Champollion démontre de manière magistrale que cette écriture comporte, en réalité, trois sortes de signes. Les premiers sont des idéogrammes, ou signes-images ; les deuxièmes, des phonogrammes, ou signes-sons ; et les troisièmes des déterminatifs, qui ne se lisent pas, mais permettent de fixer la catégorie des mots qui les précèdent. Grâce à sa découverte, le déchiffreur va pouvoir explorer peu à peu toutes les dimensions de cette écriture qui omet les voyelles, ne sépare ni les mots ni les phrases, mais compte des masculins et des féminins, des singuliers et des pluriels, des pronoms, des suffixes, des adjectifs qui s’accordent en genre et en nombre… De quoi occuper toute une vie.
Je suis d’un ennui et d’une mauvaise humeur si grande que je pleure comme un enfant. Tu sais que les lettres sont un grand soulagement quand on est éloigné des personnes qu’on aime.Son seul refuge, sa seule consolation, c’est l’étude, et il s’y adonne avec une intensité qui frôle la fureur. L’emploi du temps de ce polyglotte est stupéfiant : il étudie l’arabe avec Caussin de Perceval et un moine syrien d’Égypte, dom Raphaël ; le persan avec Antoine-Isaac Silvestre de Sacy et Louis-Mathieu Langlès ; l’hébreu, le syriaque et le chaldéen avec Prosper Audran.
J’avais un ami que j’ai aimé de tout mon cœur et que j’aimerai toujours. Il m’aimait autant que je l’aimais, il m’aidait à supporter les peines et les duretés qu’on exerçait envers moi. Toujours ensemble, on ne nous voyait jamais éloignés l’un de l’autre ; il faisait tout mon plaisir et c’est lui qui m’a soutenu jusqu’à présent. Ils viennent de le changer de division, exprès pour me désoler… Ma tête n’est plus à moi ; je suis furieux. Quand mon supplice finira-t-il ?
Si Jean-François Champollion étudie le copte avec tant d’ardeur, c’est parce qu’il s’agit d’une survivance de la langue populaire des anciens Égyptiens. Rien à voir cependant avec les hiéroglyphes : le copte, qui n’est plus employé que dans la liturgie chrétienne, s’écrit désormais avec des caractères grecs, additionnés de quelques signes pour exprimer des consonnes imprononçables.
Travailler d’arrache-pied ne lui interdit pas de s’amuser un peu. Son caractère facétieux transparaît dans Bajazet, une pièce de théâtre farfelue qu’il compose et fait jouer à Grenoble en 1814, à l’occasion du mardi gras. On y côtoie une belle princesse, un vizir occupé à sauver sa tête, un sultan atteint d’un torticolis mortel…
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