A Verdon, bourgade du Nebraska, une famille de fermiers autrefois prospère se délite sous l'effet de la modernité ; mais règne toujours en toute puissance, inspirant crainte et respect.
Il y d'abord Lincoln Fargo, le patriarche, personnage fantasque, symbole de l'Amérique. le verbe haut, ce vétéran de la Guerre de Sécession passe son temps à chasser les poules avec sa canne, un cigare noir coincé entre ses lèvres. Il a légué ses terres à son fils aîné, Sherman, arrogant et vénal, qui n'arrive pas à les faire fructifier malgré l'achat de couteuses machines agricoles.
Son autre fils, Grant, est un dandy musard, un "gommeux", un imprimeur dépassé par les
nouvelles techniques de la presse.
Sa fille Edie, abandonnée par son mari, tente tant bien que mal d'élever son garnement de fils.
Sa dernière fille, Myrtle, est marié à Alfred, un anglais atteint de la syphilis qu'il tente de soigner avec des pommades au mercure.
Il y a ensuite l'oncle Barkley, un riche banquier qui ne se laisse pas attendrir par la situation financière de sa belle famille. Sa fille Bella, une brune plantureuse aux moeurs légères lui donne du souci.
Il y a enfin
Jeff Parker, le cousin un brin dadais, qui fait rire le bourg malgré lui. Son abnégation lui a permis de devenir avocat.
Tous à leur manière sont entraînés dans une chute inexorable, battus par la vieillesse, le progrès, la corruption et la jalousie qui leur ronge le foie. La tension est palpable, l'orage va finir par éclater.
Une grande fresque familiale sous fond de roman noir, ce roman de
Jim Thompson, qui n'est pas un polar, est à part dans son oeuvre.
Il aborde de nombreux thèmes au rang desquels les liens de la famille et du mariage, l'enfance, l'adolescence, l'alcoolisme, le commerce et la corruption. Avec une grande acuité Big Jim dépeint l'Amérique rurale d'après la Grande Dépression, confrontée à la modernité et à l'appât du gain.
Les dialogues sont savoureux et la traduction de
Michèle Valencia impeccable.
Il y a du
Faulkner dans cette histoire !