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A la recherche du temps perdu - ... tome 3 sur 4

André Alain Morello (Auteur du commentaire)Pierrette Crouzet-Daurat (Autre)Dominique Frémy (Auteur du commentaire)
EAN : 9782221047439
996 pages
Robert Laffont (12/09/1989)
4.62/5   29 notes
Résumé :
Selon Nietzsche, les vrais grands livres sont rares : eux seuls font oublier les autres livres. La Recherche est dans ce cas. Comme La Divine Comédie de Dante, comme le théâtre de Shakespeare, elle ne reproduit pas le monde, elle le produit. Sans doute Dieu a disparu de cette cosmogonie, mais que de livres en un seul ! Celui de l'enfance, celui des désirs, celui de la mondanité et de la nature, celui de l'amour, celui du sexe et de la mort, celui de l'art enfin qui ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Le long purgatoire du Temps Retrouvé, cette descente aux Enfers dantesque, ponctuée d'obscurités, d'incendies, de lieux souterrains, il n'est pas croyable que Proust n'en eût consciemment le modèle, mais dissimulé, dissimulant, il n'avoue que les Mille et Une Nuits dont la référence comique émaille des scènes sans orientalisme. Dante, le modèle donc. Et plus profondément celui de la Chute et de la Rédemption.
Il n'est pas vraisemblable que Proust n'en eût conscience, et cependant, avec sa culture, son raffinement, il était capable de folies et cette démarche d'insecte qui lance le narrateur à travers Paris à la poursuite du baron de Charlus, puis de la maison de passe jusque chez lui où Françoise et le maître d'hôtel s'entre-dévorent ; cette démarche en biais, cette allure de crabe-tourteau, il est également envisageable qu'elles aient occulté les thèmes bibliques et la Divine Comédie. Ils restent sous-jacents.
On s'enfonce en effet, dès l'ouverture de ce dernier volume de la Recherche, dans une succession de scènes où le mal s'aggrave petit à petit. C'est d'abord les familiers que l'on ne reconnaît pas, la médisance du salon Verdurin altéré par les ans ; Saint-Loup dont les mauvais côtés seuls remontent à la surface et subsistent dans l'effondrement des souvenirs et des amours (Gilberte, Albertine). Puis la flagellation, les antichambres et les oeils-de-boeuf, des intérieurs dont cette fois Dostoïevski, évoqué à deux reprises dans cette « cathédrale inachevée », pourrait avoir fourni l'inspiration (par la prestesse des changements de décor, le rassemblement de personnages glanés au détour d'un cloaque dans de petits salons, des pièces closes) mais qui évoquent, en aval du courant littéraire, le Genet de Notre-Dame-des-Fleurs. Enfin le métro parisien dont l'abri ne sert plus, pendant les bombardements, virtuose parallèle de Pompéi et Sodome et Gomorrhe, qu'à d'ignominieux tripotages et des attouchements subreptices. La guerre environne cette perdition. Non la Grande Guerre sur le front, mais en creux sur la capitale, celle des embusqués et des plaisirs frivoles de l'arrière.
Et c'est peut-être la vraie ; car la guerre parisienne et son décor maudit semblent manifester le péché qui s'est emparé du monde innocent du « Côté de chez Swann » ou des « Jeunes Filles en Fleurs». En 1913, Proust a achevé le manuscrit principal de la Recherche. Il ajoute après-guerre « béquets » et « paperoles », qui font aux éditeurs s'arracher les cheveux pour tenter d'en recoudre un roman linéaire, au vaste champ d'épandage, au terrain vague du dernier livre. La malédiction du Temps lui-même, son propos initial, la guerre vient à point nommé l'illustrer. Que l'on n'en voie que les aspects mesquins répond finalement à cette dérisoire entropie de la condition humaine, dont il retrace le non-sens dans la succession du récit. La guerre est la figure politique de l'arrivée à l'âge adulte et de la perte des illusions. Il n'y a rien au-delà : la paix même ne saurait révéler du monde que les déceptions, le caractère irréversible du changement. Seule l'écriture rédime : la traversée des Enfers est aboutie à un beau livre. Choral magnifique des pavés de la cour de l'hôtel de Guermantes...
Mais annonciateur du Salut, comme « une corne de taureau dans la littérature » (Leiris), se trouve d'abord l'étrange passage où le narrateur affirme avoir tout inventé, fabriqué tous les personnages « pour les besoins de (sa) démonstration », à l'exception du seul couple sublime des Larivière. On éprouve, du reste, avec difficulté le "sublime" de ces cafetiers sortis de leur retraite pour aider leur nièce veuve. Mais si Proust le prend pour tel, c'est qu'enfin le réel affleure. Après tant de pages de fiction, après « le rocher de la Matière » où s'enchaîne le baron, voici l'évènement ni de l'ordre de l'imagination, ni de l'inanimé : en ce modeste point de l'espace et du temps se conjoignent, comme à la naissance du Sauveur, l'éternel et l'insignifiant, l'Histoire et la charité. La création se résume – elle trouve son sens. La folie du monde et ses désillusions ne valent que si on les transforme en un bel objet littéraire. A l'inverse, le livre ne serait rien s'il ne disait la vérité.

Lien : http://siladola.unblog.fr/20..
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Le plaisir de retrouver le style particulier de Marcel Proust, d'analyser les sentiments, la rupture, l'oubli, le temps qui passe.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Le chagrin finit par tuer. A chaque nouvelle trop forte nous sentons une veine de plus qui saillit, développe sa sinuosité mortelle au long de notre tempe, sous nos yeux. Et c'est ainsi que peu à peu se font ces terribles figures ravagées du vieux Rembrandt, du vieux Beethoven.

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Moi je dis que la loi cruelle de l'art est que les êtres meurent et que nous-mêmes mourions en épuisant toutes les souffrances, pour que pousse l'herbe non de l'oubli mais de la vie éternelle, l'herbe drue des œuvres fécondes, sur laquelle les générations viendront faire gaîment, sans souci de ceux qui dorment en dessous, leur "déjeuner sur l'herbe".
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Les aéroplanes que j'avais vus quelques heures plus tôt faire comme des insectes des taches brunes sur le soir bleu, passaient maintenant dans la nuit qu'approfondissait encore l'extinction partielle des réverbères, comme de lumineux brûlots.
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Ce sont nos passions qui esquissent nos livres, le repos d'intervalle qui les écrit.
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Il est faux de croire que l'échelle des craintes correspond à celle des dangers qui les inspirent. On peut avoir peur de ne pas dormir et nullement d'un duel sérieux, d'un rat et pas d'un lion.
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MARCEL PROUST / DU CÔTÉ DE CHEZ SWANN / LA P'TITE LIBRAIRIE
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