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EAN : 9782070314317
288 pages
Gallimard (11/03/2004)
3.64/5   127 notes
Résumé :
La narratrice, abandonnée à sa naissance à la porte d'un couvent, vagabondera au fil des ans d'une place à l'autre, à travers la France. C'est comme si elle n'avait pas de vie propre, mais elle participe intensément à celle des autres et aux drames dont elle est le témoin, sondant toujours plus profondément les mystères du cœur et du corps humains en lesquels rôde si souvent la folie. Elle grandit dans les Pyrénées, parmi des enfants qui attendent en vain le retour ... >Voir plus
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La narratrice nous raconte son histoire à la première personne.
Abandonnée sur le bitume dans un cageot de framboises, elle est recueillie dans un couvent de soeurs moniales.
Elle nous avoue vite sa particularité : elle est blanche, tellement blanche qu'elle en est albinos.
Ce petit enfant reçoit un patronyme donné par les bonnes soeurs : Laudes-Marie Neigedaoût.
Elle est envoyée dans les Pyrénées chez Léontine qui m'a fait penser à Madame Rosa dans "La vie devant soi" de Romain Gary. Cette période se passe pendant la seconde guerre mondiale et en 1945, certains enfants juifs retrouvent leurs parents et leurs prénoms réels.
Tout comme la noyade d'Antonin avec ses poches remplies de cailloux m'a fait inévitablement penser au suicide de Virginia Woolf.
Après la mort de Léontine, Laudes-Marie aboutira chez un couple d'aubergistes dont le mari voue un culte barbare à l'ours. Cela ne lui portera pas chance.
De fil en aiguille, Laudes-Marie arrivera dans un manoir assez bizarre , puis dans un bordel champêtre comme bonne et dans un bistrot de gare.
Voici pour le côté des faits mais le plus étonnant chez Sylvie Germain, c'est son imagination, son style d'écriture et ses scènes crues et originales.
On peut dire que j'ai découvert une auteure pas commune du tout et certainement pas ennuyeuse à lire.
De plus, Sylvie Germain ne manque pas d'humour et de distance dans des scènes qui pourraient sembler dramatiques. Cela ajoute une petite touche d'humour noir que j'ai apprécié.

Challenge plumes féminines 2019
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Un petit bébé est abandonné dans un cageot de framboises, au pied d'un réverbère. Heureusement, un homme l'entend pleurer et l'emporte au petit trot jusqu'au portail d'une communauté religieuse. Ces religieuses me nomment Laudes-Marie et m'élèvent jusqu'au jour où j'ai volé et caché le petit Jésus de la crèche pour ne pas qu'il soit tué car j'avais entendu dans les Saintes Écritures que tous les bébés juifs avaient été massacrés. La guerre est finie, celle de 1940-1945, une soeur m'emmène dans un petit village des Pyrénées où elle me confie à Léontine qui héberge déjà des enfants que les parents lui ont confiés au début de la guerre. Comme ils attendent que leurs parents viennent les rechercher, je rêve que les miens aussi viendront un jour, un rêve qui jamais ne se réalisera. Ce village ne sera que le point de départ d'une vie d'errance. Je travaillerai dans une auberge, quelques années, les meilleures, auprès d'une châtelaine, ensuite dans divers hôtels, une brasserie de gare, chez une vieille femme ; dans les rues de Paris, je jouerai de l'orgue de Barbarie. Ma vie fut bien remplie et, après une agression et l'âge venant, je suis retournée dans un petit village où j'avais vécu quelques bonheurs.
Sylvie Germain décrit admirablement la personnalité de Laudes, la narratrice, les silences et la solitude qu'elle apprécie tant qu'elle les choisira pour compagnes de fin de vie.

Challenge Atout prix 2017 – Grand Prix Thyde Monnier 2002 – Prix des Auditeurs de la RTBF 2003
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Née sous une pluie d'étoiles, Laudes-Marie Neigedaoût est albinos. Immédiatement abandonnée par sa mère dans un cageot de framboises, l'enfant portera toute sa vie un âpre ressentiment envers ceux qui n'ont pas voulu d'elle. « Mes parents n'étaient ni des héros ni des martyrs de la dernière guerre, pas même des gens ordinaires morts sous un bombardement. Juste deux renégats qui m'avait légué le tourment de leur anonymat pour tout héritage, et une inaltérable blancheur de sac de farine en prime » (p. 35) D'abord recueillie par un couvent, Laudes-Marie finit la guerre cachée dans une maison en montagne, avec d'autres enfants. Mais partout où elle passe, elle ne laisse que mort et désolation, comme si sa présence avait le pouvoir d'éteindre les existences. « J'avais juste dix ans et j'étais orpheline à répétition. » (p. 41) Rien de surprenant à ce qu'elle développe un goût prononcé pour la solitude et le silence. L'enfant amère et avide de mots grandit dans un dénuement presque total d'affectation et n'a de cesse de ruminer sa haine/amour pour ses parents déserteurs, rêvant pourtant de prendre son envol et de goûter au bonheur. « Même les ailes imaginaires ont besoin d'être soignées, lustrées, développées. Surtout les ailes imaginaires. Sinon on finit comme Antonin, des galets amassés dans les poches, des éboulis au fond du coeur, et vlan ! on se jette dans le gave. » (p. 46)

Adulte, Laudes-Marie entre comme domestique dans des maisons particulières et dans des hôtels. Elle ne reste jamais longtemps en place, poussée par un besoin d'avancer. « Je n'étais qu'une passante poudrée à frimas, filant au ras des murs, au ras des jours, tellement insignifiante aux yeux des gens qu'il me semblait parfois ne même pas projeter d'ombre. » (p. 130) Dans sa grande solitude laborieuse, Laudes-Marie voit tout, entend tout et noue des liens avec des personnes disparues. « J'avais le chic pour me lier d'amitié avec des voix, des sourires et des larmes de femmes défuntes. Comme quoi la mort n'empêche rien. Enfin, pas tout. » (p. 154) Il faut dire que Laudes-Marie ne semble pas vraiment de ce monde et il ne s'agit pas seulement de la couleur de sa peau. Quelque chose en elle semble impalpable, inatteignable.

De 1939 à 2000, Laudes-Marie fait le récit de sa vie. Narratrice impartiale, sans état d'âme, elle montre le beau et le laid de son existence, les flots de sang, les pertes et les douleurs. le récit a des airs d'élégie et de chant funèbre, comme si cette fille albinos était morte à elle-même depuis bien longtemps en raison d'un manque d'amour ou parce qu'elle a reçu et donné des sentiments trop imparfaits. Ce roman est très beau, mais j'en ai largement préféré d'autres de Sylvie Germain, comme le livre des nuits ou Jours de colère. En fait, je préfère quand cette auteure présente les destins croisés des membres de familles monstrueuses : les récits centrés sur des individus uniques m'ennuient un peu, comme ce fut le cas de Magnus ou de Nuit-d'Ambre qui restent toutefois de très beaux textes.
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L'écriture singulière, poétique, âpre aussi par moments, de Sylvie Germain se retrouve ici encore. le livre date déjà, il a été publié en 2002. J'ai lu et apprécié plusieurs romans de cette auteure mais je ne connaissais pas celui-ci.

Un destin très particulier nous est présenté, à la première personne, comme une confession écrite, celui de Laudes, une enfant trouvée, tout d'abord recueillie par des religieuses. Un parcours chaotique, de la maison de Léontine, cachant des enfants juifs, à un bar, un manoir, un bordel et d'autres lieux encore, souvent étranges, comme leurs propriétaires. L'auteure sait avec finesse et profondeur capter l'âme humaine.

Mais j'avoue que le personnage de Laudes est resté pour moi froid, retiré en lui-même, hors d'atteinte comme il le deviendra vraiment lorsqu'il sera confronté à une extrême solitude. Et puis, trop de drames, de morts dans cette histoire. Ce n'est pas fait pour remonter le moral en ce moment!

Une lecture en demi-teinte, donc, mais pour le fond, pas pour la forme, beau flamboiement de mots.
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La vie n'est pas un long fleuve tranquille. Sylvie Germain de sa plume envoûtante, riche et ciselée nous invite à partager la vie de Laudes-Marie, née albinos et abandonnée, dans sa fuite incessante. Portrait très réaliste d'une humanité dont notre narratrice va commenter les actes au fil de ses rencontres en nous offrant ses réflexions, tout en gardant une position d'observatrice, de témoin. Sans racine, Laudes-Marie qui adore les arbres, semble incapable de se fixer, s'envolant même parfois dans des visions oniriques et symboliques de sa propre souffrance et de celle du monde. Étrange chemin de vie zigzagant qui la mènera sur la voie du silence et du détachement, en paix avec elle-même et sa solitude, épanouie dans « ce sourire de délivrance » de sa dernière vision, son état de grâce.
C'est un livre percutant et intelligent où nous attendent bien des surprises, chacune d'elles donnant l'occasion de plonger au coeur de la psychologie humaine.
Deuxième livre de Sylvie Germain lu après « l'inaperçu » mais, c'est certain, pas le dernier.
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Citations et extraits (46) Voir plus Ajouter une citation
J’aimais les mots comme des confiseries raffinées enveloppées dans du papier glacé aux couleurs chatoyantes ou du papier cristal translucide qui bruit sous les doigts quand on les déplie. Je les laissais fondre dans ma bouche, y répandre leur saveur. Mes préférés étaient les mots qu’il fallait croquer ainsi que des nougatines ou des noix grillées et caramélisées, et ceux qui dégageaient un arrière-goût amer ou acidulé. Certains mots me ravissaient, pour la troublante douceur de leur suffixe qui introduisait de l’inachevé et un sourd élan du désir dans leur sens : « flavescence, efflorescence, opalescence, rubescente, arborescence, luminescence, déhiscence … » Ils désignaient un processus en train de s’accomplir, très intimement, secrètement… et j’avais forgé un mot sur ce modèle : « amourescence ». Dans l’espoir que par magie de ce vocable neuf un peu d’amour naîtrait dans le cœur évanoui de ma mère, et dans le mien, tout encroûté de larmes et de colère.

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J'aimais les mots comme des confiseries raffinées enveloppées dans du papier glacé aux couleurs chatoyantes ou du papier cristal translucide qui bruit sous les doigts quand on le déplie. Je les laissais fondre dans ma bouche, y répandre leur saveur. Mes préférés étaient les mots qu'il fallait croquer ainsi que des nougatines ou des noix grillées et caramélisées, et ceux qui dégageaient un arrière-goût amer ou bien acidulé. Certains mots me ravissaient, pour la troublante douceur de leur suffixe qui introduisait de l'inachevé et un sourd élan de désir dans leur sens : «flavescence, efflorescence, opalescence, rubescence, arborescence, luminescence, déhiscence ...». Ils désignaient un processus en train de s'accomplir, très intimement, secrètement ... et j'avais forgé un mot sur ce modèle : «amourescence». Dans l'espoir que par la magie de ce vocable neuf un peu d'amour naîtrait dans le cœur évanoui de ma mère, et dans le mien, tout encroûté de larmes et de colère.
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Et si on lui disait qu'à force de picorer du bout des lèvres il ne grandirait pas, il se contentait d'opiner : «Zustement, zustement !»
Au début cela me déroutait ; grandir était dans l'ordre des choses, et je ne comprenais pas pourquoi il voulait échapper à la règle. J'aurais tellement aimé, moi, être semblable aux autres, parée de couleurs. Devenir grande et brune comme la farouche Estelle. Mais Loulou m'a avoué son secret, à moi seule parce que précisément j'étais du même âge et de la même taille que lui. Cela faisait près de deux ans que ses parents et ses frères aînés étaient partis et lui, qui attendait de pied ferme leur retour, craignait que les siens ne le reconnussent pas s'il poussait trop vite. Il s'ingéniait donc à ralentir sa croissance, il se plongeait en apnée temporelle.
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La puberté est un exil brutal, douloureux, et humiliant. Les petites filles sont expulsées hors de l'enfance au rythme de leur sang qui flue et de lancinantes douleurs dans le ventre et les reins, les petits garçons au rythme de leur voix qui s'altère et s'enroue. Et soudain plus rien ne va de soi dans le monde alentour, tout devient sujet à caution, à défiance. Mais au moins les garçons accèdent-ils ensuite à un statut d'hommes libres, alors que les filles devenues nubiles sont placées sous haute surveillance, objets de convoitise autant que de méfiance, et taxées d'impureté à chaque menstrue.
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J'ai suivi le cortège jusqu'au cimetière, aux côtés d'Antonin. Quand on a descendu la boîte dans la fosse, j'ai été prise d'un malaise et j'ai cherché une main à laquelle me retenir. Mais j'étais placée au mauvais flanc du manchot et j'ai attrapé un bout de manche ballant au vent. Telle était la façon dont le destin me serrait la main.
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Videos de Sylvie Germain (28) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Sylvie Germain
Lecture de Sylvie Germain : une création originale inspirée par les collections de la BIS.
Ce cycle est proposé depuis 2017 par la BIS en partenariat avec la Maison des écrivains et de la littérature (MéL). Un mois avant la restitution, l'écrivain est invité à choisir un élément dans les fonds de la BIS. Lors de la rencontre publique, « le livre en question » est dévoilé. Chaque saison donne lieu à la publication d'un livre aux éditions de la Sorbonne "Des écrivains à la bibliothèque de la Sorbonne".
Saison 5 : Jean Lancri, Gaëlle Obiégly, Sylvie Germain et Michel Simonot
Captation, montage et générique par Corinne Nadal
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