Citations de Chester Himes (280)
Je pensais que ce qui me plaisait le plus, chez les femmes, c'était le cran. Et je me dis que je n'avais jamais connu de femme qui en eut. Je pensais à mes parents, à leur vieux rêve de me voir devenir docteur, à cas études de médecine abandonnées après deux années préparatoires. Et à présent, je travaillais au chantier naval, sans poste fixe.
La seule solution au problème noir c'est la révolution. Il faut que nous amenions les Blancs à nous respecter et la seule chose que les Blancs aient jamais respectée, c'est la force.
Pour arriver à me mettre en colère aujourd'hui, faudrait au moins que vous vous fourriez une poignée de crottin dans la gueule et que vous me la crachiez à la figure.
Tout ce que je voulais, c'est que les Blancs me laissent tranquille, ne me disent rien, ne me regardent même pas. Ils pouvaient garder leur vacherie de monde et aller se faire foutre avec.
Je pensais que pendant toute ma vie j'avais eu peur des Blancs parce qu'ils étaient blancs et que c'était du plus haut comique de découvrir que les Blancs avaient peur de moi aussi, parce que j'étais noir.
Ils me plaisaient bien, ces deux gosses blancs ; ils étaient blancs, mais, comme disait ma tante Fanny, ils n'y pouvaient rien.
Quand je suis arrivé ici, le seul boulot qu'un Noir pouvait trouver, c'était celui d'aide de cuisine chez les Blancs. Mais ce n'est pas tellement ça. C'est la tête que faisaient les gens quand on leur demandait de l'ouvrage. La plupart ne me répondaient pas tout de suite non. Ils avaient simplement l'air sidérés que j'ose le demander. Comme si leur chien avait poussé la porte en disant : « À moi de parler ! » C'est ça qui m'en a foutu un coup.
Ecoute, mon lapin, je vais te dire quelque chose. Dans cette ville, tu n’as pas idée à quel point c’’est facile de zigouiller quelqu’un sans se faire prendre. Il suffit de surprendre sa victime dans un coin isolé, n’importe où, de lui tirer une balle dans la peau, de le suriner tranquillement ou de lui défoncer le crâne, et de se tirer. Surtout pour un Blanc, c’est un jeu d’enfant. Une fois que c’est fait, il n’a plus qu’à changer de trottoir.
- Moi, je suis flic, répliqua Fossoyeur. Si les Blancs s'obstinent à venir à Harlem où, par leur faute, les Noirs sont obligés de vivre dans la crasse et la dépravation, il est de mon devoir de veiller à leur sécurité.
Le Blanc rougit jusqu'à la racine des cheveux.
Et comment ! C'est des flics blancs, répliqua le Cheik avec mépris. Pour eux, les négros, c'est tous des siphonnées. Toi et Sonny, vous avez qu'à faire semblant d'être un peu branques. Ils goberont ça comme une glace au chocolat. Tout ce que tu risques, c'est un coup de pied au cul. Et ils vont rigoler comme des bossus, parce que les négros , c'est vraiment des cinglés. Et quand ils vont rentrer chez eux, ils raconteront à leur bourgeoise et à tous les voisins qu'ils ont vu deux négros complètement branques, qui lâchaient des pigeons en pleine nuit, pendant que se déroulait la plus grande rafle qu'on ait jamais vu à Harlem ! Ça, tu peux être tranquille !
- Pourquoi n'aimait-il pas les flics ? Est-ce qu'il avait une raison particulière de leur en vouloir ?
- Une raison particulière ? Pour pas aimer les flics ? Non, m'sieur... Je vois pas... Les flics, c'est les flics, voilà tout.
- Chez moi ? Un type qui change les billets des billets de dix en billets de cent ? Vous êtes peut-être soûl, mais vous êtes tombé sur la tête. Si je connaissais un type comme ça, il serait encore chez moi, une chaîne à la patte, en train de marner pour moi à grands coups de pompes dans le cul.
Si on regarde vers l'est, du haut des tours de Riverside Church, perchée au milieu des bâtiments universitaires, sur la rive haute de l'Hudson River, on voit tout en bas, dans la vallée, les vagues des toits gris, qui, comme celles de l'océan, faussent la perspective. Sous cette étendue mouvante, dans les eaux troubles des garnis crasseux, une population noire se convulse dans une frénésie de vivre, à l'image d'un banc grouillant de poissons carnassiers qui parfois, dans leur voracité aveugle, dévorent leurs propres entrailles. On plonge la main dans ce remous et on en retire un moignon.
C'est Harlem.
Plus on se porte à l'est plus la ville est noire.
La colère de l’homme noir est nécessaire ! Quand on pense à ce qu’on lui fait subir !
Un Blanc a expliqué un jour son engouement pour les soirées de Mamie Mason en ces termes : « Quand je suis là-bas, j’oublie tous mes ennuis, tous mes soucis, toutes mes responsabilités ; j’oublie femme et enfants et mes pertes à la Bourse. Je me sens tout réchauffé, détendu, décontracté, je n’ai plus qu’une seule envie : forniquer ! »
Il y a ceux qui croient que les femmes à la peau jaune préfèrent les hommes à peau noire. Il y a ceux qui croient qu’en mâchant une certaine racine séchée on s’immunise contre les méfaits de l’alcool de bois. D’autres croient dur comme fer que les rêves vous prédisent les numéros gagnants de la loterie. D’autres que les Noirs sont plus forts que les Blancs en toute chose. D’autres enfin que le lait sur de la pastèque est un poison mortel.
La plupart sont convaincus qu’ils sont désavantagés par rapport aux Blancs. Certains sont persuadés qu’à chances égales ils feraient très vite beaucoup mieux que les Blancs. Et d’aucuns croient que les Blancs refusent de leur donner cette égalité de chance, de peur qu’ils ne mettent la main sur le monde blanc tout entier.
Ils savent, bien entendu, que Dieu est la source de tout bien. Mais Dieu est au paradis et, comme de juste, avec tous les gros péchés qui se commettent quasiment sans interruption par le monde, il est trop occupé pour se pencher sur leurs difficultés immédiates. Le dollar, en revanche, est bel et bien sur terre, et plus particulièrement dans la bonne ville de New York. Wall Street en regorge de dollars.
En fait, les Nègres n’ont pas le choix – ils sont obligés de vivre entre eux, dans leurs communautés noires, pour la bonne raison qu’ils ne peuvent vivre ailleurs.
Un Nègre est un individu qui, pour une raison ou pour une autre, est reconnu comme tel. Il est peu recommandé de traiter de Nègre un Blanc qui a une goutte, ou même plus, de sang noir, s’il est reconnu comme Blanc.
La plupart des Noirs américains sont des descendants, à cent pour cent ou seulement en partie, des Noirs d’Afrique qui, déportés de ce continent dans l’hémisphère occidental, furent esclaves pendant les deux siècles qui précédèrent la guerre de Sécession. Quelques-uns, cependant, ne sont pas descendants de Noirs déportés, ils vinrent de leur propre gré de différentes contrées d’Afrique, d’Europe et de l’Amérique du Sud, au même titre que les autres émigrants.