Citations de Carl Gustav Jung (2508)
La seule véritable intention de cet ouvrage est d’étudier aussi profondément qu’il se peut tous les facteurs de l’histoire intellectuelle qui concourent à la formation d’une fantaisie individuelle involontaire.
Tandis que l'ombre se laisse ranger jusqu'à un certain point, moyennant du discernement et de la bonne volonté, dans la personnalité consciente, il existe toutefois, comme le montre l'expérience, certains traits qui opposent une résistance acharné au contrôle moral et s'avèrent pratiquement ininfluençables.
(...) : le moi repose d'une part sur l'ensemble du champ de la conscience et d'autre part sur l'intégralité des contenus inconscients. Ces derniers sont rangés en trois groupes : en premier lieu, ceux qui sont temporairement subliminaux, c'est-à-dire reproductibles à volonté (mémoire), ensuite, ceux qui ne sont pas reproductibles à volonté, et enfin ceux qui ne sont absolument pas susceptibles de conscience. Le deuxième groupe peut être déduit de l'apparition d'irruptions spontanées de contenus subliminaux dans la conscience. Le troisième groupe est hypothétique et constitue une déduction logique des faits qui sont à la base du deuxième. Il se compose en effet des contenus qui n'ont pas encore fait irruption dans la conscience ou qui ne le feront jamais.
Cette définition décrit et délimite l'extension du sujet. Sans doute, on ne peut théoriquement assigner de limites au champ de la conscience, car il est susceptible d'une extension indéfinie. Empiriquement toutefois, il a toujours pour frontière le domaine de l'inconnu. Ce dernier est formé de tout ce que l'on ne sait pas, et par conséquent de ce qui n'est pas en relation avec le moi comme centre du champ de conscience. L'individu se divise en deux groupes d'objets : d'une part, les faits extérieurs susceptibles d'expérience sensible, d'autre part, les objets d'expérience immédiates, intérieurs. Le premier groupe représente l'inconnu de l'univers ambiant, le second, l'inconnu de l'univers intérieur. C'est ce dernier que nous appelons l'inconscient.
La discordance n’existe[-t-elle] pas seulement pour nous qui n’avons naturellement qu’une vision très insuffisante de ce qui se passe à l’intérieur de [l]a psyché [du patient] ?
Mon dessein de discuter ces questions historiques a eu pour occasion immédiate le fait que l'image archétypique de la totalité, qui apparaît si fréquemment dans les productions de l'inconscient, a ses antécédents dans l'histoire. Ceux-ci ont été identifiées de bonne heure à la figure du Christ, comme je l'ai montré en détail dans mon livre Psychologie et Alchimie.
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On trouve donc, groupées dans ce volume, des études qui sont toutes plus ou moins directement consacrées à l'archétype du Soi et dont l'ensemble représente une belle monographie sur ce sujet si central de la pensée jungienne. (...)
La première partie -la plus courte- traite des principaux éléments dont se compose la "carte" de notre psyché; (...).
A travers l'étude de symboles du Soi empruntés à la gnose et à l'alchimie chrétiennes, Jung étudie les rapports entre le Soi et la figure traditionnelle du Christ, qui symbolise une totalité réunissant en elle tous les caractères d'un archétype. Il tente de montrer que la doctrine selon laquelle le Mal est seulement l'atténuation du Bien (privatio boni) ne correspond, dans la mesure où elle exclut la force mauvaise, qu'à une moitié de l'archétype -l'autre moitié apparaissant dans le symbole de l'antéchrist. Aussi bien est-ce moins dans les théologies officielles que dans la théosophie chrétienne, dans l'alchimie et l'arithmosophie, ou chez Maître Echart, que Jung trouve des spéculations plus complètes, un imaginaire plus riche de sens et plus proche de la réalité psychique (...)
L'idée centrale est donc, au fond, que l'exclusion de la force mauvaise hors du Soi empirique a fait, et fait encore, des dégâts dans le mental individuel et collectif.
Comme je pense l'avoir démonté, notre inconscient manifeste une tendance fondamentale à la réalisation d'une totalité. Ceci vaut également pour la psyché orientale, avec cette différence qu'en Orient, c'est la conscience qui se caractérise par une aperception totalisante, tandis que l'Occident a développé une attention différenciée aux choses, toujours limitée de ce fait à un de leurs aspects.
La compréhension du principe de synchronicité est la clé donnant accès à cette aperception totalisante qui est l'apanage de l'Orient, et que nous éprouvons comme si mystérieuse.
Je ne suis pas en mesure de me représenter quoi que ce soit au-delà du Soi, étant donné qu'il est -de par sa seule définition déjà _ une représentation limite figurant la totalité inconnue de l'être humain. Il n'y a pas la moindre raison pour que l'on doive, ou ne doive pas, nommer le Soi transcendant Christ, ou Bouddha, ou Purusha, ou Tao, ou Khider, ou Tifereth. Toutes ces notions peuvent être identifiées comme des formulations de ce que je nomme le "Soi". En outre, il me déplaît que l'on insiste sur un nom particulier, car mes frères humains sont tous aussi bons et corrects que moi. Pourquoi le nom qu'ils utilisent devrait-il être moins valable que celui que j'utilise, moi ?
Au demeurant, je n'ai pas d'autre accès au Christ que le Soi, et comme je ne connais rien qui soit au-delà du Soi, je m'en tiens à cet archétype. je me dis : "voilà l'archétype, vivant, tangible, qui a été projeté sur l'homme Jésus ou s'est manifesté par lui dans l'histoire."
Un mythe reste un mythe, même si certains le tiennent pour la révélation littérale d'une vérité éternelle; mais il est voué à la mort si la vérité vivante qu'il contient cesse d'être un objet de la foi. Il est nécessaire, en conséquence, de rénover sa vie de temps en temps par une réinterprétation. cela signifie qu'il faut le réadapter à l'esprit du temps, qui change.
Je crois qu'il n'est pas désavantageux pour la tradition religieuse que nous puissions établir dans quelle mesure elle coincide avec l'expérience psychologique. Au contraire, cela me paraît être d'un secours extrêmement opportun pour la compréhension des traditions religieuses.
On peut considérer comme un fait établi que la figure du Christ telle que l'a fixée le dogme est le résultat d'un processus de condensation à partir de plusieurs sources. L'une des sources principales est l'antique homme-dieu de l'Egypte : Osiris-Horus et ses quatre fils. c'était là la transformation de l'archétype inconscient projeté jusqu'alors sur un être divin, non humain. En prenant corps dans un être humain historique, il se rapproche de la conscience ; mais conformément aux possibilités de compréhension de l'esprit du temps, il resta comme en suspens entre le dieu et l'homme, entre l'aspiration au bien et la crainte du mal.
La grande lutte qui a commencé avec l'éveil de la conscience n'a encore atteint son point culminant dans aucune interprétation -apostolique, catholique, protestante ou autre. Avec le dogme de l'Assomption de la Vierge Bienheureuse, même la très conservatrice Eglise catholique a enfreint son antique règle : s'en tenir au témoignage des apôtres comme source de toute autorité. D'après ce que j'apprends de théologiens catholiques, le prochain pas en avant serait le dogme de la "corédemptrice". Cette reconnaissance manifeste accordée à l'élément féminin est un progrès très important. Du point de vue de la psychologie, cela signifie la reconnaissance de l'inconscient, étant donné que la représentante de l'inconscient collectif est l'anima, l'archétype de toutes les Mères divines (tout au moins dans la psyché masculine).
J'ai une gnose en ce sens que j'ai une expérience immédiate, et mes modèles sont fortement étayés par les représentations collectives de toutes les religions. Mais je ne peux pas voir pourquoi une confession devrait posséder la vérité, unique et parfaite. Chaque confession revendique pour elle-même ce privilège, de là le désunion généralisée. Cela ne nous fait pas avancer. Il y a là quelque chose qui ne peut pas être juste. Je crois que c'est l'outrecuidance de cette prétention des croyants à leur propre infaillibilité divine qui compense ainsi leur doute intérieur. Au lieu de se fonder sur une expérience immédiate, ils croient, faute de mieux, en des paroles. Le sacrificium intellectus est une agréable drogue pour la paresse et l'inertie intellectuelle de l'homme, auxquelles rien n'échappe.
Le mérite des gnostiques est d'avoir soulevé le problème de l'origine du mal. Valentin et aussi Basile sont à mes yeux de grands théologiens, qui ont tenté de venir à bout des problèmes qui étaient constellés par l'inévitable afflux provenant de l'inconscient collectif -fait que reflète avec une parfaite clarté l'Evangile "gnostique" de Jean, de même que Paul, pour ne rien dire de l'Apocalypse de Jean, ou du Christ lui-même.
Dans le style de leur temps, ils hypostasiaient des idées en entités métaphysiques. La psychologie, certes, n'hypostasie pas, mais elle considère de telles idées comme des assertions psychologiques sur des facteurs inconscients essentiels, inaccessibles à l'expérience immédiate , ou comme des modèles de ces facteurs.
Dès lors que l'archétype est sollicité en un certain lieu, il est aussi activé comme un tout, c'est-à-dire partout simultanément, car il est universel et reste donc identique à lui-même toujours et partout. c'est pourquoi un vieil alchimiste pouvait consoler un de ses disciples en ces termes ; "Quels que soient ton isolement et la solitude que tu ressens, si tu fais vraiment et consciencieusement ton travail, des amis inconnus viendront te chercher."
On ne réalise pas encore que lorsqu'un archétype est constellé et pas compris consciemment, on est possédé par lui et fatalement contraint de servir son but.
Du point de vue psychologique, la "volonté de Dieu" apparaît dans l'expérience intérieure comme une force supérieure déterminante, à laquelle on peut donner des noms divers : instinct, destinée, inconscient, foi, etc.
Le critère psychologique de la "volonté de Dieu", c'est toujours, une supériorité dynamique. C'est le facteur décisif quand tout a été dit et fait, et c'est par essence quelque chose que l'on ne connaît pas d'avance. On la connaît seulement après coup. On apprend peu à peu à la connaître au cours de la vie.