Les Aristocrates rebelles

Cet ouvrage rassemble de courtes biographies de vingt-trois aristocrates rebelles contre leur famille, leur classe sociale ou les normes majoritairement admises au sein de la société dans laquelle ils évoluaient. Ces histoires de vie, écrites avec l'habileté d'un grand conteur, sont souvent teintées d'un certain hagiographisme, laissant dans la pénombre les complexités existentielles de certains personnages, et parfois occultant franchement les aspects polémiques ou critiquables que les biographes les plus scrupuleux ont parfois révélés – je pense à Olympe de Gouges, à Savorgnan de Brazza, à Churchill, à Saint-Exupéry... Il en ressort donc des portraits de héros et héroïnes de la liberté, animés par des valeurs impérissables au-delà du temps ou qui aujourd'hui sont enfin admises de tous.
L'absence dans la liste du premier nom auquel j'avais songé, le marquis de Sade, m'a incité à tenter de deviner quels étaient les points communs entre celles et ceux qui ont été retenus, en d'autres termes à supposer quelles étaient les sympathies de l'auteur ayant justifié sa sélection. Il est déjà agréable de dénombrer sept femmes (soit un peu moins d'un tiers du total) parmi ces figures historiques. On s'aperçoit très clairement de la prévalence des hommes et femmes de lettres et quelques (rares) autres artistes, par rapport aux hommes (et femmes) d'action et de pouvoir, et l'absence des scientifiques, dont pourtant certains aristocrates ont parfois mené des vies de rebelles surtout contre l'Église. Parmi les lettré.e.s, une place de tout premier plan est assurée par celles et ceux qui furent en relation avec le romantisme. Une majorité des hommes ont été affiliés ou proches de la franc-maçonnerie, bien que le premier personnage, Louis de Gonzague, se distingue de tous les autres pour une rébellion religieuse-mystique. Enfin, on peut regretter que dans le très fort eurocentrisme qui caractérise le choix des personnages, à la seule exception du dernier, Nelson Mandela, aucun héros de la lutte anti-coloniale, menée parfois par des aristocrates non-européens, n'ait été convoqué, sauf Abd el-Kader.



Table :


Prologue : « Rien sans amour » [sur les grands-parents de l'auteur, résistants morts en déportation]

Louis de Gonzague (1568-1591) : « La révolte sanctifiée »

Savinien de Cyrano de Bergerac (1619-1655) : « Le baroque libertin »

Olympe de Gouges (1748-1793) : « Une femme contre le conformisme »

Gilbert du Moutier de la Fayette (1757-1834) : « Le marquis libertaire »

Germaine de Staël (1766-1817) : « Le contre-pouvoir au féminin »

Esther Stanhope (1776-1839) : « La quête de l'absolu »

Lord Byron (1788-1824) : « Entre violence et passion »

Alphonse de Lamartine (1790-1869) : « Abolitionnisme et anti-esclavagisme »

George Sand (1804-1876) : « La stature de la liberté »

Abd el-Kader (1808-1883) : « Le rebelle humaniste »

Jérôme-Napoléon (1822-1891) : « Le Prince Rouge »

Léon Tolstoï (1828-1910) : « Le barine du peuple »

Henri (de) Rochefort (1831-1913) : « Le marquis contestataire »

Élisabeth d'Autriche (1837-1898) : « Le refus du conformisme »

Isabelle du Brésil (1846-1921) : « La princesse rédemptrice »

Pierre Savorgnan de Brazza (1852-1905) : « Le héros humanitaire »

Henri de Toulouse-Lautrec (1864-1901) : « La liberté de l'artiste »

Winston Churchill (1874-1965) : « Le bouledogue du monde libre »

Antoine de Saint-Exupéry (1900-1944) : « L'aventurier des cieux »

Emmanuel d'Astier de la Vigerie (1900-1969) : « Le résistant romantique »

Luchino Visconti (1906-1976) : « Comte, cinéaste, communiste »

Simone de Beauvoir (1908-1986) : « Celle qui a toujours dit non »

Nelson Mandela (1918-2013) : « Le prisonnier libérateur »

Épilogue : « La force du destin » [sur le général De Gaulle et se ancêtres, par son fils et son petit-fils]

Trois ans,
Trois ans c'est le temps à beaucoup de choses, c'est le temps à Beigbeder pour .., c'est le temps humble sans comparaison qu'il m'a fallu pour que vienne me cueillir dans mon rêve éveillé le souvenir de ce livre spécial de Gonzague Saint Bris auteur de Aristocrates rebelles que j'ai lu goulûment dès sa publication. Oui trois ans déjà qui semblent moins puisque la mort brutale de l'auteur, personnage littéraire semblant hors du temps, qui le happa en 2017 sur une route de Normandie fut controversée et s'ensuivit une longue enquête.
Oui ce personnage mi dandy, mi aristocrate, a laissé un vide dans le monde littéraire, lui qui en parlait si bien avec cette fougue et cette connaissance des belles lettres qui lui allaient si bien.
Je venais de le voir la même année à un séminaire sur Tolstoï, il était venu appuyer son ami Jean-Marie Rouart qui animait la chose qui fut un vif succès. Je m'étais intéressé à lui quand il écrivit quelques années plus tôt Les Egéries russes en compagnie de Vladimir Fédorovski, un autre personnage !
Aristocrates rebelles est un livre spécial ou livre funeste en ce sens qu'il concentre sur lui toute l'attention qu'on peut avoir sur l'auteur : ses longues phrases lyriques à la Chateaubriand avec beaucoup de participes présents, sa soif littéraire sans bornes ; il résonne comme un livre prémonitoire puisqu'il commence par dire ceci : "Voilà longtemps que je cherchais à rendre un hommage particulier à mes grands-parents, parce que leur destin noble et tragique a hanté ma jeunesse et a profondément marqué ma vie... Jean et Carmen Saint Bris, aristocrates et grands résistants, ont été dénoncés et la Gestapo est venue les chercher dans leur propriété en Anjou pour les conduire vers les camps. Ils sont tous deux morts pour la France, pratiquement à la même date, Carmen à Ravensbrück dans le camp des femmes, et Jean battu à mort dans la neige à Gros-Rosen"
D'où l'idée lui est venue d'écrire Aristocrates rebelles où il est fait un portrait de gens protéiformes comme Cyrano de Bergerac, Olympe de Gouges, Lord Byron, Madame de Staêl, le comte Tolstoï, Savorgnan de Brazza, d'Abd el-Kader, Nelson Mandela, Luchino Visconti, Simone de Beauvoir, Henri de Toulouse-Lautrec, Alphonse de Lamartine, Gilbert du Motier de Lafayette .. mais tous unis par sa formule en couverture : "Ils sont tous nés avec un nom et des privilèges. Ils ont choisi leur propre destin : la liberté."
Je retiens la formule de la 4e de couverture : "Quand un homme marche à un autre pas que ses compagnons, c'est qu'il entend un autre tambour". de Henry David Moreau.
Je retiens Lord Byron et sa vie excessive qui ne m'a pas donné l'envie de le lire plus que ça !
Je retiens la formule d'Anatole France à propos de Léon Tolstoï :
"Tu es bien plus qu'un Messie. Tu es l'Homère, tu es le Goethe de la Russie. Tu ne nous as jamais trompés, tu as toujours dit la vérité puisque tu as exprimé la beauté, et que la beauté est la seule vérité que l'homme puisse atteindre, la seule qui soit en rapport exact avec son intelligence et ses sens"