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EAN : 9782818043905
640 pages
P.O.L. (18/02/2021)
3/5   1 notes
Résumé :
Dumitru Tsepeneag est un auteur roumain établi en France depuis plus de 40 ans. Dans les années 1960 et 70, c'est le chef de file de l'onirisme, le seul courant littéraire à s'opposer au réalisme socialiste officiel en Roumanie. En 1975, il est déchu de sa nationalité par Ceausescu et contraint à l'exil. Il publie aujourd'hui pour la première fois en français une partie importante de son journal, sous le titre de Un Roumain à Paris.

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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
J'ai découvert que l'auteur ne manque pas d'humour et qu'il use de l'autodérision avec juste mesure : « Je voudrais m'établir quelque part dans le Midi. N'importe où. de préférence sur la Côte d'Azur. Mes nouvelles responsabilités de rédacteur en chef m'en empêchent. En fait, il faudrait avoir les sous pour pouvoir monter régulièrement à Paris. Je ne les ai pas. (Ou alors m'acheter une voiture – mais alors je devrais apprendre à conduire !…) ».

J'ai découvert de nombreuses informations sur des auteurs roumains et français, sur l'amitié de Dumitru Tsepeneag avec le traducteur Alain Paruit, sur l'autre dissident célèbre, Paul Goma, sur le cinéma et la musique, ainsi qu'une foultitude d'anecdotes sur l'exil plus ou moins forcé de certains Roumains, mais l'impression d'ensemble reste celle d'un auteur nombriliste, bien que défenseur et représentant de marque des « oniristes » roumains : « j'écris ma littérature onirique et formaliste, d'autant plus que de toute façon mes coups de gueule, les protestations d'un écrivain comme moi, ne peuvent influencer la marche des choses. La belle jambe, mon article du New York Times. Ma littérature est autrement importante ».

Point très positif, la présence d'un index de noms propres et de nombreuses notes de bas de pages très utiles, ainsi que l'addenda « La condition des intellectuels en Roumanie. Entre censure et corruption. Entretien diffusé par Radio Free Europe le 30 septembre 1973 » avec Monica Lovinescu.

Mais attention, les 640 pages ne peuvent, en aucun cas, être avalées d'une traite.

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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
En ce qui me concerne, et même si je rejette par principe la littérature engagée, je n’ai pas eu un choix facile lorsque dans la discussion avec la direction de l’Union des écrivains, mes interlocuteurs m’ont fait comprendre que si la censure refuse mes livres, que les critiques littéraires m’ignorent et que j’ai à subir toutes sortes de désagréments, c’est justement parce que je me mêle de ce qui ne me regarde pas. Pour ne pas tourner autour du pot, disons franchement que j’ai accepté cet accommodement, ce modus vivendi : m’occuper de mes oignons pour donner une chance à ma littérature. J’ai donc accepté cette espèce de pacte tacite qui était, de mon point de vue, un compromis. Je ne me mêle plus de ce qui ne me concerne pas, j’écris ma littérature onirique et formaliste, d’autant plus que de toute façon mes coups de gueule, les protestations d’un écrivain comme moi, ne peuvent influencer la marche des choses. La belle jambe, mon article du New York Times. Ma littérature est autrement importante. C’était, il faut le dire, le point de vue d’un écrivain qui en avait assez, fatigué. En même temps, pour que l’homme, le citoyen si vous préférez, puisse éviter de protester, ce qui est tellement difficile quand on se trouve confronté à une bureaucratie stupide, obligé de fonctionner dans un milieu engourdi, j’ai demandé le droit de repartir à l’étranger, ce qui m’a été accordé avec une rapidité étonnante. Je suis parti… Mais il y a une seconde raison de mon silence, sans laquelle peut-être que je n’aurais jamais accepté ce compromis. Eh bien, j’ai quitté la Roumanie immensément dégoûtée, déçu par la lâcheté et le conformisme de mes confrères, de mes collègues, comment les appeler ? écrivains !
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Or le modèle de cette situation [l'onirisme] est le rêve. Jamais abstrait, toujours construit avec des bribes de réel, concret puisqu’on s’en souvient au réveil et qu’il influe sur notre état d’esprit, le rêve est le symptôme réel de quelque chose qui échappe à la raison. Telles les images surgies spontanément dans l’esprit de l’écrivain quand celui-ci ne veut pas faire œuvre d’enseignant ou de prophète et se laisse porter uniquement par son imagination, le rêve est la manifestation d’une réalité intérieure qui se signale sans nous permettre de l’expliquer. De ce fait, la littérature, et l’art en général, ne « dit » pas, elle signale à chacun ce noyau d’inconcevable qui nous met devant l’inconfort de notre condition. Il va de soi que cette façon d’envisager les choses est une contestation des fondements même de l’idéologie qui justifie le pouvoir totalitaire de ceux qui prétendent mener une politique « scientifique » – qui ne l’est pas davantage, disons-le en toutes lettres, que celle de ces technocrates qui invoquent « les lois objectives du marché » –, et qui se flattent d’édifier une société idéale, pour l’heure très hypothétique.
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25 janvier 1978

Somme toute, si j’avais un peu plus de courage, je pourrais finir ma vie en « écrivain errant », comme Joseph Roth, cet Autrichien que Negoițescu admirait tant. Sa fin tragique – il s’est suicidé, m’a-t-on dit, mais je n’en suis pas sûr – est tragique uniquement d’un point de vue du bourgeois ordinaire qui voit les choses en spectateur, de l’extérieur… il n’y a rien de tragique dans un suicide. Ce n’est même pas une question de courage mais d’une certaine nonchalance. Ainsi, par exemple, je ne me soucie pas – ce qui veut dire que je ne me considère pas tenu à avoir de tels soucis (au nom de quoi ?!) – du fait que je n’ai pas les sous pour le billet de train jusqu’à Paris où Mona doit accoucher dans deux semaines, et cela lui fait un peu peur, la pauvre. Commencer par ne plus considérer ce genre de choses comme des obligations. Même si de toute évidence je retournerai à Paris dans quelques jours. Je trouverai bien l’argent pour le voyage : je demanderai à Ivănceanu ou bien, au téléphone, à Alain [Paruit]. On pourrait croire que je suis déjà entravé par trop de liens, attaché (par des dizaines et des centaines de fils plus ou moins épais) à un certain mode de vie. En définitive, ce n’est pas uniquement par fainéantise mais aussi par souci d’une certaine sécurité : il est difficile – à supposer que cela soit possible – de vivre au jour le jour (Ivănceanu faisait le même raisonnement pour justifier sa façon de vivre). Ce qui pose une fois de plus la question du binôme lâcheté/courage. On n’y peut rien, à cela près que l’appréhension est une sensation relative, toujours en rapport avec autre chose : à moins d’être psychopathe, et même dans ce cas extrême, la peur que l’on ressent n’est jamais abstraite. Elle est toujours le résultat d’une angoisse profondément enracinée dans l’inconscient ou qui a des implications métaphysiques profondes. Nous avons peur du lendemain lorsque nous avons pris l’habitude de le savoir assuré. Ce n’est pas une peur authentique. Je veux dire que cette peur peut être maîtrisée par l’éducation. Nous ne sommes pas nés avec. Nous ne l’avons pas ressentie dans notre enfance (et parfois ni même dans notre jeunesse). Pour faire bref, il va de soi que je dois me désembourgeoiser, ne plus me soucier du jugement des autres. C’est le nœud de la question.
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Au fond, qu’est-ce que la vérité en littérature ? Du point de vue philosophique, la vérité est une notion relative, subjective. Je ne parle pas d’une vérité qui vous a été présentée comme telle, de tel ou tel événement qui a eu lieu à tel ou tel moment. Ce qui compte, c’est la tension qui se manifeste dans l’effort de l’artiste d’harmoniser son être avec la société à laquelle il appartient. Il s’agit du désir d’être soi-même, entier et harmonieux, quels que soient les risques passagers et stupides encourus. Il s’agit de cette tension qui exclut la peur et les tentations matérielles. Cette fièvre… cette fièvre elle seule produit les œuvres d’art. Simple, non ?
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Je veux commencer par ce qu’on nomme le groupe onirique, auquel appartiennent les poètes Leonid Dimov, Virgil Mazilescu, Daniel Turcea, et les prosateurs Sorin Titel, Florin Gabrea, Virgil Tanase. Je ne doute pas qu’avec le temps, petit à petit, ce groupe traité avec une certaine légèreté en Roumanie où l’on met en doute la qualité esthétique de leurs écrits apportera la preuve, ici, en Occident, de la pertinence de leurs œuvres. Ce n’est certainement pas un hasard si parmi les écrivains roumains traduits ces dernières années en Occident, la majorité appartient à ce groupe : Sorin Titel, Leonid Dimov, Virgil Mazilescu, Daniel Turcea, Florin Gabrea, Virgil Tanase.
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Vidéo de Dumitru Tsepeneag
Dumitru Tsepeneag Un Roumain à Paris - éditions P.O.L : où Dumitru Tsepeneag tente de dire de quoi et comment est composé son nouveau livre, "Un Roumain à Paris", traduit du roumain par Virgil Tanase, son journal des années 1970 à Paris, et où l'on croise notamment Roland Barthes, Eugène Ionesco, Emil Cioran, Paul Goma, Nicolae Breban, Michel Deguy, Gabriel Marcel, Leonid Dimov, Paul Otchakovsky-Laurens, Alain Robbe-Grillet, Robert Pinget, où il est aussi question de la parution de ses premiers livres dans la collection Textes chez Flammarion, de sa déchéance de nationalité roumaine, de la revue "Les Cahiers de l'est", de Chine et de Roumanie, de jeux d'échecs et de courses de chevaux, de l'onirisme et du surréalisme, à l'occasion de sa parution aux éditions P.O.L, à Paris le 4 février 2021. Dumitru Tspeneag - Dumitru Tepeneag - Ed Pastenague "un român la Paris"
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