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EAN : 9791035201418
160 pages
Editions Thierry Magnier (21/03/2018)
3.52/5   26 notes
Résumé :
Un an de vie, d'un été à l'autre. Un an dans la peau de Zoé, prise dans la tourmente, entre l'enfance et l'âge adulte. Premier été : son monde se fissure. Et tout à coup, le regard qu'elle posait sur ce qui, jusque-là, était familier et rassurant n'est plus le même. Soudain, les mains de sa grand-mère, Bonny, lui apparaissent telles qu'elles sont : ridées, tachées, vieillies. Noé, le cousin autrefois chéri, s'est dissous dans ce garçon distant et moqueur qu'elle pei... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
"La peau de mon tambour" : avec ce titre, je pensais que le roman serait sur une adolescente mal dans sa peau, mal dans son poids. Et effectivement, c'est cela, mais pas que, loin de là. C'est beaucoup plus profond, plus subtil que cela.
Zoé, adolescente, est dans la période de basculement entre l'enfance et l'âge adulte, et son regard sur le monde, sur sa vie et son entourage surtout, évolue. La folie de sa mère, la fuite de son père, l'âge de sa grand-mère, les garçons...
Le début du texte m'a beaucoup plu, très sensible. Mais, je ne saurais pas forcément l'expliquer, mais je me suis lassée... J'ai fini par lire très rapidement certains passages, je n'arrivais plus trop à accrocher. L'écriture à la deuxième personne du singulier est un peu déstabilisante aussi pour moi. Et j'avoue avoir vécu longtemps une certaine confusion entre les personnages, à comprendre réellement qui est qui (vu que j'avais du mal à accrocher).
Du coup c'est difficile de résumer comme cela, mais c'est mon ressenti de lecture : une jolie écriture travaillée, un sujet sensible intéressant, mais un petit "truc" qui manque pour que je m'y attache réellement.
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Une histoire de famille entre haine et amour. Une mère dépassée et perdue. Une Grandma souvent détestable et une autre grand-mère Bonny, la tant-aimée. Bouée de sauvetage pour cette adolescente perdue et en manque de tendresse. Sans oublier BonPa...
Un été dans la tourmente de cette année où la famille éclatée vit sur des colères et des drames enfouis.
L'écriture est malaisée à comprendre au début. Un Tu qui interpelle ( mais qui concerne la narratrice ) et un Elle dont on se demande qui c'est. Finalement on comprend qu'Elle c'est la mère de Zoé qui raconte cet été de tumulte par ce Tu déstabilisant.
Un roman pour ado très fort qui frappe juste. On ne peut que s'attacher à ces personnages ( et à l'occasion haïr GrandMa ...)
Intéressant et inhabituel par le style.
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Voici un roman qui m'a dérangée, tant dans la narration que dans l'histoire. Zoé entretient une relation étrange avec sa mère et sa grand-mère, faite d'amour et de haine. Ces deux femmes, au lieu de la tirer vers le haut, la rabaissent et passent leur temps à gémir sur son existence. C'est dur à lire.
Ensuite, Zoé ne s'aime pas. Elle déteste son corps et prend conscience que le sien et celui des autres peut se flétrir, vieillir, devenir mou. Zoé ne mange plus puis se fait vomir. Son aversion pour elle-même est accentuée par le regard et le jugement des autres. de plus, elle grandit et perd ses repères. Elle n'est plus l'enfant qui adore passer ses journées à se créer des aventures. Elle devient adolescente et se cherche à travers les autres.
Enfin, la narration à la deuxième personne est particulière. Je trouve que cela ne permet pas de s'identifier au personnage. Cela crée une sorte de distance, peut-être voulue. Tout tourne autour de ce "tu" et d'un autre pronom, "elle", qui désigne la mère, comme on le comprend après plusieurs pages.
Ce roman est dérangeant car il bouleverse nos habitudes de lecture. Il faut accepter de ne pas tout comprendre au début. Il faut accepter également cette narration étrange.
Mais La peau de mon tambour est aussi l'histoire de la renaissance de Zoé qui va surmonter son désespoir et son mal-être. Les dernières pages sont très puissantes et salvatrices, d'une luminosité rare : "Tu n'es plus l'oiseau mazouté aux ailes goudronnées, tout poisseux, incapable de voler, tu es une rescapée, une survivante. Il y a de la lumière là-dedans, ça crépite, tu le sens. Rien n'est gagné, tu en as bien conscience, mais quelque chose frémi. (...) Alors oui, il y aura d'autres plongeons, de grands plouf dans des eaux glaciales et puantes, et sans doute des désert de pierre à traverser, pieds nus sur des cailloux tranchants. Rien n'est jamais tout rose ou tout noir. Tu vas encore trébucher, tomber, en baver, mais quand on est du côté des vivants, on trouve la force de se relever. Ta vie est devant toi. C'est un petit capital qui t'appartient en propre. Tu es libre d'en faire ce que tu veux : un champ de mine, un cloaque ou un atoll enchanté. Il n'y a pas de fatalité. A toi de ne pas te laisser entraîner là où tu ne veux pas aller". Je trouve ces mots justes et j'aurais aimé les trouver au bon moment et les dire aux adolescent.es qui se sont confié.es à moi. Ils résonnent fort avec mes convictions.
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Zoé doit faire face à l'adolescence, au regard des autres, mais surtout au regard qu'elle porte sur elle-même.
Ce roman illustre très bien les tourments de l'adolescence : le corps qui change et le regard que posent les autres dessus, ainsi que la difficulté à se reconnaître en ce corps et ces regards. Zoé vit une perte de repères, elle n'arrive plus à savoir sa place dans le monde, elle flotte entre son état d'enfant et son état d'adulte. Elle a des difficultés à savoir ce que les autres attendent d'elle et comment se positionner par rapport à ça pour rester elle-même.
Ce livre a aussi pour sujet une relation mère-fille complexe, voire toxique. Cette mère a même fini par la briser, elle aura donc besoin de s'en éloigner pour se découvrir elle-même et apprendre à mieux vivre avec les autres.
Cependant, l'on retrouve aussi des aspects positifs, dont la guérison grâce aux autres et à la redécouverte de soi même. Zoé a pu grandir au-delà de ce cadre étouffant, savoir qui elle était sans l'influence toxique de ses parents, et c'est ça qui l'a sauvé.
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Je suis un peu perplexe, et je ressors de cette lecture avec un sentiment mitigé.

Tout d'abord, le style d'écriture m'a intriguée. Un style assez personnel et atypique, maîtrisé, qui suscite la curiosité. Il est à la deuxième personne, en s'adressant directement au personnage principal.

C'est désarçonnant aussi parce qu'au vu du résumé, on ne sait pas trop de quoi on parle.

Juste une fille mal dans sa peau ? Eh bien, non, c'est plutôt l'histoire d'une famille désaxée. Une mère toxique et violente, un père aux abonnés absents, une grand-mère particulière et pas forcément des plus sympathiques, et les problèmes qui vont avec. C'est un drame familial, et de vie, et si sur toute la première partie du roman j'ai trouvé ça passionnant, je me suis assez vite lassée. Pourtant, ce roman n'est vraiment pas long, mais assez vite, on s'enlise, on se rend compte que l'histoire ne mène nulle part en particulier, on aborde des thèmes à peine survolés (l'anorexie qui est mentionnée, sans être nommée notamment) , et l'ensemble paraît un peu bâclé, et c'est dommage pour un roman qui frappait si fort.
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critiques presse (1)
Culturebox
12 décembre 2018
Un roman d'apprentissage, qui aborde avec sensibilité la question du passage à l'âge adulte quand les conditions ne sont pas optimum. Un roman avec une exigence littéraire remarquable, une écriture tendue comme la peau d'un tambour.
Lire la critique sur le site : Culturebox
Citations et extraits (44) Voir plus Ajouter une citation
Elle s'impatiente, mais que fait-il ? C'est à lui maintenant. Son rôle est écrit, il n'a qu'à s'y conformer. Saisir la foudre et la brandir, ce n'est quand même pas compliqué. Nouveau soupir de Zeus qui se lève, la serviette à la main, essuie ses lèvres minces et se met à tonner sans conviction.
Mais d'un aussi tiède courroux, Elle ne peut se satisfaire. Elle n'a que faire des simulacres, Elle veut le remous et la guerre. Le ton monte encore jusqu'à ce que, au bout du bout, les larmes jaillissent, ces larmes de rage et de désespoir que tu t'étais promis de ne pas verser mais que tu n'arrives pas à endiguer, et pour ça tu te détestes. Tu sors de table.
Plus tard, selon un rituel bien établi, il te rejoint dans la chambre, l'oeil délavé, le front soucieux. Son bras autour de tes épaules : alors, ma chérie, on a séché ses larmes ? - petit violon - ; c'est tellement bête de te mettre dans un état pareil - tatatata ! - ; tu te fais du mal pour rien - sa main qui te palpe l'épaule - ; est-ce que tu ne pourais pas faire un effort ? - petit baiser sur la tempe - ; tu la connais, tu sais comment elle réagit, une fois qu'elle est partie, elle ne peut plus s'arrêter, c'est chaque fois la même chose, tu devrais le savoir, elle est si fragile - si fragiiiiiiiile - ; fais un effort, un petit effort, s'il te plaît, fais-le pour moi - re-violon, les yeux dans les yeux - ; mets-toi à ma place, je n'en peux plus de vos histoires - pauvre, pauvre papa - ; j'ai travaillé toute la journée, non ? - pourquoi pas, papa, papapapa ? - j'ai besoin de calme, je sais que tu peux comprendre, tu la connais aussi bien que moi, elle ne se calmera pas tant que tu ne lui auras pas demandé pardon.
Tu bondis : pardon ? pardon de quoi ? Non mais, il rêve : des excuses, et quoi encore ?
Il te caresse la main : prends sur toi, tu en es capable, ça ne te demandera que quelques secondes et tout sera terminé ; tu t'étrangles : mais je n'ai rien fait, c'est Elle qui a tout inventé ; il susurre ; je sais bien, mais qu'est-ce que ça te coûte ? fais le premier pas ; tu dis : jamais ! Sois plus maligne qu'elle ; intelligente ! mais ça change tout, touché, coulé, il a fait mouche, plus intelligente qu'Elle ! enfin, il reconnaît ta valeur. Tu te rengorges, mais c'est toi, l'idiote, qui te fais rouler dans la farine, au nom de cette foutue intelligence que vous auriez en partage, lui et toi. Il est fort sur ce coup-ci, le bras autour de ton épaule : alors, je peux compter sur toi ? Sa main qui te palpe, ses yeux pâles dans tes yeux noirs, violons, rideau, applaudissements...
Tu te fais avoir à tous les coups pour lui sauver la mise sous prétexte qu'Elle lui fait une vie de chien avec ses rages et ses scènes à répétition, que ne ferais-tu pas pour ton papa que tu aimes tant - ce pauvre papa si intelligent qui travaille si dur pour vous -, pour lui être agréable, toi qui as en partage sa si belle intelligence ? Procéder du père, de lui seuil, ça te va bien. Ainsi soit-il. Et peu importe si lui, pas plus qu'Elle, ne semble remarquer que tu es devenue l'ombre de toi-même. Ils ont ça en partage : ils ne te voient pas.
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Tu aimerais lui dire quelque chose de pensé, de pesé, d'essentiel, à la mesure de ce qu'elle t'a apporté, de ce qu'elle a chamboulé en toi, mais tu ne trouves pas les mots. Tu te contentes de murmurer un merci, et encore un - merci, merci - tous deux à peine audibles.

Tu emportes, au creux de ta valise, le bol qu'elle t'a offert. Un bol bleu laiteux, de cette couleur indéfinissable qu'ont les yeux des tout-petits lorsqu'ils ouvrent sur le monde, de l'océan qui tempère l'or du sable au couchant, de l'infini pluriel de ton coeur réparé.

Tu es la même et pourtant autre, à l'autre bout de toi. Tu as l'impression qu'autre chose peut commencer. Quoi ? Tu ne sais pas au juste, mais pour la première fois, tu as la sensation d'appartenir à un grand tout qui te dépasse, le tout des vivants reliés entre eux par une énergie palpable, arc électrique qui embrase et vivifie.
Tu as retrouvé ta joie, fragile, mais intacte au fond de toi, comme un cristal précieux transparent et sonore. Personne ne pourra te la voler. Surtout pas Elle.
Elle est ombre, Elle est autre, Elle ne réussira plus à te faire croire que vous êtes semblables. Tu ne partages pas sa folie.
C'est son histoire, pas la tienne. Tu n'as que faire d'une vie dominée par la haine. Tu ne te laisseras pas entraîner dans le sillon boueux tracé par Grandma. Une, ça suffit.
[...]
Comment-est-Elle devenue cette femme aux ailes froissées, ligotée dans sa plainte et dans cette vie étriquée qui ne lui convient pas ? Pourquoi s'est-Elle fabriqué cette cage ?
Tu la voyais bourreau et tu la découvres victime. Et si, en fin de compte, Elle était plus à plaindre que toi ?

Tu n'es plus l'oiseau mazouté aux ailes goudronnées, tout poisseux, incapable de voler, tu es une rescapée, une survivante.
Il y a de la lumière là-dedans, ça crépite, tu le sens. Rien n'est gagné, tu en as bien conscience, mais quelque chose frémit. Y a de l'espoir, comme dirait Bonpa. Va falloir que tu te battes, ça tombe bien, tu te sens guerrière. Aux armes, à la vie !
Alors oui, il y aura d'autres plongeons, de grands ploufs dans des eaux glaciales et puantes, et sans doute des déserts de pierre à traverser, pieds nus sur des cailloux tranchants. Rien n'est jamais tout rose ou tout noir. Tu vas encore trébucher, tomber, en baver, mais quand on est du côté des vivants, on trouve la force de se relever.
Il y a du sang frais qui pulse dans ta grande marmite.
Ta vie est devant toi. C'est un petit capital qui t'appartient en propre. Tu es libre d'en faire ce que tu veux : un champ de mine, un cloaque ou un atoll enchanté. Il n'y a pas de fatalité. A toi de ne pas te laisser entraîner là où tu ne veux pas aller.
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Tes journées, tu les passes au lycée, à la bibliothèque, dans le parc de la ville, et surtout, dès que tu le peux, chez Klara. Tu fais partie de la famille. Une famille bien enracinée, rassurante et structurante, tout le contraire du champ miné qu'est la tienne. Chez les Hoos, tu picores quelques graines, te sustentes de jus de légumes centrifugés, d'infusions de plantes, tandis que Klara et la petite Els consomment des nourritures plus consistantes. Mais personne ne te dit rien, personne ne semble remarquer que tu es devenue un petit tas d'os, personne jusqu'à ce que Bonny, la mère de Klara, te prenne un jour à part.
- Zoé, tu ne voudrais pas venir me voir un de ces jours au cabinet ?
[...]
Le rituel est immuable, tu t'assieds et tu parles, tu parles sans la regarder, sans t'adresser particulièrement à elle, tu as ouvert les vannes d'une parole trop longtemps contenue et dont il est devenu urgent d'évacuer le trop-plein. Tu ne parles que d'Elle, ou plutôt d'Elle-et-toi, de toi-et-Elle, sujet unique, obsession têtue. Sur vous, tu es intarissable, et c'est un flot sombre et douloureux qui se répand dans le cabinet de Romy, à jets continus, éclaboussant les murs clairs qui absorbent aussitôt.
Tu racontes le dérèglement de votre relation, vos joutes quotidiennes, ton impossibilité à trouver grâce à ses yeux, à être acceptée telle que tu es, sa folie et la tienne.
Romy parle peu, elle t'écoute. T'écouter, elle ne fait que cela. Tu sors lessivée de ces séances bihebdomadaires.
Tu as promis à Romy d'essayer de ne plus vomir, mais tu as du mal à t'y tenir. Ton estomac est un tyran tout-puissant et paresseux qui refuse de faire son boulot, se cabre, secrète des tonnes de sucs acides. Tu mets des heures à digérer un repas de rien du tout, tu as sans cesse mal au coeur. Tu es une grosse machine humaine déréglée.
Chez Klara, tu arrives tant bien que mal à contrôler la situation, leur calme à tous t'apaise, mais à la maison, l'horrible machine s'emballe, se grippe, se bloque sur un mot, un sarcasme, un regard.
Et tu vomis sa méchanceté à Elle, tu vomis l'aveuglement de papa, tu vomis l'indifférence de Madeleine et de Titus, tu vomis l'absence de Tristan, tu te vomis toi-même.
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Le Cadran est un grand organisme vivant qui respire, s'étire, grommelle, un carrefour de flux de toutes sortes. On y entre, on en sort, les bras chargés de blocs de terre, de fleurs, de vaisselle, de lourds paniers de fruits, abricots, pêches, fraises, framboises : ici l'été se déguste jour après jours sous forme de tartes, de compotes, de confitures. La vieille Encke, penchée sur la grande bassine de cuivre qui bouillonne à bas bruit sur la cuisinière, veille en guettant la perle, une cuillère en bois à la main. L'apiculteur s'invite pour un café : on vient de l'appeler pour récupérer un essaim sauvage, coincé entre une fenêtre et son volet, il a fallu démonter les rayons gorgés de miel et les loger dans une ruchette. [...] Fred, le kiné au catogan gris, débarque pour la séance de massage quotidienne de Suzan [...]
On ne sait jamais combien on sera pour le déjeuner, pour le dîner. Il y a les amis, celles qu'Albert appelle les copines : Coren qui tricote des mitaines d'été en coton perlé coloré en hochant trop souvent la tête, Godelieve, la poétesse, toujours prête à déclamer ses textes d'un air pénétré qui donne envie de rire, Kadidja qui apporte des cornes de gazelle de sa confection, gorgées d'huile et de miel, mais qui est surtout un as de la réflexologie, [...] Kaat qui boit des litres de jus de pamplemousse additionnés d'eau gazeuse pour chasser une furieuse envie de picoler, la douce Hilke qui ne se déplace jamais sans Clams, son fils handicapé, un gentil garçon qui bave un peu et dont le pauvre corps est traversé sporadiquement de spasmes incontrôlés, comme s'il était branché sur du courant à mille volts.
On bricole, on improvise. Lorsqu'il y en a pour dix, il y en a pour vingt. Quant à savoir comment tous ces gens si différents se sont retrouvés là ? Personne n'est en mesure de le dire. C'est l'effet Susan, résume Albert.
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Au début l'estomac ne se laisse pas faire, il se contracte, se spasme, se révolte, bombardant le cerveau de signaux véhéments - faim, manger, faim, manger - ; il fait un ramdam de tous les diables, à t'en faire exploser la cervelle. Il joue son va-tout - et fait son boulot -, mais au bout d'un moment il doit bien se rendre à l'évidence, ça ne sert à rien, tu ne céderas pas. Il n'a dès lors d'autre choix que de capituler. Il se met en position de repli, se recroqueville sur lui-même, et enfin docile, ne réclame plus sa ration habituelle. Peu à peu, il perd l'habitude et jusqu'à l'idée de se remplir, il se contente de dînettes.

Au bout d'un mois, la sensation de faim s'est estompée.

Tu te nourris par procuration, préparant de formidables goûters à Tristan, Madeleine et Titus quand ils rentrent de classe. Tu te rassasies de les voir croquer dans leurs biscuits, engloutir de grosses tartines dégoulinant de confiture, laper des bols pleins à ras bords de chocolat chaud mousseux. Les deux petits se laissent choyer avec naturel et indifférence, après tout, ils ne t'ont rien demandé. Tristan ricane : tu ne manges pas ? Tu te trouves trop grosse ?
Enfin le jour arrive où tu te découvres maigre dans le regard affolé de Bonny. Tu t'empresses de jeter dans les cabinets le nectar précieux, ce pot de gelée royale qu'elle a acheté à prix d'or pour te requinquer.

Tu fonds. Chaque jour, tu te vois fondre un peu plus, troublée et secrètement exaltée de t'amenuiser ainsi. Pourquoi t'arrêter en si bon chemin ? Tu ne ressens plus ni manque ni faim, mais tu grelottes dans ton horrible robe de chambre moutarde qui plisse aux entournures. Tu te sens vieille avant l'âge, et moche.

Tu as les lèvres gercées et le nez rouge comme si tu avais bu.
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Vidéo de Marie Sellier
157 collégiens; 3 auteurs, 3 romans, 3 intervenants, 3 parcours. Une expérience littéraire de 6 mois faite de lectures, d'échanges et de débat, de rencontres, de questions, de critiques, de lectures à voix haute… Avec les élèves de 4èmeC du collège Pablo Picasso (Bron), les élèves de 3ème5 du collège Théodore Monod (Bron), les élèves de 5ème2 du collège Jean Monnet (Lyon 2), les élèves de 3ème3 du collège Olivier de Serres (Meyzieu), les élèves de 5ème6 du collège Honoré de Balzac (Vénissieux), les élèves 3ème3 du collège Jean Macé (Villeurbanne), et leurs équipes pédagogiques. Avec les auteurs Yann Fastier, Sylvain Pattieu, Marie Sellier, et les intervenants artistiques Raphaële Botte, Raphaël France-Kullmann, Camille Thomine. En partenariat avec la DRAC Auvergne Rhône-Alpes, la Métropole de Lyon, la Ville de Bron, la Délégation Académique aux Arts et à la Culture de l'Académie de Lyon, et l'Espace Albert Camus / Pôle en Scènes (Bron)
Une réalisation Fête du Livre de Bron/Collectif Risette
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