AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Damien Marie (322)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Ceux qui me touchent

Je remercie les éditions Bamboo pour l'envoi de cette masse critique privilégiée, et Nathan pour me l'avoir proposée.

Je ne suis pas habituellement une lectrice de romans graphiques mais le thème de celui-ci fait partie de ceux qui me touchent, en plus de la joie d'être conviée à une masse critique.

.

le pouvoir de l'imagination peut-il nous arracher des griffes d'un quotidien besogneux ? Peut-il réellement faire évoluer notre rapport au monde ?

le narrateur a mit toutes ces questions sous le tapis ; Ou dans un petit tiroir proprement refermé dans un recoin de son esprit. Il a fait des études dans le domaine artistique, seulement...Il y a les rêves de jeune adulte et il y a la réalité du quotidien. Les idées ne se consomment pas dans l'assiette. Pas plus que l'amour et l'eau fraîche. Alors il a déposé ses idées et son intégrité à la porte d'une usine où le temps passe inexorablement de façon morne et répétitive, mais le frigo est rempli. C'est une usine où les porcs arrivent vivants –ou plus ou moins selon les conditions de transport et de dépôt- et d'où ils sortent en pièces détachées dans des barquettes. Une usine où l'âme du narrateur est passée à tabac par le spectacle quotidien et une odeur de merde, de peur et de soies grillées qui ne le lâche plus.

.

le narrateur est le papa d'une petite fée de cinq ans. Une fée, une magicienne qui réussit à ouvrir le petit tiroir fermé depuis si longtemps. Ensemble ils recréent un monde en lequel le père décide de s'abandonner, tâchant de remettre de l'émerveillement dans son quotidien. Seules les belles rencontres sont capables de cela, et celle de ce père avec sa petite fée est magnifique.

.

Damien Marie ne donne pas de réponses à mes deux questions de départ. J'étais prête à perdre pieds avec le narrateur, pour plus de merveilleux, de l'absurde, de la folie même mais la fin n'a rien de surprenant. On imagine deux fins possibles, l'auteur nous sert les deux à la fois, incapable de trancher ; cela a fait retomber le soufflet.

.

Les planches de Laurent Bonneau, souvent avares de texte, mettent son trait abrupt et anguleux à l'honneur. Des traits secs qui se jouxtent, qui se cherchent pour créer des dessins souvent très évocateurs et émouvants. La colorisation a aussi un rôle particuliers. Plusieurs pages dans des monochromes lie de vin, suivies d'autres pages monochromes de vert, orangés qui sont représentatives de divers ambiances, sentiments. J'ai particulièrement aimé le fushia réservé à la partie mercantile du monde de l'art, ces artistes « de galerie » ou de buzz qui recherchent avant tout le tweet, la gloriole et le fric.

.

Ceux qui me touchent, touchent aux étoiles, mais il y a si peu d'élus.

Commenter  J’apprécie          3517
Ceux qui me touchent

Lui, c’est pas pareil, il peut tout changer

-

Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Son édition originale date de 2023. Il a été réalisé par Damien Marie pour le scénario, et Laurent Bonneau pour les dessins et les couleurs. Il compte deux-cent-vingt-deux pages de bande dessinée. Ces deux créateurs avaient déjà réalisé ensemble Ceux qui me restent (2014).



C’est au départ assez simple. Deux humains… Souvent un lit et quelques minutes de sueur. Quelque chose qu’on ne contrôle plus. Des corps qui parlent. C’est assez simple. Mais ça ne l’a pas été. Alors, Fabien Manry a arrêté de fumer… Spermogramme, bilans de fertilité… Recherche de facteurs génétiques. Et puis Aude, sa conjointe, a morflé : insémination artificielle, fécondation in vitro… Une fois, deux fois, trois fois… Espoir, fausses couches, encore et encore… Les saletés de fausses couches. Et puis les gamins des autres, partout des mômes qui naissent comme une pluie de bonheur, un bonheur qu’on te précise ne pas pouvoir imaginer. Et les jeunes papas au bar dégueulent à Fabien, la vraie chance qu’il a d’avoir ses nuits à lui, de ne pas connaître l’enfer des biberons et des couches. Plus tard, Fabien va chercher une bouteille de vin à la cave, Blosseville Marniquet, d’abord Pinot noir, Pinot Meunier et juste une pointe de Chardonnay. Exactement ce qu’il faut, un champagne qui ne se laisse pas faire. Il remonte dans le salon–salle à manger pour retrouver leurs invités, en train de fêter l’annonce de la naissance à venir de leur fille à Aude et lui : Élisa, après douze ans d’attente.



Élisa va bientôt fêter ses six ans, et Fabien est en train de déguster une bière avec son pote Alex. Ce dernier lui demande comment va le boulot : Fabien se montre fataliste, il tue des cochons du matin au soir, et une semaine sur deux, du soir au matin. Alex relativise en disant que ce n’est qu’un boulot. Fabien explique que son ami ne sait pas de quoi il parle. Il n’a pas cette saleté d’odeur dans le nez qui persiste encore trois jours après un brûlage, celui des soies. Et depuis qu’ils ont la petite, c’est à peine si Fabien voit Aude. Elle fait ses gardes de nuit les semaines où il est de jour, et vice-versa, pour éviter de passer un salaire en nounou. Ce boulot, ça devait être temporaire, mais la vie… Alex lui demande s’il a gardé des contacts de ses années d’arts appliqués. Fabien explique que pour chercher un taf il faut du temps, et dans ses journées le temps qui reste, ce n’est déjà pas assez pour sa petite puce. Cet horrible monstre suceur de temps, ajoute-t-il sur le ton de la plaisanterie. Alex l’invite à manger avec Élisa le soir-même, Fabien embauchant à cinq heures, ils garderont la petite fille et Aude pourra passer la chercher le lendemain matin. Fabien et Élisa arrivent juste avant le diner, et la petite fille déclare qu’elle n’aime pas le jaune, à Isa, sur un ton péremptoire. La compagne d’Alex la regarde d’un drôle d’air en lui disant bonsoir. Élisa explique : parce que le jaune, ça se mange pas. Fabien explicite : elle parle du curry.



Le récit commence de manière singulière par une pleine page noire avec quelques cellules de texte. Le lecteur constate rapidement que l’artiste réalise une narration assez aérée, majoritairement à base de cases de la largeur de la page, au nombre de trois ou quatre, utilisant parfois plus de cases disposées en bande. La pagination lui donne le loisir de réaliser des illustrations en pleine page, au nombre de huit, des dessins en double page au nombre de trois, et des pages sans texte où la narration est entièrement portée par les dessins, au nombre de trente. Cela donne au lecteur, la sensation d’une lecture facile, des pages qui se tournent à un bon rythme, les personnages disposent de place pour exister. La densité des détails dans la représentation des décors varie en fonction de la nature des séquences : des moments émotionnels ou de repli sur soi avec des fonds de case vides, ou des actions du quotidien avec décor représenté dans le détail, comme cet appartement du seizième arrondissement. Le lecteur remarque également que le coloriste a opté pour le principe d’une teinte déclinée en plusieurs nuances pour chaque séquence, ou pour le contraste entre deux couleurs. Par exemple, celle de l’annonce de la naissance se déroule dans des teintes orangées, du jaune au presque rouge. La première séquence de travail à l’abattoir se déroule dans des teintes vertes contrastées par du jaune. Celle dans l’appartement du seizième fonctionne sur un contraste de jeune pale et de violet. Cela génère une impression d’environnement très cohérent, d’un seul tenant pour chaque scène.



Laurent Bonneau dessine un registre réaliste et descriptif, avec un des traits de contour fins et cassants, quelques traits secs dans les zones détourées pour leur apporter une touche de texture ou rehausser leurs reliefs, et des aplats de noir aux formes déchiquetées pouvant être assez conséquent. Le lecteur s’adapte rapidement à cette façon de représenter la réalité, banalité d’un quotidien souvent rugueux, avec quelques images saisissantes. Il peut aussi bien ressentir la familiarité d’une discussion à bâton rompu en buvant un verre dans la cuisine que la sensation d’irréalité qui accompagne des moments sortant de l’ordinaire. En fonction de sa sensibilité, certains visuels le touchent plus que d’autres : le choix d’une bouteille de vin à boire entre copains, Fabien qui invente une histoire pour sa fille Élisa après le coucher, un cerf en ombre chinoise dans une aquarelle en double page, l’envolée d’un groupe d’oiseau au-dessus d’une route de campagne, Fabien avec un tournevis ensanglanté à la main, les porcs entassés dans la remorque bétaillère, l’intense tristesse de Fabien alors qu’il vient de donner un verre d’eau sucrée à une personne à la rue lors d’une maraude, assister à une séance de photographies conceptuelles de dénonciation consumériste et de métaphore porcine, retourner au boulot alimentaire et abrutissant.



L’intrigue en elle-même apparaît rapidement simple et linéaire : Fabien Manry forme un couple avec Aude, chacun ayant un boulot avec un bas salaire, des horaires en décalé, des heures supplémentaires imposées pour elle. Donner la mort aux porcs et les nettoyer pèse lourdement sur l’esprit de monsieur, travailler aux soins palliatifs en manquant de moyens pèse également lourdement sur l’esprit de madame. S’occuper de leur fille de cinq ans leur prend tout leur temps, mais… Fabien a suivi des études d’arts appliqués et il se prête volontiers au jeu de sa fille de lui inventer des histoires le soir, avec une princesse et même des cochons zombis, et voilà que le cerf qu’ils avaient introduit dans leur histoire du soir, se manifeste sur la route. Fabien y voit un signe : il peut changer l’histoire, celle qu’il raconte à sa fille, celle de sa vie, de leur vie. Lorsqu’un second signe des plus singuliers se présente sous ses yeux, le message est clair. Les auteurs racontent ces deux passages au premier degré, laissant le lecteur libre de s’en faire sa propre interprétation, une légère touche de surnaturel, ou bien une forme de synchronicité, c’est-à-dire l’occurrence de deux événements qui ne présente pas de lien de causalité mais dont l’association fait sens pour Fabien.



À nouveau, en fonction de son inclination, le lecteur peut y voir soit une forme de pouvoir de l’imagination, soit le refus de capituler devant le principe de réalité. Ainsi Fabien a fait les arts appliqués, peut-être comme le scénariste ou le dessinateur, en tout cas son être comporte une fibre créative qui s’exprimera quelles que soient les conditions de vie. Une œuvre artistique passe sous les yeux de Fabien, de façon particulièrement inattendue et incongrue et il y voit l’occasion de pouvoir revenir à son sa voie professionnelle de cœur, à sa branche de formation, à son inclination naturelle. Il sait qu’il dispose du pouvoir de changer la réalité, de modifier son destin, d’exprimer sa personnalité intérieure, ou plutôt en l’occurrence d’aider une artiste à être connue. Cherchant à se connecter au monde professionnel de l’art, il se rend compte que seule une des personnes qu’il a côtoyées durant ses études a fait carrière dans le monde de l’art, en tant que galériste. Cela le conduit à se demander ce qui peut bien broyer aussi systématiquement les rêves, ce qui ne marche pas avec lui, avec les autres. Ils étaient certains de leur destinée, si jeunes et si convaincus. Pourquoi il n’en reste rien ? D’un autre point de vue, le lecteur se retrouve fort impressionné par le passage de la page quarante-trois à cinquante-et-un quand Fabien décrit le fonctionnement de l’abattoir : Des barreaux pour entrer, ou pour que rien ne sorte… La grande fabrique de viande. Le crachoir jette un porc sur le toboggan environ toutes les dix secondes, seize heures par jour, cinq jours sur sept. Vingt-cinq mille cochons tout roses par semaine. Progressivement, une idée se fraye son chemin dans l’esprit du lecteur : les êtres humains sont semblables à ces cochons. Au lieu d’être broyés par l’abattoir, les humains sont broyés par la société, sacrifiés. Cette comparaison fait froid dans le dos, donnant un sens sinistre à d’autres réflexions : Rien ne ressort vivant d’un abattoir ; la pauvreté renifle chaque individu comme une friandise ; regarder sa fille comme une magicienne, détentrice de la naïveté primale… en cours de formatage par l’institution. Cette prise de conscience se trouve renforcée par une nuit passée à la rue, par la participation à une maraude avec un véhicule de l’Armée du Salut.



Une image de couverture et un titre cryptique, un texte de quatrième de couverture qui n’évoque qu’une facette du récit : le lecteur ne sait pas trop comment il doit prendre le récit. Sa lecture s’avère facile et surprenante, ancrée dans la réalité d’une famille avec de petits revenus, l’entrain de leur petite fille, des boulots harassants et pesants. La narration visuelle combine une forme aérée avec l’âpreté du réel, sans misérabilisme. Le lecteur passe des tâches de l’abattoir au monde de l’art contemporain, avec l’évocation de Damien Hirst (1965-), Isabelle Plat, Ghyslain Bertholon (1972-). Il passe du quotidien aliénant aux histoires d’Élisa avec des cochons zombis, alternant entre la quantité quotidienne vertigineuse de porcs tués et les perspectives réconfortantes d’une entreprise artistique. Une aventure de la vie humaine sans fard, sondant les limites du principe de réalité. Formidable.
Commenter  J’apprécie          330
Ceux qui me touchent

Je ne lis pas souvent de romans graphiques. Il s'agissait d'un coup de coeur des bibliothécaires de ma médiathèque et j'ai beaucoup aimé.

Fabien et Aude sont en couple depuis assez longtemps et ont eu de mal à avoir un enfant. Elisa a maintenant 5 ans et eclaire leur vie. Tous deux travaillent énormément. Fabien, qui a fait les beaux arts, travaille dans un abattoir de porcs, cela devait être provisoire mais il faut bien gagner sa vie. Sa femme travaille en soins palliatifs dans un hôpital. Ils ne font souvent que se croiser entre les horaires de jour et les gardes de nuit. Chaque soir, Fabien raconte une histoire à sa fille. Elle exige que cette histoire comporte certains éléments comme des cochons, une princesse, un loup, de la magie.

Un jour, Fabien réceptionne un porc qui a un joli tatouage. Il va alors remonter la filière pour trouver la personne qui a fait ça et tenter de changer de vie en démissionnant.

Le graphisme est très beau, des couleurs différentes indiquent s'il s'agit de la réalité ou de rêves.

Ce roman aborde différents thèmes comme la paternité, ce qu'on fait de nos vies, les rêves, l'amitié, l'art et l'argent.

Une très belle découverte.

Commenter  J’apprécie          300
Ceux qui me restent

Un coup de foudre pendant les manifs de mai 68 et Florent court rejoindre la jolie Jenny en Angleterre. Elle ne s'y attendait pas, l'accueille en riant, pose ses conditions : « Si tu viens avec moi, c'est le vrai sérieux. Je veux une bébé fille who's called Lilie and une maison dans la Normandie pour manger le camembert toute la vie. » Qu'à cela ne tienne, il lui offrira tout ça. Mais Jenny meurt lorsque Lilie a cinq ans, et Florent se retrouve dépassé : « Il faudra affronter la maison pleine de Jenny sur tous les murs... les meubles... dans tous les tiroirs. Reprendre le travail. Consoler petite Lilie. Encore travailler. Encore consoler petite Lilie. Et ne jamais pleurer. Je suis le refuge. » Lourde tâche de s'occuper seul d'une petite fille qui a perdu sa maman, perspective ô combien angoissante, vertigineuse...



Album déroutant sur le deuil, la paternité, les relations père-fille, le pardon. Et surtout sur la maladie d'Alzheimer, qui fait revivre jour après jour à cet homme le cauchemar d'une disparition, la peur de la perte de son enfant. J'ai longtemps navigué à vue entre ces pages, je ne suis pas certaine d'avoir tout compris même après relecture. J'ai été mal à l'aise, angoissée et perdue en même temps que ce père dont la mémoire fout le camp, pour qui tout s'embrouille.



Cette histoire troublante et triste est admirablement mise en valeur par des mots émouvants et un graphisme superbe.
Commenter  J’apprécie          290
Ceux qui me touchent

Fabien et Aude se sont battus à coup de FIV et d'insémination artificielle pour avoir leur petite Elisa, 5 ans déjà. Et maintenant c'est au quotidien qu'il faut se battre pour survivre dans des boulots harassants, à l'hôpital pour Aude et dans un abattoir pour Fabien. Alors quand l'histoire qu'il invente pour la raconter à Elisa tous les soirs semble prendre vie devant ses yeux, à coup de biche et de cochon tatoué, Fabien décide de croire à l'impossible et de faire un pas de côté... la réalité va-t-elle le rattraper ou réussira-t-il à changer l'histoire ?



J'ai choisi ce roman graphique un peu par hasard puisqu'il m'a été proposé lors d'une Masse Critique alors que je ne connaissais pas ses auteurs et que son résumé était assez énigmatique. Quand je l'ai reçu j'ai eu peur de ne pas accrocher car les dessins me laissaient un peu perplexe : des silhouettes très vite esquissés, des fonds flous façon aquarelle avec de grand aplats de couleurs, le trait est très original et m'a demandé un petit temps d'adaptation. Et pourtant cet album est si attachant et ses personnages si justes qu'au bout de quelques pages j'ai été happée et n'ai pas réussi à lâcher ce livre avant de l'avoir terminé. Fabien, c'est le gars qu'on connaît tous, celui qui a renoncé à ses rêves d'artiste pour entrer dans la "vraie vie" (mais est-ce vraiment la vraie vie ?), trouver un boulot alimentaire, aider sa femme à boucler les fins de mois et réserver le peu de temps libre qui lui reste pour s'occuper de sa fille, sa princesse ("Papaaa ! Je ne suis PAS une princesse je t'ai dit !"). Oui mais voilà dans la grande loterie des jobs ingrats Fabien a tiré le boulot dans un abattoir, celui qui vous épuise, vous confronte à la réalité de la production de viande, vous hante et manque vous rendre fou.



C'est là que cet album prend toute sa force : de l'histoire sympa d'un père et de sa fille, on est confronté à la réalité, la vraie, la dure, celle qui n'hésite pas à vous mettre des baffes quand vous essayez de sortir du système (superbes passages sur une maraude de la Croix Rouge pour aider les SDF). Alors quand une série de coïncidences semblant sortir d'un conte de fée et de l'imagination d'une petite Elisa de 5 ans frappe à la porte de Fabien, celui-ci y voit un signe et va tenter à sa modeste manière de changer ce qui le heurte trop. C'est tout l'art de Damien Marie de mêler ainsi réalité brute, dénonciation du capitalisme dans ce qu'il a de plus violent, et passages oniriques où le lecteur se demande avec Fabien où tout cela va le mener et se prend à retenir son souffle en espérant que parfois, juste parfois, les contes de fée se terminent bien. C'est vraiment un roman graphique que j'ai adoré, les dessins sont en phase avec le scenario et on comprend vite l'intérêt des changements de couleur au fil des chapitres : le vert oppressant de la machine de mort de l'abattoir, le jaune des chaleureux moments entre amis, le rose à paillettes du monde bling bling de l'art contemporain... C'est magnifique, images et texte se répondent et nous emportent dans cette histoire pas comme les autres dont même la fin offrira un joyeux clin d'oeil laissant au lecteur la possibilité de rêver.



Un album que j'ai vraiment trouvé très abouti et très original avec plusieurs thèmes assez rarement traités en bande dessinée. Pas de propos simpliste ici, juste une dénonciation de la violence pure de l'abattoir et un morceau de vie avec des personnages particulièrement attachants et semblant plus vrais que nature. Un énorme coup de coeur à découvrir, j'espère que ce titre rencontrera un succès bien mérité. Et comme scénariste et dessinateur ont déjà réalisé un premier album ensemble je vais pour ma part m'empresser de le découvrir ! Un très grand merci à Babelio et aux éditions Grand Angle pour ce beau cadeau et la découverte d'un titre vers lequel je ne serais sans doute pas allée spontanément (ne faites pas comme moi ! ouvrez vite ce livre !!!).
Commenter  J’apprécie          280
Ceux qui me touchent

Un très beau livre que ce roman graphique, agréable à tenir en main, un format et un papier de qualité en font un objet plaisant.



Pour le contenu, c'est autre chose, car si le résumé parle de contes et d'un changement de vie lié à des coïncidences fantastiques, on se retrouve en fait dans un récit très ancré dans la réalité sociale contemporaine, côté sombre (ce qui fut une très bonne surprise pour moi).



"La putain de pauvreté qui nous renifle comme une friandise." Voilà une phrase prononcée par le narrateur qui m'a touchée, une image percutante pour nombre de nos concitoyens qui la ressentent au quotidien.



Alors comment se sentir encore un peu libre, maître de son destin, humain tout simplement, lorsque l'on est pris dans les rets d'une société du travail et de l'argent rois et que son travail, mal payé, consiste à buter des cochons à la chaîne ? En faisant une folie. Et en la payant. Pour la beauté du geste. Pour se prouver que tout n'est pas pourri. Qu'il existe encore de la beauté et de la bonté gratuites quelque part. Pour sa fille de 5 ans qui invente des histoires de cochons-zombies et de bâton arc-en-ciel. Et tant pis pour le reste.



A lire.



Commenter  J’apprécie          262
Ceux qui me touchent

J’ai trouvé ce récit de Damien Marie très émouvant car il s’ancre dans une réalité dure, sans concessions mais ouvre aussi sur le rêve et sur tous les possibles. Malgré sa part de noirceur, il est plein d’espoir et d’humanité.

Fabien bosse dur aux abattoirs et supporte de plus en plus mal les cadences infernales et le fait de tuer des porcs à la chaine. Sa femme, qui travaille à l’hôpital, a aussi un quotidien difficile et ils ont du mal à joindre les deux bouts. Heureusement, il y a Élisa, leur fillette de 5 ans, qui adore les histoires. Un jour, Élisa se met à inventer avec son père une histoire fantastique. Et, dès le lendemain, des coïncidences troublantes entre histoire et réalité vont infléchir la vie de Fabien.

A cause d’un porc étrange mis à la réforme, sa vie va basculer, son couple battre de l’aile. Il s’engage dans une drôle d’aventure en compagnie d’une jeune autiste, convaincu qu’il peut créer du beau, de l’art, comme lorsqu’il apprenait pendant ses études d’art appliqué.

A travers l’histoire d’un parcours personnel, l’auteur aborde des faits de société qui interrogent, comme les sans-abris, la pauvreté des familles, l’élevage intensif, le travail abrutissant et déshumanisé, les codes absurdes de l’art contemporain. Où donc est l’humain dans cette société de consommation à outrance ? C’est d’une terrible lucidité. Heureusement qu’il y a des moments d’humanité comme les amis Isa et Alex, un couple mixte à la générosité infinie.

Le dessin de Laurent Bonneau épouse à la perfection la noirceur et les moments lumineux de ce récit. Chaque tranche de vie a droit à sa couleur spécifique, ainsi on passe du sépia au vert, de l’orange au brun… Les personnages sont très expressifs et on se projette parfaitement dans l’histoire.

Vraiment un récit qui m’a émue et que je recommande vivement

Je remercie Babelio et les éditions Grand Angle pour cette belle lecture



Commenter  J’apprécie          260
Ceux qui me touchent

Fabien, héros de l'histoire qui nous intéresse, est le père de la petite Lisa et le compagnon de Aude. Ils sont tout trois pris par le rythme des devoirs du quotidien: scolarité pour la petite de 5 ans, infirmière en service de thérapie intensive pour la mère et sur une ligne de production pour le père mais pas n'importe laquelle, celle des abattoirs de porc dans ce qu'on devine être la Sarthe ou un département adjacent.



Chaque soir le père lit une histoire à sa fille ou plutôt lui invente des histoires pour qu'elle s'endorme. Mais celles ci vont adopter une forme mystique: des détails de ces histoires racontées la vieille trouveront un écho dans la vie réelle le lendemain.

Fabien décide donc de suivre ces échos, quitte à vivre des moments improbables, je pense entre autre à celui avec l'armée du salut dans les rues manselles. Il renoue par ailleurs avec ses intérêts artistiques grâce à un cochon tatoué par une autiste... Histoire qui l'amènera à lâcher l'usine agro-alimentaire (de force puis de gré) puisqu'il pourra vivre désormais des 10% qu'il touche pour la diffusion et la vente des œuvres d'art (brut ?).



J'ai beaucoup aimé la palette chromatique des planches. La bichromie est surprenante (noir pour les traits et vert/rouge/orange/bleu etc pour le remplissage des vignettes... Pour chaque couleur, moult tonalités déclinées, verts pomme, bouteille, amande etc). Les couleurs sont en lien avec les dialogues mais ce n'est pas systématique. Les dessins et l'expression des visages, des ambiances sont très plaisants... La solitude et les temps de silence sont très bien représentés, la violence des abattoirs aussi. Le vocabulaire utilisé par les personnages est familier et courant mais on sent qu'il y a toutefois un bagage culturel chez ces personnages.

De nombreux thèmes sont abordés avec plus ou moins d'importance.

La société du labeur. Le sens du devoir. La condition ouvrière au 21eme siècle (un bel écho à la littérature de feu Joseph Ponthus pour son émouvant roman poétique À la ligne). La maltraitance animale. La lecture des signes mystiques dans les détails du quotidien et ce que chacun décide d'en faire. Le couple et ses failles. La paternité. L'amitié. Le mundillo de l'art contemporain.



Le scénario est bien construit, l'histoire intéressante, le graphisme original... Merci beaucoup à Babelio pour l'envoi de cette belle BD que je conseille aux amateurs du 9eme art.





Commenter  J’apprécie          232
Ceux qui me restent

Un dessin magnifique qui illustre avec finesse ce récit sur la maladie d'Alzheimer, Damien Marie et Laurent Bonneau ont trouvé le ton juste.

C'est comme une plongée dans un esprit atteint de cette saleté qui vous bouffe la mémoire... avec ce dessin au fusain, aux traits floutés, presque effacés... ou seul Florent, victime de la maladie, héros de ce triste conte, apparait clairement, dessiné d'un trait clair et limpide.

Florent, qui fut un jeune père dépassé... et dont la mémoire bloque sur cet épisode traumatisant de son passé, la mort de sa femme, et surtout, la disparition de sa fille, sa petit Lilie en ciré jaune... Le jaune, couleur solaire, point de repère de cet homme perdu dans le temps, prisonnier de ses souvenirs... La couleur jaune, comme une ponctuation d'amour dans ce noir et blanc linéaire et labyrinthique... Sa fille, sa petite Lilie, perdue, il y a si longtemps, sur ce bateau... La retrouvera-t-il ici, maintenant ?

Un livre superbe, troublant, qui se lit trop vite....
Commenter  J’apprécie          230
Ceux qui me restent

Tout au long de ce roman graphique, comme Florent, on erre entre présent et passé, réalité et souvenirs, histoire reconstituée et histoire vraie. C’est une façon extrêmement habile, outre un beau graphisme, de montrer la réalité de l’Alzheimer et de permettre au lecteur, petit à petit et sans pathos, de séparer l’histoire vraie de Florent et d’Aurélie (sa fille) des obsessions, oublis et erreurs de Florent noyé dans la détresse cette terrible maladie.
Commenter  J’apprécie          221
Après l'enfer, tome 1 : Le jardin d'Alice

Ce premier tome de « Après l’enfer » nous plonge dans une ambiance glauque et oppressante où la violence et la désolation sont tout ce à quoi ont droit les victimes collatérales d’une guerre fratricide qui a scindé un pays en deux.



C’est donc au lendemain de la guerre de sécession américaine que nous découvrons une héroïne meurtrie qui a tout perdu. Les états sudistes ayant perdus la guerre, d’horribles pillages et de monstrueux massacres sont le nouveau quotidien d’une population déjà à genoux. Essentiellement des femmes, privées d’hommes pour les protéger, se retrouvent à la merci de bandes armées qui compte bien profiter de la situation pour s’enrichir.



Pour ceux qui y aurait pensé en lisant le résumé de cette bande dessinée, vous pouvez tout de suite oublier la belle et douce histoire d’ « Autant en emporte le vent ». Ici, tout est cru, tout est sanglant et tout est terriblement dérangeant.



Sur un fond subtil et poétique d’oeuvres connus de tous, « Après l’enfer » nous présente une réalité choquante. D’ « Alice au pays des merveilles » au « Magicien d’Oz » nous voyageons mentalement sans pour autant quitter cette Amérique sudiste au prise avec tant de souffrance.



Même si les premiers instants de lectures peuvent être un peu compliqués à appréhender, on comprend très vite ce monde de terreur dans lequel on vient de mettre les pieds. On repère très vite les deux camps ennemis. Il est d’ailleurs très aisé de reconnaitre les vainqueurs des vaincus…



On s’attache très vite aux personnages qui nous sont présentés. Toutes l’horreur du tableau qui s’étale sous nos yeux est magnifié par un style graphique et une colorisation sublime qui appui avec justesse le propos énoncé ici.



C’est une aventure sordide que nous allons suivre au fil de notre lecture. Chaque page étant plus intolérable que la précédente, le lecteur en viendra à développer une curiosité presque morbide pour la suite des évènements.



Emaillée de faits historiques à vous faire dresser les cheveux sur la tête, cette bande dessinée est pourtant plus à classer dans la catégorie des divertissements. Cette intrigue aux multiples retournements de situations tient parfaitement son public en haleine et on a déjà hâte de pouvoir se plonger dans les pages du tome 2 de « Après l’enfer ».



Si vous n’êtes pas une âme trop sensible et que cette période post guerre de sécession ne vous effraie pas, je vous conseille sans hésiter la lecture de « Après l’enfer », une bande dessinée qui ne plaira pas à tout le monde mais qui pourtant d’une très grande qualité.
Commenter  J’apprécie          220
Back to perdition, tome 1

L'histoire, bien que très violente m'a passionnée.

On se trouve totalement immergés dans un univers chaud, humide, marécageux : nous sommes en Australie dans un élevage de crocodiles.

Les blancs y cohabitent (mal d'ailleurs) avec les aborigènes.

Les tensions sont palpables, la moindre parole ou le plus petit geste pouvant déclencher un cataclysme.

On y fait la connaissance avec une jeune fille, Angie, son père et leurs employés qui tous, s'occupent d'une ferme dédiée aux crocodiles.

L'amour et la haine vont faire voler en éclat le quotidien de ces personnages. On assistera alors à une course-poursuite, une véritable chasse à l'homme, et ce, sous des cieux déchaînés.

Les dessins et les couleurs vives, riches, épaisses, presque poisseuses comme du sang sont au service de cette histoire où la violence et la terreur règnent en maîtres.
Commenter  J’apprécie          210
Ceux qui me touchent

Il travaille en abattoir après avoir fait les Beaux-Arts, parce qu’il faut bien payer le loyer. Tous les soirs, avec sa petite fille, il invente des histoires. Et soudain, des signes apparaissent dans son quotidien : les animaux de l’histoire prennent vie, comme ce cochon tatoué… Signe qu’il faut changer de vie ?

Le traitement des dessins et des couleurs, pas du tout un style que j’apprécie, a un peu plombé ma lecture de cet album, qui a pourtant beaucoup d’atouts pour lui. La profession exténuante, les interrogations du père et sa relation avec l’enfant sont fouillées et bien rendues, il y a de l’humour et de la poésie dans ce récit.
Commenter  J’apprécie          200
Ceux qui me restent

Un roman graphique tout en chausse-trappes afin d'évoquer les conséquences désastreuses que la maladie d'Alzheimer inflige aux malades et à leur proches. De page en page, on se surprend à errer dans les tunnels temporels persistants, certains menant à des souvenirs lointains, d'autres comme des impasses ou des chemins de traverse menant nulle part…

C'est l'histoire de Florent et celle de sa fille Aurélie. Le deuil, l'absence, la maladie auront creusés entre eux des tranchées qui pourraient devenir infranchissables avec le temps.

Le dessin est lui-aussi tout en trompe-l’œil ; il semble esquisse, brouillon, comme tracé grossièrement au fusain ou crayonné dare-dare… C'est en réalité un vrai travail de camouflage qui masque les émotions et la réalité crue.

Afin de ne pas se perdre, il faut se repérer à la ligne jaune acidulée ; ce leitmotiv qui parfois se fond et tend à disparaitre dans le gris du décor mais nous qui rappelle que la vie et ses étincelles sont peut-être plus fortes que la détresse.

Fort, émotionnellement.
Commenter  J’apprécie          200
Back to perdition, tome 2

L'histoire, bien que très violente m'a passionnée.

On se trouve totalement immergés dans un univers chaud, humide, marécageux : nous sommes en Australie dans un élevage de crocodiles.

Les blancs y cohabitent (mal d'ailleurs) avec les aborigènes.

Les tensions sont palpables, la moindre parole ou le plus petit geste pouvant déclencher un cataclysme.

On y fait la connaissance avec une jeune fille, Angie, son père et leurs employés qui tous, s'occupent d'une ferme dédiée aux crocodiles.

L'amour et la haine vont faire voler en éclat le quotidien de ces personnages. On assistera alors à une course-poursuite, une véritable chasse à l'homme, et ce, sous des cieux déchaînés.

Les dessins et les couleurs vives, riches, épaisses, presque poisseuses comme du sang sont au service de cette histoire où la violence et la terreur règnent en maîtres.
Commenter  J’apprécie          180
Ceux qui me restent

La façon dont est composé le récit m’a surpris, les premières scènes sont vraiment déconcertantes. Le graphisme est assez froid, avec des aplats de couleurs qui mettent un peu mal à l’aise, un trait mélangeant un crayonné brut, mine de plomb avec quelques traits plus nets, et une ambiance sordide et triste, beaucoup de pluie, des ciel gris, des décors sans vie. Mais lorsqu’on comprend, lorque le puzzle se dévoile, c’est le choc. La manière avec laquelle les auteurs nous amènent dans le drame de la maladie et vraiment terrible, choquant et en même temps délicat et subtil, on entre dans la pensée du malade, dans sa manière de voir les choses, de revivre les moments durs de sa vie, de se perdre dans ses souvenirs insupportables. Le graphisme lui même participe au drame, le visage de la belle mère est à moitié gommé, le choix des détails, la tristesse des couleurs, tout est savamment posé, rien n’est laissé au hasard. Il y a peu de mots, le strict minimum pour saisir les caractères. C’est une bande dessinée émouvante, très dure et pourtant très belle, à ne pas lire si vous avez le bourdon.

Magistral.
Commenter  J’apprécie          180
Ceux qui me restent

Florent a beaucoup perdu tout au long de sa vie. D'abord sa femme, dont le suicide a fait de lui un père esseulé et incapable de faire face. Sa fille, ensuite. Lilie ne lui a jamais pardonné la mort de sa mère et l'a toujours tenu responsable de cette tragédie. Aujourd'hui, il voudrait la retrouver mais il ne la reconnaît plus. Son mal porte un nom terrible et glaçant : Alzheimer. La maladie n'est pas le seul sujet de cet album bouleversant. La rancœur, les non-dits, ces choses qui nous éloignent les uns des autres et n'engendrent au final que tristesse et remords sont également des thématiques abordées avec beaucoup d'habileté.



Difficile de mettre en images une mémoire défaillante. Les souvenirs surgissent par bribes, sans réelle hiérarchie. Ils s'imbriquent, se chevauchent, se télescopent, s'estompent, s'effacent. Que reste-t-il de tangible ? A quoi se cramponner ? Le récit restitue à merveille ce puzzle mémoriel dont les pièces se perdent peu à peu.



Le dessin de Laurent Bonneau, d'une grande sobriété, suggère les périodes de flottement, de vide, d'absence d'éléments temporels concrets auxquels Florent pourrait se raccrocher. Les grandes cases, très dépouillées, illustrent le "brouillard" dans lequel son esprit s'enfonce chaque jour davantage. C'est subtil et très lisible malgré l'aspect à première vue "décousu" de la narration.



Un album à lire comme une course poursuite. Contre le temps qui passe et efface. Contre une maladie impossible à vaincre. Contre l'amour perdu d'une fille à laquelle on n'a jamais, absolument jamais, cessé de penser au fil des années. Le récit émouvant d'un combat perdu d'avance, déroulé avec une intelligence et une pudeur remarquable.




Lien : http://litterature-a-blog.bl..
Commenter  J’apprécie          180
Ceux qui me touchent

Fabien a fait des études d'arts appliqués mais travaille dans un abattoir; sa femme, Aude, travaille à l'hôpital public, dans un service de soins palliatifs. Ils se croisent et s'éloignent l'un de l'autre. Seul rayon de soleil dans cette vie morne, où rode la mort des bêtes et des humains, Elisa, 5 ans, leur fille à l'imagination débordante qui entraîne, un soir, son père dans une histoire "zarbi" qui lui fait brusquement prendre conscience qu'il est à côté de sa vie, qu'il subit, qu'il passe à côté de l'essentiel qu'il a perdu de vue.

J'ai été touchée par la très belle relation père-fille ainsi que par les interrogations de Fabien, sur sa difficulté de se retrouver et de faire des choix; il passe de la colère à l'abattement; il est largué; peut-il retrouver ses rêves envolés? Que sortira-t-il de cette crise? Les auteurs laissent, de façon originale, le choix au lecteur entre deux scénarios.

Mais les thèmes traités (maltraitance animale, les problèmes de l'hôpital public, les SDF, l'autisme, le bénévolat, les salaires de misère, le milieu snob et méprisant de l'art conceptuel...) sont trop nombreux et donc survolés; l'attention et l'intérêt sont difficiles à fixer. L'ambiance générale qui se dégage de cet album est assez déprimante ce qui n'est pas top quand on n'est pas soi-même au top de sa forme.

Ce livre est un magnifique objet, à la reliure de qualité, au papier épais et doux que j'ai souvent caressé de la paume de la main en tournant les pages, la couverture est magnifique. Mais je n'ai pas été séduite par le graphisme trop brut, voire rageur, à mon goût. Les planches ont des couleurs monochromes qui changent au gré des situations, des sensations et de l'état moral de Fabien passant de du rouge, à l'orange, au jaune, au mauve, au vert et au noir; l'idée est intéressante et originale mais ne m'a pas emballée.

J'ai cependant apprécié de découvrir l'univers et l'imaginaire de Damien Moreau et de Laurent Bonneau même si j'y ai été partiellement hermétique.



Commenter  J’apprécie          170
Ceux qui me touchent

Après avoir traité avec émotion de la mémoire qui se délite dans « Ceux qui me restent », ses auteurs s’insinuent à nouveau avec finesse dans les méandres de l’esprit humain dans « Ceux qui me touchent » et nous ouvrent les yeux sur ses extraordinaires pouvoirs de création. Tout commence comme une simple histoire merveilleuse contée par un père à sa fille, un récit monté de toute pièce au gré de leur imagination et pourtant jamais aucune rêverie n’aura autant été aussi ancrée dans une réalité que nous ne regardons plus. Fabien, homme désabusé par un métier sinistre aux antipodes de sa passion pour l’art prend soudain conscience de l’absurdité de la société qui prône le respect de la nature et de l’homme mais fait preuve de cruauté envers les animaux et ignore les démunis. Le monde se révèle incapable de trouver la beauté dans la simplicité même dans l’art où tout devient alambiqué et complexe. Ceux qui me touchent, ce sont ces êtres qui ont encore la magie dans les yeux comme des enfants et qui s’émerveillent d’un geste, d’un paysage, d’une odeur, d’un sourire et ne se laissent pas envahir par la morosité.

Un superbe album coloré mais sobre qui bouscule et remet en question sur notre façon de voir le monde d’aujourd’hui. Encore une réussite.
Commenter  J’apprécie          172
Ceux qui me touchent

Tout d'abord, même si "ceux qui me touchent" ne m'a pas particulièrement touché, je dois dire que l'objet est très beau. C'est un grand format, les pages sont épaisses et le livre est très soigné. Je remercie Babelio pour cet envoi dans le cadre de l'opération Masse Critique.



J'ai aimé le style de dessin, quasi gribouillé, raturé et réaliste à la fois. J'ai aimé la chromatique et le fait d'avoir un dessin en noir et blanc sur un fond uni qui change de couleur en fonction de l'ambiance.



A la lecture de "Ceux qui me touchent", je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre. Le style de dessin un peu brut et l'ambiance générale amènent une forme de tension, d'urgence. Comme si un drame imminent allait arriver. Comme si.

Le milieu des abattoirs est particulier, assez peu vu en BD et apporte aussi cette atmosphère pesante. J'ai eu le sentiment que le héros étouffait dans les passages en jaune/orange et j'ai ressenti une tristesse infinie dans les passages en bleu/vert.

Puis on bascule doucement mais clairement vers une satire sociale, un message qui, couplé au style graphique, m'a rappelé l'adaptation de Vernon Subutex en BD (en moins farfelu) mais aussi le dernier livre de Nicolas Mathieu "Connemara". Les protagonistes sont des personnes comme tout le monde, avec une vie banale, puis un événement va changer leur vie, ou en tout cas la façon de voir les choses.



C'est un roman graphique original, visuellement réussi et j'ai trouvé la fin assez juste. Mais j'avoue ne pas avoir été particulièrement touché par cette lecture et son message même si je reconnais que le travail des co-auteurs est remarquable .
Commenter  J’apprécie          170




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Damien Marie (710)Voir plus

Quiz Voir plus

La littérature du XIXe siècle (niveau débutant ou jeune public)

Lequel de ces écrivains n'est pas du XIXème siècle ?

Victor Hugo
Honoré de Balzac
Voltaire
Émile Zola

19 questions
276 lecteurs ont répondu
Thèmes : 19ème siècle , littérature , littérature françaiseCréer un quiz sur cet auteur

{* *}