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Critiques de François Mitterrand (50)
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Lettres à Anne - 1962-1995 : Choix

"Anne au coeur donné et à l'âme fière. Tu es ma lumière, mais que t'ai-je donné, plus que tu dis, moins qu'il ne faut. Notre histoire est si difficile qu'elle a bien le droit d'être unique"



ce 6 novembre 2018---- quelques heures de lecture bouleversante et lumineuse , aux belles couleurs flamboyantes de l'automne: Bonheur, beauté , amour absolu et Mélancolie....réunis !...



Histoire d'amour unique; aucun doute là-dessus, ... mais en effet combien difficile. L'Amour fou, la complicité intellectuelle, mais aussi la solitude, les doutes , des périodes de chagrin immenses pour cette jeune femme,

courageuse,déterminée, exigeante, allant à l'encontre d'un chemin sentimental, hors des règles et conventions habituelles...de son milieu



Beaucoup d'hésitation à acquérir cette correspondance ...Le fait que cela soit l'intéressée , elle-même, qui a décidé de cette publication, ce qu'elle souhaitait faire lire à un lectorat anonyme, en choisissant , coupant des passages, ajoutant des précisions, des commentaires factuels, ainsi que quelques unes de ses propres réponses, sans omettre des lettres d'autres personnes, m'ont finalement convaincue...ou dédouanée en quelque sorte d'un sentiment ambivalent de voyeurisme... Mais j'assume !!! Comme j'aimerais un jour parcourir les lettres d'Albert Camus à Maria Casarès....tant j'ai une admiration sans nom pour ces belles personnalités, denses, exigeantes dans leur vie et leur Art ...





Là aussi, de façon autre... Rien de petit ni de médiocre. .. Les éblouissements et les chagrins extrêmes d'une grande histoire d'amour dans un contexte compliqué: celui d'un personnage public, de haute volée ,ambitieux , complexe et secret...





Un style densément fluide, loin des clichés... une poésie, une sensibilité extrême, l'amour partagé du Beau, de la culture comme celui de la Nature... Un homme politique encombré d'obligations et de responsabilités... qui sait aussi prendre le temps de fouiner, chiner chez les libraires d'ancien, comme de savourer un paysage, une belle architecture, une exposition...lire un texte à son Aimée...



Cette correspondance démarre en 1962, et F. M. recherche pour Anne un ouvrage épuisé qui lui tient à coeur, chez les bouquinistes et libraires d'ancien...

"19 octobre 1962

Voici, Chère Anne, le Socrate évoqué un soir à Hossegor. Edité en suisse je n'ai pu encore me procurer l'exemplaire promis. Je vous envoie donc le mien, qui m'a souvent accompagné dans mes voyages et qui est pour moi comme un vieil ami" (p. 14)





Ces Lettres sont à la fois un éblouissement et aussi une douleur... A lire et à apprécier lentement... Il reste que les heures de cette nuit d'insomnie, en "compagnie " de ces deux personnes de qualité, m'ont laissée tour à tour euphorique, emportée et bouleversée, la gorge "effroyablement" serrée !....



J'allais omettre , in-fine, un portrait irrésistible, ne manquant pas de malice de F.M. par sa fille, Mazarine, âgée seulement de 12 ans !!



Autre omission : la deuxième passion infinie de François Mitterrand: sa fille, Mazarine... des passages d'une émotion sans fard, immédiatement tangible...



" 6 août 1990 - Mon Anne chérie



[...] Depuis notre séparation de Louvet, vendredi, j'ai entrepris de refaire mes études, afin de n'être pas trop distancé par Mazarine, et je suis plongé dans-Les Rêveries du promeneur solitaire- que je redécouvre d'un tout autre regard qu'au temps de mon propre bac (...) Mais quel style ! (...) Nous trouverons là de beaux sujets de discussion. Sitôt finie cette lecture, j'attaquerai -Les Confessions-. Un enfant , et la vie recommence. (p. 937)



Je me suis beaucoup interrogée sur ma lecture et en fait la réponse vient d'une phrase de Anne Pingeot, lue dans ses entretiens avec Jean-Noël Jeanneney : "C'est un personnage qu'on ne peut pas cerner, conclut-elle. D'abord parce qu'il ne voulait pas. D'où peut-être la faute qu'est cette publication, parce que ça révèle beaucoup beaucoup de choses. Mais en même temps, ça révèle sa richesse."



Et plus encore, hormis la fascination éprouvée personnellement pour ce Président de la République ,[ dans les années 1980 et même bien avant] , Amoureux des Livres et homme de Lettres....je découvre "L'homme aux ciseaux" avec "Journal pour Anne "... facette touchante , entre amour-passion absolu, esprit d'enfance , de poésie, de fantaisie et d'humour !...Bien loin de l'homme public, et du Politique stratège !!....



[*voir https://www.liberation.fr/france/2018/08/22/francois-mitterrand-l-homme-aux-ciseaux_1673924 ]



***En complément indispensable, laissons la parole à Anne Pingeot [ juillet 2018]:

https://bibliobs.nouvelobs.com/l-humeur-de-jerome-garcin/20180730.OBS0322/anne-pingeot-passion-fixe-de-francois-mitterrand-sort-du-silence.html





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Lettres à Anne : 1962-1995

Je suis étonnée de ne pas lire plus de critique à propos de Lettres à Anne, et y ajoute donc ma plume. Vu les 1200 pages, j'ai pour le moment lu les trois premières années seulement. Faute de temps et aussi car cette œuvre se déguste lentement. Il faut en apprécié chaque mot.

Allons droit au but, ce sont pour ma part les plus lettres d’amour jamais lues en littérature jusqu’ici. Et les plus beaux mots d’amour. C’est sublime.

F. Mitterrand écrit l’amour fou, l’amour obstination (Anne Pingeot va se refuser longtemps à lui), l’amour absolu. Il est nourri par elle, par cet amour et vidé à la fois. Il a besoin de tout dire tout raconter, tout décrire, tout disséquer.

Alors au-delà de ses déclarations amoureuses sans cesse réinventées, c’est un homme qui se raconte entre 1962 et 1995, un homme simplement, un homme cultivé et érudit (ses sorties en librairie sont des moments de grande liberté pour lui), mais aussi un homme public et un homme d’état.

Le dévoilement est ainsi multiple et renforce la fascination pour ce livre. Ces lettres aujourd’hui rassemblées et publiées font de ce corpus, Lettres à Anne, un chef-d’œuvre littéraire et historique.

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Journal pour Anne, 1964-1970

C'est un document à nul autre pareil, hors format, mosaïque de textes imprimés et manuscrits, de photos, d'objets, de collages, de coupures de presse à la façon d'une chronique affectivo-politique d'un jeune tourtereau érudit de quarante-huit ans.

J'ai feuilleté les 430 pages une à une, en ai lu de nombreuses, non l'intégralité, gêné de pénétrer dans l'intime d'un couple, conjugué à une seule personne.

J'ai admiré la plume littéraire, d'une haute tenue, légère et tendre lorsqu'elle s'adresse à l'être aimé sous le manteau. Les rencontres arrachées à un agenda déjà chargé sont vécues intensément.

Une photo de François allongé dans un pré ensoleillé clôt l'ouvrage imposant. La photographe, Anne Pingeot, a coché quelques mots à la cime d'une feuille blanche :



Journée exaucée,

journée exhaussée

tu es venu, je suis venue



"nous étions" le dimanche 26 avril 1970.



Une tranche d'histoire réellement étonnante !



P.S. J'ai réveillé le livre endormi dans ma bibliothèque depuis sa parution en 2017. J'avais longuement hésité à l'acquérir







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Ici et maintenant

Une première défaite en 1974 aux élections présidentielles contre Valéry Giscard D’Estaing amène François Mitterrand à la veille de l’élection de 1981 qui lui donnera la victoire...



Nous sommes en 1980, « ici et maintenant », pourrait-on dire, alors que le futur président de la République discute à bâtons rompus avec Guy Claisse, éminent journaliste politique, à l’époque chef du service politique du Matin de Paris, un quotidien très proche du Parti Socialiste, considéré comme le quotidien du « nouvel Obs. » de jean Daniel.



On parle politique, évidemment… intérieure comme extérieure, de politique économique, aussi ; d’écologie, de la gauche, du parti socialiste, de l’élection qui approche…



Mais c’est une des grandes qualités de François Mitterrand de pouvoir parler d’autre chose. Au détour d’une préoccupation politique, il évoque son enfance en Charente, plus tard son plaisir des promenades en forêt…la disparition des ormeaux… L’homme de lettres est bien présent.



Il parle de lui également, et se définit, élection oblige : « Je fais partie du paysage de la France ».



Avec l’aide de Guy Claisse, et sur proposition de Jacques Attali, élection oblige, la aussi, « Ici et maintenant » constitue le portrait d’un des hommes politiques les plus marquants de la Ve République ; dans toute sa complexité maintes fois célébrée… Ou critiquée… C’est selon…

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Lettres à Anne - 1962-1995 : Choix

J’ai beaucoup hésité…

J’ai toujours un malaise devant l’intimité dévoilée de contemporains.

Mais telle était la volonté d’Anne Pingeot : publier, choisir elle-même ce qui devait l’être et permettre à ce prodigieux amour de continuer à vivre et d’exister enfin pleinement au grand jour.

Les lettres sont très belles, un amour fou, profond, des déclarations bouleversantes, la recherche d’une profondeur d’âme, d’esprit, de beautés partagées.

La politique est juste évoquée (fait-elle partie des coupures effectuées par la destinataire?), un homme dont on ne connaît que le visage médiatisé apparaît dans sa vérité d’homme.

De 1962 à 1995, simples, vraies, amoureuses, avec des fulgurances dans l’art de vivre, avec des interrogations, des doutes, des regards complices sur la nature, des observations humaines et lucides, des descriptions de lieux et de voyages, ces centaines de lettres conduisent de la genèse à la fin d’un amour arrêté par la disparition de François Mitterand.

La durée… Le vrai et bel amour sans conditions, espéré et rencontré.

La langue est juste, envolée, parfois lyrique, souvent poétique avec de jolies métaphores.

Je ne doute pas que cet amour intense demeure profondément enfoui à jamais dans le coeur de la destinataire.

« Je crois aux forces de l’esprit » a déclaré François Mitterand. En voici une illustration.

Editées vingt ans après sa mort, elles contribuent à mieux entrevoir un des brillants esprits du XXème siècle.

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Le coup d'état permanent

Livre remarquablement bien écrit par un des plus grands opposants au Général De Gaulle, "Le coup d'état permanent est l'ouvrage de référence s'agissant de la critique du système gaulliste et de l'architecture de la Vème République. François Mitterrand dénonce sans cesse avec une plume rigoureuse et souvent féroce les travers du régime "dictatorial" établi par De Gaulle.
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Lettres à Anne : 1962-1995

Le début du livre est formidable, on lit les lettres d'un amour naissant et ces lettres sont très bien écrites (et on voit qu'en plus d'être un bon écrivain, François Mitterrand a des talents de poète). Après cela, le quotidien s'installe sûrement entre eux et cela se ressent dans les lettres. François Mitterrand alors évoque ses parties de golf, les gens qu'ils voient, la famille d'Anne, ses lectures... et j'ai commencé à m'ennuyer. Après la naissance de Mazarine (la grossesse est d'ailleurs très peu abordée), les lettres se raréfient et gagnent en intensité.



Il est important de noter que le lecteur intéressé par l'homme politique plus que par cette relation amoureuse va énormément s'ennuyer... En effet, on ne lira aucun commentaire sur Mai 1968 par exemple, ces rencontres avec Fidel Castro ou Salvador Allende sont évacuées très rapidement...



Par ailleurs, le livre est très déséquilibré. L'année 1964 et l'année 1971 forment plus d'un tiers du livre et les années 1980 à 1995 tiennent sur 100 pages.



On pourra aussi regretter le peu de notes ou de lettres ajoutées par Anne Pingeot. Surtout quand on remarque qu'elle indique une chronologie pas forcément indispensable (par exemple, elle indique la date du premier pas de l'homme sur la Lune, qui n'a pas d'incidence dans le livre) et que les commentaires qu'elle fait à la fin du livre n'apportent pas grand chose. On lit parfois les lettres d'un homme angoissé par une rupture possible mais n'ayant aucune information de la part d'Anne Pingeot, on a du mal à juger ces lettres.



Autre remarque importante, une fois le Journal pour Anne (1964 - 1970) achevé, je pense qu'il cherche à compenser dans ces lettres. En effet de début 1971 à début 1972, il écrit (au minimum !) un courrier par jour à Anne Pingeot ! Et ces courriers ne sont pas intéressants (sauf ses voyages en Inde et au Chili) car il s'agit de petites cartes postales où il indique ce qu'il fait sans aucun commentaire (et beaucoup moins de style...).



Aussi incroyable que cela puisse paraître, Danielle Mitterrand n'est pas évoquée une seule fois...



Finalement, je pense que toutes les lettres n'étaient pas forcément nécessaires, un tri parmi ce courrier aurait permis de mieux apprécier l'écrivain et surtout une véritable correspondance aurait permis juger un peu mieux cette relation (que j'ai toujours du mal à appréhender...)
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La paille et le grain

« La paille et le grain », une chronique tenue quasiment au jour le jour, une espèce de journal qui n’en est pas vraiment un… si l’on en croit François Mitterrand dans l’avertissement au lecteur qu'il a placé en début de volume.



Des textes, chroniques, petits essais, dédiés aux époux Deferre, et pour certains d’entre eux déjà parus dans le bloc note de journal « L’unité », alors journal hebdomadaire du Parti Socialiste. Il évoque les grandes questions politiques de l'époque, réfléchit, fixe ses idées à partir de ces notes. Il aborde le programme commun de la gauche et les question d'unité, d'identité, les inégalités en particulier celles suscités par la fiscalité, la guerre endémique au proche-Orient...



Une plume au vitriol quand il s’agit de décrire ou de commenter les agissements de ses adversaires… Une plume trempée dans le terroir, également, quand l’auteur se fait contemplatif…Il parle alors de choses anodines, de petits riens… de ce qu'il aime comme la beauté d'une plage en hiver… un vol de grues qui passe au-dessus de sa maison des Landes à Lache… ou de son chien Titus.



Une très belle plume… Vraiment !

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l'abeille et l'architecte

Avec la publication de « L’abeille et l’architecte », faisant suite à « La paille et le grain » couvrant les années 1971-1974 François Mitterrand nous livre quelques-unes de ses réflexions, de ses sentiments et de ses convictions durant une période qui va de 1975 à 1978 ; une sorte de journal, bien qu’il s’en défende…

En fait, une grande diversité de sujets parmi lesquels la politique et l’économie, bien sûr, mais aussi la littérature, la philosophie…également l’art, l’histoire, la musique...

C’est aussi l’occasion pour François Mitterrand de dresser une galerie de portraits où l’on retrouve notamment des adversaires politiques (Valéry Giscard d’Estaing, Jacques Chirac, Jean Lecanuet...), des amis (Felipe Gonzalez, Willy Brandt, Régis Debray, Mikis Theodorakis, Gaston Deferre, Claude Estier...), des rencontres (Henry Kissinger...).



« L’abeille et l’architecte » révèle (pour certains) ou confirme (pour d’autres) le grand talent d’écrivain de François Mitterrand ; en symbiose avec la nature qu’il décrit dans un style d’une grande beauté à l’occasion d’une marche dans la lande… d’une promenade en forêt.



Même si le côté politique peut rebuter certains, « L’abeille et l’architecte » : un livre à lire , ne serait-ce que pour la qualité de plume de François Mitterrand.

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Lettres à Anne : 1962-1995

On se laisse emporter par le fleuve de ces lettres, qui ont une grande valeur littéraire et historique. Si elles révèlent sans doute beaucoup sur l'homme, celui-ci garde paradoxalement tout son mystère... Il est intéressant d'écouter, en complément de cette lecture, la série d'entretiens qu'Anne Pingeot a accordés dans le cadre de l'émission "A voix nue".

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Lettres à Anne : 1962-1995

On ne peut rester insensible à ces lettres qui traduisent cette belle passion pour Anne, écrites avec une plume d'une grande qualité littéraire.

Grâce à tous les lieux évoqués, les chemins empruntés, les rencontres, avec les livres et les oeuvres cités, le lecteur se replonge de 1962 à 1995 dans les souvenirs et c'est alors une incroyable promenade à travers ces années.
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Lettres à Anne : 1962-1995

Lorsqu’ils se sont rencontrés pour la première fois, au début des années 1960, sur la plage estivale d’Hossegor, François avait 46 ans et Anne, 19. N’était leur amour commun pour la littérature, ils ne se ressemblaient guère.



L’encore jeune socialiste Mitterrand avait déjà une partie de sa carrière derrière lui (il avait été douze fois ministre, il était sénateur de la Nièvre); la très jeune, ravissante et bourgeoise Mlle Pingeot avait toute sa vie devant elle. Lui avait une femme, Danielle Gouze, épousée en 1944, et deux fils adolescents, Jean-Christophe et Gilbert. Lorsqu’elle ne vivait pas chez ses parents, Anne logeait, à Paris, dans un foyer de jeunes filles.



Dans la première lettre qu’il lui envoie, le 19 octobre 1962, depuis le palais du Luxembourg, François Mitterrand s’engage à lui trouver le volume sur Socrate dont ils avaient parlé, un soir, à Hossegor. Suivront plus de 1200 autres lettres, que l’on découvre aujourd’hui avec stupéfaction.



Cette Correspondance amoureuse, par sa longévité, son intensité, son exclusivité, sa clandestinité et surtout sa qualité littéraire, défie en effet la raison politique. Si elle confirme le talent singulier du Mitterrand écrivain, qui fut notre dernier président à vénérer la langue française, user du subjonctif passé, connaître le chromatisme des métaphores et pouvoir écrire, comme ici, de vibrants poèmes d’amour, elle corrige, en le réévaluant à la hausse, en lui ajoutant soudain un tremblé inédit, le portrait doré à l’or fin du monarque florentin, volage, infidèle et cynique.



Car oui, François Mitterrand a follement aimé, et jusqu’à son dernier soupir, Anne Pingeot, qui avait la grâce, la foi et le goût des beaux-arts. Elle fut sa passion fixe. Elle fut aussi son grand regret: quel gâchis, suggère-t-il au moment où la maladie l’emporte, d’avoir caché une si belle flamme pendant plus de trente ans et d’avoir condamné à l’ombre sa «femme-fille-fleur-fruit-beau soleil».



Mais quelle chance, aussi, de lui avoir épargné les rigueurs du protocole et le poids de la charge présidentielle, d’avoir empêché cette figure poétique de tomber dans la prose de l’exécutif : car si Anne ne fut pas la première dame, elle fut sans conteste son grand amour.



Un amour que, dès le début, François Mitterrand, lecteur de Barrès et de Drieu, inscrit avec lyrisme dans la durée. Même s’il est marié (il n’envisagera jamais de quitter sa femme), il n’imagine plus sa vie sans celle qui pourrait être sa fille et dont l’âge, à lui seul, est une promesse d’avenir, comme une revanche sur sa propre finitude. 15 novembre 1964:

"Je t’ai rencontrée et j’ai tout de suite deviné que j’allais partir pour un grand voyage. Là où je vais, je sais au moins que tu seras toujours. Je bénis ce visage, ma lumière. Il n’y aura plus jamais de nuit absolue pour moi. La solitude de la mort sera moins solitude. Anne, mon amour.» "



S’il lui écrit de si longues lettres, avec d’incomparables descriptions des paysages et des ciels d’une France dont Anne serait l’incarnation idéale, ce n’est pas seulement pour la séduire, pour la conquérir, c’est aussi pour tenir, en secret et en marge de l’histoire officielle, le journal de son grand destin (on a ici une nouvelle fois la preuve que cet homme avait beaucoup d’ambition et qu’il ne se détestait pas): à son «Anne chérie», sa «Nannon aimée», son «canard à l’orange amère», sa «Nannour», son «Animour», il raconte dans le détail ses tournées de député, les débats houleux à la Chambre, le propos des articles et des livres qu’il rédige, sa première candidature à la présidence de la République, les coups qu’il reçoit, ainsi que les innombrables parties de golf qui ponctuent, avec autant de trous, son long parcours politique – «Quel chemin à gravir !» (septembre 1965).



En lui écrivant, il s’écrit aussi à lui-même, et tout laisse à penser ici qu’il envisageait une publication posthume de cette Correspondance.



Mais, pour tenir dans le temps, cet amour clandestin connaît de nombreuses crises. Même si ce volume ne contient pas les lettres d’Anne Pingeot (quelques très rares apparaissent, à partir de 1981, où elle l’appelle «Mon univers Anchois Pommier», «Mon créateur de joie» ou «Mon très très cher amour»), on mesure, en lisant celles de François Mitterrand, que la jeune femme ne s’accommode pas d’être sans cesse dissimulée, demande à partager sa vie, ou alors de pouvoir jouir de sa pleine liberté, ce qu’il ne supporte guère, et qu’elle veut bientôt avoir un enfant de lui. Mazarine naquit le 18 décembre 1974, à Avignon, et ce fut le plus beau jour de sa vie.



A partir de cette date, et plus encore après son élection à la tête de l’Etat, les lettres de François Mitterrand sont moins nombreuses. C’est qu’ils ont désormais tous les trois, entre Gordes, Souzy-la-Briche et la rue de l’Université, une vraie vie de famille, fût-elle encore officieuse. Mais ni sa fonction élyséenne ni le calvaire de la maladie ne mettront fin, au contraire, à l’expression de son amour fou pour celle à qui, en juillet 1967, il écrivait: «T’aimer est en soi une œuvre passionnante» et, en août 1969, à la manière du maître en théologie Abélard se brûlant pour sa jeune et pieuse élève Héloïse: «Notre amour me donne le sentiment de l’éternel.»



Cette Correspondance, qui se termine le 22 septembre 1995 par ces mots d’un homme au seuil de la mort: «Tu as été ma chance de vie. Comment ne pas t’aimer davantage?», Anne Pingeot la plus que discrète a donc fait le choix de la publier. C’est l’Institut Mitterrand, présidé par Hubert Védrine et au conseil d’administration duquel siège Mazarine Pingeot, qui lui a proposé de la rendre publique. Comme elle a eu raison d’accepter et d’y ajouter, en épigraphe, cette phrase de Montaigne: "Qui me demanderait la première partie en l’amour, je répondrais que c’est savoir prendre le temps; la seconde de même et encore la tierce: c’est un point qui peut tout.» "



Car ces lettres ne dessinent pas seulement le meilleur autoportrait de François Mitterrand, ce conservateur contrarié, elles composent aussi, en creux, le plus éclairant portrait de l’invisible Anne Pingeot.
Lien : https://bibliobs.nouvelobs.c..
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Le coup d'état permanent

Le duel De Gaulle - Mitterand reste le dernier moment de grande politique en date . Mitterand s'attaque â De Gaulle sur son terrain : les lettres . Et force est de reconnaitre que l'efficacité et la force des textex en présence n'on pas leur égal aujourd'hui ou le fn et les populistes en général sont sur le devant de la scéne. Pour un plaisir concret de politique il faut découvrir ce livre remarquable . Un grand moment .
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Lettres à Anne - 1962-1995 : Choix

Lettres à Anne 1962-1995 (François Mitterrand )



François Mitterrand rencontre Anne Pingeot en 1962. Il a alors quarante-six ans et elle dix-neuf. Elle devient presqu’aussitôt sa femme, celle de l’ombre mais celle à qui il écrira un millier de lettres de leur rencontre jusqu’à sa mort, trente-quatre ans plus tard.

Il faut sans doute une sorte de voyeurisme un peu malsain pour aller lire une correspondance intime. Ce serait comme fouiller dans des affaires privées, s’introduire illégitimement dans une chambre, violer l’intimité d’une personne et y prendre un plaisir un peu coupable. Je suis pourtant une inconditionnelle. De journaux intimes d’abord - Nin, Steinbeck, Green, ou encore Renard- ainsi que de correspondance - Van Gogh, Nin encore, Colette. C’est que j’y trouve ce que l’on ne trouve pas dans un essai ou un roman, dans lesquels l’écrivain s’efforce à produire le meilleur style et à y développer des idées élevées parce qu’il se figure, même en loin, au moment de l’écriture, déjà lu et jugé. On n’y trouve jamais cette sorte de relâchement tout naturel - et c’est tant mieux- que l’on peut lire dans des écrits privés. C’est comme voir un homme en public, apprêté, en tenue d’extérieur et posant : cela ne dit à peu près rien de comment il se tient dans l’intimité de son foyer. Voilà ce que je cherche et aime trouver dans les correspondances dévoilées : un homme qui ne pose pas, ou qui ne pose que pour une seul personne tout au plus. J’y lis aussi des fragilités indevinables, des faiblesses qu’il se sera efforcé de cacher au monde. Que dit plus d’un homme que l’un de ses écrits non destiné à être lu ?

Anne Pingeot, dans sa volonté de rendre publiques ces lettres, brandissant tout l’amour que lui portait Mitterrand à la face du monde comme une revendication, - j’y reviendrai- les a choisies néanmoins. On ne saura rien notamment des pensées de son amant quant à la mort De Gaulle, les lettres ayant soigneusement été évincées, tout comme celles, sans doute, faisant allusion à des événements politiques majeurs : les campagnes électorales, Chirac. D’ailleurs, les lettres se rarifient quand il devient président de la République. Ainsi, si Anne Pingeot avait voulu, comme elle l’a prétendu, publier ces lettres pour que le monde connaisse et voit Mitterrand différemment, afin de « révéler sa richesse », elle aurait tout laissé. Non, c’est bien pour elle qu’elle le fait. Elle dit ainsi : « Voyez tous comme il m’a aimée, voyez qui était sa femme, sa confidente, celle à qui il pensait sans cesse, qui l’influençait et le conseillait ». Cela sonne comme une revanche, une volonté de vérité qui éclate après trente-quatre années d’ombre. Anne Pingeot prouve, en quelque sorte, qu’elle fut la première dame, la première épouse, la première tout court.

Les lettres sont belles. Mitterrand ne se trimbalait donc pas en vulgaires fringues ni en pyjama dans l’intimité : aucune n’est médiocre. Le style ne se relâche presque jamais. L’homme se tient, même dans l’ombre. Il aime Anne mais il aime aussi la nature, la littérature, l’architecture et tous les arts. C’est aussi un fin stratège, un homme qui préparait ses interviews, ses débats et ses discours d’une manière que l’on devine méticuleuse et précise. Il évoque ce travail comme on se décharge un peu de ses tourments, preuve qu’il y songeait beaucoup, qu’il en était très préoccupé. Mitterrand est un collectionneur de belles éditions. Ses goûts sont snobs, il n’aime que le précieux, le rare, le beau. Rien n’est un jeu, tout est sérieux au point qu’il fait le reproche, dans l’une de ses lettres, de fautes d’orthographe que son amante a glissées dans son courrier. C’est un homme exigeant, pointilleux sur les détails.

Il aime Anne. Il lui écrit cet amour sous toutes les formes. Il aime son Anne, qu’il rebaptise au gré de ses envies, comme une possession. Et j’ai fort songé à Pygmalion. Il évoque même, et d’une manière très franche et décomplexée, une sorte d’inceste : il l’appelle parfois « Ma fille », et appelle dans une lettre Mazarine « ma petite-fille ». Outre l’écart d’âge qui peut expliquer cela en partie, il y a cette idée sans doute de l’avoir faite comme on élève un enfant, de l’avoir modelée, sculptée comme une œuvre. Anne a pourtant « du caractère » et est une femme intelligente. Il est snob, et c’est logiquement qu’il l’a choisie supérieure. Cependant il la possède autant qu’il la fabrique.

D’ailleurs, quelques lettre écrites par Anne Pingeot à Mitterrand sont données à lire également : le style est quasi le même, le ton aussi, tant qu’on pourrait penser que ces lettres sont écrites par Mitterrand lui-même : c’est une sorte de fusion, d’imprégnation à un point assez surprenant. Ils ne sont qu’un, en deux corps. Et sans doute pas comme on nous le vend dans les histoires mièvres : ils ne font qu’un parce que Mitterand a fait d’Anne une extension de lui-même, lui a transmis à la fois son savoir et ses valeurs afin d’en faire une femme à son image. Elle aime de surcroît les mêmes choses que lui : musées, architecture, littérature et nature. Rien d’étonnant, c’est prévisible, mais assez fascinant, au fond. Ils deviennent, à mesure des années, qu’une seule personne comme le suggère souvent Mitterrand, non parce qu’il le récite comme des paroles d’amour, mais parce qu’il l’a voulu et crée.

Et cet amour dure. Avec une belle intensité même passé le temps de la passion. Comment se détacher de ce que l’on a soi-même crée ? Mitterrand aime son œuvre, logiquement. C’est un amour entretenu aussi par une correspondance abondante, un amour de l’esprit, et une façon également, pour Mitterand du moins, d’avoir toujours une sorte de confidente pour s’épancher. La vie commune est quasiment exclue, de sorte qu’ils ne partagent ensemble que le meilleur, se voient dans des moments de plaisir, ne sont pas éreintés par un quotidien morne et plat. Tout est sérieux dans leurs rencontres : ils les attendent avec ferveur, vivent des éloignements qui créent et renouvellent le manque inépuisablement. Et voilà peut-être où Mitterrand a réussi : au-delà du fait que tout mariage leur fut « impossible », il aura préservé l’amour, peut-être, en sachant comme toute vie commune le ronge, l’entame, le dénature. Jamais ils n’auront eu à se disputer sur des sujets domestiques ou à supporter la mauvaise humeur ou les habitudes détestables de l’autre.

Anne se révolte pourtant, on le devine dans beaucoup de lettres de Mitterrand qui semblent tour à tour des lettres d’excuses, de justifications et parfois de supplications. On imagine - et même Mitterrand l’ecrit- le nombre incalculable de fois où une part d’elle s’est indignée, s’est révoltée fort et a voulu le quitter, peut-être plus pour le punir que parce qu’elle avait cessé de l’aimer. Anne n’aura rien d’une vie classique : ni mariage, ni vie commune à temps plein. Elle brise le lien bien des fois, refuse de lui parler, de lui ouvrir la porte quand il se présente chez elle. On devine ses colères et peines, ses sursauts de dignité. Mitterrand, lui, est d’une constance inébranlable. Il l’aime, la veut garder et ne rien changer. S’il fait des « efforts » c’est seulement en lui accordant plus de temps et d’attention quand elle menace de lui échapper, mais jamais au-delà. Il ne peut lui promettre un mariage évidemment, ni une vie de famille classique. Il lui consacre cependant tous ses Noël à partir de la naissance de Mazarine.

Si j’ai déjà évoqué les « buts » de cette publication, qui seraient, officiellement, de connaître Mitterrand « autrement », qu’en est-il ? Je me figurais déjà l’homme exigeant, intransigeant, cultivé et sérieux. C’est bien l’image que j’en avais de lui, toute politique mise à part - ce n’est pas le sujet du livre et les lettres en font peu mention. J’avais, en revanche, imaginé leur amour d’une manière différente, et c’est peut-être aussi pour cela qu’Anne Pingeot a fait publier ces lettres : je m’étais figuré une femme follement amoureuse d’un homme qu’elle admirait, le retenant par toutes les manières, voulant absolument un enfant de lui. Si tout ceci est vrai, c’est à nuancer. Il semble en effet que Mitterrand ait peut-être eu plus besoin d’elle encore que l’inverse est vrai. Jamais, en trente-quatre ans, il ne songe un instant à la rupture, quand Anne la désire à plusieurs reprises. Sa constance à lui est inébranlable. Il a besoin d’elle et le lui dit, en toute sincérité et comme la chose la plus normale qui soit : il ne se sent fort que lorsqu’il est aimé d’elle. Il n’est efficace dans son travail et en homme politique que lorsque leur amour est serein. Et voilà sans doute la principale faiblesse dévoilée de cet homme : il n’existe que dans le regard d’une femme, ou du moins il ne se sent puissant que porté par cet amour. Qui aurait pu croire que son efficacité lors de débats ou de discours était en partie due à la sérénité ou non de cette relation de l’ombre ? N’importe, cela ne l’amoindrit pas. Qui ne se sent pas plus de vitalité et de puissance quand il se sait aimé ?
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Lettres à Anne - 1962-1995 : Choix

Le bouquin du jour : Lettres à Anne, de François Mitterrand.



Je suis de la Génération Mitterrand. J'ai placé tellement d'espoir en cet homme lors de son élection en 1981, que j'ai eu du mal par la suite à lui pardonner ses erreurs, ses renoncements, ses échecs. Pourtant, je lui ai toujours gardé une certaine affection pour son intelligence, sa culture, et son humour.

C'est cet homme-là qui se dévoile à travers plus d'un millier de lettres à celle qui fut, malgré ses travers de séducteur invétéré, sans aucun doute l'amour de sa vie. Les mots qu'il lui adresse touchent parfois au sublime.



#FrançoisMitterrand #AnnePingeot #Lettre #Amour #Folio



Le quatrième de couverture :



«Je vous écris tandis que s’éteignent les dernières notes de notre "Alléluia". Souvent j’écoute ce chant. Il me parle de vous, Anne. Je pense qu’il vous ressemble, ou du moins, à une certaine Anne, la plus secrète, la plus vraie, la plus exigeante. J’aime que cette Anne-là existe. Pour l’atteindre il faut du silence et de la force. Ce n’est pas commode. Mais passionnant.»

En 1962, un homme politique français de quarante-six ans rencontre à Hossegor une jeune fille de dix-neuf ans. Il lui écrira, jusqu’à la veille de sa mort, plus de mille lettres témoignant d’un amour secret et indéfectible. Ce recueil nous dévoile des aspects totalement inconnus de celui qui fut deux fois président de la République.
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Lettres à Anne : 1962-1995

1200 pages de lettres d'amour..... Ça laisse pantois, quand même!

Je n'ai pas terminé cette lecture. Je savoure une lettre par ci une lettre par là quand l'envie me prend. Mitterrand manie le verbe avec une grande dextérité, de la justesse et une légèreté qui enlève au romantisme ce qu'il peut parfois avoir d'empesé, et je l’avoue, c’est du régal.

Pour ce qui est du contenu de ces lettres, si l'on fait abstraction du registre amoureux, je ne suis pas certaine qu'il y ait beaucoup d'autres choses à y trouver. Les aspects historiques ou politiques sont traversés de manière aléatoire et il ne faut chercher là aucune révélation. Non, ma grande question lors de cette lecture c'est : qu'a voulu faire Anne Pingeot en publiant ces lettres ?

Dire qu’il est impossible à 19 ans de sortir indemne d'une correspondance si puissante ? Ou alors attester de l’amour de Mitterrand à son égard? Prouver sa légitimité? Ou bien seulement rendre publique une vie trop privée?

Alors c’est vrai que parfois s’installe comme une gène à la lecture de certains passages. Une gène que l’on connait probablement tous à la lecture de ces ouvrages épistolaires. Un petit relent de voyeurisme qui même s’il est autorisé, vient titiller nos contradictions....
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Mémoires interrompus

N'étant pas socialiste et encore moins fan de Mitterrand, j'ai voulu mieux connaître le personnage des années après son départ. Donc j'ai lu quelques livres parmi lesquels ces mémoires interrompus dans lesquels je rencontre d'abord un écrivain, une connaissance et une précision de l'écriture dont nos politiques ne sont pas coutumiers, hormis sans doute De Gaulle et Pompidou.

Son texte met bien en avant l'ambiguïté de son personnage et ce n'est pas involontaire. Il peut même être lyrique, notamment quand il parle de son admiration pour De Gaulle et de ses orientations politiques différentes. Ce texte est assez court et procure un vrai plaisir de lecture.
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Lettres à Anne - 1962-1995 : Choix

Été 1962, à 46 ans François Mitterrand rencontre à Hossegor une jeune fille de 19 ans, Anne Pingeot. Durant trente-quatre ans elle sera la femme de l’ombre. Et durant toute ces années François Mitterrand lui écrira plus de mille lettres. Ce sont ces lettres qui ont été réunies dans ce volume de 1000 pages et qui donnent un éclairage intéressant et très intime sur cet homme politique contemporain.



À travers ces lettres, le lecteur découvre un homme sensible et amoureux, une plume qui a le sens de la formule, un homme d’une grande culture. On oublie vite l’homme politique, habile bretteur face à ses adversaires, pour ne retenir que l’homme qui aime sans retenu, confessant son mal être lorsqu’il s’éloigne de la femme qu’il aime, lui relatant ses journée et ses rencontres lorsqu’ils sont séparés, s’épanouissant dans son rôle de père lorsque naît Mazarine.



C’est évidemment très intime mais sans que le lecteur ne se sente voyeur pour autant.



On comprend en creux (les lettres d’Anne ne sont pas reproduites) que la jeune fille de 19 ans devient peu à peu une femme qui s’impose, qui choisit, loin de la personne effacée qu’on pouvait imaginer tant sa discrétion l’a tenue éloignée de la lumière. Elle est au contraire tout en force et en détermination. Et comment faire autrement face à cet homme parfois un brin manipulateur, qui ne renonce à aucune de ses deux familles tout en poursuivant sa carrière politique ?



Ces lettres sont un passionnant voyage à la découverte d’une histoire d’amour hors du commun mais aussi à travers des paysages français ou étrangers et à travers une page d’histoire politique qui donne à voir toute la capacité d’analyse de François Mitterrand.



C’est émouvant, poétique, parfois très sensuel, habité par l’incandescence d’un amour absolu. Et surtout à l’ère du texto, quel plaisir que de redécouvrir la beauté de l’échange épistolaire !

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Lettres à Anne - 1962-1995 : Choix

1962 : François MITTERRAND a quarante six ans, il est sénateur de la Nièvre, marié, père de deux enfants. Il rencontre à Hossegor, Anne PINGEOT, dix neuf ans. C’est le début d’une histoire d’amour, dont le point d’orgue se prénomme Mazarine et qui ne finira que par la mort de l’homme illustre après quelques 1.200 lettres d’amour.



On parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître… celui de la correspondance, un temps désuet avec ses attentes, ses codes.

Je pense à la chanson de Liane FOLY « Au fur et à mesure »….

Un temps où, les amoureux prenaient le temps…ou malgré des fonctions prenantes et un emploi du temps harassant, MITTERRAND savait se poser pour écrire, se raconter, avoir de l’attention pour l’autre.

Une autre chanson me vient à l’esprit en miroir de l’époque actuelle : celle de Benjamin BIOLAY « Brandt Rhapsodie »



Nous avons tous en tête un François MITTERRAND, séducteur invétéré. Dans ces lettres, c’est un homme sincèrement amoureux, délicat, présent, romantique.



Anne est l’héroïne de ces lettres ; et pourtant son absence se fait sentir : ses réponses sont rares ; seulement des annotations relatives au contexte et aussi un projet de rupture… car cette histoire « interdite » n’est pas si rose et le lecteur ressent la souffrance qui a dû être celle d’Anne PINGEOT, qui a accepté l’inacceptable par amour.

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Journal pour Anne, 1964-1970

En parallèle à ses Lettres à Anne, 1962-1995, le superbe Journal pour Anne 1964-1970, tout vibrant du secret d'une fougue d'adolescent, collages destinés à l'Aimée, versant de la face d'ombre de François Mitterrand alors en pleine lumière de son ascension politique vers son Capitole - peut-on jurer connaître totalement un être ? - dans la pleine maturité de l'âge et l'éblouissement de sa folle passion pour une jeune fille de trente ans sa cadette, 21 ans en 1964.



" Mais qu'était-il allé faire dans cette galère, la politique ? Aux côtés des guignols de l'officialité, lui qui chaque jour, en tapinois, au débotté, tuait en lui la marionnette ? Adhérer aux discours filandreux et guindés de la profession, lui qui trouvait sa vérité dans un oeillet des dunes, une pluie multicolore sur des pavés de bois, une mélodie de Thelonious Monk ou un film de Vadim ? [...]

Fin des propos convenus, naissance d'un inconnu intimiste dont la carrière publique prend rétrospectivement des allures de bouche-trou. Un écrivain à coeur ouvert, sans apprêt ni affectation, crayonnant la vie à main levée, avec le grain ultra-fin d'un Benjamin Constant, pour l'intime des sentiments, et la patte irrespectueuse d'un Jules Renard, pour le croquis de société." (Régis Debray, « Mitterrand, un écrivain à cœur ouvert », Le Figaro du 13/10/2016).



Tout est dit. Mais la révélation de la profondeur de l'amour-passion et la création littéraire ne pouvaient éteindre chez l'homme politique l'ardente obligation d'une ambition dévorante vers une destinée à la mesure de l'Histoire.

Un must. Incontournable
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