Séra, 13 ans, jeune représentant franco-cambodgien de la jeunesse dorée de Phnom-Penh, se trouve emporté par la vague révolutionnaire Khmer-rouge qui balaie le pays. C’est cette peur extrême, exprimée par l’expression khmer qui donne son titre au livre que relate l’auteur 40 ans plus tard.
17 avril 1975 : les Khmers rouges envahissent la capitale. Français et Américains quittent le pays en abandonnant leurs supplétifs autochtones.
Avril 1975 : Séra se souvient...
Tels de sublimes constructions « Photoshop », Séra dispose les « calques » de sa mémoire sur les planches d’un carnet de souvenirs. À grand renfort de documentations intégrées dans le fil d’un récit chronologique, de divines cases aux couleurs sages et douces que peuvent zébrer ponctuellement quelques tâches vives, captent le réalisme de photographies d’époque. De nombreuses incrustations appliquées en aplat de couleur vive et unie donnent vie à ce kaléidoscope narratif. Tel un album photo familial, documents d’archives, couvertures de revues d’époque illustrent les évènements traversés. La finesse du dessin semble retranscrire une sorte de fragilité des impressions mémorielles.
Tout en magnifiant les souffrances du peuple Cambodgien, le graphisme porte en lui l’élégance et la pureté de l’art Khmer. Les visages graves des personnages de la bd semblent s’extirper des façades des temples d’Angkor. Du chaos nait la beauté.
Aucun dialogue dans ce témoignage historique. Les personnages ne sont que témoins d’une Histoire qui les dépasse. La souffrance décrite n’est pas la leur. C’est la désolation sublimée du Cambodge dans le monstre d’un Kampuchéa proclamé. La vision journalistique de son auteur est déroulée sous les cases en caractères typographiques.
Quel dommage que la couverture de ce recueil soit si insipide au regard de la qualité de son contenu !
Cette bd restera longtemps à ma portée de main.
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Il est toujours difficile de rédiger une critique sur un ouvrage autobiographique, particulièrement pour ce roman graphique.
Son titre renvoie à une expression de la langue Khmère signifiant "Mort de peur". Cette peur que Séra retranscrit magnifiquement à travers ses dessins remplis de réalisme. Pour lui, le monde qu'il connaissait, qui le rassurait a cessé d'exister le 17 avril 1975 derrière la grille de l'Ambassade française au Cambodge.
Malgré le fait que j'ai été souvent perdue dans l'enchaînement des événements historiques, j'ai été happée et je ne suis pas parvenue à me détacher du livre.
L'auteur nous livre un épisode marquant de sa vie et construit sa trame avec beaucoup d'émotion.
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Très belle BD
c'est une belle histoire d'amour/amitié entre un homme et un oiseau marin
Les dessins sont vraiment très beaux
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Au lendemain du 17 avril 1975, alors que les Khmers rouges évacuent toutes les villes du Cambodge, hommes, femmes et enfants se retrouvent sur les routes du pays, symbolisant trois groupes : les paysans, les citadins et les Khmers rouges eux-mêmes.
Absolument bouleversant autant du point de vue graphique qu'historique, cet album, aux grandes images sombres qui évoquent magnifiquement la boue, la glaise et les charniers, est préfacé par Rithy Panh, le réalisateur de « S-21, la machine de mort khmer rouge ».
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Dans cette bande dessinée, l'auteur, Séra, revient sur la guerre du Cambodge qui permit l'arrivée au pouvoir des khmers rouges en 1975.
On suit un jeune homme, Snoul, qui appartient à l'armée quelques heures avant que les dernières lignes de défense tombent face aux attaques des khmers rouges. Snoul et sa compagnie « ne se font aucune illusion sur leur destiné. Ils n'ont plus rien à perdre, sinon des crimes, des larmes, du désespoir. » (p.30). Cette bd se déroule l'espace de quelques heures. Des heures pesantes avant la défaite. Snoul revoit son passé, se rattache au sourire de la femme qu'il aime. La tension est palpable au sein de ce groupe d'homme en déroute, « l'heure est à la barbarie. » (page 53). Snoul n'est pas loin de la folie et s'enfonce dans l'horreur de la guerre. Une guerre qui se termine et qui va laisser place à un régime sanguinaire. Le régime des khmers rouges, entre 1975 et 1979, fit approximativement 1,7 millions de victimes (environ 20% de la population de l'époque).
J'aime ce genre de bande-dessinée qui revient sur un événement historique. Dans « impasse et rouge » transparaît toute l'horreur de cette guerre. On sent une grande émotion. Le récit est parfois confus, tout comme les dessins mais l'auteur clôt cette bande dessinée par des explications chronologiques qui permettent de situer le récit.
Les dessins sont parfois un peu fouillis, manquant de netteté, les tons sont ocres, rouges, noirs, gris et font bien ressortir l'ambiance de pesanteur et de drame.
C'est une bande dessinée que je conseillerai avant tout pour l'aspect historique.
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Ce magnifique album, qui décline des planches de dessins, peinture et photographies, retrace à travers différents personnages l'histoire de la guerre du Cambodge et des Khmers rouges. Des cartes illustrent le propos, terrible, des massacres perpétués au nom de la Révolution. D'un esthétisme parfait, cet ouvrage nous donne une leçon d'histoire qui fait froid dans le dos.
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J'ai déjà lu "Lendemains de cendres" du même auteur et je trouve les deux BD complémentaires, avec les mêmes réserves que Noirdésir sur celle-ci, plus complexe à aborder sans informations préalable.
Le massacre perpétré par les Khmers rouges dans leur propre pays après une longue guerre fut abominable de bien des façons. Les chiffres sont hallucinants, les actions stupéfiantes par leurs ampleurs et le silence qui accompagna tout ceci est glaçant. Mais progressivement la parole se délie et des informations apparaissent sur ce régime et ses exactions. Cette BD s'inscrit dans le même ordre d'idée : dénoncer, raconter, se souvenir.
Elle apparait moins comme un documentaire ou un pamphlet qu'une errance dans le régime des Khmers, collectionnant des instantanés de vies de la part de personnes contraintes de fuir les villes, de paysans voyant leurs vies bouleversées et de Khmers qui croient fermement dans leurs combats. L'ensemble est plutôt décousu et présente les différentes situations que des gens peuvent avoir vécus, entrecoupés de cartes présentant l'ampleur des déplacements ou de textes historiques Cambodgien, ainsi que des témoignages. C'est un patchwork qui tente de faire ressentir ce qu'il s'est passé.
Accompagné par le dessin de Sera qui donne un mélange de rendu photographique retouché et de scènes plus sauvage dans le traitement, presque floues. C'est un mélange qui fonctionne en grande partie, donnant une atmosphère proche du rêve (ou du cauchemar) au récit, les figures humaines se mélangeant avec un environnement très présent et une horreur graphique qui joue sur ce qu'elle cache.
Une BD sympathique à lire, instructive et qui conviendra aux personnes s'intéressant au Cambodge et son histoire. Moins complet que "Lendemains de cendres", toutefois, elle se limite à un ressenti de l'intérieur et me semble en ce point complémentaire aux autres ouvrages déjà sortis sur le sujet. Pour ma part, j'ai apprécié et je conseille pour la culture générale et la compréhension de cette horreur encore bien récente.
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Voilà ! Voilà ! Ca, mes amis, c'est de la BD documentaire comme il FAUT en lire, et non pas se contenter de l'envisager. Ca, c'est le genre de BD dont la lecture devrait être obligatoire au collège ! Parce que ce n'est pas juste un documentaire !
La BD est sur la guerre du Cambodge, certes, mais surtout elle traite de tout ce qui se passe durant cette guerre atroce (en même temps, quelle guerre ne l'est pas ...). Car si, comme moi, vous ne connaissez des guerres asiatiques du vingtième siècle que la guerre du Vietnam et vaguement les Khmers rouges, cette BD remet les pendules à l'heure sur ce qu'il s'est passé il y a moins de cinquante ans dans cette partie du monde. Et ce fut loin d'être beau !
Mais ce que j'ai particulièrement aimé dans cette BD, c'est que loin de se contenter de décrire au travers d'un personnages les affres de la guerre, l'auteur rajoute des précisions qui éclaircissent bien plus sur tout ce qui a eut lieu autour (et notamment en Thaïlande par exemple). C'est des ajouts qui renforcent encore plus le sentiment d'horreur de cette guerre, qui a vu la mort de tant de cambodgiens déjà affaiblis par un des pires systèmes que le monde ait connu.
Le dessin est particulier, retranscrivant une atmosphère propre au récit, mais avec quelque chose donnant ce côté sale. C'est bien puissant au niveau de l'immersion, et efficace également.
Bref, je ne serais pas plus long pour vous le conseiller : cette BD mérite qu'on s'y attarde, deux fois plutôt qu'une. Ne serait-ce que pour comprendre dans quel monde on vit, il faut lire cette BD. Ce genre de guerre est bien trop proche de nous pour qu'on puisse la considérer comme du passé lointain. Remettre en tête ce que c'est que la guerre, c'est peut-être d'autant plus crucial aujourd'hui, dans notre démocratie qui n'hésite pas à la faire chez autrui.
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(IK971) Réédition d'un album de 2005 sur l'exil de Cambodgiens après la guerre et la prise de pouvoir des khmers rouges. Récit éprouvant et très émouvant au graphisme original, délavé assez en phase avec le thème mais pas pour la sélection du Prix BDz'îles.
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une BD graphique. Plutôt que de suivre l'histoire, on regarde les magnifiques dessins, qu'on imagine en très grand format.
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(SCO971) Cet album est terrible et sombre, tout comme l'histoire qu'il évoque : le Cambodge de Pol Pot et des Khmers rouges, la terreur, la misère... le graphisme est tout aussi sombre et la mise en page un peu confuse. Pour moi cet album est à decouvrir dans un autre contexte. Non pour le Prix.
(IK971) La suite de l'eau et la terre, réédition d'un album de 2007 sur l'exil de Cambodgiens après la guerre et la prise de pouvoir des khmers rouges. Récit éprouvant et très émouvant au graphisme original, délavé assez en phase avec le thème mais pas pour la sélection du Prix BDz'îles.
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Un livre graphique bouleversant avec un si beau titre. En khmer, avoir « l'âme au bord des cheveux » signifie « être mort de peur ».
Sera est franco cambodgien et va nous narrer avec son crayon, la vie de ses parents lors de la chute de Phnom Penh et l'arrivée des khmers rouges.
J'ai voyagé au Cambodge et cette histoire est encore présente, que ce soit avec des lieux de mémoires, des récits.
Sera va faire une enquête historique (avec des cartes, des dates, des scènes de guerre) mais aussi il rend un hommage à ses parents, ce couple mixte.
Hommage au couple de ses parents , un couple solide , amoureux , sa mère a à peine 18 ans quand elle rencontre son futur mari et part pour le Cambodge pour le meilleur et le pire.
C'est aussi un récit très documenté qui explique la situation politique de l'époque , la cruauté des vainqueurs .
Ce roman graphique est jalonné de cartes précises, de dessins en forme de photographies, des encadrés de journaux, des citations, quelques affiches ou couvertures de romans de l’époque, pour créer un reportage quasiment objectif. Puis des souvenirs plus intimes, avec des souvenirs d'enfance, le portrait de ses parents et leurs choix.
L'histoire avec un grand H et la petite histoire au niveau familial font de ce texte un texte indispensable pour ne pas oublier ces épisodes si cruels de l'histoire du 20eme siècle.
#LÂmeauborddescheveux #NetGalleyFrance
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