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Critiques de Friedrich Dürrenmatt (152)
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La promesse

Une construction étonnante pour ce roman policier où le narrateur , un ancien commandant à la retraite, rencontre un orateur donnant une conférence sur l'art d'écrire un roman policier.



Là où cela devient intéressant, c'est la façon dont ce commandant va lui expliquer que la façon de résoudre un crime ne se passe pas forcément (et d'ailleurs, je dirais souvent) comme dans un bouquin où la logique est implacable (ou presque ;)). Non, dans la vraie, oui, il y a une certaines logiques mais il y a aussi du hasard (voir de la chance) et dans les livres, cela n'existe pas (je ne spoile rien, c'est écrit au tout début du bouquin).



De ce livre, on en a tiré deux films dont l'un est The Pledge que j'avais beaucoup aimé mais vu il y a longtemps et dont je garde peu de souvenirs (bref, je ne sais pas compéré le livre et le film).



Le livre fait moins de 200 pages et le tout est écrit de manière concise, l'auteur va droit au but de manière magistrale. Cela paraîtra plat pour certains lecteurs, pas pour moi. L'intrigue est décrite avec précision, les paysages, la météo aussi. On est loin des romans policiers habituels.



Le personnage de Matthias est très fouillé, c'est lui le personnage central du roman. C'est lui qui fera une promesse, c'est lui qui va mener l'enquête à sa façon et qui va le mener à sa perte, à sa folie. Est-ce qu'il aura raison ou non ?



Une lecture que je vous recommande chaudement.
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La promesse

Reprenant une technique classique en littérature, Friedrich Dürrenmatt débute son récit à la première personne avec un narrateur qui donne une conférence sur les polars dans une ville miteuse et oppressante de Suisse. Il y rencontre un policier retraité qui propose de l’emmener faire un tour et, en chemin, lui raconte l’étrange histoire du pompiste d’une station-service déserte où ils se sont brièvement arrêtés. Cette introduction ancre le récit dans le réel et capture toute notre attention de lecteur.



Avant d’être le pompiste que le narrateur a aperçu, Matthias était un policier exemplaire sur le point d’être muté avant qu’une dernière affaire ne fasse basculer sa vie avec la découverte du cadavre d’une jeune enfant dans une petite bourgade. Les esprits s’enflamment, la foule pointe un doigt accusateur vers le colporteur et la police l’interroge avec insistance jusqu’à ce qu’il avoue et se pende. Si beaucoup se satisfont de ce dénouement, Matthias est convaincu que ce schéma est trop simple et que le meurtrier court toujours. Obsédé par la promesse qu’il a fait à la mère de Gretl, la fillette assassinée, il abandonne son poste et consacre sa vie à la mise en œuvre d’un piège titanesque pour qu’elle obtienne justice.



J’ai été bluffée par la tension dramatique qui se dégage de ce texte et la peur que j’ai ressenti à la lecture de cette traque patiente. La tâche que Matthias s’impose est devenue si essentielle à sa vie qu’il ne se rend pas compte que son côté désespéré la rend absurde aux yeux de tous les gens qui l’entourent. Le cadre posé autour de l’enquête permet également de questionner l’écart entre récits policiers et crimes réels. Les productions fictionnelles romantisent tant certaines affaires que l’on s’attend à un dénouement flamboyant avec un criminel héroïquement démasqué et condamné par une justice triomphante alors que la réalité est souvent beaucoup plus banale et décevante.
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Romulus le Grand

L'auteur , dans cette pièce de théâtre, nous conte la chute de l'empire romain en l'espace de 24 heures au moment des ides de mars, jours festif dédié au Dieu Mars.

Alors que ses conseillers tentent de faire réagir l'empereur, celui-ci n'a de considération que pour ses poules qui portent toutes un nom d'empereur .

Dans cette farce qui depeint une tragédie par l'absurde, les répliques sont truffées d'anachronismes, les personnages sont loufoques et l'histoire décalée.

Friedrich Durrenmatt prend soin de nous faire vivre cette pièce de théâtre par l'insertion de détails et de résumés au début de chaque chapitre.

Un moment de détente et de facétie.
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Le Retraité

Un roman de Friedrich Dürrenmatt inachevé mais pas du fait de la disparition de l'auteur plutôt parce qu'il l'a laissé de côté puis repris et enfin laissé tel qurl; il nous propose une fin alternative dans un autre titre ou mieux encore, imaginer nous même la fin.

Un roman policier qui n'en est pas vraiment un, plutôt une réflexion sur la justice , une métaphore autocritique sur ses éventuels échecs.

Lecture rapide et fluide si ce n'est quelques tournures de phrases et grammaticales venues d'Helvétie.
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La promesse

Bien que publié en 1958 pour la première fois, sous demande d'un scénario pour réaliser un film, la promesse n'a pas pris une ride avec un sujet toujours d'actualité.



La promesse, ou requiem pour un roman policier, nous fait part ici de la promesse qui va hanter l'inspecteur Matthieu et tenir le lecture en haleine. Une fillette de 6 ans est retrouvée assassinée au fond des bois dans un canton suisse.

Le coupable idéal est rapidement trouvé, après 20 heures de garde à vue musclée, il passe aux aveux et se suicide en garde à vue.



Pourtant, l'inspecteur Matthieu ne peut pas se défaire de son impression que le meurtrier court toujours. Il a fait la promesse à la mère de la fillette que cela ne recommencerait plus. Il doit coincer l'individu qui a fait ça.



Ouvert hier soir et renfermé 2 heures ensuite, en l'ayant lu d'une traite ; court roman qui nous tient lui aussi ses promesses : il nous tient en haleine jusqu'à la fin et nous aussi, lecteurs, voulons connaitre le dénouement.
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La Chute d'A.

Récit de Friedrich Dürrenmatt peut-être plus connu pour ses autres romans tels que "La panne" et "Les physiciens".

Roman satyrique, sarcastique et ironique d'un régime totalitaire , on peut supposer que l'action se déroule en URSS sous Staline, qui malmène ses dignitaires de haut rang lors d'une réunion et qui verra les instincts les plus vils remonter à la surface pour ne pas être celui qui sera "viré" ou disparaitra simplement comme O qui ne s'est pas présenté ce jour.

Qu'ils soient ministres ou hauts gradés, tous ne portent qu'une lettre ou un sobriquet en guise de nom.



La chute d'A arrive dans les dernières pages et comme pour les autres, une bataille successorale va s'engager entre les restants.
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Grec cherche Grecque

Une agréable, plaisante découverte ( dans une boîte à livres ) d'un écrivain que je n'avais jamais lu je ne sais pourquoi.

Il ne me reste plus maintenant qu'à visiter l'expo qui lui est consacrée dans ma ville

https://www.strasbourg.eu/evenement/-/entity/id/15655177

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La Panne

Immortalisée sous la caméra d'Ettore Scola, La panne est un récit court, sorte de parabole de la justice qui se décline ici sous la forme d'un jeu. Un jeu bien étrange, en vérité, puisque le personnage principal, Adolfo, va être l'accusé fictif d'un tribunal qui l'est tout autant.

Adolfo est un représentant de commerce qui tombe en panne ; alors qu'il demande l'hospitalité à un ancien juge, celui-ci lui propose de participer à un jeu dont il sera la pièce centrale. Ainsi, tout au long d'un dîner bien arrosé, la vie d'Adolfo sera observée, commentée, disséquée. Son ascension professionnelle interroge, d'autant plus que l'ancien supérieur d'Adolfo, Gygax, est décédé peu de temps auparavant.

Dans cette parodie de justice sont mis en évidence les mécanismes de cette grande machine humaine : la connaissance des textes de loi, l'acceptation du jugement par ceux qui en sont la cible. Le roman repose sur l'ambiguïté du jeu : en est-ce vraiment un ? Les anciens juges et procureurs sont-ils prêts à aller jusqu'au bout de leur logique ? Un roman très stimulant intellectuellement.
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Les Physiciens

Les Physiciens est une de ces pièces intelligentes, complètes, étonnantes, dont on voudrait qu'il en existe plus.

Au début, tout paraît très simple: un asile et trois malheureux, physiciens, se prenant l'un pour Newton, l'autre pour Einstein et le troisième, juste pour lui. Seulement autour de ces trois malheureux, voilà qu'on ramasse des cadavres d'infirmières...

Malgré les apparences, rien d'une pièce policière ici, ce n'est ni le but, ni le thème réel : Les Physiciens est une pièce sur les responsabilités de la science et des scientifiques et sur les terribles horreurs qui peuvent découler des merveilles découvertes par iceux.

A découvrir !
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La Panne

Une histoire courte, oui, mais d'une telle intensité. Un roman qui vous tient en haleine jusqu'à la dernière page, que dis-je la dernière ligne. Au fil de la lecture j'ai été habitée par une multitude de sentiments allant de l'insécurité à la peur, de la stupeur à l'incompréhension, le tout avec une sensation constante d'étouffement, le huis-clos a parfaitement rempli sa fonction.

Imaginez que vous tombiez en panne dans un lieu inconnu. Immobilisé, vous êtes alors convié à passer une soirée en charmante compagnie. Imaginez alors que l'on vous propose un jeu de rôle dans la reconstitution d'un procès et qu'au bout du compte le seul rôle vacant est celui du bourreau. Imaginez maintenant qu'il vous est prié d'avouer un crime que vous n'avez pas commis. Alors commence le jeu morbide.

Ce qui est certain en posant cet ouvrage c'est que nous avons tous quelque chose à nous reprocher.
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La Panne

Petit roman d'humour noir qui donne faim. Le héros subit une panne de voiture qui l'amène à côtoyer un groupe de retraités qui rejouent leurs anciennes fonctions en intentant de faux procès à leurs convives. Entre alcoolallemandes festifs, mets délicieux et langues bien pendues, Alfredo se retrouve assassin et victime de cette soirée.

Quand le théâtre de boulevard fricote avec les tontons flingueurs, le lecteur passe forcément un bon moment.

Lu dans le cadre de mon club de lecture, thématique littérature allemande.
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La visite de la vieille dame

Dürrenmatt qui bouscule et surprend nous renvoyant en un boomerang à nos raisons nos idées d'existence à notre image de nos consciences tranquilisees

Les puissances, ténébreuses de l'argent à l'oeuvre pour finaliser nos réussites à la clé

MAIS à quel prix ?

La vieille Dame en étant une vibrante parfaite illustration

en aide à sa ville en difficulté, d'où elle fut exclue à qui elle vient proposer un secours pécuniaire mais pour se réhabiliter

Une vision noire de la nature humaine. Philosophie et humanité

Une chasse aux sorcières une chasse à l'homme à abattre et une chasse aux puissances sombres régnant en maître l'argent comme une solution. !

Moyen

Ou finalité

Dürrenmatt met ici l'accent avec force sur nos versants à double tranchant et équivoques de nos motivations et actions..une vieille Dame s'érigent en exemple supra intelligent qui amène la populace à se ranger du côté de ses arguments

Avec brio Dürrenmatt nous laisse face à l'absurde le vertige de son néant

Comment cette Dame prendra une revanche sur le sort et les gens l'ayant mise au rebut les rendra partie prenante gagnés à ses idées

Au nom de la justice à mener

Avec cette chute de la fin déconcertante de la œuvre. Elle part Comme si de rien n'était

Nous laissant oser imaginer d'autres angles de jugements à trouver

Car d'après Vespasien. L'argent n'a pas d'odeur

ses Vespasiennes urinoirs publics bâtis en 69 79 av J C l'argent qui lui arrivait par ce biais pour renflouer les caisses de l'État



Peut on en concevoir l'idée de POUVOIR en supporter sans sourciller ni même réagir

autant de ses émanations rebutantes et en tt cas perverses ?!



Question de Dürrenmatt

En attente

Comment pourrions nous y répondre ?!

Humanité

Humanisme

Dürrenmatt et son réalisme éblouissant de persuasion
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La Panne

Narcissisme quand tu nous tient! Que ne ferions-nous pas pour être admiré ?

Récit grinçant et burlesque, un mélange que Dürrenmatt maîtrise à perfection, ou la justice est sous les phares des projecteurs. Un récit qui se dévore à l’image des plats succulents servis au cours de la soirée et qui se termine par une magnifique cerise sur le gâteau !
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La Panne

Alfredo Traps est représentant de commerce. Alors qu'il rentre chez lui, il tombe en panne de voiture près d'un petit village. Il lui reste une heure de route jusqu'à chez lui. Il a le choix entre prendre le train et rester sur place, dormir dans une auberge, sa voiture devant être réparée dès le lendemain. Il penche pour la deuxième possibilité et se réjouit par avance de peut-être rencontrer une galante pour passer la soirée. Mais ses plans sont compromis lorsqu'il découvre que la seule auberge du village est pleine. On lui conseille alors l'adresse d'un vieil homme qui héberge, à l'occasion, des passants. Alfredo rencontre ce vieil homme qui se montre des plus accueillant et qui lui propose une chambre gracieusement. De surcroît, cet hôte improvisé, le convie au repas qu'il donne le soir même. Alfredo aurait préféré passer la soirée en charmante compagnie mais il n'ose pas décliner l'invitation face à la gentillesse de cet homme. Les invités s'avèrent être trois vieux messieurs. Alfredo redoute par avance la soirée qu'il imagine d'ores et déjà barbante. Pourtant, les choses ne vont pas du tout tourner comme il le croit. Tous ces messieurs sont retraités de professions en rapport avec la justice. Il y a un ancien avocat, un ancien procureur, un ancien juge et un ancien représentant du ministère public. La passion de ces retraités, lors de leurs repas, est de refaire les grands procès de l'histoire. Et, lorsqu'ils ont la chance d'avoir un invité, comme Alfredo, celui-ci prend le rôle du coupable. En effet, ils partent du postulat que tout le monde a quelque chose à se reprocher et est donc coupable. Il va donc leur falloir déterminer la nature de la culpabilité d'Alfredo. Et très vite, ils vont déterrer une affaire où il est question d'un mort. Et la culpabilité d'Alfredo va se faire jour au fil des discussions. L'ambiance d'abord bon enfant va devenir plus lourde à mesure que le jour disparaît pour faire place à la nuit.



Ce roman est court et se lit donc très vite. Le lecteur est pris dans une spirale et n'a qu'une envie : découvrir le fin mot de l'histoire mettant en cause Alfredo. Toutefois, le personnage du représentant de commerce m'a semblé un peu trop caricatural et manquant de subtilité. Une agréable découverte pour cet auteur que je découvre.
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La promesse

Requiem pour le roman policier : voici le sous-titre que l'auteur avait choisi de faire figurer sur la couverture du roman à sa sortie. Plutôt bien trouvé !



Ce roman est l'adaptation en livre du scénario d'un film de 1958, " ça s'est passé en plein jour" de Ladislas Vajda avec Michel Simon dans le rôle du colporteur. Entre mars et juillet 1958, Friedrich Dürrenmatt retravaille son scénario en profondeur pour en faire un roman avec une nouvelle conclusion et un récit-cadre, absent du film.



La petite Gretel Moser est assassinée dans un bois des environs de Zurich. Le commissaire Matthias se rend immédiatement sur place. A la mère de la fillette, Matthias fait une promesse, retrouver le meurtrier. Un suspect est très vite arrêté...



Considéré comme un classique du roman policier, ce roman possède de grandes qualités littéraires.

La construction est intéressante, avec une mise en abîme amenant à une réflexion sur l'écriture des polars, leur véracité, une tromperie qui pousse à croire que toutes les enquêtes connaissent une fin plus ou moins rapide, dû au fait que nous aimerions que la justice puisse travailler rapidement.

De ce point de vue, le roman est très bien ficelé. Toutefois, il faut le replacer dans son contexte. L'action n'est pas ici des plus folles et les amateurs de polar haletant n'y trouveront pas leur compte. Nous sommes dans un temps long, une ambiance à la Maigret.

D'ailleurs, je dirais qu'il s'agit plus d'un roman d'ambiance, une ambiance polar , qu'une pure enquête. Il s'agit plus d'une quête que d'une enquête pour le commissaire.



Mon avis



Si vous gardez à l'esprit qu'il s'agit d'une enquête un peu plan-plan, vous pourrez apprécier ce livre. J'ai été un peu surprise, je m'attendais à autre chose. Néanmoins, ce roman m'a plu pour sa construction et son ambiance.

Requiem pour le roman policier était un sous titre parfait.

A découvrir !
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La Panne

Court récit d’un romancier suisse qui a écrit pour le théâtre. Un voyageur de commerce immobilisé par la panne de sa voiture (une Studebaker, voiture de luxe semble-t-il, nous sommes en Suisse dans les années 50), accepte l’hospitalité d’un quatuor bizarre : un juge, un procureur, un avocat et un bourreau. Au cours d’un repas pantagruélique, il se prête au jeu d’un procès, adoptant le rôle du coupable. L’affaire se termine mal.



L’auteur introduit l’intrigue sur un ton débonnaire, met en place un décor conventionnel par petites touches, puis se lâche dans la description de personnages grotesques, menant le procès avec une éloquence surannée, bientôt lassante, dans les vapeurs de l’alcool et l’accumulation de plats dignes de la Grande Bouffe. Divertissant et vite oublié.

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La Panne

Chef d’œuvre d'humour noir, vante la 4e de couverture, je dirai plutôt de ce court roman, ou longue nouvelle, qu'il bascule finement de la farce à la tragédie, en confrontant un individu moyen à l'envers peu reluisant du décor a priori banal de son existence. Bien vu, donc, mais parfois un peu indigeste (dans tous les sens du terme).
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Les Physiciens

Les Physiciens de Dürrenmatt est une pièce peu jouée aujourd’hui en France alors qu’elle a connu un grand succès en Europe et particulièrement dans les pays germanophones dans les années qui ont suivi sa première en 1962. Elle est représentative d’un théâtre à thèse et engagé, dans l’esprit de celui de Brecht, qui n’est plus vraiment dans l’air du temps en ce début de XXIème siècle. Pourtant la pièce de Dürrenmatt me semble particulièrement d’actualité. Tout en développant une histoire avec des rebondissements et des situations comiques, son ambition, fort sérieuse, est de confronter le spectateur à la problématique de l’éthique dans la science et de le faire réfléchir à la possibilité d’un usage nocif des progrès scientifiques et à la façon dont il faut s’organiser collectivement pour empêcher les dérives. Certes le contexte n’est plus celui de 1962. La pièce fait référence aux éléments de l’époque : la menace s’appelait bombe atomique et le monde était déchiré entre deux blocs (USA contre URSS) qui utilisaient la science à des fins politiques ou idéologiques. Aujourd’hui, il faut lire la pièce en pensant aux biotechnologies ou à la capacité de traiter d’immenses quantités de données et aux changements que ceux-ci risquent d’introduire dans l’espèce humaine.



La force de la pièce est de poser ces questions philosophiques et politiques en se plaçant sur le terrain de la farce grotesque ou de l’absurde. Trois scientifiques sont internées dans une clinique psychiatrique. Le premier se prend pour Einstein, le second pour Newton et le troisième du nom de Möbius s’entretient régulièrement avec le roi Salomon. Qui plus est, les trois malheureux commettent chacun un meurtre en étranglant leur infirmière attitrée (un parallèle est dressé avec les meurtres indirects dont la science et ses applications peuvent être l’origine). L’inspecteur de police Voss est présent sur place pour enquêter. La directrice de la clinique, l’héritière von Zahnd, règne sur son domaine.



En réalité, le savant Möbius n’a rien d’un fou. Il a découvert les lois de l’univers et pour ne pas que celles-ci soient mal utilisées et mettent en danger l’humanité, il a décidé de vivre coupé du monde dans un asile et de détruire ses travaux. Il réussit à convaincre ses deux collègues du bien-fondé de son approche. Ceux-ci, aussi peu fous que lui, viennent de deux puissances antagonistes et symbolisent deux attitudes possibles du scientifique, aussi peu satisfaisantes l’une que l’autre : se consacrer uniquement à la science pure sans se préoccuper de l’usage de son savoir ou se mettre au service du pouvoir politique en travaillant sur les applications de son savoir. Pourtant par le dénouement de la pièce, Dürrenmatt nous montre que le choix de Möbius n’est pas le bon. Le savoir ne peut pas être mis sous clé et la politique de l’autruche n’empêche pas qu’il tombe en de mauvaises mains (politiques ou économiques). La pièce appelle à des choix faits de manière collective sur l’usage des avancées scientifiques.



Au-delà des trois physiciens, les autres personnages sont des archétypes de leur profession et en quelque sorte symbolisent chacun un corps social. Le policier consciencieux du premier acte laisse couler au deuxième et peut être vu comme le symbole de la démission du pouvoir politique de nos sociétés européennes face aux enjeux fondamentaux. La directrice humaniste du premier acte devient une dingo prête à tout et avide de pouvoir et peut être vue comme le symbole de toutes les dérives mercantiles de certains acteurs de la société. Une de ses répliques à propos des fausses identités de ses patients fait directement référence à une phrase de Göring lorsqu’il disait ‘c’est moi qui décide qui est Juif’. L’ex-épouse de Möbius et son nouveau mari, un missionnaire sur le point de partir évangéliser les indigènes à l’autre bout du monde, sont des bien-pensants et des symboles de l’Eglise dont se moque Dürrenmatt.



En conclusion : une pièce qui recèle des possibilités de mise en scène intéressantes et qui gagne à être connue et à être vue sur scène plus souvent.



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La visite de la vieille dame

Une pièce maintes fois adaptées au cinéma, typique du style de Dürrenmatt, à la limite du fantastique, glaçante, avec des personnages loufoques. L’auteur maîtrise l’art de poser de bonnes questions, de mettre à jour de vrais problèmes, l’air de rien, avec finesse et sans fausse note. Ici, une vieille dame américaine, très, très riche revient dans son pauvre village d’origine. Il y a plusieurs décennies, elle a eu un enfant d’un habitant qui a payé des témoins pour déclarer qu’elle était une femme de mauvaise vie. Elle propose cent milliards à la commune en échange de la mort de son ancien amant. En fait elle ne veut pas se venger seulement de lui, mais aussi du village en obligeant les villageois à se compromettre. Et toute la question, c’est celle des limites des compromissions collectives pour de l’argent, de l’hypocrisie, de la capacité à rendre juste ce qui est surtout lucratif ! Cette pièce est un régal.
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La promesse

La promesse : requiem pour le roman policier

L'inspecteur Matthieu, criminaliste d'élite, s'apprête à quitter son poste dans la police. Avant son départ, il doit cependant enquêter sur le meurtre d'une mineure de quatorze ans survenu dans les environs de Zurich. Il jure aux parents de la jeune fille qu'il trouvera le coupable. Cette «promesse» va l'engager dans un engrenage infernal, une obsession destructrice qui risque de changer le sens de sa vie.

Déchéance sociale, morale et physique pour le commissaire Mathieu, le seul pourtant qui ait vu clair dans cette affaire...

Autopsie d'un meurtre. La Promesse fait l'anatomie d'une idée fixe. Un roman policier court mais intense

Un roman qui témoignent du sens de l'observation du quotidien et de l'art de manier l'ironie, la satire et l'absurde de l’auteur.


Lien : https://collectifpolar.com/
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