Avec malignité, Roubaud va ainsi tout au long de son ouvrage entremêler sa paraphrase du texte arthurien, centré surtout sur Gauvain, personnage certes non secondaire, mais non plus central de la Geste, de ses commentaires, explications et gloses sur le contenu et les structures du récit.
Il clôt son oeuvre par une section six nommée Quincaillerie dont le seul mot entre parenthèses est :
(Retardée).
Au lecteur de s'attarder donc dans un magasin à meubler soi-même qui doit retentir des bruits de ferraille des heaumes, hauberts et autres chausses de maille.
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Tout jeune homme un tant soit peu beau, bien fait et brave, qui atteint l'âge de quinze ans et qui désire s'établir dans le monde arthurien en méritant un minimum de considération, doit satisfaire pour commencer à trois conditions, que nous noterons CH. ART. 1, CH. ART. 2, CH. ART. 3.
Quelles sont-elles ?
CH. ART. 1: trouver son nom et son lignage.
CH. ART 2 : acquérir la prouesse, les "armes".
CH. ART. 3 : atteindre l'amour : amors.
La condition CH. ART. 1 suppose, de préférence, qu'on ignore son nom et ses origines (nécessairement élevées, sinon royales), qui feront donc l'objet d'une quête du nom, notée QUN (si on possède déjà ces objets, on peut s'en tirer en les "oubliant" par suite de maladie ou de blessure conduisant à une perte momentanée de mémoire ; mais ce n'est qu'un pis-aller).
La condition CH. ART. 2 sera remplie par une deuxième quête, la quête de l'aventure, QUAV. Elle se déroule en errance dans la forêt et fait intervenir un opposant du genre chevalier félon, géant ou dragon (on peut, dans un premier temps, et pour raffiner, refuser le combat, comme Tristan de Nanteuil quand il rencontre le serpent ; on est alors au stade BEAU COUARD [comme on était plus haut, au stade BEL INCONNU] ; stade très intéressant, mais auquel il ne vaut mieux pas, comme Dinadan, s'attarder).
Enfin la condition CH. ART. 3 donne lieu à la troisième quête, la quête de la fée, QUF.
En effet, le premier amour du jeune arthurien vient de la rencontre, au fond d'un lit luxueux abrité par un tente somptueuse dressée dorée dans une prairie intensément verte au soleil, d'une jeune et belle fée disponible, placée là à son intention (la fée peut aussi peigner ses longs cheveux d'or à la fontaine).
Mais les autres : les Yvain, les Bohort, les Sagremor, les Méraugis ? Seront-ils à jamais privés, et nous surtout avec eux, d'une bonne joute et d'un beau combat avec Gauvain, et brisements de lances et froissements de heaumes, effondrements de chevaux, saccages d'épées ? Eux dont la force est quasiment égale, égale peut-être, qui sait ? à la sienne, qui est la plus grande force ? Ce serait dommage. Le problème a des solutions nombreuses et je devrai me borner à une seule, la plus importante : c'est celle de l'incognito.
Pour une raison ou une autre, les voilà induits en erreur ; ils pensent être autre part. Les armures ont été changées, les écus... les deux amis se battent sans se reconnaître. Le combat dure. Nul ne prend l'avantage décisif. Tantôt l'un semble l'emporter, tantôt c'est l'autre. Les chevaux sont en sueur ; les héros en sang. Les spectateurs trépignent. Enfin Yvain, Méraugis ou Lancelot dit ce qu'il aurait dû dire depuis longtemps, ce qu'on lui hurlait de dire sans qu'il y prenne garde : "Mais qui êtes-vous, sire?" (s'il pose la question, d'ailleurs, c'est qu'il soupechoune un pou la réponse).
Gauvain soulagé, répond : "Je suis Gauvain, fiex au roi Lot et niès le roi Arthur." On s'embrasse. Repos.
Enfonçons-nous maintenant plus avant dans les méandres du conte, dans sa casuistique tortueuse. Les circonstances toutes naturelles au fond, de l'aventure comme nous venons de la décrire ne lui suffisent pas. Il est vrai qu'elle ne s'adapte pas à toutes les situations. Dans un tournoi, par exemple, il faut un vainqueur. Le tournoi a même été suscité pour cela, pour un vainqueur dont on a besoin qu'il triomphe, que ce soit Lancelot, Tristan ou Durmart. Mais alors, là, l'impasse est totale. L'axiome (GVIIa) est un obstacle infranchissable. On peut, bien sûr, s'arranger pour que Gauvain soit absent. Il n'est pas là. Bon. Trop facile. Le public, poli, ne vous fera pas de remarques désobligeantes. Il se contentera de bâiller, ce qui est pire. Et la valeur de votre héros, qui devait être rehaussé par le tournoi, n'aura pas avancé d'un pouce ; au contraire. Vous aurez composé trois mille six cents vers pour rien.
Quelques jours avant de disparaître, Merlin vint faire ses adieux à Blaise. Ayant réglé quelques affaires en suspens avec le pape, il quitta Rome pour la Nortombrelande qu'il atteignit en moins d'une journée. Il dit alors à Blaise qu'il le voyait pour la dernière fois, qu'il s'en allait séjourner auprès de son amie et qu'il ne serait plus jamais en son pouvoir de la quitter et de se déplacer à son aise. « S'il en doit être ainsi, pourquoi y vas-tu donc ? » dit Blaise douloureusement. Mais si Merlin ajouta quelque chose, nous ne sommes pas près de le savoir.
Avec douze écrivains de l'Anthologie
Avec Anne le Pape (violon) & Johanne Mathaly (violoncelle)
Avec Anna Ayanoglou, Jean d'Amérique, Camille Bloomfield & Maïss Alrim Karfou, Cyril Dion, Pierre Guénard, Lisette Lombé, Antoine Mouton, Arthur Navellou, Suzanne Rault-Balet, Jacques Rebotier, Stéphanie Vovor, Laurence Vielle.
Cette anthologie du Printemps des Poètes 2023 proposent 111 poètes contemporains et des textes pour la plupart inédits. La plus jeune a 20 ans à peine, le plus âgé était centenaire. Tous partagent notre quotidien autour de la thématique corrosive des frontières. Leurs écrits sont d'une diversité et d'une richesse stimulantes. Ils offrent un large panorama de la poésie de notre époque. Avec notamment des textes de Dominique Ané, Olivier Barbarant, Rim Battal, Tahar Ben Jelloun, Zéno Bianu, William Cliff, Cécile Coulon, Charlélie Couture, Jean D'amérique, Michel Deguy, Pauline Delabroy-Allard, Guy Goffette, Michelle Grangaud, Simon Johannin, Charles Juliet, Abdellatif Laâbi, Hervé le Tellier, Jean Portante, Jacques Roubaud, Eugène Savitzkaya, Laura Vazquez, Jean-Pierre Verheggen, Antoine Wauters…
Mesure du temps
La fenêtre qui donne sur les quais
n'arrête pas le cours de l'eau
pas plus que la lumière n'arrête
la main qui ferme les rideaux
Tout juste si parfois du mur
un peu de plâtre se détache
un pétale touche le guéridon
Il arrive aussi qu'un homme
laisse tomber son corps
sans réveiller personne
Guy Goffette – Ces mots traversent les frontières, 111 poètes d'aujourd'hui
Lumière par Iris Feix, son par Lenny Szpira
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