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EAN : 9782896986330
320 pages
Le Quartanier (15/09/2023)
4.21/5   129 notes
Résumé :
Elle croyait qu'ici, à l'autre bout du monde, au confluent de la rivière Klondike et du fleuve Yukon, elle aurait le droit de vivre libre. De coucher avec qui elle veut, d'aimer qui elle veut, à visage découvert et sans honte. Mais la femme sans honte se déshonore - et contre la femme sans honneur, tous les coups sont permis.

A dix-huit ans, Sacha et son meilleur ami Tom quittent Montréal sur le pouce et aboutissent à Dawson City, au Yukon, où ils t... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (14) Voir plus Ajouter une critique
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La version qui n'intéresse personne est un premier roman. Roman déchirant et subversif !
L'histoire est violente, la plume d'Emmanuelle Pierrot ne fait pas dans la dentelle. Son Québécois est sauvage mâtiné de sacres et d'anglicismes : un parler choc que l'on retrouve surtout dans les dialogues.
Et c'est justement dans ces dialogues car on "jase" beaucoup dans cette communauté, que l'autrice risque de perdre son lecteur :
il pourrait "péter une coche" !
En l'occurence, la lectrice que je suis ....
Je n'ai "catché pantoute"
Même si je connaissais quelques mots, quelques expressions québécoises, C'est l'ensemble qui fut difficile à comprendre : le québécois possède un vocabulaire, des expressions et des constructions lexicales différentes.
Exemples : "T'as-tu un lighter? j'ai demandé
-Leah m'a crissé dehors.
-Oh my god, t'es-tu correct ?
-On est là, man! j'ai dit.
- Pis en passant, tu me dois un sachet de
poudre !
-Fuck yeah. C'était-tu nice?
-Ta pogne tu la joke?
-Ta chienne est-tu correcte?"
Pas de glossaire à la fin du livre ! J'ai dû imprimer un lexique québécois et me fier au sens de la phrase ! Compliqué et très dommage !

Donc je vais baser mon ressenti sur le fond plutôt que la forme !
Une communauté de punks, une génération contestataire et déglinguée qui tente de vivre autrement, sans rien à devoir à personne.
C'est l'histoire de Sacha et Tom, une amitié fraternité. Ils fuient leur enfance et leurs familles et s'installent à Dawson City au fond du Yukon.
« Nos mères nous avaient appris que ça ne servait à rien de se comporter gentiment : elles nous tabassaient en revenant du travail, qu'on soit sages ou pas. »

Ils vivent entre drogues, alcool, sexe et amitiés. Ces paradis artificiels, cette précarité rythment leur quotidien.
Ils adoptent une chienne-louve Luna.
Un lien immense va se tisser entre Sacha et Luna.
Cette belle et affectueuse Luna sera fidèle à jamais ! Quelques moments de grâce ...

Sacha se sent libre jusqu'à ce que cette liberté se retourne contre elle. Elle va connaître la trahison, le rejet violent d'un milieu qu'elle aimait, victime d'une misogynie qu'elle ne comprend pas.
Une haine collective se déchaine , toute la cruauté humaine : ce sera sa descente aux enfers !
Cette version qui n'intéresse personne est aussi un texte féministe car à comportement égal, libéré,
elles auront toujours plus tort.

La version qui m'aurait intéressée :
la version pour lecteur français !
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Ce livre dégage une ambiance particulière, avec beaucoup d'aspérités. Ce n'est pas joli, ni lisse, c'est cru, brut et dur. Une menace sourde plane dès le prologue et s'infiltre même dans les moments les plus insouciants.
Pendant une bonne partie de l'histoire, je me suis sentie détachée du personnage principal. J'avais peu d'empathie pour son vécu, je n'étais pas d'accord avec ses choix et bien que je respectais son indépendance et son caractère fort, je ne m'y identifiais pas.
C'est là la grande réussite du roman: faire comprendre que la parole des victimes doit être entendue, peu importe qui elles sont et les sentiments qu'elles suscitent, peu importe si l'on est ou non d'accord avec leurs choix et leur mode de vie. Sacha mérite d'être écoutée, considérée et aidée dans son épreuve, sans qu'on lui demande d'éprouver des remords, de s'excuser ou de poser des gestes de réparation.
J'aime croire que la fin ouverte contient la possibilité d'une remontée vers la lumière. Pour ma part, j'en ressors émue et je suis convaincue de la nécessité de continuellement questionner mes biais.

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Originaires de Montréal, Tom et Sacha sont comme frère et soeur. Inséparables depuis leur rencontre, ils ont grandi et évolué ensemble, avant de tout plaquer pour fuir vers l'extrémité du monde, dans le Yukon, territoire hostile, à l'est de l'Alaska, où la courbe du chômage grimpe aussi vite que celle des températures chute. À Dawson City, le couple d'amis fait front. Tom et Sacha mangent, dorment et survivent côte à côte, emportés par une vie saisonnière, où il s'agit de profiter de l'afflux de touristes l'été pour travailler et emmagasiner de quoi lutter contre le froid hivernal. Leur quotidien est fait de rencontres, de défonces, de rires et de musique. Ils trouvent leur place au sein de la communauté folk punk de la région. Un mouvement porté par des valeurs progressistes et une conscience aiguë des répercussions pour les populations locales de la ruée vers l'or du Klondike à la fin du XIXe siècle. « La mise en tutelle de Britney Spears, la déshumanisation des femmes par l'institution médicale » sont au coeur de leurs discussions. Ils causent « du mouvement #MeToo, du mariage gai, du harcèlement de rue. »

Dans sa première moitié, La Version qui n'intéresse personne d'Emmanuelle Pierrot ressemble à un récit autobiographique consacré aux modes de vie alternatifs. Cherchant à donner l'impression qu'elle marche dans les pas des auteurs de la Beat Generation, Pierrot cite dans le texte les romans Sur la route de Jack Kerouac (1957) et Le Festin nu de William S. Burroughs, et le film Into the Wild de Sean Penn (2007), tels trois points de repère. le nature writing s'immisce dans des scènes hallucinées, corrompues par la drogue et l'alcool. Tom et Sacha vivent dans des meublés insalubres ou dans des tentes. Ils adoptent une chienne-loup, nommée Luna. Ils se font des amis, se donnent rendez-vous dans les rares bars de la ville via les messageries instantanées des réseaux sociaux. le lecteur progresse dans le texte, comme ses personnages dans la vie : aux hasards des nouvelles amitiés et des opportunités pour améliorer le quotidien.

Mais au milieu du roman, tout bascule. le piège se referme sur Sacha comme sur le lecteur. Après avoir installé son ambiance via des descriptions passionnantes de la vie des marginaux dans les terres reculées, La Version qui n'intéresse, porté par une langue sauvage, mute en un thriller psychologique, qui va gratter sous le vernis pour dévoiler l'ignominie du monde. Parce qu'elle a refusé de transformer son histoire d'amitié avec Tom en romance, Sacha va devenir une pestiférée démunie, à la merci de toutes et tous. « Dawson était le paradis, en dépit de preuves du contraire de plus en plus nombreuses, raconte Sacha. Ici comme n'importe où ailleurs, il y avait du conformisme, de la misogynie, de la haine. J'avais été incapable de le reconnaître. La violence dont j'avais été témoin, je l'avais excusée. Pendant huit ans, je m'étais crue autorisée à être pleinement moi-même, à être libre. Peut-être que ça n'avait jamais été vrai. » Peu importe comment évolue la société, les mécanismes de bouc émissaire et de construction du groupe social dans la détestation de personnes tierces constituent toujours un fondement malade des interactions humaines.

À chaque page grimpe le sentiment d'injustice. le jeu de faux semblants et la manière dont les protagonistes sourient à Sacha pour derrière lui planter un couteau dans le dos, le tout soutenu par une sournoise culture du viol, nous ébranle. C'est un roman écrit du point de vue de Sacha, qui sait combien ses mots peuvent contenir des biais de perception. Mais comme le titre l'indique, Sacha ne nous demande pas de prendre sa vérité pour argent comptant. Elle nous demande juste d'écouter sa version. Non pas pour remporter une victoire qu'elle n'obtiendra jamais, mais pour rappeler la nécessité de développer une vision d'ensemble, de déplacer la focale pour laisser l'empathie pénétrer nos coeurs dans une société où personne ne s'entend plus parler.

La version qui n'intéresse personne, c'est à la fois celle de Sacha, mais aussi celle du monde réel, où les fake news, les cabales et les procès en ligne font boule de neige pour devenir complotisme et remplacer la réalité. D'un roman sur des marginaux qui évoluent aux confins du territoire, Emmanuelle Pierrot a tiré une oeuvre universelle, d'une tragique modernité.
Lien : https://www.playlistsociety...
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Sacha et Tom ont quitté leurs familles dysfonctionnelles, quitté la ville et même leur Québec natal, ils ont levé le pouce et se sont retrouvés bien plus au Nord, bien plus à l'Ouest : au Klondike, pays des chercheurs d'or et aujourd'hui terre d'asile d'une communauté hétéroclite de marginaux, des punks du bout du monde. Les hivers à -40°C, une cabane spartiate pour tout logement et Luna, la plus belle chienne-louve que la Terre ait jamais portée : le paradis. Les années filent, dans un genre de bonheur.

Jusqu'à ce que Sacha se sente peu à peu mise à l'écart, insensiblement et sans heurt tout d'abord, puis avec une violence grandissante. Bouc émissaire ou chienne conspuée, reniée par une meute bien plus machiste et excluante que les airs libertaires qu'elle se donne en étendard.

Cheminer dans ce livre ne devrait jamais prendre fin, on voudrait s'attarder encore aux côtés de Sacha et Luna, on voudrait qu'Emmanuelle Pierrot écrive encore d'aussi beaux livres après ce premier roman si réussi.
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critiques presse (2)
LeJournaldeQuebec
20 octobre 2023
Avant même sa parution, la rumeur voulait que "La version qui n’intéresse personne" soit un roman puissant. De fait, on sort époustouflés de ce premier ouvrage d’Emmanuelle Pierrot.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
LaPresse
18 septembre 2023
C’est costaud, diablement bien ficelé, ancré dans un univers méconnu. Et le propos est bouleversant. Le genre de roman qu’on lit d’un trait, qui nous serre aux tripes quand on tourne inéluctablement sa dernière page.
Lire la critique sur le site : LaPresse
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
« La nuit bleutée se trouait lentement d’une lumière mauve encore tamisée. Est-ce que ça t’arrive de penser à la mort? a demandé Kosmas. Beaucoup à l’adolescence, j’ai dit, mais moins depuis qu’on est arrivés au Yukon. Plein de choses me gardaient en vie. Il y avait Luna, l’amitié, la nature sauvage, la beauté, l’humour. Quand on serait morts, il serait trop tard pour rire. Et puis le suicide, c’était du travail, et je ne voyais pas pourquoi je me serais tapé cette corvée-là. Déjà qu’il fallait pisser et chier, manger, boire de l’eau. Déjà qu’il fallait dormir, se soigner quand on était malade, se loger, se chauffer. Il fallait s’aimer, jouir, s’expliquer, se défendre, se battre contre… contre tout. On n’allait pas se tuer en plus. »
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Au début du monde, il n'y avait que Tom et moi. On ne s'est jamais rencontrés. On s'est toujours connus. Ce n'est pas quétaine, c'est vrai. On est nés ensemble, comme deux incarnation d'une même entité, un alien bicéphale, non viable. Il finissait mes phrases, je finissais sa poutine, il détestait la mayonnaise, on a banni les œufs de notre vie. Je l'aimais plus que quiconque. (page 13)
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On se foutait de l'amour, de l'école, de la famille. Rien ne compenserait l'absurdité dont on avait été témoins avant même d'être en âge de parler. Nos mères nous avaient appris que ça ne servait à rien de se comporter gentiment : elles nous tabassaient en revenant du travail, qu'on soit sage ou pas. Dans Le roi lion, notre film préféré avant qu'on voit Le seigneur des anneaux, Timon dit : " Quand le monde entier te persécute, tu te dois de persécuter le monde. " On a suivi son conseil et on est devenus des petits crisses.
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J'ai dit que tu pouvais tout oublier, mais souviens-toi: quand Luna dort, l'extrémité de ses pattes s'agite et, quand elle s'éveille, elle bâille, un petit bâillement aigu et délicat comme les fines plaques de glace qui dérivent sur les rivières au mois de mai, un son ténu et fragile, qui donne envie de faire silence, de faire attention. (page 91)
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