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Citations de Daniel Pennac (2573)


Les horaires de la vie devraient prévoir un moment, un moment précis de la journée,où l'on pourrait s'apitoyer sur son sort [...]un moment parfaitement libre, une plage déserte où l'on pourrait mesurer l'étendue du désastre. Ces mesures dans l'œil, la journée serait meilleure, l'illusion bannie, le paysage clairement balisé.
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Daniel Pennac
Ah ! le temps perdu, ça c'est bien une idée d'adulte !


(Oups ! Citation supprimée par erreur- Merci à tous d'avoir apprécié)
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Aucun avenir.
Des enfants qui ne deviendront pas.
Des enfants désespérants.
Écolier, puis collégien, puis lycéen, j'y croyais dur comme fer moi aussi à cette existence sans avenir.
C'est même la toute première chose dont un mauvais élève se persuade.
- Avec des notes pareilles qu'est-ce que tu peux espérer ?
- Tu t'imagines que tu vas passer en sixième ?
(En cinquième, en quatrième, en troisième, en seconde, en première...)
- Combien de chances, au bac, d'après vous, faites-moi plaisir, calculez vos chances vous-même, sur cent, combien ?
Ou cette directrice de collège, dans un vrai cri de joie :
- Vous, Pennacchioni, le BEPC vous ne l'aurez jamais ! Vous m'entendez ? Jamais !
Elle en vibrait.
En tout cas je ne deviendrai pas comme toi, vieille folle ! Je ne serai jamais prof, araignée engluée dans ta propre toile, garde-chiourme vissée à ton bureau jusqu'à la fin de tes jours. Jamais ! Nous autres les élèves nous passons, vous restez ! Nous sommes libres et vous en avez pris pour perpète. Nous, les mauvais, nous n'allons nulle part mais au moins nous y allons ! L'estrade ne sera pas l'enclos minable de notre vie !
Mépris pour mépris je me raccrochais à ce méchant réconfort : nous passons, les profs restent : c'est une conversation fréquente chez les élèves de fond de classe. Les cancres se nourrissent de mots.
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Un œil jaune, tout rond, avec, bien au centre, une pupille noire. Un œil qui ne cligne jamais. C'est tout à fait comme si le garçon regardait une bougie allumée dans la nuit; il ne voit plus que cet œil : les arbres, le zoo, l'enclos, tout a disparu. Il ne reste qu'une seule chose : l'œil du loup. Et l'œil devient de plus en plus gros, de plus en plus rond, comme une lune rousse dans un ciel vide, avec, en son milieu, une pupille de plus en plus noire, et des petites taches de couleurs différentes qui apparaissent dans le jaune brun de l’iris, ici, une tâche bleue (bleue comme l’eau gelée sous le ciel) là, un éclair d’or, brillant comme une paillette.Mais le plus important, c’est la pupille, la pupille noire !
-Tu as voulu me regarder, eh bien regarde-moi !
…Et c’est quand tout est devenu noir, absolument noir, qu’il découvre ce que personne n’a jamais vu dans l’œil du loup : la pupille est vivante…
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Daniel Pennac
"La lecture vous offre une compagnie, au sens ontologique. On n'est plus si seul que ça, un bon livre en main."
Lire Février 2017
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Et elle pressa sur la détente.
Toutes les idées du blondinet s'éparpillèrent. Cela fit une jolie fleur dans le ciel d'hiver. Avant que le premier pétale en fût retombé, la vieille avait remisé son arme dans son cabas et reprenait sa route.
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- Dis voir, Ben, est-ce que tu pourrais me dire pourquoi cette saloperie de participe passé s'accorde avec ce connard de C.O.D. quand il est placé avant cet enfoiré d'auxiliaire être?
- " Avoir", Jérémy, devant l'auxiliaire " avoir".
- Si tu préfères. Théo est pas foutu de m'expliquer.
- Moi, la mécanique... fait Théo avec un geste évasif.
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— Monsieur Malaussène est demandé au bureau des Réclamations.
Une voix de brume, tout à fait comme si les photos de Hamilton se mettaient à parler. Pourtant, je perçois un léger sourire derrière le brouillard de Miss Hamilton. Pas tendre du tout, le sourire. Bon, j'y vais. J'arriverai peut-être la semaine prochaine. Nous sommes un 24 décembre, il est seize heures quinze, le Magasin est bourré. Une foule épaisse de clients écrasés de cadeaux obstrue les allées. Un glacier qui s'écoule imperceptiblement, dans une sombre nervosité. Sourires crispés, sueur luisante, injures sourdes, regards haineux, hurlements terrifiés des enfants happés par des pères Noëls hydrophiles.
— N'aie pas peur, chéri, c'est le Père Noël !
Flashes.
En fait de Père Noël, j'en vois un, moi, gigantesque et translucide, qui dresse au-dessus de cette cohue figée sa formidable silhouette d'anthropophage. Il a une bouche cerise. Il a une barbe blanche. Il a un bon sourire. Des jambes d'enfants lui sortent par les commissures des lèvres. C'est le dernier dessin du Petit, hier, à l'école. Gueule de la maîtresse : « Vous trouvez normal de dessiner un Père Noël pareil, un enfant de cet âge ? » « Et le Père Noël, j'ai répondu, vous le trouvez tout à fait normal, lui ? » J'ai pris le Petit dans mes bras, il était bouillant de fièvre. Il avait si chaud que ses lunettes en étaient embuées. Ça le faisait loucher encore davantage.
— Monsieur Malaussène est demandé au bureau des Réclamations.
M. Malaussène a entendu, bordel ! Il est même au pied de l'escalator central. Et il s'y serait déjà engagé s'il n'était cloué sur place par la gueule noire d'un canon rayé. Parce que c'est moi qu'il vise, le salaud, pas d'erreur possible. La tourelle a tourné sur son axe, s'est immobilisée dans ma direction, puis le canon a levé le nez jusqu'à me fixer entre les deux yeux. Tourelle et canon appartiennent à un char AMX 30, télécommandé par un vieillard d'un mètre quarante qui manipule l'engin à distance, en poussant des petits gloussements émerveillés. C'est un des innombrables petit vieux de Théo. Réellement très petit, absolument vieux, repérable à cette blouse grise dont Théo les affuble pour ne pas les perdre de vue.
— Pour la dernière fois, grand-père, remettez ce jouet à sa place !
La vendeuse gronde avec lassitude derrière le rayon des jouets. Elle a la gentille tête d'un écureuil qui aurait conservé ses noisettes dans ses joues. Le vieillard crachote un refus d'enfant, son pouce sur le bouton de la mise à feu. Je claque un garde-à-vous impeccable et dis :
— L'AMX 30 est dépassé, mon Colonel, bon pour la ferraille ou l'Amérique latine.
Le petit vieux jette un regard désolé sur son joujou, puis, d'un geste résigné, me fait signe de passer. Le sourire de la vendeuse me dédie un brevet de gérontologie. Cazeneuve, le flic de l'étage, surgit du sol et ramasse le char d'un air rageur.
— Décidément, il faut toujours que tu foutes la merde, Malaussène !
— Ta gueule, Cazeneuve.
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Je fouille le fatras de mes vieux papiers à la recherche de mes bulletins scolaires et de mes diplômes, et je tombe sur une lettre conservée par ma mère. Elle est datée de février 1959.
J'avais quatorze ans depuis trois mois. J'étais en quatrième. Je lui écrivais de ma première pension :

Ma chère maman,

Moi aussi j'ai vu mes notes, je suis écoeuré, j'en ai plein le dot [sic], quand on en est venu au point de travailler 2 h sans arrêt pendant une étude pour récolter un 1 à un devoir d'algèbre que l'on croillait [sic] bon il y a de quoi être découragé, aussi ais-je [sic] tout laché [sic] pour réviser mes examens et mon 4 en application explique sûrement la révision de mon examen de géologie pendant mon cour [sic] de math,
[etc.]
Je ne suis pas assez intelligent et travailleur pour continuer mes études. Ça ne m'intéresse pas, j'attrape mal au crane [sic] à rester enfermer [sic] dans la paperasse, je ne comprend [sic] rien à l'anglais, à l'algèbre, je suis nule [sic] en orthographe, que reste-t-il ?
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(...) une scolarité littéraire bien menée relève autant de la stratégie que de la bonne intelligence du texte. Et un "mauvais élève" est, plus souvent qu'on ne croit, un gamin tragiquement dépourvu d'aptitudes tactiques. Seulement, dans sa panique à ne pas fournir ce que nous attendons de lui, il se met bientôt à confondre scolarité et culture. Laissé pour compte de l'école, il se croit très vite un paria de la lecture. Il s'imagine que "lire" est en soi un acte élitaire, et se prive de livres sa vie durant pour n'avoir pas su en parler quand on le lui demandait.
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Une seule condition à cette réconciliation avec la lecture : ne rien demander en échange. Absolument rien. N'élever aucun rempart de connaissances préliminaires autour du livre. Ne pas poser la moindre question. Ne pas donner le plus petit devoir. Ne pas ajouter un seul mot à ceux des pages lues. Pas de jugement de valeur, pas d'explication de vocabulaire, pas d'analyse de texte, pas d'indication biographique... S'interdire absolument de "parler autour".
Lecture-cadeau.
Lire et attendre.
On ne force pas une curiosité, on l'éveille.
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Daniel Pennac
Le temps de lire est toujours du temps volé. C'est sans doute la raison pour laquelle le métro se trouve être la plus grande bibliothèque du monde.
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On dit que l'arabe est une langue gutturale, voix sèche du désert, râle de sable et de ronces? L'arabe est une langue de colombe, aussi, promesse lointaine des fontaines.
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"Monsieur, j'ai consacré hier deux heures à ne pas faire votre devoir. Non, non, je n'ai pas fait autre chose, je me suis assis à la table de travail, j'ai sorti mon cahier de texte, j'ai lu l'énoncé et, pendant deux heures, je me suis retrouvé dans un état de sidération mathématique, une paralysie mentale dont je ne suis sorti qu'en entendant ma mère m'appeler pour passer à table. Vous le voyez, je n'ai pas fait votre devoir, mais j'y ai bel et bien consacré ces deux heures. Après le dîner il était trop tard, une nouvelle séance de catalepsie m'attendait : mon exercice d'anglais."
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Daniel Pennac
Quand un être cher nous donne un livre à lire, c'est lui que nous cherchons d'abord dans les lignes, ses goûts, les raisons qui l'ont poussé à nous flanquer ce bouquin dans les mains, les signes d'une fraternité.
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Debout devant l'enclos du loup, le garçon ne bouge pas. Le loup va et vient. Il marche de long en large et ne s'arrête jamais.
"M'agace, celui-là..."
Voilà ce que pense le loup. Cela fait bien deux heures que le garçon est là, debout devant ce grillage, immobile comme un arbre gelé, à regarder le loup marcher.
"Qu'est-ce qu'il me veut?"
C'est la question que se pose le loup. Le garçon l'intrigue. Il ne l'inquiète pas (le loup n'a peur de rien), il l'intrigue.
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-Et comment elle t'a fait ça ?
- Les deux pieds dans la gueule, expliqua Manon. Deux fois en trois secondes.
- Karaté, conclut Titus. Nidan geri, si je me souviens bien. Niron geri, peut-être. Une caresse du genre.
- Ses godasses, c'est des fers à repasser ?
- Gnluibedraizarazeazetvigledegiene.
- D'accord, tu lui peteras sa race à cette fille de chienne.
Manin haussa les sourcils :
- Putain, vous apprenez vite, capitaine!
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Daniel Pennac
" Les enfants sont des énigmes lumineuses. "
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Daniel Pennac
« Parlons un peu de lecture à présent. Du fameux rôle de la lecture. Loin de moi l'idée que la littérature soit la panacée absolue contre l'idiotie suiviste ou la consommation hypnotique. (….) Mais tout de même, tout de même, je n'arrive pas à m'ôter de l'idée, que la compagnie de nos auteurs favoris nous rendent plus fréquentables à nous-mêmes, plus aptes à préserver notre liberté d'être, à contrôler notre désir d'avoir et à nous consoler de notre solitude. C'est cette liberté qu'il est prudent de rendre à nos élèves les plus fâchés avec la littérature en les réconciliant avec la lecture. 
Pourquoi, d'ailleurs, sont-ils tellement fâchés avec la lecture ces jeunes gens? 
(…) Je vous propose l'exercice suivant. Au début de la prochaine année scolaire, postez-vous à la porte d'une librairie :
Vous constaterez que la plupart des élèves y entrent comme dans une pharmacie. Ils se présentent au libraire avec la fameuse "listes des livres à lire", comme un patient avec son ordonnance. Ils voient le libraire disparaître dans son officine, la liste à la main, et ressurgir derrière la pile des oeuvres "prescrites". Soit dit en passant, le terme de "prescription" ne me paraît pas le mieux approprié s'agissant de l'incitation à la lecture. Il sent trop sa potion: "Vous me lirez trois gouttes de Mallarmé (à chaque auteur français faire correspondre un italien) matin et soir dans un grand verre de commentaire... Un mois d'Education sentimentale et nous verrons ce que donnent vos analyses... La Recherche du temps perdu, n'interrompez surtout pas le traitement avant la fin."
Abominable. 
Leur scolarité achevée, la plupart de ces jeunes adultes considéreront tout juste ces auteurs comme des noms donnés par le programme scolaire à l'obligation de lire. Loin de protester le jour où un fast-food remplacera la librairie ou la bibliothèque de leur quartier, ils y déposeront leur progéniture pour aller passer ailleurs que dans les livres ce moment de liberté. 
Cette indifférence à la lecture est aussi la conséquence d'un enseignement médico-légal de la littérature. Mais nous en concluons hâtivement qu'ils ne s'intéressent pas à la littérature - et, partant, qu'ils "n'aiment pas lire." 
En réalité, comme certains médecins spécialistes s'intéressent davantage à la maladie qu'aux malades, il arrive trop souvent que nous autres pédagogues menions bataille pour la littérature sans nous soucier de faire des lecteurs. Nous nous posons en gardiens d'un temple dont nous déplorons qu'il se vide mais en nous félicitant qu'il soit si savamment gardé. 
Gardiens du temple
Gardien du temple, c'est ce qui se recrute le mieux, c'est ce qui est le plus facile à former. (…)
Prenez un livre, un auteur, un mouvement littéraire, aspirez sa substantifique moelle, vitrifiez-la, décrétez-en le culte, vous aurez votre temple et avec les diplômes nécessaires et un peu d'entregent, vous en deviendrez le gardien. 
Les gardiens du temple se reconnaissent à ce qu'ils décrètent et déplorent. 
Décrètent l'absolue nécessité de lire mais déplorent la mort de la littérature (Ah la la, plus un romancier digne de ce nom depuis Gide (ou Svevo)! Plus un philosophe depuis Sartre (ou Croce)! Rien de neuf depuis le surréalisme (ou le futurisme)...), décrètent l'excellence, déplorent la médiocrité, comme ce critique littéraire qui, tous les ans s'exclame invariablement: Six cents nouveaux romans et pas un qui soit lisible! 
Les Gardiens du Temple décrètent et déplorent... Mais ne font rien passer.
(…) 
On l'aura compris, gardien du temple, ce n'est pas une fonction, c'est un état d'esprit, un rôle. C'est la lecture limitée à la connaissance, la connaissance considérée comme une propriété privée et la place de concierge garantie à vie. Le gardien du temple cultive la certitude qu'aujourd'hui la transmission ne peut plus se faire... 
Les passeurs
D'autres, heureusement - professeurs, critiques littéraires, libraires, bibliothécaires - préfèrent être des passeurs. Et c'est beaucoup plus qu'un rôle, c'est une manière d'être, un comportement. Ceux-là, les passeurs, sont curieux de tout, lisent tout, ne confisquent rien, et transmettent le meilleur au plus grand nombre. 
Passeurs sont les parents qui ne songent pas seulement à armer leurs enfant de lectures utiles pour les diplômer au plus vite, mais qui, connaissant le prix inestimable de la lecture en soi, souhaitent en faire des lecteurs au long cours.  
Passeur est le professeur de littérature dont le cour vous donne envie de vous précipiter dans la première librairie venue. (…) 
Passeur est le libraire qui initie ses jeunes clients aux arcanes de la classification, qui leur apprend à voyager entre genres, thèmes, auteurs, pays, époques... qui fait de sa librairie leur univers. 
Passeurs les universitaires qui ne se bornent pas à former des chirurgiens en littératures, mais des éveilleurs de conscience, des allumeurs d'émerveillement. 
Passeur le bibliothécaire capable de raconter les romans présents sur ses étagères! 
(…) Passeur, le critique littéraire qui lit tout, découvre et donne à lire le jeune romancier, le jeune dramaturge, le nouveau poète, ou qui ressuscite la grande plume oubliée, au lieu de se rengorger dans sa vanité de fossoyeur raffiné. 
(…) La lecture nous est une compagnie qui ne prend la place d'aucune autre et qu'aucune autre compagnie ne saurait remplacer. Elle ne nous offre aucune explication définitive sur notre destin mais tisse un réseau serré de connivences entre la vie et nous. Infimes et paradoxales connivences qui disent le paradoxal bonheur de vivre alors même qu'elles éclairent l'absurdité tragique de la vie. En sorte que nos raisons de lire sont aussi étranges et personnelles que nos raisons de vivre.  
Oui, telle est la paradoxale mission du passeur de livres: offrir à chacun de nous le plaisir secret d'être le Gardien de notre propre Temple.  (…)»
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- L'insomnie est une illusion de feignant, Malaussène, on dort toujours plus qu'on ne le croit, dans la vie.
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