme perdre une ou deux jambes. En revanche, le tramway est un moyen de rencontres, de lier connaissance avec un peintre, des filles...
le narrateur a choisi son parti : celui des gens qui ont connu la prison, font quand il est interdit dans la rue, le geste de la figue avec leurs doigts de pied, pour exprimer leur refus catégorique. C'est un iconoclaste.
Ce que j'ai le plus apprécié dans ce livre, c'est le style. le narrateur s'adresse à quelqu'un, à qui il conte ses histoires, et il est ardent à les conter, il s'exclame, se répète, cite les auteurs qu'il aime, textuellement ou en les déformant. Platonov, sceptique envers la collectivisation et la politique stalinienne, et Soljenitsyne, grand dénonciateur du régime et pourtant rentré au pays, sont les plus cités.
Je ne connaissais pas du tout l'auteur, qui est encore vivant et vit à Paris. Il est né en 1934 à Leningrad. Il a édité les premières oeuvres de Joseph Brodsky. Il a été arrêté en 1974 pour édition clandestine, et contraint à l'exil.
C'est sûrement un homme et un auteur intéressant mais les atomes ont manqué de crochets.
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Maramzine est l'un des derniers auteurs de la troisième vague de l'émigration russe en France. Ce recueil de nouvelles intègre des nouvelles très courtes et une nouvelle plus longue, un tramway long comme la vie (titre de l'ouvrage). J'ai nettement préféré cette dernière aux autres textes que j'ai trouvé plus originale et déliée dans l'écriture. Léningrad après-guerre : le personnage principal y narre sa vie, se servant du tramway comme fil rouge ou prétexte : il y rencontre des filles puis des femmes, observe les autres passagers, s'improvise pickpocket, se trouve mêlé dans des rixes. A travers les yeux du narrateur, c'est la Russie d'après-guerre qui défile devant nos yeux et on voit le personnage principal évoluer dans le temps. C'est aussi le pays tout entier qui change en même temps. La construction de l'intrigue est très habile. Notons également le travail de traduction remarquable de la traductrice et la couverture de ce livre, illustrée par l'artiste polonais Chudy. Un texte à découvrir.
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Auteur russe exilé en France, définitivement fâché avec son pays, au point de refuser qu'on y publie ses oeuvres, rares, par ailleurs. le recueil comporte quelques brèves nouvelles. « Un tramway », la plus longue, est inspirée par l'enfance et la jeunesse de l'auteur à St-Pétersbourg dans les années 60. le texte est habilement construit sur des anecdotes de voyages dans les tramways de la ville. Chaque événement de sa vie y est rattaché d'une manière ou d'une autre. L'épisode le plus touchant est sa rencontre d'une jeune fille dans le tram avec laquelle il entretient une relation enflammée. On dirait, cependant, que le tram devient peu à peu, pour une raison inexplicable, le point de rupture entre elle et le narrateur, comme si une rencontre dans un tram était nécessairement indigne d'intérêt. du grand art.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Parmi eux s'étaient glissés des émigrés patriotes. Les avait-on expulsés et pourquoi, comment s'étaient-ils retrouvés hors de leur pays natal, ce n'était pas très clair. Au lieu de "vivre sans bourreaux" ils proposaient, à la suite du grand homme, de "vivre sans mensonge". Ils disaient toute la vérité sur eux et sur les autres. Quand on leur demandait "Comment ça va ?", ils se mettaient à tout vous raconter dans les moindres détails. Leurs femmes discutaient à voix haute de leurs cycles de vie et ne cachaient pas leurs élans matinaux ni leurs désirs vespéraux. Ils méprisaient ceux qui avaient menti lors des interrogatoires, et ceux qui avaient réussi à rouler leurs persécuteurs dans la farine.

[Vivre sans mensonge, titre d'un célèbre appel d'Alexandre Soljenitsyne, 1973]
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Ce cabinet a deux sections : pour les cors féminins et pour les cors masculins. Aux yeux du frotteur de parquet on les a séparés d'une cloison par souci de moralité. On a séparé le pied féminin du pied masculin, et c'est devenu moral. La moralité générale et obligatoire, pensait le frotteur de parquet, c'est sans doute nécessaire
Il a vite astiqué le cabinet et il est sorti. Le parquet derrière lui brillait sans rien refléter de ce que pensait le frotteur en frottant.
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Comme il est dit dans l'annonce, un conférencier parlera demain aux résidents sur le thème : "Chichkine est avec nous." Ce conférencier peut faire cette conférence parce que Chichkine est avec lui, il est pénétré de Chichkine et il peut parler de Chichkine deux fois par jour et même plus.

[Chichkine est un peintre russe du XIXème siècle. Il s'agit d'une parodie de la phrase de propagande "Lénine est avec nous." Note du traducteur ]
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Un lettré jeune et pas bête écrivit : le complot mondial contre la Russie existe bien - ce qui se passe, c'est que toute la population adulte du pays y prend part. Mais personne ne l'entendit.
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Ma grand-mère allait souvent à l'église. De mon temps, ceux qui allaient à l'église étaient un petit peu meilleurs que ceux qui n'y allaient jamais - maintenant c'est tout le contraire.
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