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Georges Piroué (Traducteur)
EAN : 9782070763221
448 pages
Gallimard (03/10/2001)
3.92/5   33 notes
Résumé :
Ce roman retrace quelques années de la vie d’un jeune homme, Alfonso Nitti, campagnard transplanté à Trieste, où il fait à la fois la découverte du monde du travail et celle de l’amour. Mais cette double initiation révèle une double faillite.
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
"Une vie" est le premier roman d'Italo Svevo. L'auteur y décrit la vie tragique d'Alfonso Nitti. Ce jeune homme a quitté son village pour Trieste. Il loue une modeste chambre et est employé au service de la correspondance de la banque Maller. Mais c'est surtout la littérature qui intéresse Nitti et les intrigues de bureau l'ennuient. Il s'éprend d'Annetta, la fille de Maller, la séduit en dépit de sa timidité et de son inexpérience. Il est question de mariage, à condition d'abord de convaincre un père qui espérait un meilleur parti. Mais Nitti semble craindre cet engagement. Il obtient un congé afin de retourner dans son village où il apprend que sa mère est mourante. Après le décès de sa mère il rentre à Trieste. Annetta a été promise à un autre. Il cède une partie du capital qu'il a hérité afin de permettre le mariage de Lucia, la jeune fille de ses logeurs. A la banque il est relégué au service de la comptabilité en guise de punition. Bref, il est à nouveau pauvre et désoeuvré et Anetta le poursuit désormais de sa haine. Ce premier roman est donc l'histoire d'un échec, celle d'un homme sans doute trop tendre et sentimental, dont les rêves et les ambitions se heurtent à une réalité qui s'avérera des plus brutales.
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Alfonso Nitti est un jeune homme pauvre, tendrement attaché à sa mère, venu tenter à chance à Trieste. Il trouve un modeste emploi d'employé de banque, copiant des correspondances commerciales toute la journée dans un univers terne et compassé. Alfonso a des rêves de gloire littéraire, comme Italo Svevo qui s'inspire manifestement largement de sa propre expérience professionnelle. Une vie modeste qu'il consacre à la lecture, à l'étude et à des rêveries, logé par une famille qui aimerait bien qu'il s'intéresse à leur fille.

Pourtant, un jour, son patron lui ouvre la porte de sa demeure où il fait la connaissance d'Anneta la fille de la maison. Il noue avec elle une relation d'abord fondée sur la littérature mais qui devient amoureuse. Ou bien il s'imagine qu'il vit une histoire d'amour... Car Alfonso est peu doué pour la vie, peu préparé à ce monde, à l'engagement que la vie implique.

Le sujet de livre est l'incapacité à vivre, la peur devant tout ce qui est susceptible d'arriver, l'impossibilité de saisir à pleines mains ce qui se passe pour le faire sien et s'y retrouver.
Le destin du jeune homme pauvre, qui aurait pu être fait de succès et d'amour, s'enfonce vers l'échec. Chacun de ses choix ou de ses non choix l'y entraine. Il pense aimer et se regarde aimer à distance, n'y croyant pas toujours lui-même mais souffrant des moments de froideur ou d'éloignement qui peuvent marquer le développement de la relation. Il se pense amoureux, prêt à jouir des perspectives de cette union socialement avantageuse puis se pense noble en renonçant à son amour par grandeur d'âme et stoïcisme. Enfin, il est envahi par la jalousie et le sentiment d'échec qu'il a provoqué.

Et Anneta épousera Macario, le collègue solaire et vivant d'Alfonso, tandis que dans la vie d'Alfonso le gris se fait. Son dernier geste sera d'aider financièrement la famille qui le loge, incapable de demander son pardon à une Annetta qui maintenant le hait.

Il y a chez Svevo à la fois une peinture des moeurs de cette bourgeoisie triestine très XIX e siècle et une plongée dans l'univers mental d'Alfonso qui annonce la littérature du XXeme. le lecteur suit la sinuosité de ses pensées, ses hésitations, ses rêveries, ses atermoiements dans un récit introspectif méticuleux.

J'ai été très touchée par cette lecture, émue et agacée par cet Alfonso névrosé.
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UNE VIE de ITALO SVEVO
De son vrai nom, Ettore Schmitz, Svevo est de Trieste et c'est là qu'il rencontrera Joyce, qui fût son professeur d'anglais en 1903. Svevo servira en partie de modèle au Bloom d'Ulysse, juif par son père, protestant par sa mère. Une vie est son premier roman paru en 1892.
Une vie, c'est celle d' Alfonso Nitti, jeune homme qui quitte son village natal et sa mère pour Trieste. Il est persuadé d'avoir un destin littéraire, loue une chambre minable et travaille chez un banquier Maller. Il sera bientôt invité chez ce dernier et va tomber amoureux de sa fille.
Ce n'est pas un livre qu'on lit pour l'intrigue, bien sûr, mais pour le traitement psychologique des personnages. Nitti découvre l'amour mais n'y comprend pas grand chose et passe son temps à vivre les situations dans sa tête. Tout est sujet à interprétation, la distance de la main de l'aimée par rapport à la sienne ou le sourire présent ou absent sur son visage. C'est le roman de l'indécision, de l'hésitation, d'où les conseils plus ou moins avisés des amis. Manipulé par tous, cet être pur et maladroit ne s'en sortira pas indemne.
Une très belle plume qui de temps à autres a des accents proustiens, c'est une découverte pour moi. Dans ce tome il y a également Selenità et La conscience de Zeno, j'y reviendrai ultérieurement.
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Premier roman d'Italo Svevo (1861-1928), passé inaperçu lors de sa parution (1893).
Alfonso quitte sa campagne pour la ville où il espère faire carrière. Il est embauché dans une banque, noue une intrigue amoureuse avec Annetta , la fille du patron. Eternel insatisfait, il renonce à s'attacher à cette fille, finit par perdre son travail et tout espoir de réussite sociale. Il se résout au suicide pour des motifs similaires à toutes ses décisions précédentes, par orgueil, par excès d'introspection et d'interprétation des pensées des autres. Il se noie tout au long du roman dans les hésitations et ruminations stériles au lieu de vivre pleinement, tout simplement.
Le personnage principal, un antihéros bien moins sympathique que le Zeno du troisième et excellent roman de Svevo, est morne et usant, au point de peser sur l'état d'esprit du lecteur. Les analyses psychologiques sont fines mais trop peu au service de l'action ou d'intrigues intéressantes. On ne retrouve pas non plus l'humour et l'ironie omniprésents dans "La conscience de Zeno".
Paradoxalement, c'est peut-être la première qualité de ce roman d'avoir su rendre crédible l'inanité du personnage puisque le titre initial était « Un incapable ».
A noter que, dans "La conscience de Zeno", Svevo nous offre un long chapitre sur la mort du père, ici nous avons droit à un chapitre sur la mort de la mère.
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Ce livre n'est pas une claque dans son style, ni dans son écriture. Il n'est pas une claque dans son originalité tant dans le choix du thème que son traitement. Il n'est pas le plus fin et le plus abouti roman psychologique de la littérature. Mais en rien, il n'est médiocre. Il est bon dans tout et à titre personnel, il me touche sur au moins un aspect émotionnel. Donc il rentre dans mes critères pour les quatre étoiles.
Mais si vous souhaitez lire un Italo Svevo, optez pour La Conscience de Zeno, qui lui est original et abouti sur à peu près tous les domaines précités.
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Citations et extraits (42) Voir plus Ajouter une citation
Chaque instant de loisir qu'il passait hors du bureau, ou même au bureau, où il possédait quelques livres dans un coin, il le consacrait à la lecture. c'était généralement des ouvrages sérieux de critique ou de philosophie, parce que l'art ou la poésie ne le fatiguaient pas assez. Il écrivait, mais peu ; son style encore hésitant et les termes impropres qui en disent trop ou trop peu sans jamais atteindre le but ne lui donnaient pas satisfaction. Il pensait que l'étude le ferait progresser. Il n'était pas pressé et le peu qu'il faisait constituait sa contribution journalière au plan de travail qu'il s'était fixé. Après s'être fatigué à la banque ou à la bibliothèque, il jetait sur le papier quelques petites remarques, quelques effusions romantiques adressées à lui seul et que personne ne recevrait jamais. Il n'y avait de notable, dans ces confidences, que l'espèce de mal universel dont le jeune homme semblait souffrir ; ses souffrances réelles, la nostalgie de son village, qui le travaillait toujours, n'y trouvaient aucune place. Il considérait ses écrits comme des notes rudimentaires dont il pensait se servir dans un avenir lointain pour des oeuvres plus importantes, drames, romans, ou pis encore.
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Il n'avait jamais pensé au suicide qu'à travers le jugement faussé d'autrui. Or il l'acceptait maintenant, non point résigné mais heureux. Quelle libération ! Il se souvenait avoir eu d'autres idées encore récemment et il souhaita se calmer, voir si ce sentiment de bonheur qui l'entraînait vers la mort n'était pas un produit de la fièvre dont il pouvait être envahi. Non. Il raisonnait calmement. Tous les arguments contre le suicide défilaient devant son esprit, des préceptes moraux des prédicateurs aux considérations des philosophes plus modernes : tout cela le faisait sourire. Ce n'étaient pas des arguments mais des désirs : le désir de vivre.
Lui au contraire se sentait impropre à la vie. Quelque chose que souvent en vain il avait cherché à comprendre la lui rendait douloureuse, insupportable. Il ne savait ni aimer ni jouir de quoi que ce soit ; dans les circonstances les meilleures il avait souffert davantage qu'autrui dans les plus douloureuses. Il quittait cette vie sans regret. C'était la voie pour dominer soupçons et haines. C'était le renoncement auquel il avait rêvé. Il fallait détruire cet organisme qui ne connaissait pas le repos, qui, vivant, aurait continué à l'entraîner à lutter, puisque telle était sa fonction. Il n'écrirait pas à Annetta. Il irait jusqu'à lui épargner le dérangement et le danger que cette lettre pouvait être pour elle.
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Il regarda avec des yeux tous neufs sa petite chambre gaie, rendue riante par le rayon de soleil qui y pénétrait à cette heure, pour la seule fois de la journée. Que de belles heures il y avait pourtant passées ! Heures d'étrange félicité, de permanente satisfaction d'orgueil à découvrir certaines faiblesses chez autrui, contre lesquelles il était lui-même immunisé à voir les autres se battre pour l'argent et les honneurs, tandis que lui restait tranquille, tout heureux de sentir naître le génie dans son cerveau et, dans son coeur, une affectivité plus délicate que celles que les hommes possèdent d'habitude. Il comprenait les faiblesses des autres, il y compatissait, et sa fierté de leur être supérieur s'en trouvait augmentée. Lorsqu'il entrait à la bibliothèque ou dans sa petite chambre, il s'isolait totalement de la lutte ; personne ne lui contestait son bonheur, il ne demandait rien à personne. Mais voilà qu'aujourd'hui, ces partisans de la lutte, qu'il avait toujours méprisés, l'avaient attiré parmi eux et, sans la moindre résistance, il avait éprouvé leurs désirs, adoptés leurs armes.
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Aujourd'hui, il l'aimait. Car ce devait bien être de l'amour, cette nostalgie d'une femme à l'exclusion de toutes les autres. Il soumettait l'agitation de ses sens à de subtiles analyses, ne pouvant le faire sur un quelconque sentiment, puisqu'il n'en éprouvait pas. Pendant les quelques jours où il s'était efforcé en vain d'étouffer ses désirs en les orientant dans une autre direction, il s'était senti devenir homme, adulte. Il se souvenait des remarques que le visage d'Annetta lui avait inspirées et s'étonnait maintenant de n'avoir pas tout de suite compris que l'originalité de cette femme et sa beauté consistaient précisément dans ce qu'il avait d'abord qualifié du nom de défaut. Des yeux qui n'étaient pas noirs ! Des cheveux pas assez frisés ! Annetta était une Vénus et sa tête aux yeux bleus tranquilles, aux cheveux presque modestement plaqués était l'effigie de l'intelligence. Un baiser sur ces lèvres qui semblaient incapables de le rendre, quel délice ce devait être !
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Malgré tout, Alfonso ne se sentait pas malheureux. Il trouvait le bonheur, d'une part, dans son acharnement même à l'étude et, d'autre part, dans son ambition démesurément grossie, sa soif de gloire. Il se découvrait supérieur aux autres et s'il ignorait encore comment atteindre la célébrité, il se trouvait confirmé dans ses espérances par son amour de l'étude devenu passion. Il complétait ses heures de travail à la bibliothèque par d'autres heures à la maison, sans pour autant s'estimer satisfait. L'étude envahissait ses occupations de bureau, mordait sur le déjeuner, le dîner et lui dérobait chaque jour quelque nouvelle tranche de sommeil.
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Quel roman tire à boulets rouges sur la psychanalyse ? Mais avec un humour qui dériderait le plus sérieux des psy ?
« La conscience de Zeno » , d'Italo Svevo, c'est à lire et à relire au Livre de poche.
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