Ce petit livre très commode a une étonnante postérité. Étonnante parce qu'il a été publié sans l'accord de
Sartre, qui le trouvait « mauvais » et pourtant, c'est bien peut-être l'ouvrage de philosophie le plus connu et le plus lu de
Sartre.
Il me semble que ce texte a fait autant de bien que de mal au sartrisme. En effet, s'il a permis à un grand nombre de lecteurs de découvrir la philosophie en général et celle de
Sartre en particulier (grâce à sa simplicité) ; cette simplicité a eu également beaucoup d'effets négatifs. J'en veux pour preuve les commentaires publiés ici : certains trouvent les thèses de
Sartre dépassées, mal développées et non justifiées. Comme si
Sartre s'était levé un matin et aurait écrit « Je pense ceci et cela », sans l'argumenter. Et, c'est ce qui ressort à la lecture de
L'existentialisme est un humanisme : des thèses séduisantes ou rebutantes mais dans tous les cas, non justifiées.
Cela permet même à de nombreux lecteurs d'être condescendants à l'endroit de
Sartre, l'accusant de n'avoir rien compris aux déterminations sociales qui pèsent sur nous. Comment le leur reprocher ? Puisque
L'existentialisme est un humanisme n'explicite pas ces notions et n'explique pas, au fond, ce qu'est la liberté de l'homme : l'ouvrage la suppose et jamais ne la défend. J'ai vu et entendu quantité de gens affirmer que la philosophie de
Sartre est nulle. Citant ce texte à l'appui.
Alors voilà, à tous ceux qui pensent que la philosophie est nulle, inutile, surcotée, vieillie etc., sachez qu'il ne s'agit ici que d'une faible version des positions de
Sartre, davantage explicitées dans
L'être et le néant (1943). Et concernant les déterminations sociales,
Sartre les a étudiées dans la Critique de la raison dialectique (1960), ne renonçant d'ailleurs pas à la liberté de l'homme. J'encourage nos chers lecteurs condescendants qui affirment que
Sartre n'a rien compris à rentrer plus profondément et honnêtement dans la philosophie de
Sartre et à lire ces ouvrages, qui réviseront sûrement leur jugement hâtif et ignorant.
Je mets un 4/5 pour remonter sa note, mais je ne conseille pas vraiment sa lecture, sauf si on a compris que ce n'était pas la version définitive, achevée et justifiée de la philosophie de
Sartre.