Citations de Constantin Virgil Gheorghiu (141)
Un prêtre, ce n’est pas un homme, c’est l’immolation d’un homme ajoutée à celle de Dieu. C’est cela le sacerdoce.
Tout chrétien est contemporain du Christ.
Mavid Zeng est un personnage petit, chétif, d'environ soixante ans, auquel aucun service de recrutement, de n'importe quelle armée de terre, n'aurait jamais donné un uniforme militaire. Il fut d'ailleurs réformé.Il n'a jamais fait de service militaire. Cela ne l'empêche pas d'être aujourd'hui en grand uniforme de colonel, avec des bottes vernies, des épaulettes immenses comme deux plateaux à galons, à la manière moscale, et la poitrine bardée de décorations. Mavid Zeng est colonel de la milice.
Je suis née ici. Le pays natal est comme la femme que vous épousez. Jusqu'à une certaine date, elle vous est étrangère, une inconnue. Mais du jour où elle est devenue votre épouse vous l'aimez plus que tout au monde, plus que votre propre mère, plus que vos propres sœurs. Pour elle, vous quittez tout. C'est la même chose pour la terre natale. Même si elle est étrangère. C'est votre terre et vous ne pouvez pas l'abandonner. La Roumanie est mon pays natal. Elle m'est plus chère que la patrie éternelle, la Palestine.
A partir du moment où la soif de l'homme pour la Justice et pour la Liberté est taxée de folie, l'homme n'existe plus. Il peut posséder la civilisation la plus évoluée de l'histoire, mais cette civilisation même ne lui est plus d 'aucun secours.
Il savait bien que l'Homme doit payer de son cerveau aussi, non pas seulement de son sang. Sinon, on lui conteste le droit de vivre.
Le danger- cependant- est le même partout. Seules les réactions des hommes en face du péril sont différentes.
Eleonora West regardait le tableau qui représentait une femme à tel point défigurée par la souffrance que son visage ne gardait plus rien d’humain. C’était une vision de chair déchiquetée, un portrait de l’homme que la douleur avait démonté comme une machine. Il n’en restait que les éléments essentiels : les yeux, le nez, la bouche, les oreilles. Chacun de ceux-ci vivait isolément, une vie individuelle. A cause de la souffrance ils s’étaient repoussés l’un l’autre. Le corps humain avait renoncé à son unité.
-[...] Mon roman sera le livre de cet épilogue.
-Quel est son titre?
-La vingt-cinquième heure, dit Traian. Le moment où toute tentative de sauvetage devient inutile. Même la venue d'un Messie ne résoudrait rien. Ce n'est pas la dernière heure: c'est une heure après la dernière heure
Monter aux hommes la route qui les conduit chez les russes équivaut à leurs montrer le mur dévoré par les flammes, par-dessus lequel, ils peuvent se précipiter dans la chambre même où a pris l’incendie. Pas un homme ne voudrait sauter dans le feu, au moins tant qu’il y aura une porte. Et cette porte, c’est nous. Ils demandent à s’échapper, mais ils ne cherchent pas vers quoi s’ouvre cette porte. Il faut qu’ils sortent parce qu’ils étouffent. Prendre une porte vaut toujours mieux qu’un mur dévoré par les flammes. Et même si les hommes savaient que passé le seuil de cette porte, il y a toujours du feu, ils choisiraient toujours la porte. Au moins pendant un instant, ils sont sûrs de ne plus voir le feu. Ils gardent encore un espoir, une illusion. Et cela vaut mieux que rien. Il est très important de garder une illusion, aussi absurde soit-elle.
« Le salut ne viendra que pour les hommes qui sont vraiment des hommes, c’est-à-dire des individus. Cette fois-ci, ce ne seront pas les catégories qui seront sauvées. »
« Aucune Eglise, aucune nation, aucun Etat et aucun continent ne pourra sauver ses membres en masse ou par catégories. Seuls les hommes pris individuellement, sans tenir compte de leur religion, de leur race ou des catégories sociales ou politiques auxquelles ils appartiennent pourront être sauvés. Et c’est pourquoi, l’homme ne doit jamais être jugé d’après la catégorie à laquelle il appartient. »
L’heure dans laquelle je m’intègre n’appartient plus à la vie, je suis incapable de passer avec mon poids de chair et de sang à travers elle. C’est la vingt-cinquième heure, l’heure où il est trop tard pour être sauvé, trop tard pour mourir, trop tard pour vivre. Il est trop tard pour tout.
Sache, Traian, que la vie n'a jamais de but objectif, à moins qu'on ne désigne ainsi la mort : tout but réel et véritable est subjectif.
La Société technique occidentale veut offrir à la vie un but objectif. C'est le meilleur moyen de l'anéantissement (...)
Et c'est à cause de cela même que nous pouvons avoir la certitude que cette Société s'écroulera. La Société de la civilisation technique est devenue incompatible avec la vie de l'individu.(...) Voilà le crime de la Société technique occidentale. Elle tue l'homme vivant, le sacrifiant à la théorie, à l'abstraction, au plan.
L'amour, cette suprême passion, ne peut exister que dans une société qui estime que chaque être humain est irremplaçable et unique.
Tu prétends que je suis encore en vie parce qu'au moment où je ne serai plus en vie tu me verrais mort. Tu verrais mes paupières se fermer, mon cœur cesser de battre et tout mon corps se refroidir. Tu verrais mon cadavre. Mais, mon vieux Moritz, il y a certaines morts qui ne laissent pas de cadavres derrière elles. Les continents meurent et ne laissent pas de cadavres. Les civilisations meurent et ne laissent pas de cadavres. Les religions non plus, ni les Patries. Les hommes aussi, meurent parfois avant d'avoir pu prouver leur mort par leur cadavre. Me comprends-tu ?
La Roumanie est un pays révolutionnaire. Papa m'a expliqué que la révolution ne peut pas être faite sans les concierges../... Ils savent tout sur chaque citoyen. Votre concierge m'a donné la fiche. Ainsi je vous connais.
Tout homme a besoin de se persuader qu'il est un soleil sans lequel rien n'existe. C'est l'important dans la vie d'un homme, le reste n'est rien. Sans cette confiance, l'homme devient réellement négligeable, sa vie est inutile.
Pour montrer clairement que l’Eglise est du ciel et non de la terre, elle est édifiée en forme de nef, ce qui signifie qu’elle est sur la terre de la même manière que le navire est sur l’océan : elle vogue. Mais elle est une réalité d’ailleurs.
Les médiocres n’ont été et ne seront jamais persécutés. La foudre ne tombe jamais sur les lieux bas. Il faut être grand pour recevoir la foudre sur la tête.
Toute terre étrangère est leur patrie, et toute patrie leur est étrangère.