Polar idéal à lire un lendemain de fête !
Un scénario qui tient la route : même en connaissant le meurtrier dès le milieu de l'ouvrage, le suspens ne faiblit pas.
Premier roman d'une journaliste critique musical, qui nous plonge dans un monde qu'elle connaît bien : celui du Londres des années 90, entre les beaux quartiers et les salles de concert et pub du côté de Camden, entre un jeune, talentueux, et charismatique réalisateur d'un film horrifique, mais aussi une jeune, talentueuse, ravissante journaliste héroîne de l'histoire, et un jeune, talentueux et sulfureux érivain , entre musique, film et journal , journal qui se veut aux dents longues.
On ne sait pas trop si leurs folies sont de mauvais trips dus à un usage plus ou moins régulier de produits extatiques. Quoi qu'il en soit, je suis toujours admirative devant la résistance physique de ces corps anglos-saxons, capables d'ingurgiter et de mélanger tant d'alcools divers...
Je n'ai pas trop appris sur la musique de l'époque, mais quelle belle promenade dans ce Londres mythique de la fin du vingtième siècle. Cela vaut bien le Whitechapel du dix-neuvième.
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Le personnage principal Diane est un peu l'alter ego de Cathi Unsworth. Comme l'auteure, ex-critique musicale, elle est journaliste et écrit dans un nouveau magazine culturel d'avant-garde. Son job l'amène à fréquenter les milieux où se retrouvent en cette année 1992 tout ce que la scène londonienne comptent de célébrités, actuelles, anciennes ou à venir, du monde de la musique, du cinéma et du roman. La description des endroits branchés de ce Londres underground est d'ailleurs très réussie. Pour Diane, son collègue Barry et son boss Neil, la vedette du moment qu'il ne faut pas rater est le réalisateur Jon Jackson dont le dernier long métrage vient de révolutionner le film noir. Diane se passionne également pour un roman particulièrement réussi mais dont l'auteur est une énigme à ses yeux.
Alors que tout semble bien s'annoncer pour nos journalistes, le cinéaste est assassiné dans des circonstances rappelant son dernier film. Une certaine opinion publique y voit l'oeuvre d'un esprit impressionnable que la violence à l'écran à poussé à commettre un geste horrible. le récit bascule alors vers le roman noir, sans réelle enquête, mais avec une tension qui va crescendo à mesure que se dévoilent les personnalités. le suspense n'est cependant pas vraiment au rendez-vous, le rythme reste assez lent et l'intrigue, qui tarde à se mettre en place à mon goût, pas super passionnante.
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Impressionnant ce livre, il nous transforme en rôdeur dans un milieu londonien très branché.
Nous courrons à travers différents quartiers underground.
Nous découvrons des lieux insolites avec des personnages hors norme.
Nous entendons des morceaux de musique et nous voyons le même film que les personnages rien qu'en tournant les pages.
Nous nous passionnons pour cette histoire dont on découvre petit à petit les différents fils...une intrigue déconcertante, poignante qui nous entraîne jusqu'à la dernière page avec un style soutenu en nous laissant haletant.
Témoignage d'une époque, d'un milieu! C'est un vrai roman noir.
Il ne me reste plus qu'à découvrir les autres titres de cette auteure, superbe programme!
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C'est un roman basé dans les années 70 avec beaucoup de références musicales que je n'ai pas. C'est agréable à lire, sans beaucoup de suspense, on connaît assez vite le coupable. C'est plutôt l'image d'une époque foisonnante qui est intéressante. le style est fluide.
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La lumière crue du plafonnier ne le gênait pas, au contraire. Il ne voulait pas en perdre une miette. Comme s'il mettait en scène un scénario, un tableau vivant. Pas une partie de jambes en l'air improvisée, mais une oeuvre qu'il chorégraphiait. Il me manipulait au lieu de me laisser bouger. M'immobilisait pour mieux visiter chaque recoin et chaque repli de mon anatomie.
Ses baisers ; sa langue épaisse et avide dans ma bouche ; ses doigts qui m'explorent, durs et impatients. Il s'arrête. S'assoit. Regarde. Réarrange. Choisit l'angle de mes jambes, s'introduit. Pilonne, s'arrête. Regarde. Réarrange.
Ça dure des heures, et bientôt ce n'est plus qu'une étrange performance artistique, totalement mécanique. Rien à voir avec l'union de deux êtres désireux de partager un peu de chaleur. Alors, pour masquer l'anormalité de la situation, il répète :
- Putain, que t'es belle. Je n'ai jamais vu de femme aussi belle. Je te trouve incroyable. Merde, t'es incroyable !
Moi, j'ai l'impression d'observer, de ne pas réellement participer. Je ne sais pas ce que je ressens. Je ne ressens plus rien. Je me dis : quand est-ce que je vais pouvoir dormir. Qu'on en finisse.
Enfin, à l'approche de l'aube, tandis qu'il se démène comme s'il voulait me faire passer à travers le mur, il jouit en hurlant. Marmonne encore : « Putain que t'es belle » et s'écroule sur moi.
S'endort, la main dans mes cheveux.
Moi, le corps meurtri, écoeurée, je me demande : pourquoi est-ce que j'ai fait ça ?
(p. 244-245)
Aux yeux des autres habitants du village, la famille de Barjo ne valait pas mieux que les porcs. Ils étaient la lie de la création.
La caravane abritait une véritable collection de monstres de foire, fruits des coucheries d'un soir de la mère [alcoolo et toxico] qui s'était tapé tous les motards, les gitans et les ivrognes du bled. Ceux des enfants qui n'étaient pas dégénérés étaient d'une cruauté machiavélique.
Everill [l'auteur du roman] me faisait penser à un Harry Crews ou à une Flannery O'Connor qui se seraient égarés sous des climats plus froids - et plus familiers.
Au fin fond du pays de Galles.
L'aîné était de loin le plus abruti et le plus violent de la fratrie. On l'appelait Cogneur et, quand il ne tentait pas de copuler avec les poules, il terrorisait ses cadets à grand renfort de beignes et de torgnoles. Quand la volaille venait à manquer, il se rabattait sur ses deux petites soeurs : Mary, qui avait pour toute possession une bible, et Mong, totalement aphasique, qui ne savait que baver et renfiler.
[...] La mère n'était qu'un fantôme, trop bourrée, trop nase ou trop défoncée à l'arrière de la caravane pour offrir une quelconque protection à ses enfants.
(p. 46-47)
Tout est plus grand en Amérique. Vous avez Hollywood, la pègre, et, ainsi que Luther le faisait remarquer si justement, un pays tout entier bâti sur l'esclavage, la prohibition, le racket et le trafic d'alcool. Ici, nous avons de vieilles baraques à la campagne avec des cadavres plein les placards, des stations balnéaires fanées et les vestiges d'un empire sur lequel le soleil a fini par se coucher. Nos flics sont de frêles vieilles dames qui enquêtent comme on résout des mots croisés. Les assassins sont au pire des employés de bureau frustrés, au mieux des acteurs ratés - mais certainement pas de ceux qu'aurait choisi Howard Hughes.
En revanche, il détestait King's Cross, le quartier qui s'étendait devant lui. C'était Sodome. L'enfer sur terre. Une porte avait dû s'ouvrir ici, déversant son lot de pervers et dépravés. Les putes, les maquereaux et la racaille camée déferlaient dans les rues crasseuses à grand renfort de bourrades et de vociférations ; frissonnants et transpirants, ils rasaient les devantures clinquantes en face de la station de métro et se répandaient dans les boyaux cancéreux environnants. La puanteur infecte de King's Cross accompagnait sa lente et solitaire progression le long de York Way.
Les loyers bon marché attirent une certaine clientèle. Je vivais en compagnie d'hommes vieillissants sans emploi fixe, qui erraient parmi les ruines de leur vie, dans un étrange crépuscule perpétuel, un relent de graisse de bacon et de sueur qui perçait sous l'odeur de talc. Les morts en sursis : c'était le surnom que je leur avais donné.
Reportage dans la classe d'anglais de Marie-Hélène Fasquel avec la présence des auteurs Cyane et Cathi Unsworth.
Extrait JT 12/13h de France 3 du 29 mars 2017