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EAN : 9782377312535
296 pages
Sarbacane (01/05/2019)
4.4/5   10 notes
Résumé :
Jérôme Ruillier nous fait (re)découvrir l'histoire de l'immigration maghrébine à travers des témoignages poignants (en trois parties : les pères, les mères, les enfants), qui rendent compte de la quête d'identité et des effets au quotidien du racisme.
Un roman graphique « coup de poing », essentiel, alors que se discute depuis des mois le mauvais feuilleton de « l'identité nationale » qui, en virant au défouloir raciste, n'a été rien d'autre qu'une machinati... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
J'avais été très marquée par le documentaire de Yamina Benguigui, Immigrés, composé de trois volets: les hommes, les femmes, et les enfants.
Yamina Benguigui y interviewe la toute première génération d'hommes venus d'Algérie pour trouver une vie meilleure en France, en grande demande de main d'oeuvre en cette période d'après-guerre et de croissance; les épouses rapatriées quelques années plus tard en général suite à une politique de regroupement familial; et enfin les enfants nés en France de cette première génération, coincés entre deux culture et deux nationalités.
Ce documentaire édifiant, retraçant grâce à ces portraits l'histoire de l'immigration algérienne en France, est une vraie mine d'or pour en saisir les enjeux et mieux comprendre pourquoi on en est là aujourd'hui, quant aux rancoeurs et et méfiances que l'on peut percevoir d'un côté et de l'autre.
Jérôme Ruillier a décidé, avec l'accord de Yamina Benguigui à qui il a soumis des pages et des pages de dessins, d'adapter ce documentaire en roman graphique.
Je ne suis pas fan des dessins, un peu trop simplistes à mon goût, mais je trouve cette adaptation très réussie. J'y ai retrouvé, en général, les émotions ressenties par le documentaire, et il ne manque que la bande originale -magnifique, surtout grâce à Idir - et les visages frais et spontanés des enfants interviewés qu'on ne retrouve pas ici...
J'ai apprécié de revenir sur ces témoignages d'hommes qui ont le sentiment d'avoir gâché leur vie à attendre un retour au pays qui ne s'est pas fait, celui de ces femmes d'abord complètement perdues, sans leur voile, qui prennent leur vie en main, apprennent à écrire et lire et trouvent un travail pour une vie meilleure, celui de ces enfants enfin, en conflit avec leurs pères qui font tout pour se faire invisible quand eux affirment haut et fort leur nationalité française et leurs droits (c'est l'époque des premières manifestations des Beurs).
Et puis... l'horreur de ces bidonvilles qui n'avaient rien à envier à ceux des pays en voie de développement, les baraquements d'hommes seuls, les préfabriqués temporaires qui se font permanents, le cynisme, enfin, de l'état, qui tente de les renvoyer quand il n'en veut plus, pour la somme de 10 000 francs.
Un documentaire et un roman graphiques essentiels si on veut témoigner face aux ignorants qui ne voient en ces immigrés, qui font partie de l'histoire française, que des assistés, des voleurs d'emploi, des racailles.
Je suis surprise qu'il n'ait été que si peu lu pour l'instant.

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Ce roman graphique est issu des témoignages recueillis par Yamina Benguigui à la fin des années 90 auprès de plusieurs personnes issues de l'immigration maghrébine dans les années 50 et 60, au temps de la reconstruction après-guerre et de son grand besoin de main-d'oeuvre.
Le choix graphique est étonnant : des pages épaisses veloutées, un dessin au style naïf, des personnages aux têtes de chats avec des moustaches en queue de poisson, une écriture manuscrite… on pourrait se croire dans un roman pour enfants, ou penser à un ouvrage de débutant, d'amateur. Mais le sujet n'est pas léger, il est grave et parfaitement documenté. de la douceur pour atténuer la dureté de certains propos ? Paradoxalement ce choix de visage animalier fait penser au terrible et magistral Maus d'Art Spiegelman.
D'abord les pères, dont certains ont combattu pour la France lors de la seconde guerre mondiale. Ils sont venus travailler en France en laissant leur famille dans leur terre d'origine, qu'ils ne voient qu'une fois par an lors des vacances d'été. Une vie de travailleur solitaire, entre hommes, loin du rêve de vie meilleure.
Puis les mères, qui après un mariage arrangé finissent par rejoindre leur mari et vivent recluses dans la pièce unique qui leur sert de logement. Certaines nous livrent de beaux récits d'émancipation, tardive car uniquement après que les enfants aient quitté le foyer. Magnifique séquence d'une famille juive qui sauve 2 jeunes filles arabes lors de la traversée en bateau, tandis qu'à la génération précédente le père arabe aidait des juifs à fuir le nazisme.
Enfin les enfants, qui arrivent jeunes avec leur mère lors du regroupement familial, qui pensent atteindre l'El Dorado et qui atterrissent dans un bidonville, qui ne voient leur père que le dimanche, ce dernier restant pour eux un étranger qui cultive l'utopie du retour au pays. Enfants francophones qui sont rapidement chargés des démarches administratives de leurs parents.
Des vies de misère, de soumission, de discrimination. Beaucoup de déceptions et de regrets, mais aussi quelques belles destinées.
Cette parole est rare et précieuse, car les parents interrogés n'ont pas l'habitude de s'exprimer sur ce sujet.
L'auteur Jéröme Ruillier en profite pour questionner ses propres problématiques familiales d'inclusion.
L'oeuvre est réalisée avec beaucoup de sensibilité et est d'un grand intérêt pédagogique.
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Un roman graphique ambitieux et passionnant composé d'après l'ouvrage de référence de Yamina Benguigui, "Mémoires d'immigrés". Dans cette très belle adaptation Jérôme Ruillier met en scène témoignages et souvenirs. Classés en trois parties, les pères, les mères et les enfants, cette galerie de portraits intergénérationnels explique avec délicatesse les ravages de la guerre, de l'exil, de la précarité et de la discrimination, et questionne les notions fluctuantes d'identité et de nationalité.
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Nous, les enfants du Maghreb périphérique, on a bien besoin de revoir les valeurs de base de la psychanalyse. Dans l’œdipe, il faut tuer le père, mais nous, au contraire, il nous faut le déterrer, il nous faut le faire revivre. Il a été tué socialement par le colonialisme, par les guerres, puis par l'immigration. Au lieu de le tuer, il nous appartient à nous, les enfants, de le faire revivre, de lui faire redresser la tête. (p. 209)
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"Toi, l'immigré,
Tu as traversé les frontières,
Tu as voulu fuir la misère,
Tu as quitté les champs de soleil,
Tu as quitté tes patents, tes merveilles,
A la chaîne, tu as été le premier servi,
Sur les chantiers, aussi,
On te regarde avec mépris,
Ainsi a commencé ta vie
D'immigré...
Mais la France, ce beau pays,
Elle te renie, aujourd'hui,
Elle n'a plus besoin de ta vie,
Elle te renvoie où elle t'a pris,
Immigré,
Dix mille francs, c'est ton prix,
c'est ce que tu vaux aujourd'hui..."
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"Tu verras, la maison est au bout de la rue Voltaire, à Puteaux ! Tu ne peux pas te tromper !", m'avait dit Mounsi, le chanteur-poète d'origine kabyle. La porte d'entrée, à moitié pourrie, s'ouvre sur une cour minuscule, aussi sombre qu'une cave. A l'intérieur, les murs, moisis à mi-hauteur, comme allergiques aux rayons du soleil et à la lumière du jour, et tout au fond un escalier extérieur sur lequel un tapis décoloré semble remplacer les marches manquantes. Il s'en dégage une odeur nauséabonde, un mélange irrespirable de pisse et d'excréments, qui saisit à la gorge.
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Brusquement, je réalise que les Noirs américains ont vécu la même histoire. Des hommes comme Mohamed Ali, Chester Himes ou Richard Wright ont voulu venger les humiliations imposées à leurs pères.
Leur Harlem c'est mon Puteaux. On vient des mêmes ghettos.
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Je pensais travailler dur, bien dur, et retourner là-bas. Et j'ai tout le contraire. Maintenant, je suis vieux, je suis malade, je souffre, et qu'est-ce que j'attends aujourd'hui de la vie ? J'attends la mort ! Ca, je sais que j'y ai droit, pff... pff...
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