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4,05

sur 6053 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Umberto Eco a bien parlé dans son roman le Nom de la Rose du fait que les livres parlent aux livres, parlent des livres et se transmettent des messages, de livre en livre.
Jorge Luis Borges, quant à lui, avait abordé dans sa nouvelle La Bibliothèque de Babel le fait que la disparition des livres n'était pas un problème sur le long terme car leur effet a eu le temps de se répercuter dans la pensée des suiveurs.
Ces deux illustres décodeurs de bibliothèques me semblent tout à fait indiqués pour parler de la genèse de Roméo et Juliette.
Il faut probablement remonter jusqu'à Jean Boccace (Giovanni Boccaccio) pour comprendre l'ensemble du phénomène et la suite d'appropriations et de réappropriations d'oeuvres désormais quasi oubliées qui ont conduit au chef-d'oeuvre que l'on connaît.
Boccace a connu un tel succès, notamment avec son Décameron, que nombreux sont les écrivains italiens qui ont tenté d'exploiter le filon de la nouvelle tel que lui l'avait fait.
Ainsi, Masuccio de Salerne (Masuccio Salernitano, 1410 – 1475) produira un Novellino, ouvrage qui regroupe cinquante courtes nouvelles, dont la 33ème, une certaine Romeo e Giulietta.
Version certes primitive mais déjà suffisamment marquante pour avoir été repérée, reprise et enrichie par Luigi da Porto (1485 – 1529).
À son tour la version étoffée par da Porto de Romeo e Giulietta sera ré-assaisonnée par Matteo Bandello (1480 – 1561) dans son gros corpus d'histoires courtes, dont Shakespeare connaissait la traduction du français Pierre Boaistuau (1500 – 1566), également connu pour avoir édité des nouvelles de Marguerite de Navarre, la propre soeur de François Ier.
Notons au passage que la traduction de Bandello sera très profitable à Shakespeare car, outre Roméo Et Juliette, elle fournira également au dramaturge anglais le sujet de deux autres pièces restées fameuses : les comédies Beaucoup de Bruit Pour Rien et La Nuit Des Rois (de même Lope de Vega s'inspirera aussi de Bandello).
Mais, si William Shakespeare remet le couvert de Roméo Et Juliette, c'est qu'il a sûrement une ou deux idées en tête, le bougre.
L'auteur écrit sa pièce en fin du XVIème siècle, un siècle particulièrement chaud sur la question du mariage, notamment en raison du séisme que provoque la réforme protestante. Laquelle doctrine défend le mariage « d'inclination » au détriment des règles classiques du mariage dans tout le monde chrétien, à savoir, le choix des parents et l'intérêt de la famille.
De tout temps, hier comme aujourd'hui, quel meilleur symbole d'émancipation pour la jeunesse que celui de Roméo et de Juliette, deux amoureux qui n'ont que faire de l'opinion de leurs parents respectifs et qui préfèrent braver l'interdit que de s'interdire leur amour ?
Ce thème, en lui seul, suffirait presque à expliquer le succès de la pièce depuis plus de quatre siècles. Mais il n'est probablement pas tout. Aussi, vais-je hasarder une autre interprétation qui n'est pas spécialement fréquente pour cette pièce.
Shakespeare nous dresse un tableau où deux familles rivales s'opposent, pour des raisons anciennes, obscures et probablement oubliées, dans une lutte à mort. le vieux Montague et le vieux Capulet sont deux respectables, aimables, riches citoyens de Véronne, estimés l'un et l'autre du seigneur de la ville, mais ils ne peuvent pas se sentir, c'est comme ça.
Chacun des membres du clan ne demande que le prétexte pour se lancer dans une échauffourée avec la bande rivale. C'est ce point qui me semble capital dans la compréhension des intentions de l'auteur dans cette tragi-comédie.
La première version publiée de l'oeuvre remonte à 1597, mais il est clairement spécifié qu'à la date de cette publication, la pièce est déjà montée et jouée depuis un certain temps, certains avancent 1594, mais à la vérité on n'en sait rien, juste une présomption. Que ce passe-t-il dans l'Angleterre de Shakespeare à cette époque ?
1588, Francis Drake bat l'Invisible Armada espagnole mais le risque d'une invasion de l'Angleterre par les Espagnols est réel. de nombreux combats ont eu lieu avant et se poursuivent après cette date.
L'Irlande (déjà elle !) est une véritable poudrière et risque d'exploser à la figure de l'Angleterre, notamment en servant de base arrière à l'armée espagnole.
Bref, Philippe II d'Espagne (le fils de Charles Quint) et Elisabeth Ière d'Angleterre ressemblent étrangement à ces vieux Montague et Capulet, qui se crêpent le chignon sans trop savoir pourquoi, pour d'anciennes histoires de prestige (notamment liées au commerce dans les Antilles et en Amérique).
Comment s'appelle le poison, le démon des Espagnols ? Ne serait-ce un certain Francis Drake ? N'est-ce point un poison qui tue Roméo ? N'est-ce point une arme virile qui tue Juliette ? La symbolique du démon et de la folie est également évoquée dans la tirade de Juliette, juste avant qu'elle n'avale la fiole à la scène 3 de l'acte IV. Shakespeare utilise le terme de mandragore. C'est certes une plante, connue pour ses vertus hallucinogènes et de supposées propriétés magiques, mais c'est aussi une façon, en langue anglaise, d'évoquer le démon et l'occultisme. Je vous le donne en mille, comment se dit mandragore en anglais ? Mandrake ! Man Drake ! Bien évidemment, on peut toujours arguer le hasard, mais venant de Shakespeare, le doute est plus que permis.
Comment s'achève la pièce ? Les deux clans pleurent les innocents morts pour rien et leur élèvent à chacun une statue d'or. Voilà qui leur fait une belle jambe, n'est-ce pas ?
Donc, outre l'appel à l'émancipation de la jeunesse et à la fin de la férule des parents, je vois dans cette pièce un message plus politique, celui que quand les puissants s'affrontent, les enfants innocents de chaque nation payent l'addition et que tout ce qu'ils récoltent, c'est, au mieux, un monument à leur nom. En somme, une dénonciation de la folie des dirigeants qui s'engagent dans des conflits sans fondement et qui sacrifient de jeunes vies pour cela.
Merci monsieur Shakespeare pour cette sublime tragi-comédie, genre qui fera des émules, notamment côté espagnol sous la houlette de Lope de Vega, mais ça c'est une autre histoire et tout ceci n'est que mon avis, un parmi quelques millions d'autres, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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D'habitude, en cette période de l'année, j'ai déjà une ou deux pièces de théâtre à mon actif. Je suis donc un peu en retard puisque je ne lis la première de l'année que maintenant. Avec "Roméo et Juliette", j'ai choisi un classique qu'on ne présente plus mais que je lis pourtant pour la première fois. Évidemment, j'en connaissais bien l'histoire pour avoir vu de nombreuses adaptations, pas de surprise de ce côté-là donc. Je suis en revanche étonnée du style employé, bien plus fluide que ce à quoi je m'attendais.

Faut-il vraiment en faire le résumé ? Pour faire court : une histoire d'amour interdite entre deux membres de familles rivales, un mariage secret, des duels qui tournent au fiasco, un bannissement, des suicides, une réconciliation qui repose sur la mort des deux amoureux.

Comme je disais plus haut, j'ai été très surprise par le langage employé, que j'ai trouvé moins complexe, plus compréhensible, peut-être également plus moderne, que celui employé dans les pièces de Molière ou de Corneille par exemple. Il est vrai que, dans l'édition que je possède, il nous est expliqué que certaines expressions ou joutes verbales n'étaient pas traduisibles en français et qu'il a bien fallu adapter. Ceci explique certainement cela, du moins en partie. Quoi qu'il en soit, je n'ai donc pas pu profiter de tous les jeux de mots et doubles sens auxquels Shakespeare aime à s'adonner, mais j'ai tout de même perçu quelques traits d'humour ici et là, donnant un peu le sourire malgré le drame qui se prépare.

"Roméo et Juliette" se découpe en 5 actes, chacun avec des scènes plus ou moins longues. Les personnages entrent et sortent d'une scène un peu à tout-va, ce qui change là encore du théâtre français (classique s'entend), bien plus strict si je puis dire. Les Anglais prennent davantage de libertés de ce côté-là, et je dois dire que cela rend les dialogues et les événements bien plus naturels.

Mais assez parlé de l'aspect technique, venons-en à l'histoire à proprement parler. Roméo et Juliette sont deux êtres qu'on prend en pitié, victimes de la haine que leurs parents se jettent à la tronche. Leur amour ne fait pas le poids face à toutes ces rivalités, et pourtant il est fort, incommensurable. Qui n'a d'ailleurs jamais voulu aimer et être aimé de la sorte ? C'est beau... et tellement tragique...

Si je ne connaissais pas déjà leur histoire en long et en large, si je la découvrais pour la première fois, j'en serais certainement ressortie bouleversée. Mais j'ai, en revanche, toujours autant d'empathie pour ces amoureux maudits, un attachement particulier.

Je rêve de voir un jour une adaptation qui me changerait ce dénouement tragique. Ça ne plaira pas à beaucoup j'imagine... Mais juste une fois, une toute petite fois, j'aimerais pouvoir assister au triomphe de leur amour...
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Si j'avais déjà lu des oeuvres de Shakespaere, j'ai tardé à découvrir Roméo et Juliette, drame qui est souvent cité comme un modèle d'histoire d'amour, mais qui n'est peut être pas aussi bien connu que cela. Roméo et Juliette dans l'imagerie populaire semble être l'archétype de la passion amoureuse, au point que les prénoms de Roméo et Juliette sont galvaudés. Certes ces deux jeunes gens sont amoureux, ou plutôt ils connaissent le coup de foudre, mais leur idylle est très brève, ne vivant que quelques jours, et les protagonistes sont très jeunes, Juliette n'a pas encore atteint l'âge de 14 ans. Quel aurait été la valeur de cet amour inscrit dans la durée? Ce qu'il faut surtout retenir de ce drame, c'est la tragédie née de la haine de deux familles, qui conduit au tombeau plusieurs jeunes gens. Oeuvre trop souvent (mal) citée, Roméo et Juliette n'est pas ma pièce préférée de William Shakespeare... Je lui préfère de loin "Le roi Lear".
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Encore assez peu familière de Shakespeare et par ailleurs assez peu sensible à l'histoire d'amour iconique que porte cette pièce, c'est surtout sa modernité et sa tonalité qui me sidèrent, comme si la fougue des passions humaines qui se dégage du texte transcendait les codes narratifs par-delà les siècles.
La lecture en est un bonheur de fluidité, traversée d'un riche arc en ciel de sentiments et sensations extrêmes.
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Y aurait-il un âge pour apprécier cette pièce? Je me souviens d'avoir adoré la première fois mais peut-être était-ce l'effet "star du théâtre", le côté excessivement romantique bien que peu vraisemblable propre à l'adolescence...
J'ai d'abord voulu relire cette pièce que j'ai en version bilingue dans la langue d'origine, mais j'ai très vite dû recourir à la traduction. Ca m'a permis, quand même, de bien prendre conscience de l'inventivité de Shakespeare au niveau de la langue et des énormes difficultés de traduction d'une langue riche et novatrice. Finalement, j'ai terminé en français.
Comme j'avais revu le film avec di Caprio et Claire Danes, la lecture fut accompagné d'images qui ont modernisé ma lecture. Ca reste une belle oeuvre au niveau de la langue et de sa poésie, du drame qui se noue, de sa noire ironie, de la violence parentale également.
Mais je n'ai été que moyennement prise par la passion de ces deux enfants si soudaine et si absolue qui fait beaucoup de bruit et ressemble un peu à un caprice. Pourtant, elle semble si pure!
Comme pour les films: je mettrais une limite d'âge à cette pièce, mais elle serait maximale!
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Reprise de cette lecture obligatoire à l'école quelque 30 années plus tard...
Que dire du génie et de la modernité de l'écriture qui n'ait pas déjà été évoqué auparavant...

Je me suis surprise à espérer un dénouement heureux :)

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Je ne lis pas souvent des pièces de théâtre, et je n'en ai pas lues beaucoup, mais je me rend compte que j'aime bien ça en fait !
C'est la première pièce de Shakespeare que je lis, j'avais essayé "Songe d'une nuit d'été" en anglais, mais c'était un chouia trop difficile pour mon niveau.

Bon j'avoue que j'ai choisis Roméo et Juliette parce que j'avais vraiment adoré l'adaptation cinématographique avec Léonardo DiCaprio et Claire Danes.

Au niveau des personnages, j'ai une préférence pour Juliette. Bien qu'elle soit très jeune, elle est réfléchie et courageuse. Elle transgresse beaucoup d'interdits pour vivre son amour avec Roméo et elle trouve le moyen d'échapper à son mariage avec Pâris désiré par son père.
Dans un autre registre j'ai beaucoup aimé la nourrice et toutes ses lamentations. Une vraie girouette celle-là, à un moment Roméo est le meilleur homme pour Juliette et l'instant d'après c'est le pire déchet de l'humanité.
Les hommes sont également très expressifs, ça se bats pour tout et n'importe quoi, ça tombe amoureux au moindre regard et puis c'est dépressif... Heureusement que Frère Laurent est là pour les modérer.
Un bien étrange Frère que celui-ci. En effet, dans l'espoir de réconcilier les deux familles ennemies, il accepte de marier clandestinement les deux jeunes gens, puis il magouille avec Juliette pour qu'elle puisse rejoindre Roméo en exil, en lui fournissant une étrange potion.

Pour conclure, j'ai pris beaucoup de plaisirs à lire la pièce en elle-même, par contre j'ai trouvé les notes un peu trop présentes et longues, bien que intéressantes.

Challenge MULTI-DEFIS 2017
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Quand on parle de la plus belle histoire d'amour jamais écrite, on peut bien féliciter Shakespeare de nous avoir écrit cette tragédie et qui reste toujours au goût du jour...N'aimant pas vraiment les pièces de théâtre, j'aurais cru avoir du mal à relire ce genre de lecture mais non... je me suis fait au fil de l'histoire aux vers qui s'enchaînent les uns avec les autres...Bref, ravie d'avoir rajouté ce classique à ma bibliothèque personnelle.
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Que dire qui n'ait déjà été dit sur la plus belle des histoires d'amour? Peut-être juste que comme beaucoup j'ai été envoutée moi aussi, par le talent de conteur de Sir William Shakespeare et aussi troublée qu'émue en découvrant ses deux amoureux de légende et leur funeste destin.
Emblèmes de l'amour passionnel, de la fougue de la jeunesse et de la force absolue du lien, Roméo et sa belle Juliette ont marqué mon coeur il y a plus de dix ans et aujourd'hui encore certains de leurs vers résonnent souvent à mes oreilles... Ô Roméo! Roméo! Pourquoi es-tu Roméo?....
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Quelle belle plume que celle de Shakespeare !
Malgré son grand renom, je n'ai véritablement lu Shakespeare pour la première fois que l'année dernière avec Songe d'une nuit d'été.
Je (re)découvre à présent son oeuvre magistrale Roméo et Juliette, si bien écrite. J'aime beaucoup son écriture poétique, au point où je me suis demandée si l'on pourrait parler de poésie, en raison des vers et des rimes que j'ai trouvé magnifiques. Moi qui ne suis pas trop friande du théâtre, j'ai apprécié Roméo et Juliette autant qu'un livre poétique, en appréciant la musicalité des mots, les belles métaphores, les phrases raffinées et sublimes.

Incroyable de penser que cette oeuvre fut écrite au XVIe siècle ! J'ai aimé aussi ce côté littérature anglaise dont Shakespeare est le maître et le précurseur, mêlant raffinement, légèreté et petites doses d'humour. J'ai apprécié le côté courtois et romanesque des personnages comme Roméo. Quelle galanterie !

J'ai passé un très bon moment de lecture, à me délecter de la musicalité et de la poésie des mots. Je continuerai à découvrir la plume de Shakespeare avec son oeuvre la plus célèbre : Hamlet. (et oui, je fais tout le contraire moi, je lis du moins au plus connu ;) )
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