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Critiques de Eduardo Mallea (37)
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Cendres

Cendres d’Eduardo Mallea

Quarante quatre jours que l’incendie faisait rage dans la montagne, la chaleur était insupportable, le lit du ruisseau ne contenait plus que des cailloux et un mince filet d’eau, Nicanor Cruz éclatait de rire c’était sa façon de pleurer. Agata Cruz était sur la terrasse à observer la sécheresse, les agapanthes qui mouraient et les fourmis qui montaient à l’assaut de la maison. La sécheresse dévastait tout, la situation empirait d’année en année. Estaurofilo, le simple d’esprit s’occupait des trois chevaux efflanqués. Quinze ans qu’Agata et Nicanor vivaient ensemble, jamais ils n’avaient semblé aussi loin de l’autre, murés qu’ils étaient dans leur amertume, qui aurait pu les rapprocher, mais c’étaient des amertumes qui divergeaient. Le soir devant cette terre de désolation, elle se souvenait de son enfance, sa mère morte en la mettant au monde, son père qui venait de Suisse, médecin sans clients ou presque, dévasté par ce décès. Il avait fait le mieux qu’il pouvait mais l’alcool remplaçait trop souvent l’action. Agata s’ennuyait, rêvait au prince charmant. Nicanor s’inscrivit dans le cercle des intimes du docteur, il passait tous les jours puis un jour il lui prit le bras et lui dit »Agata, je désire vous épouser » et elle lui répondit «Je ne suis pas un animal bien gai ». Elle était lasse d’attendre la perfection qui ne venait pas. Quand elle découvrit l’estancia de Cruz, elle crut qu’elle allait aimer cet endroit, 1000 hectares de prairies et 200 hectares de champs semés de céréales. Mais les récoltes furent médiocres, il décida d’ensemencer la totalité des champs, et puis au moment où tout semblait au mieux, survint la Saint Martin et ses gelées. De ce jour il ne se parlèrent plus directement, ils rentrèrent dans une sorte de vie animale.



Encore un livre sur l’incommunicabilité des êtres qui se murent progressivement, insensiblement, qui n’ont pas été habitués à parler, à échanger et pourtant, à un moment donné, il aurait suffi d’un mot, d’un geste pour abaisser les barrières qui s’étaient dressées. Mallea est un magicien des mots, son texte est ciselé, impressionnant.
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Chaves

Chaves d’Eduardo Mallea

C’est un lundi de fin mars qu’il arriva à la scierie, il cherchait du travail, le contremaître lui en fournit, agacé par le mutisme de Chaves, qui délivrait des réponses brèves à ses questions. Il l’avertit des risques du travail, des exigences de rendement, il lui trouva une chambre libre chez un représentant de commerce. Chaves commença à travailler, constata l’état de ses mains, de toute évidence il n’avait jamais fait ce genre de travail. Les premiers jours il rentrait directement dans sa chambre après sa journée, il parlait toujours aussi peu et de la fenêtre il observait et écoutait les bruits. Puis il explora le village, commença à fréquenter la taverne, taiseux, quelques mots par ci par là, insuffisants pour satisfaire les curieux qui le questionnaient. Peu à peu ils l’oublièrent. Il était habitué, on ne comprenait pas son extrême réserve, on lui prêtait des intentions secrètes, nuisibles. Mais il savait qu’on ne l’oubliait pas vraiment, que tôt ou tard les ennuis arriveraient, il avait déjà connu cela. Avait il déjà parlé quand il était plus jeune? Non mais oui, une fois, lorsqu’il avait rencontré Pure, qu’ils s’étaient fiancés, il avait rassemblé toutes ses forces pour faire sortir de son corps tous les mots qu’il contenait, il avait parlé, il savait confusément que s’il ne le faisait pas, l’étudiant dont Pure lui parlait régulièrement pourrait être un problème, alors il avait parlé, il n’avait jamais imaginé une telle logorrhée de sa part…



Un très court roman de 130 pages d’une incroyable puissance. Entre présent et passé on découvre l’histoire de Chaves, ses failles, sa passion pour Pure, ses drames qui l’ont mené dans cette scierie loin de tout, mais où il y a toujours trop d’hommes qui ne peuvent comprendre sa différence. Je vous conseille ce petit chef d’œuvre.
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La ville au bord du fleuve immobile

La ville au bord du fleuve immobile d’Eduardo Mallea

Un dialogue entendu dans la rue, « Hommes d’Amérique, hommes d’Argentine qui sont sur le point de se mettre au monde eux mêmes ». L’autre ne comprend pas. Dans ces deux pages qui servent d’introït à ce livre, Eduardo Mallea pose les bases des neuf récits qu’il va développer sur l’homme, la ville, la solitude, neuf portraits comme celui



d’Avesquin, perdu depuis qu’Eva est morte à Athènes, qui erre dans une ville muette avec son costume élimé, observateur du port, avec son accent espagnol qu’il ne peut pas masquer.



Ou celui de Solves, esprit d’élite, toujours songeur, s’abandonnant « au rythme capricieux de sa fantaisie »que Christiana Ruiz, créatrice de décors de théâtre, célèbre, avait tenté de changer sans succès jusqu’à ce que ce matin là elle ne trouva plus Solves dans sa chambre, elle s’y était préparée, elle avait réservé une petite partie de son cerveau, toute petite, pour sa tristesse.



Peut-être celui de Carlos qui arrive à la Gare du Nord, son ami Venolia l’attend, il a tout organisé, un dîner des filles jeunes et moins, une belle soirée en perspective. Carlos a passé deux ans loin de tout près de la cordillère où il s’échappait régulièrement. Il écrivait tous les jours et la ville lui manquait trop, il laissa Alma, sa femme, inquiète et le voilà dans la ville, il court, s’agite à droite à gauche, incertain, puéril et indécis, mais que veut il à la fin.



Et que dire de ce couple incapable de savoir, en buvant leur whisky au bar, s’ils vont honorer l’invitation d’Ema, tout en sachant qu’ils iront, pour des raisons différentes, jalousie, obligation.



Quant à Ana Borel, qui travaillait seule avec madame Saviano, et lui tenait sa comptabilité, elle vivait avec un père mutique, sa mère était partie et quand elle se maria avec Benes, rien ne changea pour elle, il y avait toujours des copains le soir et elle était seule, si seule.



Jacobo Uber, lui, cultivait une forme de souffrance, incapable de communiquer avec ceux qu’il ne connaissait pas, il portait en lui « une masse d’air vicié » dont il ne pouvait se débarrasser. Et surtout il trainait cette sensation permanente d’inutilité.



Serena Barcos est une jeune femme mince, élancée, un beau visage, elle travaille dans un laboratoire de recherche et y met toute son énergie. Elle est régulièrement courtisée mais son attitude hautaine et son rire sardonique en ont blessé plus d’un. Elle a horreur du côté animal des relations sexuelles. Un jour, pourtant, après un dîner avec Colmar, un médecin qui passe au laboratoire régulièrement, elle s’interroge sur ses sentiments, peut-être est il sincère?



Il était au bar, il ne savait pas pourquoi il était là, pourquoi il avait accepté de les rejoindre, pourquoi il répétait toujours les mêmes comportements. Sa vie il aurait pu la tenir toute entière dans son poing, c’était pathétique, il connaissait déjà la suite depuis qu’il était en Amerique, le restaurant avec terrasse, la langouste, les babillages, la politique, encore et toujours…



Durcal avait rendez vous avec Berta, ils ne s’étaient pas vus depuis des années. Ils se racontèrent leur vie, leur lassitude, leurs insuffisances. Il sortit du restaurant plein de bonnes résolutions, il lui fallait se débarrasser de sa raideur, il était envahi par cette pensée et puis au fur et à mesure de sa marche, tout s’estompait…



Tout au long de ces portraits d’hommes et de femmes, argentins ou américains, Mallea dépeint la solitude, cette solitude qui nous empêche de mettre en œuvre, de réaliser un idéal de vie. L’univers de Mallea est assez sombre sans être désespéré, son écriture est d’une grande richesse.

Eduardo Mallea est né en 1903 à Bahia Blanca en Argentine, mort en 1982 à Buenos Aires. Il a écrit près de 40 romans essais ou pièces de théâtre dont six ont été traduits en français.
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La ville au bord du fleuve immobile

Voilà 9 nouvelles en 260 pages, écrites par Mallea entre 1931 et 1935 (né pour rappel en 1903).



Après avoir lu sur les dernières semaines Cendres, Chaves, Dialogues des silences et Les Rembrandt, je m'étais déjà interrogé sur la personnalité et les luttes intimes de ce magnifique auteur argentin. Sachant que le présent recueil a été écrit bien avant ces différents livres, je m'interroge d'autant plus.



Quel homme faut-il être, ou peut-être quelles épreuves a-t-il dû traverser pour avoir une telle vision de l'homme abandonné à sa solitude et à son destin? Ses personnages sont voués, non... condamnés!, à la tragédie, à la souffrance, mais aussi à la rédemption.



Une nouvelle fois, nous faisons face à des couples désabusés, des adultes jeunes, solitaires et reclus dans leur mutisme, une récurrence de pères alcooliques, une profonde prise de conscience de la vacuité des hommes, de la société, du monde. Il y a certainement beaucoup de l'auteur dans ces nouvelles, du moins si l'on en croit Lisardo Pibida dans la postface du livre.



Ce livre n'est pas celui avec lequel je découvre Eduardo Mallea. Pourtant, à ceux qui ne connaissent pas encore cet auteur, je conseillerai de commencer par ce livre. En effet, découvrir dans un 2ème temps des livres tels que Cendres et Chaves seront certainement mieux compris à la lumière de ses 1ers écrits. La parole de Mallea, faite de silence, encore à ses balbutiements ici, atteindra son acmé dans les écrits suivants.
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Chaves

Ce très court roman d'Eduardo Mallea, auteur argentin du XXe siècle, dresse le portrait de Chaves, un homme silencieux et taciturne qui arrive dans une petite ville argentine du nord de la Patagonie.



Le principal attribut du personnage de Chaves est donc ce mutisme quasi-permanent, qu'il n’interrompt que rarement pour répondre de manière extrêmement brève et factuelle à celui qui l'interrogerait. L'auteur alterne les chapitres au "présent" et ceux reprenant le passé du héro. À travers ce dernier, c'est une histoire de silence, de solitude et d'une résignation fataliste qui s'exprime, c'est aussi une réflexion sur le rejet de l'autre et sur la superficialité des rapports humains : Chaves est seul et incompris mais au moins le sait il, les autres personnages (comme nous-même) ne sont ils rien d'autre que des solitaires qui s'ignorent ?



L'histoire est simple émouvante et forte. Elle pourra rappeler au lecteur francophone le roman l'Étranger publié 11 ans plus tôt par un certain Albert Camus : difficile effectivement de ne pas faire un lien entre les deux ouvrages tant les thématiques sont similaires. Néanmoins, une différence fondamentale subsiste entre les personnages : celui de Meursault (l’Étranger) est passif avant tout car le sort des autres et dans une certaine mesure le sien propre l'indifférent, Chaves lui, ressent les émotions mais par fatigue et par un fatalisme sur l'incommunicabilité entre lui et le reste du monde, renonce à s'exprimer.



Le style et le rythme du livre d'Eduardio Mallea s'adaptent parfaitement à son personnage : plutôt lent et parfois contemplatif, il est épuré, simple et économe en mots, sans aucune fioriture. Au fur et à mesure des pages, on peut qu’être pris d’empathie et parfois de pitié pour le personnage principal et ses proches.



Bref, en à peine plus de 80 pages, Eduardo Mallea nous offre une belle pépite : un livre intelligent et émouvant aussi court que marquant.
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Dialogues des silences

Dialogue des silences d’Eduardo Mallea

Pinas, qui vivait à Buenos Aires, avait été surpris de recevoir cette invitation formelle de Gerardo Durán, fils d’un juge de la cour suprême. Ils s’étaient connus en suivant les cours de droit, ils avaient de nombreuses idées communes sur bien des sujets et Pinas s’était mis à fréquenter la maison des Durán régulièrement et il fit a connaissance de la tante Ifigenia, la plus impressionnante personne de cette demeure. C’était une vieille fille , antique, avec une coiffe en dentelle, mais le plus étrange était cette broche qui représentait deux serpents en train de copuler, obscène. Ils furent ainsi amis mais sans jamais devenir intimes. Pinas aimait la vie et les hommes, Gerardo était en retrait, méfiant. A un certain point, ils se voyaient tous les jours, leur amitié se développait sans jamais que s’introduise une once de camaraderie et Pinas s’était habitué aux questions d’Ifigenia qui vivait dans un monde éteint. Son autorité sur la maison était indiscutable. A la fin de leurs études, Pinas voyagea, Durán ouvrit son cabinet et ils continuèrent à se voir régulièrement. Au retour d’un déplacement aux Bahamas, Pinas trouva son ami marié à Josefina, fille d’un aristocrate sans fortune, intelligente mais avec laquelle Pinas se trouva souvent en désaccord. Gerardo semblait pour la première fois heureux, Ifigenia était morte. Cette légère tension avec Josefina fit que Pinas s’éloignait progressivement, ne vint plus chez eux, les nouvelles devinrent sporadiques, ils se croisèrent à la sortie de spectacles puis Pinas, toujours célibataire, vécut sa vie, voyagea et oublia. Cinq ans plus tard il apprit que Josefina était morte, il alla présenter ses condoléances puis la séparation se réinstalla. C’est la raison pour laquelle Pinas, confortablement installé dans le train qui l’amenait chez Gerardo, s’interrogeait sur cette étrange invitation, il n’avait eu aucune nouvelle de lui depuis 10 ans après le décès de Josefina.

Mallea explore les relations humaines, l’usage de la parole, du verbe, du fait que les mots vont s’entrelacer de l’un à l’autre ou pas. Un saupoudrage de surnaturel va agrémenter les retrouvailles de ces deux vieux amis d’adolescence, mais pour que la communication passe il faut un effort mutuel et de compréhension, alors Gerardo et Pinas pourront ils faire tomber cette couche de verre qui les a, jusqu’à présent, empêché de vraiment se parler. En ont ils seulement envie ou se laisseront ils aller, une fois de plus, sur les sujets sans risques et sans intérêts? Magistral.
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La barque de glace

Je termine ma découverte d’Eduardo Mallea par un 6ème livre sur quelques semaines. Il s’agit de livres que j’ai pu me procurer via un site d’occasion car malheureusement ces livres ne semblent plus édités.



La majorité de son travail n’a pas été traduite de l’espagnol. Le 1er livre qui a été traduit en français est ‘La barque de glace’.



Et je dois bien avouer que j’ai eu un énorme coup de cœur pour ce livre, sachant que cela fait plusieurs semaines que je suis admiratif face à cet auteur argentin tombé dans l’oubli. J’aime tellement ce livre que je viens de remplacer ‘Cendres’ dans mon top 6 pour une île déserte par celui-ci.



Alors que dans ses œuvres plus précoces Mallea traite beaucoup de la solitude et du silence entre les êtres, ici, il me semble que le sujet principal est le temps qui s’écoule.



Le récit fait de 9 histoires enchevêtrées sont comme une investigation temporelle. Nous sommes confrontés à une vision kaléidoscopique de la réalité et de la vie d’où se dégagent les éléments essentiels de la conception de la vie et de l’homme chez Mallea. Cette chronologie disloquée permet au temps de devenir un protagoniste essentiel du récit.



On parle ici de relations entre un homme et son épouse, de relations de cet homme avec ses fils, d’histoires d’un grand oncle… Tout est relaté sous la forme de souvenirs. L’homme plonge dans son passé pour établir un dialogue qui soulage sa solitude et donne un sens à sa vie. Car entre les êtres, aucune communication n’est possible, c’est le silence. Ce silence est le symbole de la solitude de l’homme. Le silence est un refuge contre les désillusions car la parole est trompeuse. Les mots sont traîtres, les silences rapprochent ; voilà bien un thème cher à Mallea.Il suffit de relire Chaves pour s’en rendre compte.



Point intrigant : l’administration où travaille le père possède un côté kafkaïen : on n’en sait rien, mais il y est fait sans cesse allusion. Le père s’y rend inlassablement, rappelant le mythe de Sisyphe. On y retrouve un certain aspect ‘absurdité du monde’ que je pense également être un thème cher à Mallea.



La barque de glace… La vie est une embarcation capricieuse… Mais surtout n’hésitez pas… montez à bord de cette extraordinaire barque de glace, vous ne le regretterez pas.

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Les Rembrandt

Après le 'Dialogues des silences' qui m'a introduit dans l'oeuvre de Mallea voici une dizaine de jours, je viens de terminer ces 2 nouvelles totalisant 100 pages.



J'ai retrouvé la touche si caractéristique de cet auteur argentin. Une langue ciselée, suggérant assez vite dans la description de certains des protagonistes (Mona, dans la 1ère nouvelle, et Berta dans la 2ème) un sentiment de mal-être mal défini, une certaine amertume.. Cela crée un climat très particulier et je me réjouis de retrouver ce sentiment dans les oeuvres suivantes... Je m'attelle maintenant à 'Cendres'.



J'ai beaucoup aimé ces 2 nouvelles, qui sont vraisemblablement mineures dans l'oeuvre de Mallea. Elles sont un cran en -dessous du 'Dialogues des silences', mais valent certainement le détour.
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Dialogues des silences

Dialogue des silences est un court roman qui nous raconte l’amitié austère mais sincère qui unis deux Argentins de Buenos Aires : Durán et Pinas. Ce livre nous parle d’abord de ce lien (C’est d’ailleurs le titre original du roman : El vinculo) qui va ensuite s’effriter au fur et à mesure des années, particulièrement après le mariage de Durán. Une décennie passe, et un jour Pinas reçoit l’invitation de Durán, devenu veuf, qui propose de le recevoir dans sa maison de campagne. C’est ensuite l’histoire d’une rencontre impossible entre deux solitudes. Progressivement, Pinas se rend compte du fossé qui le sépare de son ancien ami mais aussi de ses autres contemporains.



Dans un style remarquablement sobre et économe en mots, Mallea nous conte l’histoire d’une tragique descente intérieure lors de laquelle Pinas va se défaire de ses illusions et réaliser l’étendue de sa solitude. On y voit aussi une critique des villes et du monde « moderne » où l’on se croise dans se regarder, où l’on se parle sans s’écouter. Comme pour Chaves (roman qu’il publiera 7 ans plus tard), Eduardo Mallea offre un récit puissant et fataliste sur le thème de l’incommunicabilité entre les êtres.



Un roman pas très « feel good » mais touchant et intense.



PS : Merci à Bookycooky pour sa critique qui m’a décidé à découvrir cette petite perle.

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Dialogues des silences

Au détour d’une allée de la bibliothèque municipale mes yeux se portent sur ce tout petit roman (80 pages), au titre assez surprenant.

Je lis le quatrième de couverture et découvre qu’il d’agit d’un auteur argentin.

Je trouve la littérature sud-américaine toujours étonnante, un brin fantastique, une mélancolie latente ou une tristesse profonde donc je me laisse tenter. Parfois j’aime et parfois non.



L’écriture est très belle et en même temps l’auteur est avare de mots, laisse le lecteur déchiffrer, réfléchir, se questionner.

Une lecture qui demande de la concentration, qui est sacrement triste.

Pour résumé ce roman je dirais, parler c’est bien beau mais pour dialoguer il faut être au moins deux, sans dialogue pas de vie.
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Chaves

Je connais Eduardo Mallea... depuis 2 semaines.



Chaves est le 4ème roman que je découvre de cet auteur incroyable. Et je l'apprécie toujours autant, voire de plus en plus!



Chaves est une courte nouvelle de 80 pages, parfaitement synthétisée par les commentaires précédents. Je ne peux qu'encourager les membres de Babelio à se plonger dans l'univers si particulier de Mallea. Il est bien malaisé de définir le concept de littérature; mais si je devais en donner un exemple, je citerais sans hésiter cet auteur argentin.
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Cendres

Vraie littérature par un auteur reconnaissable dès les premières pages. Tout est introspectif, avec un style aride comme le désert.



Cendres ou le récit d'une fleur qui se fane dans le désert, d'une femme dont l'intelligence et la beauté n'ont pour toute compagnie que l'indifférence d'un père alcoolique, d'un époux taciturne, d'un amant égoïste. Au terme d’un long monologue intérieur, cette femme va tomber dans l’ennui, le désespoir puis la folie.



Il est curieux de voir comme Mallea semble amené à faire tourner en boucle dans ses romans des héros solitaires, silencieux, malheureux, en marge de la société. Ses thèmes récurrents de solitude physique et psychique font pourtant de ses œuvres des œuvres d’art.



Entre les êtres, aucune communication n‘est possible. C’est le silence. On ne peut manquer de percevoir dans l’œuvre de Mallea la référence constante au silence comme symbole de la solitude de l’homme. Chez Mallea, le silence est consistant.



Ce livre est admirable et m’accompagnera longtemps. Je ne peux que vous le conseiller. J’ai été obligé de l’acheter d’occasion car il ne semble plus édité.

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Les Rembrandt

Les Rembrandt d’Eduardo Mallea suivi de la Rose de Cernobbio.



Dés qu’il descendit du train à son arrivée à Amsterdam, il pensa » il faut que je vois les Rembrandt ». Il avait été envoyé par un journal argentin pour couvrir l’actualité des jeux olympiques avec deux de ses collègues qu’il retrouva un peu plus tard. Sa passion pour Rembrandt n’était pas partagée, la rencontre avec des femmes locales semblait plus les passionner. Il va également croiser un sportif belge qu’il connaissait bien, complètement cramé suite à un entraînement trop intensif imposé par son entraîneur et ils vont se retrouver le soir avec deux jeunes filles, la « fille de Delft »et « Mona ». La première c’est lui qui l’avait rencontrée dans un café et elle lui avait parlé de Mona pour laquelle elle s’inquiétait car »elle ne pouvait rester seule ». Pour la sortir de cet état il fait le projet de l’amener voir les Rembrandt au Rijks-museum…



La Rose de Cernobbio.

Berta n’avait jamais pu savoir qui de son grand-père ou de son arrière grand père avait acheté la maison, son père entrait dans de telles colères sur le sujet qu’elle avait renoncé. Sa mère était morte. Elle avait du abandonner l’école à huit ans et s’occuper progressivement des fleurs à la boutique, ses interlocuteurs étaient les pieds de bégonia ou les semis de giroflées, la parole humaine était rare et si elle émanait de son père elle suintait la peur et la rancoeur. Quand il rentrait ivre du bistrot, il mettait un antique gramophone à fond avec le seul enregistrement qu’il avait. Puis, arrivant à l’adolescence, observant plus finement son père, elle crut discerner l’origine de ses maux, l’arrivée sans cesse différée des « roses de Cernobbio ». Le nom du magasin de fleurs était sans équivoque, l’Attente!





Si la difficulté ou l’impossibilité de communiquer reste une des clés dans ces deux nouvelles, c’est l’attente qui est au centre de ces histoires. Attente pour visiter un musée lors d’un séjour professionnel, attente qui se poursuit sur des années et se transmet dans une famille pour une rose fabuleuse. Une fois encore la magie opère avec Mallea.
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Dialogues des silences

J’ai découvert ce court roman en parcourant la page du bison... Et quelle découverte !



Un magnifique moment d’introspection, de plaisir littéraire voire quasiment philosophique.



Admirablement écrit et traduit de l’espagnol. Un de ces livres qui, une fois lu, vous laisse ce sentiment d’avoir réfléchi à la vie, à la mort, aux relations inter-personnes... bref à soi-même. On se sent presque compris par Mallea.
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Les Rembrandt

Ce livre comporte deux nouvelles d'Eduardo Mallea, auteur argentin, parues en 1970 : "les Rembrandt" et "La Rose de Cernobbio". Deux nouvelles qui ont pour point commun l'attente de quelque chose qui surviendra, ou pas...

Dans "Les Rembrandt", le narrateur ne cesse de répéter "Je dois absolument voir les Rembrandt", phrase qui inaugure la nouvelle et qui reviendra la ponctuer, comme un refrain. Nous sommes en 1928 et le narrateur, journaliste argentin venu couvrir les Jeux Olympiques, a cette obsession. Il rencontre Mona, la jeune fille de Delft avec laquelle il découvre Amsterdam. A la façon du peintre convoité, Mallea nous livre une peinture de cette jeune femme et de cette ville.

Dans "La Rose de Cernobbio", Mallea raconte l'histoire de Berta, la fille d'un fleuriste qui attend la rose éponyme. Berta est sûre que l'arrivée de cette fleur à la boutique signera sa fin. Dans l'atmosphère étouffante de la boutique, le lecteur suit la destinée de ce personnage...

Deux portraits ciselés de personnages qui m'évoquent les héros balzaciens...
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Chaves

Être réservé est suspect, on vous prend soit pour un demeuré, soit pour quelqu'un qui se croit supérieur. On ne cherche pas à connaître vos raisons. Pourquoi Chaves est-il quasi muet? Est-ce son passé de vendeur bonimenteur qui l'a écœuré, ou bien, la douleur de son passé? Sans doute tout cela... Mais au nom de quoi faudrait-il confier ses pensées profondes à des inconnus ignares, ou potentiellement malveillants?



La jeune fille avec qui Chaves va se marier, comme lui, semble détachée des choses banales de la vie auxquelles les gens attribuent une valeur décisive. L'auteur lui a donné pour prénom Pure. Sûrement pas par hasard.



Pure tombe gravement malade. Chaves consulte les médecins les plus réputés de la ville. Ceux-là maîtrisent l'art du discours, et le résultat n'en est que plus tragique: des efforts d'éloquence pour justifier que le cas de Pure ne les intéresse pas vraiment, n'est pas digne d'eux.



Vous aussi vous avez certainement subi des conversations insipides. "Dans un monde où personne ne répond à personne, personne cependant n'accepte qu'on refuse de lui répondre", nous dit Eduardo Mallea. De nos jours, où chacun étale sa vie sur les réseaux sociaux, court après les "likes", c'est encore pire. On vous prend pour un demeuré si vous n'entrez pas dans ce jeu. Et pourtant, se déconnecter, parfois, ça fait du bien. Alors j'arrête... pour aujourd'hui !
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Chaves

C'est l'histoire intéressante d'un taiseux qui choisit le mutisme pour vivre son intériorité sa communion avec le fleuve, la Nature de son pays: la Patagonie.

Il se lance dans une logorrhée par 2 fois par amour pour éloigner la mort, le néant comme une fuite en avant , pour se " sauver" et protéger les 2 êtres aimés.



Finalement il revient au silence même si celui -ci a causé son isolement social et psychologique : d'abord transparent aux autres , il est perçu comme l'étranger , le suspect , le danger .

Cet anti héro a préféré le mutisme à la médiocrité et l'adversité.





Eduardo Mallea contemporain de JL Borges , est un auteur inconnu en France par les éditeurs qui l'ont laissé dans l'ombre .



C'est un roman profond de l'extrême solitude.

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