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EAN : 9791095772934
96 pages
Anamosa (03/09/2020)
3.97/5   17 notes
Résumé :
Les répercussions mondiales de la mort de George Floyd, le 25 mai 2020, l’ont montré : plus que jamais il est utile de défendre un usage critique du mot race, celui qui permet de désigner et par là de déjouer les actualisations contemporaines de l’assignation raciale.

User de manière critique de la notion de race, c’est, en effet, décider de regarder au-delà de l’expression manifeste et facilement décelable du racisme assumé. C’est saisir la forme séd... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Difficile de résumer un tel livre, dans lequel Sarah Mazouz a déjà condensé – en moins de 80 pages – l'essentiel de ce qui s'est écrit sur le sujet depuis plusieurs décennies. L'essai s'articule en neuf chapitres, du propos liminaire, qui relie l'importance de s'assurer du langage conceptuel au I can't breathe de George Floyd, à la proposition suggérant de remplacer l'« universalisme abstrait » par la « transposition minoritaire ».

Plus de raccourci possible : en tant que tel, il faut conseiller la lecture intégrale de Race à toustes, mais aussi aux éditorialistes, essayistes et piliers de réseaux sociaux qui parviennent encore, en 2021, à dire qu'il suffit de ne plus employer le mot race ou ses dérivés (racisation, racialisme) pour qu'il n'y ait plus de racisme... le plus retors étant lorsqu'on cherche, comme cela devient systématique, à qualifier de racistes celles et ceux qui s'expriment sur la racisation autrement que d'un revers de main.

Le premier chapitre part, on l'a dit, de la manière dont les médias et certains intellectuels en France ont rendu compte du mouvement Black Lives Matter, en tournant autour des mots de race et de racisation. Mazouz prend acte de la « crispation que ces mots suscitent » et du fait que « le silence se craquelle » (p. 9), tout en rappelant que, du côté des politiques, « le déni de ces enjeux » se poursuit (p. 10). Il s'agit donc de comprendre pourquoi la défense du modèle républicain s'accompagne si souvent d'une dénonciation des mouvements antiracistes. Dans les chapitres 2 et 3, Mazouz explique en quoi il faut distinguer l'usage raciste du terme de races au pluriel (et de l'idée conjointe de hiérarchie raciale) de son emploi au singulier par « celles et ceux qui cherchent à combattre le racisme » en faisant valoir que les hiérarchies raciales, justement, « sont en fait socialement et historiquement produites » (p. 19). Cela aide à échapper à l'aporie [2] bégayante des personnes qui pensent avoir clos le débat en disant que « la race n'existe pas » : c'est là confondre « la validité naturelle ou biologique de la notion et son effectivité sociale, étatique et politique » (p. 27).

Dans le chapitre 4, Mazouz relie la question de la racialisation à l'organisation sociale en termes de pouvoir(s). Reprenant notamment les travaux de Juliette Galonnier au sujet des personnes converties à l'islam ou de Noel Ignatiev dans How the Irish Became White (1995), Mazouz rappelle que « [t]ravailler sur la racialisation permet ainsi de voir par exemple que, selon les contextes, toutes les personnes qui ont la peau blanche ne sont pas catégorisées comme telles et ne bénéficient pas des privilèges qui reviennent à celles et ceux définis comme blanc·he·s » (p. 36-7).

La racialisation est donc, comme l'indique le titre du chapitre 5, « une condition sociale » : la notion de privilège blanc, si souvent comprise de travers, est donc opérante dans la mesure où, sans nier « le fait qu'il y ait des personnes blanches pauvres », elle sert à « éclairer l'avantage qu'il y a à avoir le statut de blanc dans des contextes sociaux marqués par une longue histoire d'infériorisation des groupes définis comme non blancs » (pp. 45-6, italiques soulignés). C'est à ce titre que la lecture de Race ne peut suffire : l'« universalisme abstrait » français se nourrit en grande partie d'un déni total des phénomènes profonds qui nourrissent la France d'une histoire d'infériorisation. Sur l'héritage racialiste de la colonisation et l'articulation entre racisation et impensé coloniaux dans la France contemporaine, il y a d'autres livres.

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•SA RACE
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🦊 Les mots. Toujours les mots et leur substance. Avant d'entrer dans le vif du sujet, permettez-moi de vous présenter cette collection. le mot est faible chez Anamosa. Cette maison d'édition dirigée par Chloé Pathé et sa douceur infinie, met en avant des mots. Dirigée par Christophe Granger dont on reparlera dans quelques jours, l'auteur de Joseph Kabris -prix femina qui m'a tant bouleversé- cette collection pétille en vous faisant réfléchir. Des mots qui débutent sur la couverture, pour que l'analyse continue le travail. Ces mots qui perturbent, qui interrogent, qui sont parfois tabous dans certaines sociétés. Format élégant, graphisme épuré, mais surtout des concepts avec un auteur différent, qui m'enchante. Quoi de mieux que de s'emparer d'une langue et d'aller la chatouiller un peu. Nous parlons toujours de littérature•••
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🦊 Race. Rien que de prononcer ce mot certains iraient jusqu'à honnir votre famille. Race. Depuis de nombreuses années ce mot irrite, ce mot devient sale et galvaudé par de nombreux polémistes mais également par les pouvoirs publics. Dans une société où chaque mot est analysé, vilipendé, à tort ou à raison selon le camp dans lequel on se trouve, chacun d'eux comporte une origine qui s'avère dévoyée par le temps. George Orwell affirmait que « la pire chose que l'on puisse faire avec les mots, c'est de capituler devant eux ». Affronter les mots, les gros mots, ceux que la tiédeur ambiante n'aime pas utiliser de leur de froisser ou de commettre une bévue sur Twitter. Comme si bannir le mot race de la constitution suffisait à régler le problème du racisme en France. Sarah Mazouz prend la race au pied de la lettre pour en extirper son essence. C'est brillant, c'est construit admirablement au gré d'une analyse extrêmement accessible et fine. Sociologue et chargée de recherches au CNRS, chaque chapitre nous amène ailleurs. Si la race n'existe pas elle est cependant partout selon Colette Guillaumain, en effet à chaque coin de rue un événement incluant le mot race, demeure présent. Et ce, à toute heure de la journée. 🌟 La mort de Gorge Floyd, les violences policières qu'on ne souhaite pas nommer ainsi, le racisme ambiant. Tout se cumule. Si la définition ancestrale de la suprématie de certaines races, est de plus en plus minoritaire, la définition actuelle est encore plus mise à mal. le racisme s'insinue partout mais notamment dans les préjugés et dans l'esprit humain. Certaines expériences dans cet ouvrage dont la plus marquante où une femme noire médecin aux Pays-Bas est toujours prise pour une femme de ménage ou au mieux une infirmière. On ne peut pas concevoir qu'elle exerce le métier qui sauve des vies. Ce livre est essentiel, revient aux fondamentaux des mots mais également de notre Histoire, de notre passé colonial et de la vision du monde sur des termes qu'on connaît bien mal. Rendez-vous au prochain mot. Il s'agira de l'utopie et j'en rêve déjà 🌟•••
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Recourir, même de manière critique, au mot race, est désormais sujet au discrédit, suspect de racisme, tandis que prospère dans l‘indifférence quasi générale les discours racialisants. La sociologue Sarah Mazouz en défend l'usage critique, moyen selon elle de saisir les actualisations contemporaines de l'assignation raciale, de les désigner comme telles et de les déjouer.
(...)
Ouvrage éminemment synthétique, comme tous les titres de l'excellente collection fort bien nommée « le mot est faible ». Indispensable pour comprendre la nature des tensions de nos sociétés qui refont brutalement surface ces derniers mois, en France, aux États-Unis et dans beaucoup d'autres pays, et pour déjouer les pièges de la pensée dominantes qui assimilent les dénonciations du racisme structurel à des tentatives séparatistes afin de les discréditer et les nier.

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En France, c'est la color blindness qui domine. Et oui, c'est bien connu, dans l'hexagone, il n'y a tellement pas de racisme qu'on "ne voit pas les couleurs". Si, si ! Ainsi, ceux qui utilisent le terme de race sont immédiatement taxés de racisme.

Le confort dans lequel se trouve la société est celui-ci : comme il est interdit de parler des origines ethniques d'un individu dans une étude statistique, les dites statistiques ne peuvent calculer les inégalités d'accès à l'emploi, au logement, le nombre d'agressions et d'insultes que reçoivent les personnes non blanches. Solution toute trouvée : puisqu'on ne mesure pas les inégalités, elles n'existent pas. Il suffit de se cacher les yeux pour que ce qu'il y a devant disparaisse pour de bon.

Ce court essai évoqué avec amertume cette grande blague de la France néocoloniale et profondément cruelle et irréfléchie, qui perpétue des systèmes de domination basés sur la couleur de peau.
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A la lecture du statut de l'auteur - chercheuse au CNRS, j'espérais un traitement du sujet objectif, apolitique. Malheureusement, l'approche est fortement teintée de militantisme et ôte, de mon point de vue, toute
caution intellectuelle.
Il s'agit bien plus d'un livre politique qui, par son choix de positionnement partisan, ne peut être que partiel.
Dommage.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Dans ce contexte, le socle politique et social commun est bâti sur un geste d’uniformisation qui suppose de ne reconnaître que des individus abstraits et d’effacer le rôle de l’histoire dans la production de groupes soumis à des traitements non seulement divers mais aussi inégalitaires. Or, loin de l’idéal d’universel qu’il est censé servir à réaliser, ce geste d’abstraction autorise les membres du groupe majoritaire à particulariser ce qui leur paraît différent et à considérer que les revendications de celles et ceux qui sont particularisé-es sont sans pertinence pour l’ensemble.
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Le discours critique de la race use pour sa part de cette notion au singulier parce qu’il désigne par là un rapport de pouvoir qui structure, selon des modalités diverses en fonction des contextes et des époques, la place sociale assignée à tel ou tel groupe au nom de ce qui est censé être la radicale altérité de son origine (géographique, culturelle ou religieuse). Et c’est justement la manière dont l’origine est utilisée pour hiérarchiser qui distingue la race d’autres rapports de pouvoir, notamment le genre et la classe.
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La transposition minoritaire : « Pratique de soi à portée collective et politique, la transposition minoritaire consiste en la capacité à inverser les rôles, afin de prendre conscience des rapports de pouvoir qui structurent telle ou telle situation ou d’évaluer la façon dont des pratiques des paroles ou des attitudes assurent l’égalité entre les personnes, ou, au contraire, réitèrent et renforcent des assignations et des formes d’infériorisation. » (p. 83)
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Quand nos dirigeants s’expriment sur le sujet, c’est systématiquement pour donner à entendre leur hostilité à l’antiracisme. Drapé dans un républicanisme réactionnaire et nationaliste teinté parfois d’anti-intellectualisme, leur discours est identitaire.
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Se définir comme blanc et avoir une expérience de blanc amène à ne pas se concevoir comme éventuellement racialisable, tout en pensant que les membres d’autres groupes le sont. Cela amène par conséquent à considérer que les positions que l’on tient sur tel ou tel sujet sont absolues et universelles, à la différence des membres des autres groupes qui n’exprimeraient qu’un point de vue limité par leur expérience.
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Videos de Sarah Mazouz (9) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Sarah Mazouz
Présentation de l'éditeur : Non le concept d'intersectionnalité ne représente pas un danger pour la société ou l'université, ni ne fait disparaître la classe au profit de la race ou du genre. Bien au contraire ! Cet outil d'analyse est porteur d'une exigence, tant conceptuelle que politique. Une synthèse nécessaire, riche et argumentée, pour comprendre de quoi on parle. Les attaques contre les sciences sociales se font de plus en plus nombreuses. À travers elles, ce sont certains travaux critiques en particulier qui sont visés, notamment ceux portant sur les discriminations raciales, les études de genre et l'intersectionnalité. À partir d'un article de 2019, devenu référence et paru dans la revue Mouvements, entièrement revu et actualisé, voici, pour toutes et tous, une synthèse salutaire et nécessaire sur ce qu'est réellement la notion d'intersectionnalité. Les autrices, sociologues, s'attachent d'abord à rappeler l'histoire du concept élaboré il y a plus de trente ans par des théoriciennes féministes de couleur pour désigner et appréhender les processus d'imbrication et de co-construction de différents rapports de pouvoir – en particulier la classe, la race et le genre. Il s'agit ensuite de s'interroger sur les résistances, les « peurs », les discours déformants et autres instrumentalisations politiques que l'intersectionnalité suscite particulièrement en France. Mais justement, défendre les approches intersectionnelles, n'est-ce pas prendre en compte, de manière plus juste, les expériences sociales multiples et complexes, vécues par les individus, et donc se donner les moyens de penser une véritable transformation sociale ?
Éléonore Lépinard (https://www.librest.com/livres/auteurs/eleonore-lepinard,0-1101080.html) est sociologue,  professeure en études de genre à l'Université de Lausanne. Ses travaux portent sur les mouvements et les théories féministes, l'intersectionnalité, le genre et le droit. Elle est l'autrice avec Marylène Lieber, de Les Théories en études de genre (« Repères », La Découverte, 2020) et de Feminist Trouble, intersectionality Politics in Post-secular Times (Oxford, 2020). Elle a également codirigé plusieurs ouvrages : Genre et islamophobie (ENS éditions, 2021, avec O. Sarrasin et L. Gianettoni), Intersectionality in Feminist and Queer Movements (Routledge, 2020, avec E. Evans), L'Intersectionnalité. Enjeux théoriques et politiques (avec F. Fassa et M. Roca i Escoda, La Dispute, 2016). 
Sarah Mazouz (https://www.librest.com/livres/auteurs/sarah-mazouz,0-11411115.html) est sociolo gue, chargée de recherches au CNRS (Ceraps) et membre de l'Institut Convergences Migrations. Ses travaux s'appuient sur des enquêtes ethnographiques et mobilisent les critical race studies, la sociologie du droit, la sociologie des politiques publiques et l'anthropologie critique de la morale. Elle est l'autrice de Race (« Le mot est faible », Anamosa, 2020). Dans La République et ses autres. Politiques de l'altérité dans la France des années 2000 (ENS Éditions, 2017), elle montre comment s'articulent dans l'espace social immigration, nation et racialisation.
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