AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,97

sur 133 notes
5
9 avis
4
17 avis
3
3 avis
2
0 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Qui n'a pas aperçu derrière la fenêtre d'une maison bretonne la silhouette d'une maquette de bateau de pêche traditionnel, témoin d'une autre époque où les bateaux étaient en bois ?
Une coque colorée et des voiles cachou, des tangons qui lui donnent une allure d'insecte, caractérisent le dundee thonier. C'est dans le berceau de ces voiliers de travail que nous invite Georges Simenon, pour partager une tranche dramatique de la vie d'un armateur, à Concarneau.

Jules Guérec, armateur de quarante ans, revient de Quimper après une réunion du syndicat des patrons pêcheurs. Son permis fraîchement acquis, il n'est pas très à l'aise pour conduire dans l'obscurité sur cette route tortueuse. Il aurait pu, il aurait dû quitter la ville plus tôt et ses pensées se bousculent, l'empêchant de se concentrer sur la route. S'étant octroyé une petite pause chez une prostituée, il va devoir se justifier, auprès de sa soeur aînée, pour les cinquante francs manquants dans son portefeuille. Arrivé à Concarneau, sursautant à chaque fois que quelque chose passe dans la lumière des phares, il accélère au lieu de freiner lorsqu'une silhouette d'enfant surgit. le choc le fait trembler mais la peur le fait fuir, sans se retourner.
Il imagine un mensonge crédible : la perte de son portefeuille. Ses soeurs semblent accepter l'excuse mais Céline, la plus jeune, perce chez son frère le moindre changement, le scrute et lit en lui comme dans un livre ouvert.
Ils vivent, en effet, tous les trois dans la maison familiale; lui travaillant à l'armement, elles, tenant la maison et tissant le cocon chaleureux dans lequel il est traité comme un coq en pâte.
Mais l'accident va faire basculer ce petit monde, révéler le côté obscur de cette vie confortable, préservée, mais au combien dépourvue de liberté, d'indépendance. Alors qu'ils ont tous trois la quarantaine, les dépenses doivent être justifiées, pas de cigarette, pas d'alcool…
Hanté à l'idée de ce qu'il a commis, il se sent aimanté par la maison où vivait cet enfant avec sa mère et son frère dans une grande pauvreté.

Autour des affres de Jules Guérec, la ville de Concarneau se dessine au fil du texte ciselé de Simenon. Une drague ramenant le sable, le passeur d'eau, les remparts, le port de pêche. On est en novembre. « Il pleuvait toujours, ou plutôt c'était si fin, si régulier si monotone, qu'on n'avait pas l'impression que l'eau tombait du ciel. Elle était en suspension dans l'air, une poussière d'eau froide qui reliait les pavés aux nuages ».
On notera le récit d'une pêche au chalut qui sonne comme un reportage.
Bien sûr la psychologie des personnages est décryptée, tracée, mais sans jugement. On sent que ceux-ci font ce qui est dans leur nature malgré les alertes de leur conscience notamment pour Jules Guérec.
Sur fond de lutte des classes, ce dernier va se frotter à la pauvreté, réaliser par exemple que lorsqu'il a la flemme d'envoyer ses bateaux en pêche, cela se traduit par la famine de son équipage.
Le dilemme sera de choisir entre la préservation de la respectabilité de sa famille et le déshonneur de la situation dans laquelle il va se fourvoyer. Ces gens-là tremblent à l'idée de perdre leur confort alors que les pauvres n'ont rien à quoi se rattacher, ils subissent la vie avec résignation.
Jusqu'où peut-on aller dans le déni pour préserver son image ?

Ce petit roman, comme tous ceux de l'auteur, est un nouveau voyage au coeur de l'humain, d'une époque, d'un lieu précis, tout simplement. C'est à la fois simple et exhaustif.
Commenter  J’apprécie          290
"Mentir. Chaque jour. Être surveillé dans ses moindres faits et gestes. Avoir deux soeurs qui lisent dans vos pensées et comptent le moindre centime. Jules Guérec a quarante ans. Il est le frère qui subit. Celui qui cache ses désirs,  ses passions. Jusqu'au jour où l'irréparable arrive. Un accident. le drame. de ces enchaînements de circonstances qui mènent au tragique". 4e de couverture pour un livre de poche de chez Folio, ma foi tout est dit!!
Heureusement qu'on apprend dès le départ l'âge de notre personnage principal car on s'y perdrait très vite et l'on aurait pu croire à un tout jeune homme qui n'a pas encore quitté le cocon familial et pour lequel tout reste à expérimenter.
Avec Simenon, que je découvre avec ce livre, on rentre dans le vif du sujet dès le départ et d'ailleurs on sent bien qu'on va avoir des portraits psychologiques de personnages bien définis.
L'écriture est simple et ciselée pour le rythme de l'intrigue et ça se lit très vite... Cela dit, il me semblait bien qu'on resterait dans la banalité et même à la fin je ne m'attendais pas à quelque chose de bien original.
Pas d'étonnement, pas de surprise et pas d'ennui non plus,  juste une lecture bien agréable.
Commenter  J’apprécie          231
Un polar avec un héros de Simenon qui s'appelle Jules, mais il n'est pas commissaire et, le polar n'est pas réellement un polar mais l'analyse psychologique d'un égoïste qui a tué un enfant en perdant le contrôle de son véhicule en pleine nuit à Concarneau ! Jules Guérec, armateur de thoniers sort d'une réunion des patrons pêcheurs, la route est tortueuse, il pleut et il est inquiet car il a son permis depuis peu, mais il va être en retard chez lui car il s'est arrêté chez une prostituée et a dépensé 50 francs !
Ses soeurs : Françoise, Marthe et Céline l'attendent et il va devoir expliquer son retard, l'utilisation de cette somme et trouver un prétexte car il a fui après l'accident comme un lâche !
Jules travaille et habite en famille avec 2 soeurs car Marthe est mariée à Emile : ils ont 3 bateaux, un magasin, une buvette, une belle maison et des économies : ce sont les plus riches de Concarneau.
Céline qui a toujours protégé Jules ne croit pas au mensonge de son frère qui prétend avoir perdu son portefeuille pour expliquer son retard !
On apprend que l'enfant est mort suite au choc et, Jules pour se déculpabiliser va rendre visite à Marie Papin qui vit seule avec Edgard le frère jumeau de Jo, celui qui a succombé !
Jules va même engager Philippe, un " quasi idiot " frère de Marie pour travailler avec lui, il va multiplier les visites et apporter des cadeaux ! Il a l'impression que, célibataire de 40 ans, il peut avec son argent rattraper son erreur et en faire profiter la famille de Marie ! Bien sur, à Concarneau comme dans toutes les petites villes de province, ses faits et gestes sont suivis et, à la maison les soeurs : en particulier Céline a des doutes sur le vrai motif de cette générosité ! Elle va, contre le gré de Jules proposer un marché à Marie : 8000 francs en échange de tout recours contre sa famille ! Marie accepte mais Jules qui avait décidé entre-temps de l'épouser se met en colère et va tout détruire et tout vendre pour punir sa soeur d'avoir fichu en l'air sa vie !
Georges Simenon dresse le portrait d'une époque, d'un milieu : celui de la pêche et, à la manière De Balzac nous fait vivre les petitesses de la bourgeoisie de province, leur besoin d'assumer leur réputation mais aussi la pauvreté des " petites gens ", leur précarité et leur détresse !
Un polar psychologique et social ou Simenon soulève la face cachée de l'humanité !
Commenter  J’apprécie          222
Jules Guérec célibataire, patron-pêcheur à Concarneau, vit étouffé entre ses trois soeurs et son beau-frère.
Il vient d'obtenir son permis de conduire depuis peu et revient chez lui après une journée à Quimper.... Et sa vie va basculer!
Simenon sait bien décrire l'être humain!
C'est le premier Simenon que je lis. Une fois commencé , je n'ai pas pu le lâcher. C'est un roman court (150 pages) et passionnant. J'ai l'intention de continuer à le lire, et comme il a écrit 192 romans, je vais avoir le choix!
Commenter  J’apprécie          220
Un des 117 "romans durs" du prolifique Georges Simenon.
Comme dans chacun d'entre eux, à la manière d'un Chabrol, d'un Buñuel, d'un Almodovar, l'auteur traque les dysfonctionnements de l'individu et d'une vie sociale et sociétale, surtout provinciale mais pas que, dont il excelle à mettre en lumière les moeurs, leurs travers : les apparences, l'hypocrisie, les mensonges, la "veaudorlâtrie", l'ambition, la lutte pour le pouvoir, l'égoïsme, l'individualisme exacerbé, la ou les lâchetés, la faiblesse, la peur, les pulsions "amoureuses" extra-matrimoniales etc, le tout sous la bienveillance protectrice et intéressée du goupillon jamais à court d'eau bénite, et de l'absolution des péchés confessés dès lors qu'ils n'ont rien à voir avec ce qui s'apparente de près ou de loin avec les vérités du "repentant".

De retour de Quimper où il a assisté à une réunion qu'on qualifierait aujourd'hui d'interprofessionnelle, Jean Guérec, riche patron pêcheur, commerçant aisé et estimé, notable de Concarneau, retourne de nuit, sous le crachin breton, chez lui, au volant de sa voiture neuve, muni d'un permis de conduire des plus récents, et d'une quasi non-expérience de la conduite. Il a peur.
Peur parce qu'il y a beaucoup de tournants, peur des phares d'en face qui l'aveuglent, peur lorsqu'il doit passer en code de se tromper et d'éteindre les siens et de se retrouver dans le noir, peur des descentes, peur lorsqu'il doit freiner d'intervertir les pédales et d'accélérer, peur du bus qui emprunte cette route dans l'autre sens et qui provoque un accident par semaine...
Peur parce qu'il est en retard.
Et s'il est en retard, c'est parce qu'il a dépensé cinquante francs pour passer un moment avec une de ces dames venues de Paris et qui donent leur vertu contre quelques billets...et que Cécile, une des deux soeurs, tient les comptes de la maison, et que non contente de les tenir elle en exige de son frère dont elle connaît les faiblesses... faiblesses qui naguère ont eu un coût et ont failli ébranler la quiétude et la réputation de la famille...
Alors Jean Guérec conduit habité par toutes ces peurs...
Vous l'aurez compris, d'entrée le lecteur sait que cet homme de quarante ans, qui vit avec deux de ses trois soeurs aînées... lui est le petit dernier de la famille..., Céline et Françoise, cet homme est un timoré chronique.
Lorsqu'il entre à Concarneau, peu maître de sa voiture, craintif et pas confiant en ses capacités de conducteur, il réagit de manière hébétée lorsqu'une petite silhouette surgit dans les phares de son auto.
Incapable du moindre réflexe, le choc est inévitable.
Il continue de rouler, non pas parce qu'il a envie de fuir mais parce que l'étroitesse de la venelle où vient d'avoir lieu l'accident ne permet pas à ses lacunes de "chauffard" de faire demi-tour et qu'il a peur de manoeuvrer...et parce qu'il n'a jamais été un homme de décision, un de ceux qui savent prendre leurs responsabilités.
Ça, c'est le domaine de prédilection, le domaine d'influence de ses soeurs...
Lorsqu'il finit par y parvenir, c'est-à-dire à faire faire demi-tour à son automobile, il réalise qu'il est trop tard pour descendre de voiture, assumer sa faute.
Il prend alors la fuite. Commence alors pour lui la vie hantée d'un délinquant qui vient peut-être de tuer un enfant.
Rongé par les remords et sous le joug "affectueux" de ses deux soeurs... les Demoiselles de Concarneau..., il va tenter maladroitement de "réparer" sous le regard réprobateur des soeurs, dont Cécile l'aînée exerce sur lui un ascendant dont il est incapable et peut-être peu désireux de se libérer.
Jean Guérec va pourtant chercher à s'émanciper.
Mais peut-on parvenir à s'affranchir d'une vie douillette, une vie que les "autres" ont toujours veillé à ce qu'elle vous évite les écueils, qu'elles ont fait en sorte que votre chemin soit toujours parsemé de roses et à l'abri de la moindre épine ?
Peut-on s'acheter une conduite d'adulte lorsqu'on a la maturité d'un adolescent pris en charge par les ailes protectrices de deux substituts maternels ?
Peut-on quitter le nid lorsqu'on vous a privé de vos ailes ?
Peut-on exiger que le monde s'adapte à l'idée qu'on se fait de lui ?
Telles sont quelques-unes des questions que va se poser Jean Guérec lorsqu'il va rencontrer la jeune Marie Papin, la mère du petit Joseph quil a renversé, et d'Edgard son jumeau.
Une mère ouvrière pauvre, un gamin un peu sauvage.
Deux mondes que tout oppose et que seul l'argent peut, vaille que vaille, faire cohabiter.
Mais les Demoiselles de Concarneau veillent...

Roman de moeurs, roman social, il y a chez Simenon des influences balzaciennes et zoliennes.
L'auteur a toujours un oeil scalpel très affûté pour disséquer l'âme de ses protagonistes et mettre à nu tous les mécanismes qui s'articulent autour d'eux et qui régissent le cours de leur existence et celui de la petite ville de province qui est à leur image... à moins que ce ne soit l'inverse.
Les personnages sont aussi vrais que nature.
L'histoire est contée avec un sens du narratif parfaitement maîtrisé.
Le style "simonien" est irréprochable et à chacun de ses romans, qu'ils appartiennent aux "durs" ou aux "Maigret", on est envoûté par l'atmosphère singulière que ce grand écrivain réussit à faire surgir de sa plume.
Deux heures d'excellente lecture.

Commenter  J’apprécie          172
Jules Guérec, patron de deux navires de pêche à Concarneau, vit sous le même toit que ses deux soeurs, Céline et Françoise, célibataires comme lui, qui le couvent comme un poussin tombé du nid alors qu'il a une quarantaine d'années.
L'homicide involontaire que commet Jules Guérec au volant d'une voiture l'oblige à se libérer de la tutelle oppressante de sa soeur pour cacher son crime et trouver une solution pour le réparer. Durant quelques semaines, il invente pour la première fois sa vie. Jusqu'à quand ses manigances échapperont-elles à la sagacité de sa soeur Céline et de son entourage ?
C'est ce que vous découvrirez dans ce livre.
C'est le 5ème livre que je lis de Simenon. Je suis toujours ébloui par son style sobre et efficace, ses dialogues d'une vérité incroyable et sa façon implacable de sonder, percer et mettre à vif les ressorts de l'âme et de l'humanité.
Commenter  J’apprécie          102
Jules, 40 ans, une vie triste et mouillé comme un crachin battant les rochers bretons. Rentrant d'une réunion intersyndicale sur une route sombre et cahotante, son permis fraichement passé, il renverse un enfant. La peur, le doute, la maladresse, l'impuissance le poussent à partir non sans hésitation et à rentrer chez lui, sa petite maison sombre qu'il partage avec deux de ses soeurs.
De ces premières pages glaçantes, le mensonge s'installe et tisse la toile emprisonnant Jules. On ne peut s'empêcher d'éprouver de la compassion face à ces vies modestes et brisées qui se débattent quotidiennement pour exister dans le malheur qui les entoure. La religion, la dureté du climat, l'inexistence d'une reconnaissance, l'âpreté des sentiments finissent de dresser un portrait miséreux d'une Bretagne d'avant toute modernité (sauvage dirait Gauguin). Une lecture qui m'a évoqué de nombreuses nouvelles De Maupassant.
Commenter  J’apprécie          101
Premier livre de Simenon que je découvre, mieux vaut tard que jamais, en me référant à la liste proposée par Dourvach et conseillée par Siabelle. Merci à vous deux.
J'ai été conquis. Une histoire toute simple en apparence, mais dans la tête du personnage principal, Jules, elle est très compliquée. Non pas à cause du drame qu'il a provoqué, mais à cause du comportement de ses soeurs, surtout une, qui l'infantilise sans cesse et veut diriger sa vie, ce qui l'oblige sans cesse à mentir et à inventer une autre vie. Et c'est là que j'ai trouvé la narration exceptionnelle, car d'une grande finesse, délicate dans l'analyse psychologique des protagonistes. Nous sommes plongés dans les méandres des errances compliquées de Jules, et pour ma part j'avais du mal à lâcher ce petit roman. Rien n'est appuyé, tout est simplement énoncé ou suggéré, et l'on se dirige doucement vers la destinée triste des uns et des autres, sans pourtant s'y attendre, étant régulièrement surpris par des réactions et des décisions qui, pourtant, semblent inéluctables.
Ce qui interpelle le lecteur c'est aussi, tout au long du récit, la notion de choix du personnage principal, mais aussi des autres personnages. Que vont-ils décider, comment en sont-ils arrivés là, pourquoi, et qu'a donc fait de sa vie Jules... J'ai beaucoup aimé cette fin, qui est un mélodrame.
Commenter  J’apprécie          99
Ceci est un roman de Simenon, mais pas une enquête du commissaire Maigret : Simenon était un auteur très prolifique, et nombres de ses romans inspirent encore les cinéastes de nos jours.
Le lecteur sait dès le début qui est le coupable et qui est la victime. d'un côté, Jules, qui revient de Quimper où il a un peu trop traîné et surtout, trop dépensé (il va y voir des petites femmes, douces comme celles de Paris). Il se demande comment il expliquera les cinquante francs manquants à sa soeur Céline, qui tient les comptes avec beaucoup de compétence et de lucidité – si vous préférez « avarice », cela fonctionne aussi. de l'autre, nous avons un gamin qui revient de l'école, enfant naturel d'une toute jeune fille-mère, comme on disait à l'époque. Elle travaillait à la conserverie, qui a fermé (déjà, la crise, à l'époque). Elle a un frère un peu simple d'esprit, sur lequel elle veille, en plus de ses jumeaux. A Concarneau, tout le monde se connaît, ou presque.
Jules, qui était encore un conducteur novice, est face à deux dilemmes : cacher ce qu'il a fait à ses soeurs, surtout à Céline, si perspicace, si observatrice, et apaiser sa conscience face à la mort du petit garçon. La première tâche sera beaucoup plus difficile que la seconde, tant les soeurs ont imposé leurs règles de vie. Avoir des secrets, un peu d'intimité est impossible. Sur les trois soeurs, seule Marthe, la seconde, est mariée, et comme le veut la tradition, sa fille se prénomme Françoise, comme la soeur aînée, et si elle devait avoir une seconde fille, elle se nommerait sans doute Julie, version féminisée du prénom de son frère. Françoise et Céline ne sont pas seulement les soeurs, ce sont aussi les bateaux que possèdent les Guérec. Seule Marthe, celle qui a quitté la boutique et la maison au rythme de vie si étouffant n'a pas eu droit à un bateau à son nom. Mise à l'écart (bien involontairement) du clan Guérec, elle est la seule à avoir pu se construire une vie en dehors du cercle de famille.
Jules pourrait, lui aussi, s'il n'était pas si lâche, s'il n'aimait le petit confort douillet que lui procure ses soeurs. Céline le pense, et le lui dira : pourrait-il vive avec une femme qui ne prend pas soin de lui constamment, comme elle le fait ? Supporterait-il de ne pas avoir un déjeuner abondant, au retour de la pêche, voire même que ses chaussons ne soient pas soigneusement chauffés ? Guérec n'est pas sans me rappeler Joseph, le héros de Maigretchez les flamands. Adulé par ses soeurs, velléitaire, il a pourtant fait un enfant à une petite ouvrière qu'il est hors de question qu'il épouse. Il est arrivé la même « aventure » à Jules, mais lui a eu plus de chance (je précise, pour ceux qui auraient des doutes, que je cite les soeurs de Jules) : l'enfant était mort-né. Pour Jules, qui n'a jamais eu une décision à prendre de sa vie sans avoir à obtenir l'approbation de ses soeurs, cet accident est presque la grande aventure de sa vie. Pour lui, tout fut aisé, facile, il a toujours eu beaucoup de chance.
A Concarneau, ce sont deux mondes qui s'opposent, le sien et celui de Marie, qui n'a jamais eu de chance. Devenue ouvrière par nécessité à la mort de ses parents, elle est devenue mère de jumeaux à seize ans, tout en ayant la charge de son frère. Pas de jouets, pas de chocolat, pas de tendresse pour ses enfants. Pas de joie non plus, ce que Guérec appelle son inaptitude au bonheur, et presque une incapacité à ressentir des émotions, une résignation. Parce qu'elle a trop souffert dans sa vie ? Elle ne va plus à la messe, contrairement aux Guérec : la religion n'est pas pour les ouvriers. Pas d'introspection non plus, tout juste quelques questions sur les causes des visites régulières de Jules.
Un autre dénouement que celui de ce roman était-il possible ? Non. La révolution n'aura pas lieu, le poids des habitudes, du regard des autres aussi, est toujours là. Et si changement il y a, il n'est pas celui qu'attendait Guérec.
Commenter  J’apprécie          70
Non ce n'est pas un policier! Pas d'enquête. on est témoin de l'accident , on connaît le coupable. C'est plutôt un roman noir. le roman de la culpabilité. le roman des pêcheurs de Concarneau, et des ouvrières dans la crise des années 30 qui a fermé les conserveries.Roman social. Roman familial, d'une tragédie familiale, qui mime le bonheur parfait en infantilisant le héros. C'est le roman de Concarneau.
Lien : http://miriampanigel.blog.le..
Commenter  J’apprécie          70




Lecteurs (343) Voir plus



Quiz Voir plus

Le commissaire Maigret

Quel est le prénom du commissaire Maigret ?

Hercule
Édouard
Jules
Nestor

12 questions
278 lecteurs ont répondu
Thème : Georges SimenonCréer un quiz sur ce livre

{* *}