Grâce à ma soeur cadette qui a eu la main bien heureuse en choisissant ce livre, nous nous envolons vers l'Inde tout juste indépendante, mais alors qu'un grand nombre de britanniques sont encore sur place, dont les protagonistes de notre roman du jour.
Howard Clinton a été chargé d'y mener un projet d'envergure : la construction d'un barrage dans la jungle du sud du pays. Les équipes, composées d'ingénieurs, techniciens et ouvriers, forment un microcosme hétérogène, non seulement en termes de profils de fonction, mais également en termes d'origine. Tout ce petit monde cohabite au même endroit, mais dans des logements et baraquements bien distincts. Sont présentes également les épouses de certains ingénieurs et meneurs du projet (dont Helen, la femme de Howard Clinton, qui apporte une intelligence et une sensibilité à l'opposé de l'opportunisme et du côté impitoyable de son mari). Au long de notre lecture, nous suivons dès lors l'édification de ce barrage et les événements liés au chantier.
En anglais, langue dans laquelle l'auteure a écrit, le titre du roman est « The Coffer dams », qui se traduit par « les batardeaux ». Un batardeau est, selon le Larousse, une : « digue ou barrage provisoire, établi en site aquatique pour mettre à sec la base d'une construction que l'on veut réparer ou l'emplacement sur lequel on veut élever un ouvrage. » Et ce sont bien eux autour desquels l'histoire s'enroule et se vit, plus qu'autour de ce « Grand Barrage » de la traduction française.
J'ai énormément apprécié ce livre, à l'écriture très belle, riche et aux descriptions vivantes.
Kamala Markandaya a trouvé comment donner à l'histoire un rythme tout à fait en rapport avec le climat, l'histoire avançant lentement à certains moments pour s'accélérer par exemple sous l'urgence de l'arrivée de la mousson. L'humidité et ce qu'elle entraîne comme lourdeur, l'opacité de la nuit, la chaleur… le tout est décrit de façon à ce qu'on ressente le climat au moment où nous lisons. Les personnages sont bien, et même très bien campés, l'atmosphère qui règne également, et le ton semble juste à tout moment, tout comme les relations humaines et tout ce qu'elles ont de complexes : le blanc qui se sent supérieur aux Indiens, mais aussi ces derniers, entre eux, en fonction de leur provenance ou de leur métier.
En résumé, une toute belle lecture en terre indienne, qui donne envie de continuer à découvrir l'oeuvre de
Kamala Markandaya.