Citations de Béatrice Hammer (110)
Si j’ai choisi de l’appeler Blanchette, avec ce que cette dénomination a d’affectueux, mais aussi, il faut l’avouer, de légèrement condescendant, ce n’est pas par mépris, loin de là. J’ai toujours adoré mes personnages, même quand ils étaient veules, lâches, méchants, rancuniers, hypocrites ou pervers. Je les aime du fond du cœur, et je cherche toujours, au plus profond de mes entrailles, ce qui me permettra de les nourrir.
Elle est partie, j'en suis certaine. Elle en rêvait, elle a osé.
Personne ne peut vraiment comprendre l'autre, mais je la comprenais un peu moins mal que beaucoup d'autres.
Elle ne supportait pas cette vie. Elle ne supportait pas de se commettre. Et elle se commettait. Du matin jusqu'au soir. Pour gagner de l'argent, pour être une bonne fille, une bonne mère, une bonne épouse, une bonne amie....
On ne sait pas bien d'où ça vient, le courage. Personnellement, je ne suis pas du genre à accabler les lâches, je crois qu'on ne le devient pas, on le découvre, c'est déjà assez difficile.
être amoureux, c'est un péché de jeunesse. Aimer, c'est un devoir d'adulte.
A mon avis, elle a eu besoin d’être libre. De ne plus être dans ce fameux lot. Alors elle est partie. Une nouvelle fois, elle avait besoin de pouvoir choisir, vous comprenez? Choisir sa vie, c’est tellement important.
Elle l’avait prévenu, le jour de leur rencontre, elle le lui avait dit, un jour je partirai, je suis comme la marée, je viens, je vais, je viens, je vais, mais contrairement à elle, un jour je partirai, on ne me verra plus, réellement plus, et il faudra vivre sans moi.
Je savais bien, pourtant, que ce n’était qu’une anecdote, un court récit, tandis qu’avec elle, c’était la vie.
Quel drôle de métier j'ai choisi, se disait Gloria Basteret tout en montant rapidement les quatre étages qui la séparaient de son prochain cadavre. Ne débouler dans la vie des gens que quand ils sont morts. Rencontrer leurs parents, leurs amis, apprendre à les connaître, reconstituer leur vie, s'attacher à leurs petits défauts, tout ça pour rien, à part une obscure idée de la justice qui est si rarement juste.
Le temps passant, c'était le genre de pensées qui envahissaient de plus en plus l'esprit de la jeune femme.
Gloria avait choisi son métier à dix ans, l'été où elle avait découvert, dans la bibliothèque de sa grand-mère, Hercule Poirot, Miss Marple et le commissaire Maigret. Pendant longtemps, elle s'était sentie portée par la vocation précoce que ces livres avaient suscitée en elle. Mais maintenant, de plus en plus souvent, la foi semblait l'avoir abandonnée.
Tout aurait été terminé, alors qu’elle y croyait toujours, à ce je-ne-sais-quoi qu’elle aimerait créer, qu’elle voudrait contempler, peut-être pour le jeter, peut-être pour l’admirer, ce fragment délicat qui n’était pas encore venu, malgré l’âge qu’elle avait.
C’est quand on manque qu’on veut créer.
Je sais bien que je ne dois pas intervenir dans la vie de mes personnages...
Je ne vous dirai pas qu'elle était heureuse. Elle était beaucoup trop intelligente pour ça.
Elle ne nourrit aucune illusion sur le monde littéraire. De la magouille et des paniers de crabe, dit-elle avec vivacité. Il faut se débrouiller pour échapper aux pinces et ne pas finir dans la casserole.
Elle a cru me faire de la peine. Elle a plissé les yeux, glissé sa langue entre ses dents avant de me le dire, ma pauvre fille, ne prends pas tes airs d'orpheline, avec moi ça ne marche pas; ta mère, elle n'est pas morte comme tu le crois. Elle est partie quand tu avais deux ans. Tu te demandes pourquoi? C'est son cul qui la démangeait. Une pute, ta mère. C'était une pute. Voilà la vérité.
Déjà petite, je la voyais comme une limace avec des poils qui piquent, une limace qui sentirait la naphtaline, mais maintenant elle devient vraiment vieille, elle s’y complait, elle se relâche, comme si c’était bien fait pour nous qu’elle enlaidisse. Elle a des plis au coin des lèvres qui ne s’effacent plus jamais, elle passe son temps à grimacer en se tenant le ventre, et quand papa propose d’appeler un docteur, elle fait celle qui prend sur elle, qui déploie une énergie surhumaine pour s’arracher un lambeau de sourire, et elle dit non, ça va aller, les médecins sont des incompétents. Quand elle dit ça, ça me donne envie de devenir médecin, pour l’achever.
« Envie, dit le lion. Envie. Voilà la clef Noémie, crois-moi. C’est la clef et c’est la seule. Quiconque la possède parviendra à ouvrir la porte, quiconque ne la possède pas restera dehors à tout jamais ».
Quelle idée d’aller fouiller dans la merde ! Ma mère lui avait dit, ce type est un minable, qu’est-ce qu’elle imaginait ? Que ma mère se trompait, que c’était un type bien, que s’il avait rien fait pour elle depuis toutes ces années, c’était pas de sa faute ?
Gloria applique la méthode préconisée par Arici pour être impénétrable : elle pense à ses impôts. Et répond à Dutilleul qu’elle n’a de preuves ni dans un sens ni dans l’autre.
Moi, dans la cuisine, je préparais mon fameux gâteau au chocolat, celui qui vous console d’avoir laissé passer toutes les occasions du monde, l’antidote universel contre les regrets, la lâcheté et les pieux mensonges.
Moi, tous les copains me l'avaient dit, explique-t-il d'une voix forte, en France, c'est le pays des bonnes manières, les femmes tu dois toujours leur faire le baisemain, j'étais jeune à l'époque, je venais juste de débarquer pour mes études. J'arrive dans la famille chez qui j'allais loger, une famille d'ouvriers, quelque part dans le Nord. On me présente la dame, je m'apprête à lui faire le baisemain, la pauvre dame, on lui avait trop dit que les nègres étaient cannibales, elle a cru que j'allais la mordre, elle s'est mise à crier et ç a a fait une belle pagaille.