Ce livre a tout d'abord été une magnifique rencontre avec une auteure, avec son style tellement fluide et chaleureux que j'ai pensé à Joyce Maynard, ces auteurs qu'on lit mais qu'on a l'impression d'écouter tellement la plume est une évidence.
Elizabeth Day s'appuie sur son podcast How to fail with Elizabeth Day, ses invités ou les gens qu'elle a été amenée à interroger durant sa carrière de journaliste (Anne sinclair, Robert Pattinson, Gina Miller, Phoebe Waller-Bridgepour, Nicole Kidman.. ) pour revenir sur le rôle et l'image de l'échec dans sa vie à travers la thématique du couple, du travail, de l'amitié, la fertilité.
Le livre est riche de références à son expérience mais également de références culturelles ou d'actualité pour étayer l'image de l'échec, plus particulièrement le regard féminin sur l'échec, une expérience ou une crainte plus lourde pour les femmes conditionnées très jeunes à la peur de ne pas réussir, pour lesquelles le sentiment de colère n'est pas très approprié.
Elle nous parle de manière décomplexée de l'échec, des siens, nous révélant son intimité pour démystifier cette épreuve, comment l'échec peut être obnubilant au point de s'oublier et de guider nos actes, à travers la volonté de plaire à tout prix ou comment elle peut devenir un point de départ ou de changement.
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L'art d'échouer. Tout un programme. Des choses dont on ne parle pas, mais alors pas du tout, surtout pas dans notre société. Partout, l'on ne voit que réussite, quel que soit le niveau : ouvrez le moindre magazine, le moindre compte instagram, et vous verrez des réussites à tout point de vue, que ce soit la nouvelle recette de cuisine, votre mariage ou la naissance de bébé (forcément parfait lui aussi).
Alors oui, Elizabeth Day, dont j'avais déjà apprécié un des romans, dénote, détonne dans cette univers, quand elle crée un podcast où elle demande à ses invités de parler de ses échecs, où elle-même parle de ses échecs, dont le plus grand est sans doute le fait de ne pas avoir pu devenir mère. Oui, de nos jours où on nous dit en long, en large et en travers "un enfant quand je veux", on ne vous montre pas, ou très rarement, le protocole à suivre lors d'une fécondation in vitro, les échecs, et la fausse couche toujours possible - c'est ce qui est arrivée à l'autrice, qui ne cache pas les douleurs éprouvées (physique et morale).
Elle montre aussi que l'échec n'est pas une fin, mais peut être le point de départ d'autre chose. Elle montre aussi que l'échec est ce que l'on ressent soi, et qu'il ne faut pas laisser le regard des autres vous affecter. Plus facile à dire qu'à faire, et l'autrice a effectué un long parcours pour en arriver là.
L'art d'échouer est un livre féministe. Point. Je rappelle que le féminisme est le fait de vouloir les mêmes droits pour les hommes et les femmes. Or, Elizabeth Day nous montre à quel point les attentes envers les femmes, leurs obligations, leurs contraintes sont plus fortes que pour les hommes. Un homme a le droit d'échouer, une femme, nettement moins. Un homme peut attendre d'être prêt pour avoir un enfant, une femme n'a pas toute la vie devant elle. Un homme peut montrer sa colère, elle sera valoriser, une femme en colère sera une hystérique, il ne faut surtout pas qu'elle montre ce sentiment. Bref, une femme doit être dans le contrôle permanent, de son apparence, de ses sentiments, de sa carrière, de sa vie familiale et amoureuse. En prendre conscience, c'est aussi vouloir faire changer les choses - et montrer aussi qu'en dépit de décennies de combat féministes, il reste encore beaucoup à faire.
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Je rattrape mon retard dans mes lectures en service de presse, avec un nouveau roman reçu gracieusement en version numérique (Kindle) par l’intermédiaire de la plateforme NetGalley.fr. Fait rare pour moi depuis plusieurs années, il s’agit d’une traduction en français, sortie au mois de mars de cette année, d’un livre publié à l’origine en langue anglaise en 2017. L’invitation (The Party en VO) est un roman de la journaliste et écrivaine britannique Elizabeth Day, que j’ai découverte à cette occasion.
Le résumé m’avait tout de suite donné envie de lire ce roman, quand je l’avais découvert dans le catalogue de NetGalley :
Martin Gilmour ne s’est jamais vraiment senti à sa place. Mais en réussissant à décrocher une bourse pour la prestigieuse Burtonbury school, ce fils unique d’une mère célibataire sans le sou s’est vu ouvrir un monde auquel il n’aurait même jamais oser rêver : celui de l’aristocratie britannique. Un monde clos, exclusif, sur lequel règne le très charismatique, populaire et séduisant Ben Fitzpatrick.
Contre toute attente, entre l’héritier d’une dynastie et le working class héros va se nouer une forte amitié. Amitié qui va perdurer, quand Ben sera pressenti pour une haute fonction politique et que Martin se sera fait un nom en tant que critique d’art. Quand le premier épousera la très parfaite Serena et que Martin se mettra en ménage avec la très discrète Lucy.
Ce soir, dans la somptueuse demeure familiale, Ben fête ses quarante ans. Tout le gratin est présent. Martin aussi.
Le lendemain, Lucy est internée, Serena est à l’hôpital, Ben est à son chevet. Et Martin répond aux questions de policiers bien déterminés à comprendre : que s’est-il passé durant cette party ? Comment cette amitié a-t-elle subitement volé en éclats ? Pourquoi un tel déchaînement de violence ? Le vers était-il dans le fruit dès le départ ?
Nous entrons dans un récit que je suis tenté de situer entre le thriller classique et le drame sociologique. Tout tourne en effet autour de la relation entre Martin, issu d’un milieu modeste, et Ben, héritier d’une famille riche et puissante en Grande-Bretagne. Quand Martin rencontre Ben à l’école, il va tout faire pour se rapprocher de lui et devenir son meilleur ami. Leur relation va alors s’étendre sur vingt ans.
Comment Ben et moi sommes-nous devenus amis ? J’aimerais beaucoup vous raconter que c’était la rencontre naturelle de deux âmes soeurs, l’épanouissement organique de deux esprits jumeaux. Mais, en vérité, j’ai fait ce qu’il fallait pour le conquérir, comme s’il s’agissait d’une campagne militaire. Je me fixais des objectifs précis, et chaque petite victoire représentait une étape supplémentaire vers mon triomphe final.
Le roman suit plusieurs lignes narratives. D’un côté, nous assistons à l’interrogatoire de Martin par la police, suite à un événement dont on ignore la nature au début du roman mais qui s’est déroulé lors d’une grande soirée organisée par Ben pour son quarantième anniversaire. C’est à travers cet interrogatoire que Martin raconte aux policiers, et au lecteur par ce truchement, la soirée en question. Nous pouvons également découvrir les pensées de Lucy, l’épouse de Martin, internée dans un centre psychiatrique après la fameuse soirée anniversaire. Enfin, Martin se remémore ses années d’adolescent et de jeune adulte aux côtés de Martin, à l’école puis à l’université.
J’ai trouvé ce récit palpitant et très bien construit. On sent la patte d’un auteur qui sait écrire des thrillers, avec une structure narrative qui permet de ménager le suspense tout en captivant le lecteur avec des révélations cadencées.
J’avais sous-estimé le pouvoir de séduction des Fitzmaurice. Être près de gens comme eux – riches, privilégiés, beaux, égoïstes – n’est pas bon pour l’âme. Ils ne s’intéressent qu’à eux tout en n’ayant que le mot « générosité » à la bouche. Ils se fichent des autres. Non par méchanceté, mais simplement par manque d’imagination. Ils ne savent pas comment nous vivons. Mais les plus impressionnables parmi nous – les inadaptés, les solitaires, les aigris et les vulnérables – se font emporter par leurs courants d’or, comme des nageurs trop faibles pour résister à la marée. Nous voudrions être leur place et, en même temps, nous les détestons.
Au-delà du thriller, c’est aussi un portrait virulent de la société britannique, avec le fossé entre les puissants et les autres. Aucun des personnages n’est vraiment sympathique : Martin est tourmenté, manipulateur, inquiétant, presque psychopathe ; Ben est charmeur mais semble vide au-delà de son apparence ; Serena est froide et sans coeur ; Lucy est pâlotte, sans trait distinctif. Difficile de s’attacher véritablement à eux, mais je l’ai ai pourtant suivi avec beaucoup d’intérêt, ce qui est la marque d’un récit très bien écrit.
J’ai passé un très bon moment de lecture avec ce roman, d’autant que la traduction en français ne m’a pas gêné plus que cela. Je vous le conseille si vous voulez lire un thriller captivant et intelligent.
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Martin est issu d’un milieu très modeste, Ben est lui du milieu de l’aristocratie britannique, leur amitié était plus qu’improbable. Ce lien qui les unit depuis le collège est trouble, Martin voue de l’admiration à Ben, il est admis dans le milieu familial et découvre un univers qu’il ne connaît pas. Cette relation se poursuit jusqu’à l’anniversaire des quarante ans de Ben où tout se dérègle. Martin comprend qu’il ne fera jamais parti de ce monde. Mais pourra t’il vraiment assouvir sa vengeance.
Il m’a manqué quelque chose pour être complètement conquis par ce livre. Est-ce le personnage de Martin qui m’a dérangé ? Il accepte tout face à son ami et se sacrifie pour lui, mais ne voit pas qu’il est manipulé.
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Ce qui aurait dû être une agréable fête d’anniversaire, s’est rapidement transformée en descente aux enfers pour Martin et sa jeune épouse Lucy.
Dès le départ, quelque chose n’avait pas fonctionné, pourquoi des amis de longues dates, à qui la maison a toujours été ouverte, ont-ils été obligé de loger dans un modeste hôtel voisin alors que bien des chambres restaient disponibles dans la luxueuse maison de Ben et Serena?
Pourtant entre les deux hommes, il s’agissait d’une amitié durable et solide, c’est du moins ce que pensait Martin aveugle à la domination et à l’ambiguïté qui s’était installé peu à peu. Bien sûr, il y avait eu ce surnom de PO, petite ombre, qui lui collait à la peau pour lui rappeler ces années d’enfance et d’adolescence où Ben lui assurait une sorte de protection aussi indispensable que malsaine.
Lors de cette fête organisée dans un magnifique presbytère, demeure de Ben, les masques tombent comme si l’heure de régler les comptes avait sonné.
Une atmosphère lourde s’installe peu à peu, les épouses n’étant pas en reste par leurs réflexions acerbes pour accroître la tension ambiante.
Ce roman oscille entre polar et thriller psychologique, parfaitement maîtrisé, l’écriture est addictive.
Habilement construite, l'histoire se tricote à l’envers et débute le jour d'après, alors que Martin est interrogé par la police tandis que Serena, la jeune épouse de Ben est plongée dans le coma.
L’auteur réussit parfaitement à mettre à jour l’ambivalence entre les deux garçons, leur passé dans lequel ni l’un ni l’autre n’est parfait.
Les caractères des protagonistes sont minutieusement disséqués par la plume alerte et précise d’Elizabeth Day.
J’ai particulièrement aimé Lucy, épouse obéissante et apparemment soumise de Martin, qui est la seule finalement à avoir le courage d’exprimer la rancœur qu’au fond tout le monde ressent.
Je remercie NetGalley et les Editions Belfond qui m’ont permis cette passionnante découverte.
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"C'est comme buter sur une pierre et se casser la jambe. Parfois, le cours d'une vie peut changer en une seconde, parce que cette seconde n'existe pas isolée des autres : elle est reliée à la chaine infinie de minutes, de jours, de semaines, de mois et d'années qui se sont écoulées auparavant. Mais cette seconde d'inattention vous met par terre. Comme une maille ratée ruine l'écharpe qu'on tricote." (p.228)
Mais quelle est cette seconde qui fait d'un coup basculer les vies de Ben, Martin, Lucy et Serena ? Comment Ben Fitzmaurice, le nanti à qui tout réussi, et Martin Gilmour, son meilleur ami, sa "petite ombre", issu d'un milieu moins favorisé, en sont-ils arrivés au point de rupture ?
Tout le suspense de ce roman d'Elizabeth Day est là : découvrir le moment où la vie des personnages bascule. Pour ce faire, l'auteur nous propose un récit qui n'est pas linéaire, qui joue sur la temporalité par un constant va-et-vient entre le passé et le présent, entre les événements qui ont rythmé la vie de Martin et cette fameuse réception à laquelle sa femme Lucy et lui ont été invités, entre la rencontre avec Ben et la prise de conscience... Les événements, vus à travers le prisme de Martin, tissent pas à pas la trame du récit, comme les pièces d'un puzzle qu'on assemble. Et "Quelle est la meilleure méthode pour compléter un puzzle, déjà ? Commencer par les coins." (p.305) le tout, c'est de les trouver... ce n'est pas forcément évident dans ce récit et, même si le thème du roman n'est pas neuf, les relations amicales toxiques entre gens qui ne sont pas du même monde, l'auteur parvient à tenir le lecteur en haleine.
Le narrateur principal, Martin, apporte également beaucoup d'intérêt au roman car il a une personnalité ambigüe, qu'il faut reconstruire en même temps que le récit. C'est au travers de son regard que nous apprenons à le connaitre. Mais il ne nous dit pas tout et sa vision des événements est tronquée. Son récit est interrompu par celui de Lucy, sa femme, plus bref mais qui apporte un éclairage nouveau, pour trouver les morceaux manquants du puzzle. Et, une fois les pièces assemblées, on découvre une personnalité troublée et troublante, un anti-héros qui inspire tantôt la pitié, tantôt le dégoût, que l'on a envie de plaindre tout en ayant envie de le gifler par moment pour lui dire d'ouvrir les yeux. Et lorsqu'il finit par voir la réalité en face, tout s'écroule, y compris ce qu'il croyait être...
Merci à Babelio et aux éditions Belfond de m'avoir fait découvrir la plume d'Elizabeth Day grâce à "L'invitation". Conseil aux futurs lecteurs : si vous lisez la quatrième de couverture, ménagez-vous le suspense en ne lisant pas le dernière paragraphe du résumé...
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Ben et Martin. Martin et Ben. Deux amis que rien ne semble pouvoir séparer. Après tout, quoi de plus beau qu'un ami sur lequel on pourra toujours compter? Pourtant, lors de la soirée d'anniversaire de Ben un incident jette une ombre au tableau qui semble parfait.
Ce roman d'Elizabeth Day fonctionne très bien, élaboré un peu à la manière d'un polar, les choses se mettent en place chapitre après chapitre pour nous permettre de comprendre ce qui s'est passé à cette soirée et comment les choses en sont arrivées là où elles le sont aujourd'hui.
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Percutant
Roman au suspense grandissant
Roman sur l'amour l'amitié l'adolescence les grandes questions de la vie
La manipulation
A beaucoup de nos générations ce roman va rappeler des situations vécues
Ce roman par sa sincérité peut bouleverser en tout cas mémorable.
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Excellente surprise que ce roman. La quatrième de couverture annonce par la critique de l'obs un "monsieur Ripley à l'envers" et c'est vrai que j'ai pensé souvent à "plein soleil" au cours de la lecture. Les personnages sont terriblement bien campés et le malaise s'installe insidieusement pour ne plus vous lâcher. Grande maîtrise de la narration et fluidité du style avec une fin en point d'interrogation. Bravo !
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Martin et Lucy sont invités à la grande fête qu'organisent Ben et Serena pour les 40 ans de ce dernier. Le gratin du show-biz et du monde politique se presse à cette soirée. Ni Martin ni Lucy ne font partie de ce monde, mais Ben est le meilleur ami de Martin...du moins c'est ce qu'affirme Martin. Ils se connaissent depuis le collège et sont inséparables. Martin ne quitte jamais Ben, à tel point que Ben et sa belle épouse l'ont baptisé "Petite Ombre"...Est-ce vraiment de l'amitié? Est-elle vraiment partagée ? Leur passé et de terribles secrets vont resurgir au cours de cette soirée qui leur réserve bien des surprises. Pépite ! Roman grinçant, drôle, cruel et touchant, haletant que j'ai adoré. Une belle découverte, bien construit et brillant.
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J'avais vraiment hâte de lire ce roman.
Ce roman se lit très vite. On alterne entre les confidences de Martin au poste de police, ce qui s'est passé pendant cette fameuse soirée, les notes dans le carnet de Lucie et le passé entre Ben et Martin. A chaque partie, on essaie d'en savoir un peu plus, l'auteur nous fait beaucoup réfléchir sur ce qui a pu se passer durant cette fameuse soirée.
J'ai passé un agréable moment, même si j'ai trouvé la fin un peu décevante. Elle n'était pas à la hauteur du roman.
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Il s’agit d’un roman psychologique. L’auteur raconte la relation de deux amis d’école, Martin et Ben, que leurs différences auraient dû séparer.
Le lecteur suit le récit à travers le regard de Martin et parfois celui de Lucy, son épouse.
Martin raconte sa jeunesse, ses rapports avec sa mère, et surtout sa rencontre avec Ben. Les deux hommes entretiennent des relations ambiguës. Au cours du récit, on ressent bien que rien n’est vraiment naturel dans cette amitié. Il y a des non-dits, des espérances déçues, des désillusions. Comment la situation a-t-elle pu en arriver là ? C’est ce cheminement que l’auteur va expliquer.
Ce récit est addictif, même s’il n’y a pas de grandes révélations. Au travers de cette histoire, on découvre des personnages qui ne s’assument pas tels qu’ils sont, car le paraître a trop d’importance.
Au cours de cette soirée d’anniversaire, vont voler en éclats des années de vernis qui maintenaient en place un équilibre précaire et malsain. Le puzzle se reconstruit petit à petit. Il y a une certaine naïveté chez Martin, mais aussi du calcul et un contrôle de soi pour arriver à ses fins. On remarque également que toute sa vie tourne autour de Ben, son modèle. Ce dernier est un bourgeois qui n’a pas à faire beaucoup d’efforts pour réussir sa vie, selon le modèle familial pré-établi.
Il ressort de cette histoire que les personnages ont des réactions assez superficielles. Il s’agit d’une amitié basée sur des fondations factices et cela ne pouvait que mal tourner.
À découvrir.
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Ben et Martin sont amis depuis les bancs du pensionnat chic qu'ils ont fréquenté dans leur tendre jeunesse. le beau, flamboyant, riche, populaire, Ben Fitzmaurice, issu d'une grande famille anglaise avait pris la défense de Martin Gilmour, pauvre boursier, introverti, orphelin de père, mis à mal par les brutes épaisses partageant son dortoir. Cette amitié a évolué au même rythme que les deux hommes qui aujourd'hui sont mariés, et épanouis professionnellement. Ben a épousé la belle Serena, lui a fait trois enfants et a repris les rênes de l'empire familial. Martin est critique d'art et écrivain, son dernier ouvrage a d'ailleurs remporté un franc succès, ce qui fait la fierté de la douce et discrète Lucy, son épouse. Mais les deux amis se voient moins ces derniers temps. Ben et Serena passent leur temps libre dans les Cotswolds où ils ont acheté et rénové à grands frais le prieuré de Tipworth pour en faire une somptueuse résidence secondaire. La pendaison de crémaillère se fera pour les 40 ans de Ben lors d'une soirée où se côtoiera tout le gratin londonien, journalistes people, politiques de premier plan, chanteurs à la mode, mannequins en vue. Et Martin et Lucy, mal à l'aise, nerveux, vexés d'avoir été obligés de loger dans un hôtel minable alors que la propriété compte de nombreuses chambres.
Le lendemain, Lucy est à l'hôpital, dans le coma, Ben à son chevet, Lucy dans une maison de repos et martin interrogé par la police. Et une question se pose : que s'est-il passé lors de cette fête qui se voulait exceptionnelle et de bon goût ?
Le sujet de l'amitié bancale qui unit deux êtres aussi dissemblables que possible, l'un ayant un ascendant certain sur l'autre n'est pas nouveau en littérature. Mais l'anglaise Elizabeth Day y apporte sa touche personnelle en nous livrant une satire sociale qui allie avec succès comédie et polar. Car oui, il y a bien tous les ressorts du roman à suspense dans cette invitation qui tourne au drame. La tension est maintenue tout au long du livre et, au fil des pages, les liens qui unissent les deux couples sont disséqués et mis à nu. Ce mélange d'amour, d'admiration, d'envie, de jalousie, de manipulation et d'attirance homosexuelle qui fait le ciment et aussi la tombe de l'amitié entre Ben et Matin qui, sous la plume de Day, sont tour à tour sympathiques ou détestables. Les femmes, ''pièces apportées'', tiennent le rôle de témoins de cette amitié. Mais pas de témoins muets. L'évanescente Serena sait dire tout le dédain qu'elle éprouve pour l'homme du peuple qui sert d'ami à son mari. Et la gentille Lucy ne mâche pas ses mots quand il s'agit de dénoncer l'égocentrisme et l'arrogance de ces nantis que Martin l'oblige à fréquenter.
Roman grinçant, critique et terriblement addictif, L'invitation est une réussite absolue, un moment de lecture qui réserve son lot de surprises et de révélations.
Un grand merci à Babelio et aux éditions Belfond pour cette passionnante lecture.
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