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sur 1049 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
John Steinbeck est un affreux petit magicien auquel je vous déconseille de vous frotter jamais. En effet, il est bien capable de vous envoûter, l'animal, et vous n'en sortiriez plus, jusqu'à la fin des temps. Car il est comme ça, John Steinbeck, soyez-en sûrs, et l'on ne se méfie jamais suffisamment des enchanteurs de grands chemins de la littérature tels que lui.

En ce qui me concerne, à chaque fois que revient l'été et qu'un soleil étouffant m'accable (j'ai encore un peu de temps pour cette année), que je me traîne telle une limace exsangue avec pour seule idée fixe l'envie de me vautrer et de siroter quelque boisson, je repense invariablement à Tortilla Flat.

Mais faire la critique de Tortilla Flat est pour moi un exercice périlleux. Premièrement parce que je n'ai pas relu le livre récemment, et ce n'est que par l'entremise des « petites mains » ou logiciels de Babelio qui ont eu le désir et le loisir de supprimer ma critique au cours du dernier mois que je me retrouve à devoir la réécrire aujourd'hui avec pour seul matériau, des souvenirs flétris et des couleurs passées.

Alors certes, le livre est encore bien présent à mon esprit, mais je ne viens pas de le reposer donc, mon cerveau peut vraisemblablement en altérer certains traits et en sur-exprimer beaucoup d'autres. Vous me pardonnerez peut-être et remercierez les bons offices de Babelio pour moi.

Deuxièmement, Steinbeck est probablement l'un des auteurs, pour ne pas dire L'Auteur que je préfère, donc, pas facile, facile d'avoir l'air objective, n'est-ce pas ? Troisièmement, Tortilla flat est, de par son sujet et de par son traitement, très différent, ce me semble, du style « ordinaire » de l'auteur.

À la lecture de certains commentaires, je comprends mieux l'indignation de John Steinbeck et sa décision de ne jamais plus écrire sur les Paisanos de Monterey. Ses contemporains ont interprété son livre dans les années 1930 comme une moquerie en règle, voire, une certaine forme de mépris pour ces habitants dont le sang est à forte proportion amérindio-mexicaine et pour lesquels il nourrissait une réelle sympathie.

En effet, c'est avec beaucoup de tendresse et une bonne dose d'humour que Steinbeck dépeint ces drôles de drilles et certainement pas pour s'en moquer, un peu à la manière d'un Pagnol qui se fout gentiment des Marseillais mais qui nourrit un profond respect et un amour vrai de leur âme.

Pour être franche, je n'ai réellement compris ce que John Steinbeck avait voulu exprimer dans Tortilla flat que lorsque j'ai moi-même côtoyé des Amérindiens pendant une année. À la première lecture, j'en étais restée au cocasse, au côté décalé de ces gais lurons, dont l'essentiel du raisonnement tourne toujours plus ou moins autour d'un gallon de pinard.

Mais en vivant auprès des peuples amérindiens, à voir, en chair et en os, des gens qui sont tout sauf adaptés au système dominant, qui sont heureux quand ils peuvent se retrouver entre copains et se mettre une bonne cuite, qui n'ont aucune espèce de notion de ce que ça peut être que la rentabilité, l'intérêt, la prévoyance, les réserves, un travail fixe ou encore la ponctualité, mais qui jouissent, en revanche de nous, d'une forme d'insouciance continuelle, d'une joie de vivre dans le dénuement et d'une confraternité très enviable, j'ai vu plus clair dans le message de Steinbeck.

(Bien que, vous l'imaginez sans peine, même parmi de telles gens peuvent toujours se faire jour des querelles — d'ailleurs souvent pour les motifs les plus incompréhensibles de ce côté-ci de l'Atlantique.) Eh bien là, d'un coup, mes souvenirs de Tortilla flat ont refait surface, et je me suis dit : « Comme c'est juste ; comme il a su trouver la bonne façon d'en parler, avec humour, avec certains traits un peu caricaturés, mais dans l'ensemble si réalistes. »

Du coup, j'ai également compris ce choix de narration, si empreinte d'une certaine naïveté. Cela colle si bien au tempérament des Paisanos qu'un autre mode d'énonciation eût été moins bien approprié.

Il ne faut surtout pas chercher une histoire ou une morale à ce livre. Dites-vous simplement que l'auteur va vous parler de gens, qui, dans l'ensemble, ne réfléchissent pas comme vous et moi, qui considèrent qu'ils ont sauvé leur journée quand ils ont réussi à se gonfler la panse de victuailles (c'est bien), et de vin (c'est mieux).

Si par revers de fortune il n'y a que du vin, ils ne vont pas en faire une maladie, par contre, s'il n'y a ni victuailles ni vin, ils vont s'ingénier, faire fonctionner leurs bras, voire même leur cerveau pour combler cette lacune.

C'est une vie sans calcul, d'aucune sorte. Donc, lorsque le hasard d'un héritage fait de Danny un propriétaire, c'est tellement loin des préoccupations ordinaires du groupe de copains, c'est une telle révolution de leurs habitudes qu'on comprend que l'ordre ne reviendra qu'à partir du moment où Danny aura tout perdu et qu'il pourra retourner à ses rigolades et pochetronneries quotidiennes avec ses potes.

Pour illustrer cet état d'esprit, je vais prendre un exemple que j'ai réellement vécu avec des Amérindiens. Lorsqu'on vous donne par exemple rendez-vous « demain », cela peut signifier « dans une heure », « ce soir », « dans une semaine », « dans un mois », « jamais de la vie, tu peux toujours courir » voire, très, très, très exceptionnellement, « demain ».

Eh bien les Paisanos de Monterey c'est ça, c'est exactement ça ! L'esprit du quartier nommé " Tortilla Flat ", c'est ça ! Des gens qui n'ont pas du tout la même vision de la vie que la nôtre, cette vie que nous subissons plus que nous ne la vivons, où l'on déprime dès qu'on perd son emploi, où l'on a la bougeotte dès qu'on est trois jours sans aller travailler, où l'on court toute la journée (d'ailleurs pour pas grand-chose, bien souvent).

Bref, voilà ce que je peux vous dire de ce livre, c'est drôle et pathétique à la fois, c'est presque un témoignage ethnographique urbain sur une communauté et un quartier qui a dû bien changer à présent. C'est un drôle de document sur une façon de vivre probablement disparue de nos jours à Monterey, mais qui a existé du temps de Steinbeck, il n'y a pas de raison d'en douter, et que l'on peut encore rencontrer en voyage, deci-delà, auprès de populations, pas du tout « dans le système » et qui doivent bien rigoler à nous voir courir tout le temps. du moins c'est mon avis tortillé et plat, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Sur les hauteurs de Monterey se trouve le quartier de Tortilla flat.
Dans ce quartier vit une communauté " les paisanos ", qu'est-ce qu'un paisano?
" c'est un mélange de sangs espagnol, indien, mexicain avec des assortiments caucasiens.
A Tortilla flat tout le monde connaît Danny, surtout depuis qu'il a hérité de deux maisons.
Danny est un vagabond où plutôt était un vagabond, sa nouvelle condition de propriétaire va faire de lui une personne très convoitée.
Dans ce roman de John Steinbeck on découvre une communauté de petites gens, de vagabonds, une histoire d'amitié à travers des chroniques.
Même si " Tortilla flat " n'égale pas les raisins de la colère " ou " des souris et des hommes ", j'ai aimé ce roman.
C'est l'esprit " beat " avant l'heure.
Steinbeck est un naturaliste comme l'était Emile Zola, sa façon de raconter la vie, les drames des petites gens, bref un grand écrivain.
J'aime cet homme.
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Un délicieux petit livre qui se savoure comme une parenthèse de douceur dans un monde de brutes, un baume de lumière joyeuse, goguenarde et fraternelle qui fait du bien, rempli d'humour et baigné de la tendresse qui transparait dans la plume de Steinbeck pour cette nonchalante bande de pieds nickelés amoureux du vin, des nuits étoilées et de l'amitié à rebours de toutes les valeurs matérialistes contemporaines.
Merci à Nastasia-B pour les éclairages apportés dans sa critique, qui m'ont permis de savourer pleinement ce petit bijou.
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Très belle histoire sur le thème de l'amitié d'une bande de copains, qui ne possèdent rien sinon l'amitié qu'ils partagent et qui est leur seule richesse, leur luxe.
Ils sont heureux ainsi, en ne possédant rien, en ne travaillant pas, en vivant de petits larcins, de trocs,sans aucune responsabilité sinon celle de trouver de quoi boire et manger, de profiter de la vie tout simplement, au jour le jour.
Récit souvent drôle, qui met en scène des gens très pauvres, délaissés par la société mais qui ne sont pas malheureux pour autant , bien au contraire. C'est vrai que leur attitude est un peu déroutante, leur activité principale étant de boire, mais on leur pardonne car ils débordent de générosité ,d'altruisme et d'ingéniosité.
On reconnait bien là les thèmes de prédilection de l'auteur; la Californie et les personnages de la classe ouvrière confrontés à la crise.
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Une ode magnifique à l'amitié
Au milieu des pauvres gens qui peuplent Tortilla Flat , peuplé de gueux , de propres-à-rien , de mendiants rivalisant de tares, comme disait le poète, l'amitié est au dessus de tout de l'argent, du luxe et même de l'amour
Un texte inoubliable qui réchauffe le coeur
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Je continue tranquillement ma découverte de l'oeuvre de Steinbeck.
Avec Tortilla Flat, c'est une plongée en Californie, sous le soleil de Monterey à laquelle nous convie l'auteur.
C'est avec beaucoup de tendresse que Steinbeck nous fait suivre une tranche de vie de certains paisanos. Qu'est ce donc que ces paisanos ? me demanderez vous . Steinbeck les décrit comme " un mélange de sang espagnol, indien, mexicain, avec des assortiments caucasiens. Des autochtones quoi ...
Danny, qui va être le personnage central de l'histoire, va hériter fortuitement de deux maisons. Pour quelqu'un qui n'a jamais pu accéder au titre de propriétaire, cela augure beaucoup de bouleversements dans sa vie.
Dany étant par nature un homme ayant le sens du partage, va inviter ses amis à profiter de ses maisons.
C'est cette bande d'amis que nous allons suivre au rythme des journées paisibles de cette région.
Cette bande d'amis qui vit au jour le jour n' pas été sans me rappeler la bande de joyeux lurons de la Rue de la Sardine.
La lecture fut plus que sympathique, je n'ai pas pu m'empêcher de sourire à l'évocation de certaines histoires.
Bon, bientôt, je vais m'attaquer à un morceau autrement plus sérieux avec les raisins de la colère...
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Décidément, Danny est un brave type. Alors qu'il vit de trois fois rien, il hérite de deux maisons dans le quartier de Tortilla Flat, il va s'installer dans l'une des deux et louer l'autre à un ami de beuverie, première erreur car il ne verra jamais tomber le moindre loyer. Son prétendu locataire va culpabiliser et lui trouver quelques bouteilles en guise de remerciements, avec Danny, ça passe. Si encore cela en restait là… Il va dépanner un deuxième, puis un troisième, puis un encore, et un autre avec ses cinq chiens. Et quand la maison à louer aura brûlé, toute cette charmante troupe va élire domicile chez Danny en rapportant un soutien-gorge trouvé je ne sais plus où, comme-ça, Danny pourra l'offrir à sa compagne du moment, avec Danny, ça passe !
Bref, une bande de pieds nickelés dans les années 30, un seul travaille, les autres se lèvent à midi et s'installent au soleil pour la sieste, le soir, on boit quelques gallons de mauvais vin piqués chez Torelli qui tient le débit de boisson et qui se fait arnaquer du début à la fin du roman, qui se fait dépouiller de son mobilier et sa femme de sa vertu. La soirée se termine par des chants et quelques bagarres.
Une ode à l'amitié chez les marginaux de la côte ouest qui n'est pas sans rappeler les compagnons de la grappe de John Fante ou l'oeuvre de Charles Bukowski.

Un petit passage pour finir qui donne une idée de l'humour de l'auteur:
“Moralement, voici comment on peut graduer les bonbonnes. Juste au-dessous de l'épaule de la première bouteille, conversation sérieuse et concentrée. Cinq centimètres plus bas, souvenirs doux et mélancoliques. Huit centimètres en dessous, amours anciennes et flatteuses. Deux centimètres de plus, amours anciennes et amères. Fond de la première bouteille, tristesse générale et sans raison. Épaule de la seconde bouteille, sombre abattement, impiété. Deux doigts plus bas, un chant de mort ou de désir. Encore un pouce, toutes les chansons qu'on connaît. La graduation s'arrête là, car les traces s'effacent alors et il n'y a plus de certitude : désormais n'importe quoi peut arriver”.
Je rappelle à cette honorable assemblée que l'abus d'alcool nuit gravement à la santé. Un verre, ça va, 3 verres, bonjour les dégâts.
Encore un grand Steinbeck.

Challenge Multi-Défis 2022.
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J'éprouve souvent le besoin de relire un grand écrivain dont les années ont bonifié l'oeuvre, comme vieillit un bon vin dans son fût. C'est aussi pour moi un retour aux sources : jeune lectrice, ces livres m'ont enchantée et formé le caractère. Ce sont des livres et des auteurs - hommes et femmes - dont la réputation n'est plus à faire. Ce sont des textes intemporels et universels, en ce sens qu'ils parlent des besoins et des liens vitaux communs à l'humanité : nourriture, abri, solidarité, désir amoureux, échanges amicaux, philosophie et spiritualité.
J'ai lu plusieurs fois Tortilla Flat, découvert dans une édition ancienne, le Club des Amis du Livre. Présenté par Albert t'Serstevens, écrivain français d'origine belge et illustré par Pierre Chaplet - le peintre du mouvement mort en 2011 - le texte de Steinbeck ressort comme un joyau dans son écrin. Ancrée en un lieu, à une époque précise (Monterey, Californie, 1919), l'histoire qui nous est contée n'en répond pas moins à ces critères d'intemporalité et d'universalité.
C'est la saga de joyeux drilles qui, par dessus tout, aiment leur liberté. de courtes saynètes, enchaînées avec une fluidité maîtrisée, nous les présente confrontés aux pièges de la sédentarité et de l'enracinement : propriété, travail, famille, engagements, obligations sociales. Pourtant, portés par de nobles convictions morales, ces « clochards célestes » abandonnent volontiers leur habituelle oisiveté et leur ivresse chronique lorsqu'il s'agit de secourir la veuve et l'orphelin. le plus pur d'entre eux, Danny, est également leur mentor et l'héritier de la maison qui les abrite tous. C'est aussi celui qui tient le plus à sa liberté. Par sa fin homérique, il rendra la leur à ses compagnons.
Fable philosophique, roman tout à la fois joyeux, tendre et mélancolique, Tortilla Flat enchante l'esprit et le coeur.
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Tortilla Flat nous emmène au milieu d'une bande de paisanos en Californie. Ceux-ci vivent de rien, sans moyens, sans maisons, sans travail, se contentant de vivre heureux entre amitiés et tonneaux de vins. Jusqu'au jour où l'un d'entre eux, Danny, va hériter de deux maisons.
Les personnages sont incroyablement attachants et généreux. Ils sont drôles et vivent simplement entourés de bons vivants à trinquer au soleil.
C'est un récit optimiste et coloré qui donne envie de s'attarder sur les instants les plus simples de la vie.
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Excellent ! A chaque fois que j'ouvrais ce livre c'était un peu comme si je sautais dans un tableau et me fondais dans le paysage. Je n'imaginais pas, j'étais, je vivais... l'histoire, le paysage, les personnages, leurs sentiments.
Quel écrivain !
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