Je commence par deux commentaires sur la présentation du livre dans l'édition Folio :
- Bravo pour l'illustration de couverture qui mêle subtilement les courbes de niveau des cartes IGN au 1/25 000ème et les cernes concentriques qu'on voit sur les souches d'arbres.
- Mais pourquoi ce bandeau « commercial » signé
Pierre Vavasseur, qui proclame : « Marche ou crève. » ? Pour moi cette phrase n'a rien à voir avec le contenu du livre.
Venons-en justement au contenu.
Sylvain Tesson nous a habitués depuis quelques titres, comme « L'Axe du loup » ou «
Berezina », à des paris foutraques. Sur un coup de tête, une idée subite, il part pour l'aventure que nous rêvons tous d'accomplir tout en trouvant toutes les excuses pour ne pas la tenter.
Là, il s'agit de traverser la France à pied, le plus loin possible de la civilisation, au sortir de quelques mois d'hôpital, la colonne vertébrale truffée de plaques et de boulons.
Mais ce livre n'est pas un récit de voyage ni un carnet de route, du moins pas seulement. Ce pourrait être une version moderne des « Rêveries d'un promeneur solitaire ». le sujet principal n'est pas le paysage traversé, mais plutôt les pensées qu'il fait naître : « La marche était une pêche à la ligne : les heures passaient et soudain une touche se faisait sentir, peut-être une prise ? Une pensée avait mordu ! ».
Les réflexions se mêlent aux impressions visuelles, et l'auteur aborde de nombreux sujets sur la vie contemporaine : l'isolement et la désertification des campagnes, l'urbanisme galopant, Internet … Bien sûr il y a assez souvent un aspect « misanthrope grincheux » dans les propos de
Sylvain Tesson, mais même si parfois je ne suis pas d'accord avec lui, j'avoue que je me suis régalé de la finesse de pensée du bonhomme, et surtout de son habileté à user des mots, de les condenser dans la formule qui fait mouche.
D'ailleurs je me rends compte que les citations saisies par les lecteurs de Babelio sont extrêmement nombreuses, preuve que je ne suis sans doute pas le seul à apprécier le style de
Sylvain Tesson, et aussi son érudition qui affleure perpétuellement sans jamais devenir envahissante.
Voilà encore un livre à conserver à portée de main pour venir y picorer de temps en temps.