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EAN : 9782253142911
216 pages
Le Livre de Poche (03/12/2012)
3.73/5   52 notes
Résumé :
Dominique Salès, vieille fille déchue et déçue, vit une existence confinée et insipide dans son logement exigu, dérangée par la seule vitalité du jeune couple, les Caille, ses proches voisins... En face, dans une maison bourgeoise, vivent de riches industriels, les Rouet: au second, les parents Rouet, au premier le fils et son épouse Antoinette...
La vieille fille vit sa vie par procuration en observant et guettant les moindres faits et gestes du jeune co... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
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Un de ces romans de Georges Simenon qui ne met en scène ni Maigret ni scénario policier, mais un récit psychologique. On connaît à travers l'ensemble de l'oeuvre de Simenon ses capacités à décrire une ambiance, la chaleur, l'humidité, l'évolution des sensations… Ici encore, cette dimension va jouer un rôle.

Dominique, une « vieille fille » de 40 ans, fille d'un général bougon et tyrannique, mort sans lui avoir laissé un sou, un peu aigrie mais pas encore racornie est obligée de sous-louer une pièce de son petit appartement pour survivre.
De sa fenêtre, à laquelle elle passe son temps, épiant ses voisins, elle va assister à une sorte de meurtre par non-assistance à malade en période de crise. Simenon nous oriente donc vers ce qui pourrait être une enquête policière. Or, le sujet est ailleurs.
Dominique espionne également de façon acoustique (volontairement ou involontairement) ses sous-locataires. Bientôt, les personnages d'en face ou de la chambre d'à côté semblent lui appartenir.
Comme devant un film muet, elle va reconstituer la vie de chaque instant de ses voisins. Ce qu'elle ne voit pas, elle l'imagine, ce qu'elle n'entend pas, elle le devine et le déduit de ses observations.

Comment, à force d'observer ses voisins en arrive-t-on à vivre par procuration ?
A tel point que quand ses voisins s'en-vont, elle a l'impression qu'ils la quittent et ressent un grand vide ; un trou dans sa vie. Un vide de sens !
Le roman se centre petit à petit sur Dominique, ses rêves, ses frustrations, tout ce qu'elle ne s'avoue pas.
C'est une très belle étude psychologique, qui n'explique pas mais constate et aide à comprendre comment on peut vivre en dehors de la « normalité » institutionnelle. Et comment, quand une vie est construite sur des piliers aléatoires, tout peut s'écrouler très vite.
Du très bon, très beau Simenon.
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Ce livre est une première pour moi, il marque mon entrée dans l'univers de Simenon. Belle rencontre, j'ai apprécié la plume, colorée et vivante à la manière d'une palette à la Breughel, capable de plonger loin dans les personnages pour livrer au lecteur leur "moi" le plus secret, dans une vérité parfois cruelle, à la limite de la perversité. Ce n'est pourtant pas l'impression qui l'emporte au terme de la lecture.Il me reste du livre plus encore que les tourments de Dominique dans ses transferts impuissants vers Antoinette, la poésie en noir et blanc d'un décor. Un Paris disparu aujourd'hui s'anime au fil des pages, au delà des fenêtres où se jouent les silences et les drames, il y a la rue, celle des boutiques et des petits métiers, des autobus à plate-forme, des concierges, toute une vie grouillante où j'ai aimé retrouver la ville de mon enfance. Un Paris curieusement non daté pourtant, le récit écrit en 1942, ne décrit pas le Paris de l'occupation, pas de soldats allemands, pas de bruits de bottes, un Paris intemporel, poétique, comme un décor de théâtre éternel.
Une écriture précise et affutée pour un joli voyage en nostalgie.
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La fenêtre des Rouet de Georges Simenon ( France Loisirs - 106 Pages )

Ce court roman narre la grande solitude d'une femme, Nique qui vit chichement avec peu de moyens.
Elle est même obligée de louer une chambre de son appartement.
La chambre de son père, le général Salès servira à un jeune couple.
Elle s'est occupée de son père comme une fille soumise jusqu'à son décès.
Elle est seule dans cet appartement des beaux quartiers de Paris.
Un Paris disparu à jamais avec ses petits métiers, ses vieux autobus, ses commerces où quand il faisait beau les parisiens s'installaient sur le trottoir avec leur chaise en regardant les mômes jouer..


Elle vit en regardant les fenêtres de l'immeuble d'en face.


Un jour elle voit l'homme malade qui a sa crise toujours vers la même heure. Toujours il lui faut ses gouttes pour ne pas étouffer.
Mais ce jour là, sa femme Antoinette, la jeune madame Rouet le regarde s'étouffer et mourir sans réagir...
Nique a assisté à la scène de la fenêtre de chez elle ...
Nique vit dans la vies des autres qu'elle épie. Elle n'est qu'une ombre bien pâlotte.
Avec talent Simenon vous décrit un quartier, ses habitants, les heures qui défilent, les routines, les saisons comme si vous y étiez.
L'atmosphère est lourde et une immense tristesse vous prend à la gorge au fil des pages.
Un drame se prépare lentement.
Pas de commissaire Maigret avec sa pipe dans cette histoire, il n'a pas encore été créé ...
Mireine





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Curieusement, je n'avais jamais lu Georges Simenon. Étonnant, quand on pense que la bibliothèque parentale, dans laquelle j'ai pioché tant de mes lectures adolescentes (découvrant notamment Frédéric Dard, ou Boileau et Narcejac...) comptait pléthore de ses titres. Je crois que cela tient à un de ces a priori qui finissent par nous sembler légitimes, et dont on ne songe même pas à se défaire, instillé en moi par la vieillotte grisaille qui émanait, me semble-t-il, des adaptations télévisées sur lesquelles je ne jetais pas plus qu'un coup d'oeil distrait.. Et puis, à force d'entendre parler du bonhomme par des personnes très recommandables, j'ai fini par me convaincre que ma méconnaissance du troisième auteur de langue française le plus lu après Jules Verne et Alexandre Dumas, était une immense lacune.

Comme je ne fais pas les choses à moitié, que la bibliographie de Simenon est gargantuesque, et que j'adore ajouter des livres à ma bibliothèque, je suis passée du rien au tout, en décidant de me procurer l'anthologie en vingt-cinq volumes publiée chez Omnibus, dont les couvertures sont joliment illustrées de photographies du maître lui-même, prises lors de reportages qu'il effectua au début des années 30 en tant que journaliste. Bon, je n'en suis pour l'instant qu'à deux volumes, mais j'ai le temps...

Tout ça pour dire que le Mois Belge, organisé comme chaque année en avril par Anne, a été l'occasion rêvée de lire mon premier Simenon, et j'ai logiquement commencé par le premier titre du premier volume de cette anthologie..

Alors, verdict ?

Oh, il y a bien dans "La fenêtre des Rouet" quelques indices qui témoignent de son ancienneté (ce roman date de 1942) : des bas que l'on reprise, une petite-bourgeoisie parisienne confite dans des principes qui peuvent aujourd'hui sembler dépassés (quoique, je ne saurais en juger, s'agissant d'un milieu que je ne fréquente pas vraiment). Mais peu importe car la plume, elle, n'a pas pris une ride, l'efficacité stylistique s'accompagnant de la capacité de planter en quelques phrases un univers palpable, enrichi d'images évocatrices et pertinentes. L'intrigue est simple, elle tient d'ailleurs en une petite centaine de pages, et tourne autour d'une petite poignée de personnages, dont un, surtout, occupe son attention.

Dominique habite un immeuble du Faubourg-Saint-Honoré. Cette jeune quadragénaire est ce qu'on l'on appelle communément une vieille fille, bien qu'elle-même refuse se définir ainsi. N'a-t-elle pas après tout conservé la blancheur lisse de sa peau, et la jeunesse de ses traits ? Mais ce qui lui apparaît comme la préservation d'une relative fraîcheur physique, n'est en réalité que l'insipidité qu'elle doit à son immobilisme vital. Élevée dans le milieu rigide et fermé d'une noblesse désargentée, qui n'a gardé de son rang que principes étriqués et puritanisme mortifère, elle a été coupée de tout ce qui pouvait y paraître brutal ou vulgaire, selon les codes d'une bienséance excessive, rejetant toute joie, tout plaisir, toute spontanéité. Dominique vit seule depuis la mort de son père, l'autoritaire et indifférent Général Salès, dans un appartement qu'elle a pu conserver grâce à un charitable arrangement avec un lointain cousin. Elle n'a pas de fortune, n'a jamais connu l'amour, et vit plus que chichement, comptant les grammes de fromage et les bouts de chandelle (au sens propre comme au figuré), s'alimentant à peine, dormant tout aussi peu.

Alors elle vit par procuration, écoutant le bruit des ébats du jeune couple auquel elle loue une partie de son appartement, s'offusquant de leur capacité à se dénuder à n'importe quelle heure du jour mais ne résistant pas à les épier par le trou de la serrure. Et puis elle observe les membres de la riche famille Rouet, à travers les fenêtres de l'appartement d'en face. Les parents vivent à l'étage du dessus -la mère presque impotente mais qui régente le clan avec une tyrannique omniscience, le père souvent absent car pris par son travail-, et les enfants en-dessous : le fils insignifiant, souffreteux, alité car malade, et la bru, Antoinette, belle, vive et coquette, une vulgaire dactylo que le fils, l'unique fois où ce faiblard imbécile a fait valoir quelque volonté, a insisté pour épouser.

C'est dans l'antre de ce couple mal assorti, rendu étouffant par la chaleur mortifère du mois d'août, que se joue le drame dont Dominique est témoin : Antoinette omet volontairement de donner son traitement à son mari lors d'une de ses crises, provoquant sa mort. La curiosité méprisante qu'elle éprouvait jusqu'alors pour cette vulgaire parvenue d'Antoinette se transforme d'abord en fascination horrifiée, puis en un sentiment plus complexe, mêlant à une sorte d'admiration obsessionnelle une farouche volonté de comprendre et d'approcher sa voisine, de s'impliquer, ne serait-ce qu'à distance, dans la passion et la détermination que traduisent ses actes. Car si la personnalité transgressive d'Antoinette heurte la chaste inertie de sa destinée qui n'a jamais été en marge d'un quotidien monotone et écoeurant, Dominique réalise qu'elle a pourtant besoin de se frotter, de tourner autour de cette vie à la fois splendide et vulgaire qui l'impressionne. Et il y a, dans cet élan qu'éprouve soudain cette femme qui semblerait presque sans corps, tant elle en a banni toute sensation, comme l'expression refoulée d'un désir sensuel latent, l'aveu inconscient d'un manque charnel qu'elle n'osera jamais s'exprimer clairement. La justesse et la précision avec lesquelles Georges Simenon évoque les détails de l'existence mesquine de Dominique, puis sa prise de conscience de la vacuité de cet effacement distingué qu'on lui a inculqué, de l'attachement à ces menus gestes du quotidien qui ne servent qu'à bercer la solitude à laquelle l'a condamnée son impuissance à vivre, créent entre le lecteur et son héroïne une proximité qui rend sa chute d'autant plus poignante.

Pour l'auteur, ce titre entrait dans la catégorie de ce qu'il appelait ses "romans durs", et il y a bien, oui, quelque chose de profondément brutal et douloureux, d'obscur, même, dans l'inexorable effondrement de Dominique.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Derrière ses volets mi-clos Dominique vit par procuration. Son horizon s'est limité aux fenêtres de l'immeuble d'en face.
Faubourg Saint-Honoré, dans un Paris disparu, presque provincial, Dominique observe Antoinette, l'épouse extravertie d'un mari mourant, elle observe aussi l'acariâtre belle mère, vivant dans l'appartement au-dessus de sa belle-fille. de son poste non seulement Dominique voit presque tout, mais elle devine les conversations, les mimiques, les jeux de pouvoir entre les personnages, elle va jusqu'à sentir les odeurs. Cette activité de voyeurisme comble le vide de sa propre existence. Une destinée contrariée, une impuissance à vivre et à rebondir inculquée par son éducation. Elle n'a pu s'en défaire, elle lui colle à la peau.
Dominique, bientôt 40 ans, est une célibataire endurcie, solitaire. Sans le sou elle est la dernière survivante d'une famille petite bourgeoise tombée dans le besoin.
Face à Antoinette l'attitude de Dominique sera ambivalente. Elle est tour à tour accusatrice, dénonciatrice, elle va jusqu'à jouer les corbeaux, envieuse, elle ira jusqu'à la suivre dans Paris. méprisante mais avant tout hypnotisée par la liberté et la sensualité de cette femme qui n'est pas de son monde.
Périphérique à cette obsession, le quotidien de Dominique est morne, un jeune couple de locataires qu'elle doit supporter, le poids d'une famille qui la ramène à un passé douloureux, le décès lointain d'une tante, les constantes privations. Elle ne voit plus qu' « à quarante ans, une pente à descendre sans joie ».
Dès les premières pages on est plongé dans l'atmosphère confinée de l'appartement de Dominique, on connaît ses pensées les plus cachées, ses hontes, ses malaises, ses craintes. Simenon a su restituer l'ambiance d'un lieu, d'un milieu, d'une époque ; il nous associe pas à pas comme spectateur à un drame en devenir. On est englué dans une spirale d'une pathétique auto-destruction. Plus qu'un roman policier c'est un roman de l'intime. Une belle réussite.
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Tous les fantômes de Dominique sont de la même race, et tous les mots qui remontent du fond de sa mémoire.
-Les Cottron sont allés faire une cure à la Bourboule...
On ne cite pas le nom de la maladie, on n'évoque pas la chair malade.
-La petite Mme Ralet vient d'avoir une enfant...
Le mot "accoucher" n'est pas énoncé pour préciser l'image; tout se passe, toujours dans un univers en demi-teintes, où les êtres n'apparaissent que lavés, peignés, souriants ou mélancoliques.
Il n'y a pas jusqu'aux noms propres qui ne soient comme des totems; on ne les prononce pas comme des mots quelconques, comme les noms des gens de la rue; ils ont leur noblesse à eux, il y en a une dizaine, pas plus, qui ont accès dans ce vocabulaire, où se rejoignent la famille de Brest, la famille de Toulon, le lieutenant-colonel et l'ingénieur de la marine, les Babarit, qui se sont alliés aux Lepreau et qui sont entrés dans le cercle sacré par petit-cousinage avec Le Bret.
Ces gens, pourtant, Dominique y pense aujourd'hui, n'étaient pas riches. La plupart avaient un petit bien.
-Quand Aurélie héritera de sa tante de Chaillou...
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La sonnerie triviale d'un réveil-matin éclata derrière le cloison, et Dominique sursauta, comme si c'était elle que cette sonnerie - mais n'allait-on donc pas l'arrêter ! - était chargée de réveiller, à trois heure de l'après-midi. Un sentiment de honte. Pourquoi ? Ce bruit vulgaire ne lui rappelait que des souvenirs pénibles, vilains, des maladies, des soins au milieu de la nuit, au petit jour, mais elle ne dormait pas, elle ne s'était même pas assoupie.
(Quatrième de couverture de l'édition de nov 2012)
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Dominique a fermé ses persiennes, mais elle n’a pas joint tout à fait les deux battants ; elle a laissé une fente verticale de quelques centimètres par laquelle elle découvre les maisons d’en face, et, des deux côtés de cette fente où coule du soleil en fusion, brillent les fentes horizontales, plus étroites, aménagées dans le bois. […] De l’autre côté de la rue, ils n’ont pas le soleil de l’après-midi et ils ne ferment pas les persiennes ; aujourd’hui, à cause de la chaleur, toutes les fenêtres sont ouvertes, on voit tout, on a l’impression d’être avec les gens dans leur chambre, il suffirait de tendre la main pour les toucher.
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Un homme ne s’aperçoit pas de ces choses-là, il est rarement capable de percevoir la haine chez une femme, parce que cela ne se passe pas comme chez lui. Rien qu’un redressement du buste, un sursaut à peine visible, une tension passagère des traits, puis un sourire condescendant.
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Les hommes se doutent-ils que le commencement du jour est aussi mystérieux que le crépuscule, qu'il contient en suspens la même part d'éternité? On ne rit pas aux éclats, d'un rire vulgaire, dans la fraîcheur toute neuve de l'aurore, pas plus qu'au moment où vous frôle la première haleine de la nuit. On est plus grave, avec cette imperceptible angoisse de l'être devant l'univers, parce que la rue n'est pas encore la rue banale et rassurante, mais un morceau du grand tout où se meut l'astre qui met des aigrettes aux angles vifs des toits.
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Vidéo de Georges Simenon
"L'Homme de Londres", Georges Simenon, aux éditions le libre de poche
Mila Boursier, libraire à La Grande Ourse à Dieppe, nous parle du roman "L'homme de Londres" de Georges Simenon. Dans ce polar, l'auteur ne nous parle pas de Maigret, mais d'un homme qui prend une mauvaise décision un soir à Dieppe. de fil en aiguille, le lecteur parcourt les rues de la ville dans une haletante chasse à l'homme.
Un entretien mené à Dieppe, à la librairie La Grande Ourse.
Vidéo réalisée par Paris Normandie.
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