grand livre écrit par un grand historien...il s'agit de regarder à la loupe les crises qui ont émaillé ( et construit) la France de 1871 à 1968)...on a beau avoir été à l'école et suivi des cours d'histoire...C'est fou ce que l'on peut apprendre dans ce livre!
Commenter  J’apprécie         10
Jules Ferry a été un des hommes les plus caricaturés, les plus brocardés, les plus hais de son temps: par une droite, qui lui reprochait ''l'école sans Dieu''; par une gauche, qui dénonçait son conservatisme social; par une droite et une gauche qui lui faisait un crime de sa politique coloniale. Trois fois ministre de l'Instruction publique, deux fois président du Conseil, il a été pendant ces six années qu'il passa aux affaires, de 1879 à 1885, le grand praticien du positivisme constructif, mais son oeuvre, honnie ou mal comprise, exerça une répulsion dont le général Boulanger a amplement bénéficié en ses jours de gloire.
Entre le 17 juin et le 11 juillet, le Maréchal prononce cinq discours qui livrent les idées générales de ce qui va s'appeler l’État français. ''C'est à un redressement intellectuel et moral'', selon l'expression de Renan après la défaite de 1871, que les Français sont conviés. ''L'esprit de jouissance'' avait fait tout le mal; l'heure était à ''l'esprit de sacrifice''.
L'expérience internationale prouve qu'il n'y a pas de différence de nature entre la démocratie bourgeoise et le fascisme. Ce sont deux formes de la dictature du Capital. Le fascisme naît de la démocratie bourgeoise. Entre le choléra et la peste, on ne choisit pas.
S'il fallait justifier mon choix - l'étude des spasmes, des ruptures, des fractures plutôt que celle des continuités, des structures, des régularités - je dirais que l'étude des divisions passées contribue, mieux que les discours unanimistes, à l'élaboration d'un ''vouloir-vivre-ensemble''.
Deux charges supplémentaires firent du suspect un coupable: l'une, avancée comme "preuve", était une similitude d'écriture entre le bordereau et une dictée qu'on fit faire à Dreyfus; l'autre, implicite, était que ce capitaine d'artillerie était juif.
Par Annette WIEVIORKA, directrice de recherche émérite au CNRS
Tout historien, et même préhistorien, établit un lien avec "ses" morts dont il tente de restituer l'histoire, de la Lucy d'Yves Coppens aux morts qui sont ses contemporains. L'opération historiographique a souvent été décrite, de Jules Michelet à Michel de Certeau, comme opération de résurrection des morts et oeuvre de sépulture de ces morts qui hantent notre présent.
Il y a aussi d'autres morts. Ceux des siens qui sont autant de dibbouk pour l'historien parce qu'ils ont orienté sa vie. Ce sont des morts fauchés avant d'avoir été au bout de leur vie, des morts scandaleuses. "Je suis le fils de la morte". Ce sont les premiers mots de l'essai d'égo-histoire de Pierre Chaunu. Ces morts nourrissent les récits familiaux, devenu un nouveau genre historique, de Jeanne et les siens de Michel Winock (2003)("La mort était chez nous comme chez elle") à mes Tombeaux (2023).
Les morts de la Shoah occupent une place tout à la fois semblable et autre. C'est la tentative d'éradiquer un peuple, la disparition du monde yiddish dont ceux qui en furent victimes prirent conscience alors même que le génocide était mis en oeuvre. Ecrits des ghettos, archives des ghettos, rédaction de livres du souvenir, ces mémoriaux juifs de Pologne écrits collectivement pour décrire la vie d'avant, recherche des noms des morts, plaques, murs des noms, bases de données.... Toute une construction mémorielle. Vint ensuite le temps du "je"(qui n'est pas spécifique à cette histoire) , celui des descendants des victimes, deuxième, troisième génération, restituant l'histoire des leurs. Chaque année, plusieurs récits paraissent, oeuvres d'historiens ou d'écrivains, qui usent désormais des mêmes sources, témoignages et archives, causant un trouble dans les genres.
+ Lire la suite