AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Daniel Pennac (2574)


« Nos « mauvais élèves » (élèves réputés sans devenir) ne viennent jamais seuls à l'école. C'est un oignon qui entre dans la classe : quelques couches de chagrin, de peur, d'inquiétude, de rancœur, de colère, d'envies inassouvies, de renoncement furieux, accumulées sur fond de passé honteux, de présent menaçant, de futur condamné. Regardez, les voilà qui arrivent, leur corps en devenir et leur famille dans leur sac à dos. Le cours ne peut vraiment commencer qu'une fois le fardeau posé à terre et l'oignon épluché. Difficile d'expliquer cela, mais un seul regard suffit souvent, une parole bienveillante, un mot d'adulte confiant, clair et stable, pour dissoudre ces chagrins, alléger ces esprits, les installer dans un pré­sent rigoureusement indicatif.
Naturellement le bienfait sera provisoire, l'oignon se recomposera à la sortie et sans doute faudra-t-il recommencer demain. Mais c'est cela, enseigner c'est recommencer jusqu'à notre nécessaire disparition de professeur. Si nous échouons à installer nos élèves dans l'indicatif présent de notre cours, si notre savoir et le goût de son usage ne prennent pas sur ces garçons et sur ces filles, au sens botanique du verbe, leur existence tanguera sur les fondrières d'un manque indéfini. Bien sûr nous n'aurons pas été les seuls à creuser ces galeries ou à ne pas avoir su les combler, mais ces femmes et ces hommes auront tout de même passé une ou plusieurs années de leur jeunesse, là, assis en face de nous. Et ce n'est pas rien, une année de scolarité fichue : c'est l'éternité dans un bocal. »
Commenter  J’apprécie          432
Chaque élève joue de son instrument, ce n'est pas la peine d'aller contre. Le délicat, c'est de bien connaître nos musiciens et de trouver l'harmonie. Une bonne classe, ce n'est pas un régiment qui marche au pas, c'est un orchestre qui travaille la même symphonie. Et si vous avez hérité du petit triangle qui ne sait faire que ting ting, ou de la guimbarde qui ne fait que bloïng, bloïng, le tout est qu'ils le fassent au bon moment, le mieux possible, qu'ils deviennent un excellent triangle, une irréprochable guimbarde, et qu'ils soient fiers de la qualité que leur contribution confère à l'ensemble. Comme le goût de l'harmonie les fait tous progresser, le petit triangle finira lui aussi par connaître la musique, peut-être pas aussi brillament que le premier violon, mais il connaîtra la même musique.
Commenter  J’apprécie          410
Œil dans l'œil, tous les deux. Avec le grondement de la ville en guise de silence. Depuis combien de temps se regardent-ils ainsi, ce garçon et ce loup ? Le garçon a vu le soleil se coucher bien des fois dans l'œil du loup. Non pas le froid soleil de l'Alaska (celui-là, avec sa lumière si pâle, on ne sait jamais s'il se couche ou s'il se lève...), non, le soleil d'ici, le soleil du zoo qui disparaît chaque soir quand les visiteurs s'en vont. La nuit tombe alors dans l'œil du loup. Elle brouille d'abord les couleurs, puis elle efface les images. Et la paupière du loup glisse enfin sur cet œil qui s'éteint. Le loup reste là, assis face au garçon, bien droit.
Mais il s'est endormi.
Alors le garçon quitte le zoo, sur la pointe des pieds, comme on sort d'une chambre.
Commenter  J’apprécie          390
Daniel Pennac
" L'homme qui lit de vive voix s'expose absolument aux yeux de celui qui l'écoute.
S'il ne sait pas ce qu'il lit, il est ignorant dans ses mots, c'est une misère et cela s'entend.
S'il refuse d'habiter sa lecture, les mots restent lettres mortes, et cela se sent.
S'il gorge le texte de sa présence, l'auteur se rétracte, c'est un numéro de cirque, et cela se voit.
Une lecture bien menée sauve de tout, y compris de soi-même. "
Commenter  J’apprécie          392
Daniel Pennac
La question n'est pas de savoir si j'ai le temps de lire ou pas, mais si je m'offre ou non le bonheur d'être lecteur.

(" Comme un roman")
Commenter  J’apprécie          380
...lire était alors un acte subversif. A la découverte du roman s'ajoutait alors l'excitation de la désobéissance familiale. Double splendeur ! O le souvenir de ces heures de lecture chipées sous les couvertures à la lueur de la torche électrique ! Comme Anna Karénine galopait vite vers son Vronski à ces heures de la nuit !Ils s'aimaient ces deux là, c'était déjà beau, mais il s'aimaient contre l'interdiction de lire, c'était encore meilleur !
Commenter  J’apprécie          380
Un après-midi de l’année du bac (une des années du bac), mon père me donnant un cours de trigonométrie dans la pièce qui nous servait de bibliothèque, notre chien se coucha en douce sur le lit, derrière nous. Repéré, il fut sèchement viré : – Dehors, le chien, dans ton fauteuil ! Cinq minutes plus tard, le chien était de nouveau sur le lit. Il avait juste pris le soin d’aller chercher la vieille couverture qui protégeait son fauteuil et de se coucher sur elle. Admiration générale, bien sûr, et justifiée : qu’un animal pût associer une interdiction à l’idée abstraite de propreté et en tirer la conclusion qu’il fallait faire son lit pour jouir de la compagnie des maîtres, chapeau, évidemment, un authentique raisonnement ! Ce fut un sujet de conversation familiale qui traversa les âges. Personnellement, j’en tirai l’enseignement que même le chien de la maison pigeait plus vite que moi. Je crois bien lui avoir murmuré à l’oreille : – Demain, c’est toi qui vas au bahut, lèche-cul.
Commenter  J’apprécie          373
Si vous voulez vraiment rêver, réveillez-vous...
Commenter  J’apprécie          370
... les coloques ont toujours fait plus de cocus que de savants !
Commenter  J’apprécie          363
Daniel Pennac
"Le suicide est une imprudence ".

Vannes 2017 . Daniel Pennac (père de )
Commenter  J’apprécie          363
Ou ce professeur de sciences naturelles, en terminale, à qui je dois mon exclusion du lycée. Se plaignant de ce que la moyenne générale de "cette classe" n'éxcédât pas les 3,5/20, il avait commis l'imprudence de nous en demander la raison. Front haussé, menton tendu, commissures tombantes :
- Alors quelqu'un peut-il expliquer cette... prouesse ?
J'ai levé un index poli et suggéré deux explications possibles : ou notre classe constituait une monstruosité statistique (32 élèves qui ne pouvaient dépasser une moyenne de 3,5 en sciences naturelles), ou ce résultat famélique sanctionnait la qualité de l'enseignement dispensé.
Content de moi, je suppose.
Et fichu à la porte
- Héroïque mais inutile, me fit observer un copain : sais-tu la différence entre un professeur et un outil ? Non ? Le mauvais prof n'est pas réparable.
Viré, donc.
Fureur de mon père, bien sûr.
Sales souvenirs, ces années de rancœur ordinaire !
Commenter  J’apprécie          360
La peur ne te garantit de rien elle t’expose à tout ! Ce qui n’empêche pas d’être prudent. Papa disait : La prudence est l’intelligence du courage.
Commenter  J’apprécie          350
Efforçons-nous de penser juste."Louna est arrivée à terme": pudique optimisme pour désigner ce qui est en fait le début de nouvelles catastrophes. Parce que des jumeaux , ne nous leurrons pas, c'est deux bouches de plus à nourrir, quatre oreilles à distraire, une vingtaine de doigts à surveiller, et des états d'âme en pagaille à éponger, encore et encore! ...... Dés qu'ils auront cinq ans, je les foutrai au turf, les jumeaux! Voilà ce que je ferai! Amputations et mendicité! Et que ça rapporte, Hein! Si vous voulez bouffer autre chose que vos assiettes vides!
Commenter  J’apprécie          340
La mémoire, c’est l’imagination à l’envers.
Commenter  J’apprécie          340
Vendredi 3 mai 1968
44 ans, 6 mois, 23 jours

"La peau vieillit." Cette phrase anodine a fait mouche. C'est une vieille peau, disait maman en parlant des gens qu'elle n'aimait pas (qui aimait-elle ?). Vieille peau, vieille baderne, vieux con, vieille carne, vieux schnoque, vieux débris, vieux machin, vieux croûton, vieux cochon, vieille ganache, vieux dégoûtant : les mots, la langue, les expressions toutes faites laissent entrevoir quelque difficulté à entrer dans la vieillesse d'un cœur léger. Quand y entrons-nous, d'ailleurs ? À quel moment devenons-nous vieux ?
Commenter  J’apprécie          3318
Samedi 3 mars 1979
55 ans, 4 mois, 21 jours

Certains changements de notre corps me font penser à ces rues qu'on arpente depuis des années. Un jour un commerce ferme, l'enseigne a disparu, le local est vide, le bail à céder, et on se demande ce qu'il y avait là auparavant. C'est-à-dire la semaine dernière.
Commenter  J’apprécie          334
L'avenir, c'est la trahison des promesses, monsieur le commissaire, le dernier des députés et le meilleur des amis vous le confirmeront!
Commenter  J’apprécie          330
Un ivrogne, ça raconte n’importe quoi, surtout la vérité.
Commenter  J’apprécie          330
Ce sont rarement les réponses qui apportent la vérité, mais l’enchaînement des questions.
Commenter  J’apprécie          330
D'où ça te vient, cette religion de l'amour, Benjamin? Où est-ce que tu l'as chopée, cette vérole rose? Petits coeurs qui puent la fleur, Ce que tu appelles l'amour.. au mieux, des appétit. Au pis, des habitudes. Dans tous les cas, une mise en scène. De l'imposture de la séduction jusqu'aux mensonges de la rupture, en passant par les regrets inexprimés et les remords inavouables, rien que des rôles de composition. De la trouille, des combines, des recettes, la voilà la belle amour... Cette sale cuisine pour oublier ce qu'on est; Et remettre la table tous les jours; Tu nous emmerdes, Benjamin Malaussène, avec l'amour; Change tes yeux; Ouvre la fenêtre; offre-toi une télé; lis le journal; Apprends la statistique; Entre en politique; Travaille; Et tu nous en reparleras de la belle amour......
Commenter  J’apprécie          330



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Daniel Pennac Voir plus


{* *}