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EAN : 9791041412891
320 pages
Points (15/03/2024)
3.42/5   109 notes
Résumé :
En 1944, au milieu des étendues sauvages de la Laponie, un jeune soldat finlandais, Olavi Heiskanen, officie comme traducteur dans un camp de prisonniers dirigé par les Allemands. La cruauté fait partie du quotidien, détenus et gardiens luttent pour préserver leur humanité.
Enontekiö, 1947. La journaliste Inkeri Lindqvist s’installe dans la ville pour écrire sur la reconstruction de la Laponie. Mais elle cherche avant tout, et en toute discrétion, à élucider ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (65) Voir plus Ajouter une critique
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Si vous aimez les grands espaces arctiques et leurs paysages de neige, si vous n'êtes pas insensibles à l'histoire du XXe siècle, alors partez à la découverte de ce premier roman tout-à-fait étonnant de la finlandaise Petra Rautiainen. L'intrigue mêle seconde guerre mondiale en Laponie, mystère d'une disparition, neige et nuit polaire et culture samie. Dépaysement assuré.
Tout commence en 1947, lorsque Inkeri Linddqvist arrive à Enontekiö. Journaliste et photographe, elle s'intéresse à la reconstruction de la région détruite par la guerre, mais sa motivation première c'est la recherche de la trace de son mari disparu dans un camp de prisonniers.
Finlandais et samis vivent côte à côte, et ils ont comme point commun de ne pas s'épancher sur ce terrible et trouble passé qui a bouleversé le pays. Grâce à Bigga-Marja, la journaliste va découvrir la culture sami. Les Samis, (et non les lapons, terme péjoratif) sont un peuple autochtone, à l'origine nomade, qui vivent dans le nord de la Finlande, de la Suède, de la Norvège et une partie de la Russie.
L'originalité de ce roman, c'est d'alterner deux périodes et deux voix différentes. La première est issue d'un journal écrit par un soldat finlandais envoyé comme interprète au centre pénitentiaire d'Inari en février 1944. La seconde raconte l'arrivée et l'installation d'Inkeri à Enontekiö en 1947. En slalomant entre deux époques, deux histoires, se construit peu à peu le puzzle de ce mystère qui entoure ce camp de prisonniers pas comme les autres et qui n'a jamais figuré sur les cartes. Que s'y passait-il vraiment ? Et que sont devenus ses gardiens et ses prisonniers à la fin du conflit ? Il y avait une femme parmi eux, Saara, mais qui était-elle exactement ? Olavi, qui l'a connue, dit qu'elle était « Une guérisseuse, une noaidi. Elle était saigneuse et infirmière dans les camps »
Inkeri va être confrontée à la chappe de silence des habitants, à commencer par Olavi, son colocataire, qui semble cacher des choses, comme cette photo prise dans le camp de prisonniers et qu'il tente de dissimuler dans les fondations de la nouvelle église.
« Pour bien mentir, il faut rester aussi proche que possible de la vérité, Olavi le savait »

On se prend d'affection pour Inkeri et son combat difficile pour connaitre la vérité. Rattrapée par son passé et ses années africaines aux côtés de son mari, elle tente, parfois avec maladresse de se lier avec les samis. Elle veut faire connaitre leur culture et, contrairement à ses contemporains, n'a pas d'opinion négative à leur égard.
L'intrigue se met en place petit-à-petit, et, au fur et à mesure que le mystère s'éclaircit, on découvre la vraie personnalité des personnages, et les intrications entre eux. C'est aussi une plongée dans une culture souvent méconnue avec ses croyances, ses rites et sa langue.
L'écriture est fluide, agréable, avec de nombreux dialogues, et la personnalité de chaque personnage bien cernée. Sur des bases historiques sérieuses, la romancière a construit une intrigue bien ficelée qui m'a tenue en haleine jusqu'à l'épilogue.


Ce roman est traduit du finnois par Sébastien Cagnoli. Spécialiste de culture finno-ougrienne et écrivain, il a traduit entre autres les romans de Sofi Oksanen. On ne souligne pas assez le travail de traduction qui demande des connaissances qui vont au-delà de la langue traduite, et il est dommage que le nom de Sébastien Cagnoli soit absent de la couverture et qu'on ne le trouve que sur la 4e de couv et à l'intérieur du livre.
Je remercie les éditions du Seuil et Babelio pour la découverte de ce premier roman.
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Un pays de neige et de cendres est le premier roman d'une jeune auteure finlandaise de trente-trois ans, Petra Rautiainen, passionnée notamment par l'histoire du peuple Sami en Laponie.
Nous sommes tout d'abord en 1944 dans un camp de prisonniers dirigé par les Allemands, au milieu des étendues sauvages de Laponie... Nous découvrons le quotidien d'un camp, la survie, la cohabitation des détenus et des gardiens qui luttent pour préserver une part de leur humanité. Ici c'est une cohabitation compliquée entre Allemands, Finlandais, Polonais et Samis, ce peuple nomade originaire de Laponie...
Et ce récit construit sous la forme d'un journal va alterner avec celui d'une femme journaliste et photographe suédoise, Inkeri Lindqvist qui s'installe en 1947 dans la ville d'Enontekiö en Laponie, officiellement venue ici pour écrire un livre sur la reconstruction de la Laponie, mais en creux elle est à la recherche de son mari disparu durant la guerre... Nous allons suivre ses pérégrinations jusqu'en 1950...
C'est un roman surprenant, au rythme déroutant... Bien qu'ici il soit question de Laponie, c'est-à-dire de grandes étendues, des paysages de neige à l'infini, l'atmosphère est ici parfois étouffante, oppressante même.
Nous sommes pris par la main, entraînés dans cette oscillation, tiraillés presque par deux récits qui vont se parler, dialoguer entre eux, durant tout le roman.
Petra Rautiainen nous révèle un pan de l'Histoire sans doute méconnu pour beaucoup d'entre nous. Un épisode de la fin de la Seconde Guerre mondiale vécu sur ce territoire éloigné aux confins de la Finlande, théâtre des haines et des violences, des atmosphères de fin de guerre où l'ennemi sent que la victoire lui échappe irrémédiablement et, pour ne pas perdre la face, donne toute sa rage, toute sa haine, dans ce processus d'extermination final...
J'ai découvert ici un territoire qui fut déchiré par la guerre, avec des enjeux complexes entre Allemands, Russes, Finlandais où le destin du peuple Sami fut malheureusement oublié dans cette tourmente...
L'écriture est plutôt conventionnelle, bien que d'une splendide maîtrise. Cela tient sans doute à la manière ici de convoquer L Histoire, sa tragédie et des personnages hantés par le poids de cette douleur ; cela rend le roman prenant, addictif à certains endroits. On veut dérouler le fil jusqu'au bout du paysage...
Cette écriture tient sans doute aussi à sa traduction réussie. C'est un roman traduit du finnois par Sébastien Cagnoli ; j'ai découvert que ce dernier avait traduit il y a quelques années ce magnifique roman qui m'avait bousculé et émerveillé, Purge de Sofi Oksanen. Il n'y a pas de hasard.
Un pays de neige et de cendres... Pourquoi la neige, pourquoi les cendres ? La neige est là dans le paysage parfois ébloui par des journées sans fin où la nuit ne vient jamais, tandis que les cendres évoquent avec effroi les nuits intérieures, la barbarie à visage humain, le malheur du monde et la mort au bout du chemin, au bout de la geôle, derrière les grillages, dans la neige tâchée de sang...
Peu à peu les deux textes s'imbriquent et commencent à cheminer ensemble, entrer en résonnance, pour n'en faire qu'un au final.
Par le truchement d'une histoire secrète et tourmentée, nous venons aussi à la rencontre des Samis, peuple nomade voyageant vers le cercle arctique. Les nazis avaient à peu près la même considération à leur égard qu'ils en avaient à celle des tziganes... C'est dire...
Je me suis parfois un peu perdu dans cette intrigue qui porte bien sûr ce roman, reposant sur la disparition du mari de cette journaliste et qui lui donne tout son sens. Bien sûr, la tragédie de la guerre, sa douleur quotidienne telle que décrite, parfois cruellement et avec réalisme, ne peuvent laisser indifférent.
Mais la lumière de ce roman, suggérant l'émotion, m'est venue dans cette très belle relation d'amitié entre Inkeri Lindqvist et cette jeune adolescente Sami, Bigga, petite-fille du propriétaire qui l'héberge. La journaliste va lui enseigner l'art de la photographie, l'aider à s'émanciper d'un destin qui paraît parfois si tristement scellé dans un sort les éloignant de manière discriminatoire du droit à l'éducation. Elle va du reste donner des cours d'art et de photographie aux enfants du village, elle va peu à peu comprendre ce que tout un peuple a subi dans l'indifférence la plus totale. C'est beau et, contre toute attente, c'est ce pan du récit qui m'a le plus touché. Plus que l'intrigue...
Je remercie les Éditions du Seuil et Babelio pour ce beau livre reçu dans le cadre d'une opération Masse Critique.
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Je remercie les Éditions du Seuil et Babelio pour ce beau livre reçu dans le cadre d'une opération masse critique.

J'ignorais totalement qu'en Finlande du nord dans leur toundra le peuple Sami aux beaux costumes lapons richement coloriés pouvaient souffrir des rafales de sable comme leurs frères dans le Sahara.

La neige du titre pendant la longue nuit d'hiver me paraît assez évident, les cendres par contre se rapportent à la dernière guerre mondiale et l'avance meurtrière des nazis dans cette partie périphérique du continent européen.
La neige noire des cendres, en somme.

Il s'agit d'un ouvrage particulièrement ambitieux qui en 2 temps, de février à septembre 1944, soit la période de guerre, et l'après-guerre, allant de 1947 à 1950, nous raconte les horreurs des hostilités entre différents peuples, tels les Finlandais, les Allemands envahisseurs et les Samis qui coexistent péniblement s'ils ne se battent pas et cela dans un climat impitoyable.

Les deux périodes ne se succèdent pas dans un ordre chronologique strict, mais nous sont présentées par deux personnages différents en de nombreux brefs chapitres qui s'alternent systématiquement.

Vu la conception originale et la structure spécifique de l'ouvrage et compte tenu des thèmes abordés, il est tout à fait surprenant qu'il s'agisse d'une première oeuvre littéraire par, en plus, une jeune écrivaine, car Petra Rautiainen n'a que 33 ans.
Que ce roman, paru initialement en Finnois en 2020, soit déjà traduit en 12 langues n'est, par contre, pas étonnant du tout.

Je partage l'avis de notre amie Regine, "Zephirine" sur Babelio, que la traduction française de ce livre par Sébastien Cagnoli est d'une qualité exceptionnelle, qui confirme ses talents déjà démontrés dans sa version française du roman superbe de Sofi Oksanen "Purge".

L'auteure, sans se lancer dans une étude ethnologique académique, nous apprend beaucoup sur le peuple Sami, estimé à quelque 84.000 citoyens actuellement et éparpillés en Finlande, Suède, Norvège et Russie. Un peuple situé au même niveau par les nazis que les Roms ... et donc à éliminer !

Je n'ai, hélas, jamais visité la Finlande, bien que ce pays, qui l'année dernière a été proclamé pour la 4e fois le "happiest country in the world", m'intrigue considérablement.
Heureusement que nous avons Sofi Oksanen, Arto Paasilinna, Paivi Alasalmi, Antti Tuomainen et autres auteur-e-s talentueux.
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Tout d'abord, merci aux Éditions du Seuil et à une opération Masse critique privilégiée pour l'envoi de ce livre !

Jean Gabin nous chantait « Maintenant je sais, je sais qu'on ne sait jamais ».
Je me suis longtemps cru calé en histoire, j'ai appris depuis à être plus modeste …
Ce préambule pour vous avouer que je connaissais peu l'histoire de la Finlande et absolument pas son rêve passé de « Grande Finlande » avec une base raciale pure ni les mesures prises après la seconde guerre mondiale pour assimiler le peuple Same.
Les livres me permettent de continuer à apprendre et à réaliser qu'il me reste beaucoup à apprendre !
Petra Rautianien situe son roman en pays Same, en Laponie, zone au nord de la Finlande, de la Norvège, de la Suède et de la Russie.
le récit s'articule autour de deux époques : la fin de la guerre, 1944-1945 et quelques années après, de 1947 à 1950.
La période de la fin de guerre est relatée par le journal de, Väinö Remes, un interprète finlandais employé dans un camp de prisonniers géré par les Nazis. L'après-guerre, présentée de manière plus traditionnelle, nous relate l'arrivée d'Inkeri Lindqvist, une journaliste et photographe venue réaliser un reportage sur le peuple same, mais ceci est un prétexte, en réalité elle veut surtout rechercher les traces de son mari prisonnier, disparu durant la guerre.

Les chapitres relatifs à ces deux périodes s'alternent et peu à peu construisent la trame de ce beau roman.
Son titre est éloquent : pays de neige car dans ce grand nord, le froid règne, la neige couvre tout, les saisons sont bien éloignées des nôtres, l'une avec des jours très longs et une luminosité aveuglante et l'autre plongée dans une nuit sans fin ; pays de cendre, car cette neige fut couverte de cendres par les Nazis. «Les cendres flottaient au-dessus des corps ».

Petra Rautianen est historienne de formation et a défendu une thèse sur les Sames, ce peuple lapon, éleveur de rennes et aux habits très colorés qui vit dans cette contrée sans en connaître les frontières. Sa bonne connaissance de l'histoire de ce peuple lui permet, par le biais de ce roman, de mettre en lumière des événements encore souvent occultés aujourd'hui même en Finlande. La lutte héroïque de ses soldats contre l'armée rouge est souvent le seul fait mis en exergue, ici l'autrice nous montre également la collaboration avec les Nazis allant jusqu'à se mettre sous leurs ordres, et l'idéal d'une « Grande Finlande » composée d'une race pure et asservissant les races inférieures.
« Ces peuples primitifs de cueilleurs du Grand Nord sont des marginaux, extérieurs à la civilisation véritable. Ils sont considérés comme une anomalie pathologique résultant de facteurs environnementaux ».
Ces races sont étudiées scientifiquement pour un programme de pureté raciale. Et cela a continué après guerre comme nous le montre l'autrice.

Mais laissons ici ces considérations historiques, je ne voudrais pas rebuter celui qui lit cet avis, si ce roman se déroule dans un contexte historique, il reste avant tout un véritable roman !

Les personnages, certains très attachants tels la petite Bigga-Marja et le vieux Piera, d'autres nettement moins reluisants, sont tous intéressants. Les relations qu'ils ont entre eux se dévoilent progressivement tout au long du récit, comme après la nuit polaire le lecteur découvre la lumière. Beaucoup de secrets entourent les personnages et Petra Rautianen réussit à ne les révéler que partiellement et lentement.

Je ne voudrais pas oublier de mentionner la presentation du camp de prisonniers et sa cruauté, la description du territoire same et de ses habitants poussés à s'assimiler.

L'autrice a un style caractérisé par des phrases courtes et beaucoup de dialogues. le livre se lit facilement et avec plaisir.




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Au coeur de la Laponie, de ses étendues neigeuses et de ces ciels où la lumière danse avec les ténèbres, un camp de prisonniers dirigé par les Allemands hérisse ce lieu sauvage de sa cruauté.

On oscille entre deux périodes, 1945 et 1947.
Olavi est un jeune soldat finlandais, traducteur dans ce camp sordide. Il est toujours à Enontekïo lorsque Inkeri, une journaliste photographe, vient enquêter discrètement sur la disparition de son mari pendant la guerre.

Tout au long de ce roman on plonge dans l'ombre de secrets, n'osant pas croire à leur noirceur. Pourtant l'Histoire nous a déjà révélé jusqu'où les hommes peuvent aller pour créer une race aryenne, jusqu'où leurs expériences peuvent défigurer l'humanité, s'arroger le droit de définir le peuple same, les Juifs et d'autres communautés, comme races inférieures, s'emparer de leurs biens, détruire leur culture, leur identité, leur droit à la vie.

Pendant ce temps la nature continue son cycle de beauté indifférente, inégalable. Sous son soleil de minuit, ses ténèbres de plomb ou étoilées de magie, ses ressources pillées attendent la fin de la tempête des hommes pour se reconstruire. Dans cet environnement venteux et glacial, les fleurs résistent en rasant le sol. Elles offrent une leçon d'espoir. Même quand les oiseaux tombent du ciel en cendres.

Dans ce roman on croise différents personnages, tous torturés de secrets, ou transformés par la guerre et ses règles. Elle a révélé leur nature, leurs faiblesses. Mais aussi leur impuissance à agir autrement, englués dans cette vase de désespoir, d'autorité, de pensée unique et glaçante.

Ils sont encore comme recouverts des cendres de la destruction. Ils ont beau ériger une église sur le cadavre d'une autre, créer une école pour les enfants de culture same, rien n'effacera ce qui niche au fond d'eux-mêmes, leurs souvenirs poisseux. Rien n'effacera vraiment leur regard sur ce peuple en marge, à la culture pure et étrange, riche et sauvage, voyageant sur un territoire sans frontières.
Même le mystérieux Olavi, même Inkeri qui veut apprendre à Bigga, jeune fille Same, à dessiner la lumière grâce à la photographie, sont loin d'effacer les cendres fondues à la neige.

J'ai beaucoup aimé ce roman historique, je connaissais peu cette part d'histoire. le style concis et ténébreusement poétique de Petra Rautiainen va directement à l'émotion pure, sans s'appesantir. de très beaux passages à lire dans le journal de Vaïnö, l'interprète Finlandais. Ce style à la fois glacial et lumineux s'accorde vraiment bien à ces étendues sauvages de Laponie où se mêle l'âme du peuple same, et aux traces laissées par l'histoire des hommes rongés par la guerre.

Je remercie Babelio et les Éditions Seuil pour ce très bon roman.
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Citations et extraits (40) Voir plus Ajouter une citation
Les gardiens allemands ne supportent pas le silence, il a dit. Certains ne se font pas au jour, d'autres à la nuit.. Quatre ans de supplice...
C'est à cause de la lumière. La moitié de l'année, il y en a trop. Le reste du temps, elle n'est jamais normale, et le ciel est plein de phénomènes plus étranges les uns que les autres, qui te font croire aux dieux païens, au diable, à n'importe quoi.
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- J'ignore ce qui est arrivé à ton mari Kaarlo Lindqvist, dit Koskela après un silence. Et je n'ai pas l'intention de retourner en prison. N'oublie pas que c'était la guerre... C'est une question de perspective. Et si les évènements s'étaient conclus autrement, ces erreurs n'auraient pas été des erreurs.
- Ah, vous êtes tous victimes des circonstances, hein ? s'exclama Inkeri, frustrée, virulente. Vous n'auriez pas pu penser autrement ?
- Les gens ne sont pas construits pour penser autrement, madame Lindqvist, énonça Koskela avec un formalisme glaçant. Les gens croient être radicaux mais leurs pensées sont rarement uniques. Même Hitler n'était pas unique par ses pensées, ni exceptionnellement doué. Il a seulement eu de la veine. Car les gens sont paresseux, oui. Et même s'ils croient penser autrement ou mener une vie "spéciale" - en s'adonnant à la photographie en Afrique, au hasard -, est-ce là "penser autrement". Vous faites de la photo, n'est-ce pas ?
Inkeri acquiesça, blême. Elle avait joint les mains sur ses genoux. Ses paumes étaient en sueur.
- Alors vous savez tout sur les illusions. Même les meilleurs d'entre nous s'y laissent tromper.
Le cœur d'Inkeri battait fort. Elle suffoquait. Le vent soufflait dehors. Les oiseaux voletaient. Elle repensa aux paroles de Piera : "Les oiseaux deviennent gagas."
- Il en va de même avec la guerre. La vraie guerre ne se déroule pas en première ligne mais complètement ailleurs. La vraie guerre, c'est tout autre chose, dit Koskela d'une voix forte, puis il marqua un long silence.

p.189
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À un certain moment de son chagrin, Inkeri se rendit compte que, malgré tous les amants qu'elle avait eus, seul Kaarlo avait tenu ses promesses. Il lui avait toujours offert soutien et réconfort. Il était un ami. Malgré les nombreux autres hommes, personne en ce monde ne la connaissait aussi bien que lui. Sous le poids du chagrin, elle comprenait enfin ce qui était superflu et ce qui comptait vraiment, au bout du compte. Deux compagnons. L'amitié. Leur amitié.
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Tout est calme et paisible. Cela faisait longtemps qu'on n'avait pas vu autant d'empreintes d'animaux dans les parages. Les fleurs vont bientôt s'épanouir. C'est plantes ont des propriétés xérophytes. Elles ont de petites fleurs, un rhizome puissant et des feuilles cireuses. C'est ainsi qu'elles tirent le maximum de la lumière qui parvient jusqu'ici.
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Mais j’ai vu ses yeux. Ils ont une couleur étrange. Je n’ai jamais rien vu de tel. J’avais peur de les regarder, mais je ne pouvais pas m’en empêcher. Ils sont comme des myrtilles gorgées de jus et scintillantes de rosée, ou comme des violettes des chiens à peine écloses. Pas bleus, d’un tout autre aspect.
Comme s’ils reflétaient une lumière perçante et l’univers entier.
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En 1944, au milieu des étendues sauvages de Laponie, un jeune soldat finlandais, Olavi Heiskanen, officie comme traducteur dans un camp de prisonniers dirigé par les Allemands. La cruauté fait partie du quotidien, détenus et gardiens luttent pour préserver leur humanité.
Enontekiö, 1947. La journaliste et photographe Inkeri Lindqvist s'installe dans la ville pour écrire sur la reconstruction de la région. Mais elle cherche avant tout, et en toute discrétion, à élucider le mystère qui entoure la disparition de son mari durant la guerre.
Alors qu'Olavi et Inkeri cohabitent, la journaliste découvre peu à peu ce que tout un peuple a subi dans l'indifférence la plus totale. Et dans la nuit polaire, l'Histoire s'apprête à révéler, sous le soleil de minuit, ses plus sombres secrets.

Petra Rautiainen est née en 1988 en Finlande. Elle travaille sur une thèse abordant la représentation du peuple sami dans les médias de son pays. Un pays de neige et de cendres, son premier roman, est un best-seller dans son pays et a été traduit dans douze langues.
Traduit du finnois par Sébastien Cagnoli.
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