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Critiques de Adrian Tomine (50)
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Blonde platine

Quatre nouvelles en bande dessinée.



"Alter ego" : un jeune écrivain qui manque de confiance en lui cherche à renouer avec une ancienne connaissance du lycée, au détriment de sa relation actuelle.



"Blonde platine" : un jeune homme limite asocial s'éprend d'une jeune femme et essaie de l'aborder. Il est très déstabilisé quand celle-ci entame une relation avec son voisin qui est tout le contraire de lui.



"Escapade hawaïenne" : une jeune femme mal dans sa peau vit une vie très effacée et trouve un échappatoire en faisant des canulars téléphoniques au court des quels elle rencontre quelqu'un.



"Alerte à la bombe" : au lycée un jeune homme n'arrive pas à se situer entre un ami moqué pour ses possibles tendances homosexuelles et une amie qui est plutôt une fille "facile". Lui-même ne semble pas être intéressé par la sexualité.



Le point commun de ces histoires est le fait qu'elles parlent toutes de gens mal dans leur peau, mal dans leurs vies, plutôt des "loosers"... Et je dois dire que j'ai trouvé ça plutôt déprimant!



Ce qui m'a gênée, c'est que les histoires s'arrêtent d'un coup et on reste vraiment sur sa faim. J'ai trouvé que les thèmes assez graves qui sont évoqués dans ces nouvelles auraient mérités d'être approfondis. C'était un peu trop superficiel à mon goût.



Quant au dessin, noir et blanc et grisés avec un effet "journal", je n'ai pas été emballée. J'ai trouvé que les personnages étaient très figés et peu expressifs.



Bref, ce n'est pas un coup de coeur!




Lien : http://ennalit.canalblog.com..
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Blonde platine

Vraiment un très très bon livre ! Un recueil d'histoires pensées sur le ton de la chronique et mettant en scène des personnages aux prises avec toutes sortes de mal-être (corps, timidité, sexualité...). Et, malgré tout ce qui peut faire obstacle, ces discrets solitaires parviennent à se lier et ainsi à explorer ce qui fonde leur présence dans le monde. Bref : un propos et un trait parfaitement maîtrisé. Je sens que je vais lire et relire plusieurs fois cet ouvrage
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Blonde platine

Delcourt a la bonne idée de rééditer des albums d’Adrian Tomine, star du comic indé us dont « Les intrus » vient d’être adapté au cinéma par Audiard (les Olympiades).



Ces 2 albums sont des recueils d’histoires courtes (4 dans Blonde platine) voire très courtes (16 dans Insomnies). Dans ces histoires, des hommes, des femmes, plus ou moins jeunes, à des moments de leur vie parfois banals … parfois des moments de bascule, des instants où des failles apparaissent dans leur quotidien… des rencontres qu’on fait ou qu’on évite, des non-dits, des regrets…



Ici on est dans le réalisme désenchanté de l’Amérique observé par l’œil aiguisé d’Adrian Tomine. Il y a peut-être aussi beaucoup de lui dans ces anonymes, dans ces situations quotidiennes qui rappelleront des moments de vie à chacun d’entre nous. Malaise, maladresse, doutes, qui n’a pas vécu ça un jour ?



Le dessin noir et blanc est sobre et réaliste, il met à nu les situations et les personnages avec précision et finesse. C’est parfois étrange, on se sent observateur privilégié ou voyeur compulsif… J’ai préféré « Blonde Platine » qui prend davantage le temps de développer les récits et le regard posé sur les personnages.



Au final, ces 2 rééditions sont idéales pour découvrir le travail particulier d’Adrian Tomine. A compléter avec « la solitude du marathonien de la bande dessinée », son carnet paru chez Cornelius.

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Blonde platine

Quatre histoires composent cet album :



- Alter Ego : Un écrivain reçoit la lettre d’une fille qu’il vénérait à l’époque du lycée. En essayant de la retrouver, il rencontre sa petite sœur et finit par reporter ses sentiments amoureux sur cette dernière.



- Blonde platine : L’histoire désespérée d’un homme présenté comme l’archétype du « moche, célibataire, bouseux et dépressif » qui tente de séduire à tout prix une belle blonde sensuelle. L’histoire de la belle et la bête, revisitée pour la énième fois…



- Escapade hawaïenne : Après s’être fait virer de son boulot, une jeune hawaïenne ne trouve rien mieux à faire, pour tromper l’ennui, que de passer son temps à monter des canulars téléphoniques qui ne font rire qu’elle seule.



- Alerte à la bombe : Un mélange d’homosexualité, de fêtes, de filles et de garçons faciles en manque de repères.





Toutes ces histoires finissent rapidement par se ressembler car Adrian Tomine ne peut s’empêcher de les lier par le fil conducteur de son regard méprisant, dégoûté, totalement incapable de se détacher de la bourbe qu’il exècre et vénère à la fois. Ses personnages sont invariablement seuls (mais pas forcément solitaires, ce qui rend leur situation encore plus affligeante), inadaptés socialement, mais surtout remplis d’espoirs démesurés qui ne leur correspondent même pas, et qu’ils n’arriveront jamais à réaliser.





Alors oui, on peut aimer lire les aventures de personnages plus nuls que nous, et on se sentira flatté de n’avoir pas atteint les mêmes niveaux de misère sociale qu’eux ; on peut gratter en espérant découvrir sous cette représentation la critique acerbe d’une société superficielle, mais on sera quand même obligé de reconnaître qu’Adrian Tomine en fait vraiment trop. Ses personnages finissent par n’être même plus attachants. On ne les comprend plus, et il ne reste plus qu’une envie : leur foutre une bonne claque pour qu’ils se remuent les idées et cessent de penser uniquement au prochain coup qu’ils désespèrent de tirer.

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Blonde platine

Un art de la simplicité qui demande une énorme maîtrise. Les yeux à vif n’en constituait que l’ébauche. Blonde platine en affiche, déjà, la géniale maturité.
Lien : https://www.avoir-alire.com/..
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Blonde platine

Je n'apprécie pas trop les œuvres de cet auteur de manière générale au regard de ce que j'ai pu lire par le passé : c'est souvent froid et il y a un gros manque d'émotion dans cette introspection. Blonde platine n'échappe pas à la règle mais je dois bien avouer qu'il y a un léger plus par rapport au restant de la bibliographie de Tomine.



Il y a des comportements qui m'échappent totalement mais qui montrent une certaine fragilité des personnages. Cela concourt à rendre crédibles les faits. En l'espèce, c'est l'exploration amoureuse qui semble être le thème central. J'ai bien aimé "blonde platine" et "alerte à la bombe", un peu moins les deux autres nouvelles. Au final, nous avons quand même la moyenne car la lecture fut fluide et donc plaisante. L'achat ne se justifie pas à moins d'être un inconditionnel de l'auteur.
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Blonde platine

Adrian Tomine est sans conteste un des fers de lance de la nouvelle vague littéraire de la BD US. Derrière ces courtes nouvelles graphiques, deux figures tutélaires (et non des moindres) s'imposent, à savoir : Daniel Clowes et Jaimie Hernandez. Mais on aurait tort de passer à côté d'un tel auteur. Dans Blonde Platine, il s'attache à explorer avec brio les troubles affectifs de jeunes adultes. Il nous emmène dans les méandres de l'incommunicabilité, de la vie sans relief. Tous les personnages semblent impuissants à saisir la complexité des relations humaines. Et le pire, c'est qu'on les comprend un peu. Comme le dit un des héros : « Ce genre de chose parle à tout le monde. »
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Blonde platine

Moins connu que Clowes, Adrian Tomine n'en est pas moins un auteur particulierement intéressant. Son univers nourrit de nombreuses similitudes avec celui de Clowes, plus precisement avec les Clowes de "Caricature" ou "Ghost World". Au centre de cet univers, on retrouve la désespeérante monotonie d'une vie sans relief. Au fil de ces 4 récits, il nous convie a des tranches de vie pour le moins... pathétiques. Le ton est résolument dépressif, les personnages au mieux socialement inadaptés, au pire d'une lacheté sans nom.

Il y a d'abord ce jeune écrivain raté qui met en péril son couple pour une relation aussi incongrue qu'ambigüe avec la soeur cadette d'une fille qu'il aimait en secret au lycée. Il y a ensuite cette blonde platine qui se perd entre 3 hommes. Puis il y a cette fille qui se retrouve subitement seule et sans travail et ne trouve rien de mieux pour passer le temps que de faire de tristes canulars téléphoniques. Et enfin ce couple improbable composée d'une fille facile et d'un pré-adolescent qui se cherche.

Tomine n'a aucune pitié pour ses personnages. Mis a part dans la dernière histoire, on peut affirmer que ses personnages voient leur situation empirer au fur et a mesure que l'histoire avance. Que ce soit par lacheté ou par égoïsme, aucun n'a su assumer ses choix, avec les conséquences que ça implique. Il devient difficile de leur trouver des excuses... et pourtant, ils paraissent parfois étrangement familiers parce que Tomine a le don de gratter là où ça fait mal. Les choix, ou l'absence de choix, qu'ils font nous renvoient souvent à nos propres dilemmes. Comment condamner des personnages qui nous ressemblent un peu trop? Il en résulte un étrange malaise qui vous lache difficilement. C'est à cela qu'on reconnait le talent d'un auteur: à sa manière de nous toucher.
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Blonde platine

En France, Blonde Platine était d'abord paru en 2003 au Seuil, édition en un seul volume de quatre histoires originellement parues dans le comic book de leur auteur Adrian Tomine, Optic Nerve entre 1998 et 2002 aux Etats-Unis. En 2011 les éditions Delcourt mettent à l'honneur l'auteur californien en rééditant Blonde Platine, et en traduisant pour la première fois en France Scenes from an impending marriage, Scènes d'un mariage imminent, une bande-dessinée d'un tout petit format (13 x 15 cm).



Ce sont ces deux BD que nous avons chroniquées sur Culturopoing !
Lien : http://www.culturopoing.com/..
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Blonde platine

Adrian Tomine exploite les mêmes créneaux que ses confrères et concitoyens que sont Charles Burns et Daniel Clowes : l'adolescence/l'âge adulte désenchanté, le mal-être et la non acceptation de soi. Toutes fois, si Clowes et Burns excellent à cet exercice, je dois avouer que j'ai été moins sensible à la prose de Tomine.

Ce tome narre les tranches de vies de quatre personnages qui se caractérisent par des difficultés de communication et un manque de confiance en soi pathologique. le problème, c'est que les personnages sont tellement pathétiques qu'ils ne sont absolument pas attachants et il m'a peu importé que leurs histoires se terminent bien ou pas...ce que l'on ne sait d'ailleurs finalement jamais étant donné que les récits s'achèvent sans conclusions.

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Insomnie et autres histoires

Adrian Tomine offre au lecteur, seize "short stories" comme autant de flash de vies, d'aperçus sur des éxistences qui basculent et des failles qui s'ouvrent.

La musique des mots, illustre un dessin sobre et réaliste apte à faire ressentir au spectateur cette Amérique blanche et ordinaire.

Ces seize histoires sont passionnantes de vide, de riens et de nausées intimes.

Les protagonistes semblent "subir leur vie" et se laisser balloter au gré d'évènements qu'ils subissent ou ont subi.

Seize histoires, donc, dans la lignée d' un Raymond Carver.

...qu'il serait dommage de ne pas lire.

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Insomnie et autres histoires

Adrian Tomine assure une belle prestation en noir et blanc qui se veut en totale communion avec la thématique ambiante. […] Un recueil sombre que les amateurs d’Adrian Tomine sauront apprécier à sa juste valeur artistique.




Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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Insomnie et autres histoires

Delcourt a la bonne idée de rééditer des albums d’Adrian Tomine, star du comic indé us dont « Les intrus » vient d’être adapté au cinéma par Audiard (les Olympiades).



Ces 2 albums sont des recueils d’histoires courtes (4 dans Blonde platine) voire très courtes (16 dans Insomnies). Dans ces histoires, des hommes, des femmes, plus ou moins jeunes, à des moments de leur vie parfois banals … parfois des moments de bascule, des instants où des failles apparaissent dans leur quotidien… des rencontres qu’on fait ou qu’on évite, des non-dits, des regrets…



Ici on est dans le réalisme désenchanté de l’Amérique observé par l’œil aiguisé d’Adrian Tomine. Il y a peut-être aussi beaucoup de lui dans ces anonymes, dans ces situations quotidiennes qui rappelleront des moments de vie à chacun d’entre nous. Malaise, maladresse, doutes, qui n’a pas vécu ça un jour ?



Le dessin noir et blanc est sobre et réaliste, il met à nu les situations et les personnages avec précision et finesse. C’est parfois étrange, on se sent observateur privilégié ou voyeur compulsif… J’ai préféré « Blonde Platine » qui prend davantage le temps de développer les récits et le regard posé sur les personnages.



Au final, ces 2 rééditions sont idéales pour découvrir le travail particulier d’Adrian Tomine. A compléter avec « la solitude du marathonien de la bande dessinée », son carnet paru chez Cornelius.

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La Solitude du marathonien de la bande dess..

Drôle d’effet d’avoir en main le journal intime d’Adrian Tomine. Car c’est de cela qu’il s’agit : un très joli carnet, une belle couverture, un fin fil rouge marque-page, des petits carreaux et des croquis autobiographiques présentés chronologiquement et dans un découpage identique.

L’objet est donc très réussi et le contenu est intéressant. De la naissance de son rêve d’enfant en 1982 à un passé tout proche (2018), Adrian nous raconte les doutes, les espoirs, les rêves, les angoisses…On est là dans l’intime, dans la tête de l’auteur.

Alors oui c’est narcissique, parfois agaçant et gênant, souvent drôle mais ça semble plutôt sincère et finalement plutôt attendrissant. Et puis en tant que lecteur de BD, ça interroge tout de même sur le statut de l’auteur. Adrian Tomine n’est sûrement pas le seul à souffrir d’un manque de reconnaissance, à la peur d’un avenir incertain…

Au final, chacun pourra se retrouver dans les réflexions d’Adrian Tomine, en tant que lecteur, auteur ou père, de l’intime à l’universel il n’y a parfois qu’un pas.

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La Solitude du marathonien de la bande dess..

Même reconnu au-delà de la profession -Jacques Audiard et Céline Sciamma travaillent à une adaptation de ses récits-, Tomine reste un grand anxieux.




Lien : https://focus.levif.be/cult..
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La Solitude du marathonien de la bande dess..

Mal-être, malaise et maladresse d'un individu ordinaire

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Ce tome contient une suite de scénettes de nature autobiographique. Sa première édition date de 2020, dans un format original : à l'identique d'un carnet de note, avec une couverture toilée. C'est l'œuvre d'Adrian Tomine, pour les histoires et les dessins.



À Fresno en 1982, le jeune Adrian Tomine, 8 ans, se tient devant la classe avec la maîtresse dans son dos et il se présente. Elle lui demande de parler de ses hobbies. Il répond qu'il dessine des bandes dessinées, et qu'il en collectionne. Elle lui demande ce qu'il veut devenir quand il sera grand. Réponse : un bédéiste célèbre, ce qui suscite quelques rires dans la classe. Elle lui demande : célèbre comme Walt Disney ? Et lui répond : non comme John Romita. Sentant la question venir, il se lance dans une présentation de qui est cet artiste qui a dessiné le plus Spider-Man, après que Steve Ditko soit parti. La maîtresse l'interrompt alors que les rires ont repris. Adrian se redresse et les traite d'idiots stupides. La maitresse calme tout le monde, mais le garçon paye cher sa hardiesse lors des récréations suivantes, subissant des humiliations chaque jour. Puis un midi, un autre garçon de sa classe vient s'assoir à côté de lui pendant le repas et lui demande s'il lit des comics. Adrian se lance dans une liste des différentes séries qu'il suit, toutes des Marvel, et il finit par interrompre en demandant à son interlocuteur si ce ne serait pas la maîtresse qui lui aurait demandé de lui adresser la parole.



San Diego, en 1995, à bord d'un avion. Adrian Tomine est assis à une place côté hublot et il se dit qu'il leur a bien prouvé : il avait dit qu'il allait devenir un bédéiste célèbre et c'est chose faite. Il a bien conscience que pour y arriver il a dû consacrer toute son enfance et son adolescence à développer son art et à le peaufiner. Mais ça en valait le coup. Il ressort une critique de sa poche : elle qualifie sa dernière œuvre de meilleure bande dessinée réaliste du moment. Il jette également un coup d'œil à la petite phrase de Daniel Clowes : Drawn + Quarterly conserve intact la perfection de leur catalogue en signant le petit prodige des mini-comics. Une fois débarqué, il se rend à la convention et y retrouve Eric le représentant de son éditeur qui lui tend le dernier numéro du Comics Journal, en le prévenant que leur critique n'est pas très tendre. Adrian lui répond que c'est un honneur d'être étrillé par le magazine littéraire de référence sur les comics. Le soir, dans sa chambre d'hôtel, il lit l'article et il en pleure allongé par terre. Puis il ressort pour participer à la réception organisée à l'hôtel et il reprend confiance car il est vraiment parmi ses pairs. Il grince un peu des dents quand un collègue lui dit qu'il était plutôt bon jusqu'à ce qu'il se mette à imiter Clowes. Tomine rit poliment et baisse la tête. Un autre professionnel rejoint le groupe et découvre qui est Adrian. Il commence à le prendre à parti sur la manière dont Adrian a laissé tomber son précédent éditeur, tout ça pour un gros contrat avec D+Q. Il le met en garde sur les risques encourus à trahir ainsi des partenaires commerciaux. Adrian remonte dans sa chambre et s'écroule sur le lit en pleurant.



26 petites histoires entre 2 et 7 pages avec une exception pour la dernière qui en compte 33, toutes centrées sur l'auteur qui se met en scène dans chaque page, avec ses inquiétudes, ses névroses, ses angoisses, son mal-être, son manque de confiance en lui, la dépréciation de son métier par les autres, et parfois même par ses pairs, son comportement gauche d'inadapté social, son caractère hypocondriaque, etc. Tout est fait pour donner la sensation d'une vision égocentrique. L'objet est séduisant une sorte de carnet de notes avec des pages à petit carreau, recelant les pensées intimes de l'auteur. Les dessins sont réalisés avec des détourages au trait fin non repassé, avec quelques solutions de continuité dans les contours. Le degré de réalisme est assez élevé, dans la représentation des environnements quand ils sont présents, et pour celles des personnages. L'artiste applique une simplification des visages qui rend les personnages plus expressifs, et plus immédiatement sympathiques. Il utilise souvent des plans taille et des plans poitrine pour se représenter en train de parler sur un fond vide, facilitant ainsi la projection du lecteur dans cet avatar de papier. Cette simplicité apparente crée à la fois une proximité avec Adrian et ses proches, et une facilité d'accès qui confine à l'évidence naturelle. Le lecteur se sent à chaque fois impliqué dans ces moments banals et ordinaires, en pleine empathie avec le narrateur, adoptant son état d'esprit sans y penser. De ce point de vue, ces scénettes sont une totale réussite en termes de comics autobiographique : dans la peau d'Adrian Tomine.



À chaque fois, le pauvre Adrian Tomine se retrouve dans une situation sociale inconfortable, surtout parce qu'il la vit comme telle, car finalement sans danger physique ou psychologique. Le lecteur se prend d'affection pour son avatar de papier, un tout jeune homme qui prend de l'âge progressivement, sa silhouette évoluant discrètement que ce soit sa ligne de cheveux, ou sa morphologie. Il rencontre des êtres humains aussi normaux que banals, d'âge différent. S'il est familier des bédéistes indépendants canadiens publiés par le même éditeur, le lecteur peut en identifier un ou deux, à commencer par Seth, nom de plume de Grégory Gallant. Il utilise une direction d'acteur de type naturaliste, avec capacité extraordinaire à retranscrire les petits riens du quotidien, un geste, une mimique, une posture, et bien sûr un état d'esprit. Il n'exagère ni le langage corporel, ni les expressions du visage. Il est aussi à l'aise et aussi convaincant pour montrer Adrian absolument confus et gêné au-delà du possible après avoir émis des bruits répugnants dans les toilettes, alors qu'une jeune femme l'attend sur le canapé du salon dans la pièce d'à côté, que le même individu également affreusement gêné par sa fille faisant une comédie dans sa poussette, dans un centre commercial, avec une vieille dame autoritaire venant faire la leçon aux parents laxistes. Du coup, le lecteur se laisse gentiment porter par cette narration visuelle tranquille et attentionnée, même si ces scènes de la vie quotidiennes ne comportent pas d'intrigue.



Scénette après scénette, le lecteur se dit qu'il n'éprouve aucune difficulté à ressentir de l'empathie pour cet individu un peu timoré, plutôt sûr de son talent, et en même temps manquant totalement d'assurance. Il le voit prendre de l'âge insensiblement au fur et à mesure que les années passent, et continuer de s'inquiéter pour les mêmes choses, ou pour de nouvelles. Quelquefois, il se dit que Adrian se fait des nœuds au cerveau pour rien, à essayer d'éviter le regard éventuellement négatif des autres. D'autres fois, il compatît avec la situation qu'il subit : une personne qui lui succède au micro sur l'estrade et qui tourne en dérision sa qualité de dessinateur qui a ramené des images pour distraire le public, ou bien le canular du festival international de la bande dessinée, avec l'annonce d'un faux palmarès de nominé en 2016 au nombre desquels se trouve Tomine. Oui, parfois, il s'agit d'une réaction infantile ou immature comme de verser des larmes à la lecture d'une critique assassine. Encore qu'il s'agit aussi d'une réelle sensibilité à fleur de peau. Il peut également s'agir d'une petite vexation comme Frank Miller ne parvenant pas à prononcer son nom de famille lors d'une remise de prix. Et que dire de cette après-midi passée dans une boutique de comics avec Seth à attendre en vain qu'une personne se présente pour faire dédicacer un ouvrage, et se rendre compte que les seuls qui viennent sont des amis du propriétaire qui leur a demandé de passer, et qui n'ont jamais ouvert un seul de ces comics. Il se produit alors deux réactions chez le lecteur.



Tout d'abord, il éprouve de la compassion pour Adrian Tomine, en plus de l'empathie. L'auteur ne se présente pas sous un jour avantageux : au contraire toutes ces histoires font ressortir comme il est gauche au moins pire, comme il est anxieux et presque pétochard au pire. Si tous les récits sont centrés sur lui, il n'en sort pas grandi, et ce n'est pas de l'autopromotion. Du coup, ce n'est pas à proprement parler de l'égocentrisme, mais plutôt quelqu'un qui parle de ce qu'il connaît le mieux : sa vie. Il règne un humour doux et discrètement dépréciateur qui neutralise toute forme d'autopromotion et d'autocélébration. La seconde réaction vient avec l'effet cumulatif de ces scènes de la vie ordinaire d'un bédéiste : le lecteur n'est pas que dans l'intimité d'Adrian, il est aussi à ses côtés pour sa vie sociale, pour tout ce qui est lié à son métier, et à sa célébrité toute relative. D'ailleurs, l'auteur a mis une phrase de Daniel Clowes en exergue relative à la célébrité d'un auteur de BD : C'est comme d'être le joueur de badminton le plus célèbre. Tout y passe : de fan collant inquiétant, à la lecture publique pathétique, en passant par la caméra qui le suit dans les allées du festival d'Angoulême alors qu'il ne comprend rien aux animations du fait de la barrière de la langue, par le cuistot qui l'a reconnu et lui fait servir une pizza au Nutella comme dessert alors qu'il est allergique aux noix et qu'en plus il doit la payer.



Que peut-il y avoir de plus narcissique qu'une petite bande dessinée où l'auteur se regarde le nombril en mettant en scène ses angoisses insignifiantes, ses petites névroses ? Certes, toutefois la douceur et la justesse de la narration visuelle séduisent et divertissent le lecteur. En outre, ce manque d'assurance proche d'être maladif résonne chez le lecteur sur ses propres inquiétudes, et lui permet d'observer l'écosystème de l'auteur de BD.
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La Solitude du marathonien de la bande dess..

Les mimiques gênées et le découpage du récit, avec ses chutes toujours abruptes, enferment avec lui lecteur dans ces moments de malaise. Ce qui en fait de ce recueil joliment édité sous forme de carnet de bord un travail de catharsis à la fois drôle et cruel, jamais vraiment léger, mais pétri d’honnêteté.
Lien : http://www.bodoi.info/la-sol..
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La Solitude du marathonien de la bande dess..

A quoi ressemble la vie d'un auteur de bd ? Il y a de glamour dans cette profession ou ils passent la journée habillés en pyjama ? Ils ont tous la grosse tête à cause des conventions ? Ce sont des adultes qui n'ont pas su grandir ?

Si vous lisez ce livre vous saurez tout !

J'ai rarement lu une plongée dans les pensées si authentique. Le pathétique et le minable, l'insécurité, la fragilité de l'ego. Tout est dedans.

Le récit est parfois monotone mais je le recommende.
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La Solitude du marathonien de la bande dess..

Un regard autobiographique caustique sur le monde de la bande dessinée et le métier, difficile et solitaire, de dessinateur.
Lien : https://www.avoir-alire.com/..
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La Solitude du marathonien de la bande dess..

Attirée par cette bande dessinée présentée comme un carnet de croquis (signet en tissu, pages quadrillées, cachet d’appartenance au début…), j’ai assez vite déchanté. On découvre ici l’autobiographie dessinée de Tomine; de son enfance et ses premiers couacs dans la vie sociale à l’âge adulte avec mariage et progéniture.



Peut-être y a-t-il eu incompatibilité d’humeur mais j’ai été exaspérée par le personnage dès qu’il entre dans l’âge adulte. Lire des prises de tête autocentrées pendant autant de pages ne m’a ni distrait ni amusée. J’ai même failli abandonner en cours de route.



Pas ma tasse de thé.
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